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Résolution 2006 (2014) Version finale

Intégration des immigrés en Europe: la nécessité d'une politique volontaire, continue et globale

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 juin 2014 (24e séance) (voir Doc. 13530, rapport de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, rapporteure: Mme Marietta Karamanli). Texte adopté par l’Assemblée le 25 juin 2014 (24e séance).

1. L’Assemblée parlementaire se réfère à sa Résolution 1972 (2014) «Assurer que les migrants constituent une richesse pour les sociétés d'accueil européennes» et rappelle que beaucoup de pays européens ont besoin d’une immigration régulière, en raison essentiellement du vieillissement de la population et de la baisse des taux de natalité. Par ailleurs, les migrants sont une source d’enrichissement culturel pour les sociétés d’accueil.
2. Cependant, pour tirer pleinement parti de toutes les opportunités offertes par les immigrés réguliers, les pays d’accueil doivent garantir leur bonne intégration dans la société.
3. L’Assemblée considère l’intégration des immigrés réguliers comme un processus à double voie d’inclusion dans les institutions et de relations au sein de la société d’accueil, impliquant des droits et des responsabilités des deux côtés. Le marché du travail et les services sociaux, ainsi que l’éducation et la participation à la vie politique constituent les principaux domaines d’intégration.
4. Malheureusement, force est de reconnaître que le niveau global d’intégration demeure insatisfaisant et que la situation des immigrés réguliers, et, plus inquiétant encore, de leurs descendants, soulève des préoccupations justifiées dans de nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe.
5. En règle générale, les taux de chômage des immigrés et de leurs descendants sont supérieurs à ceux des ressortissants nationaux. De même, les deux groupes sont plus fréquemment employés à titre temporaire, d’où l’insécurité et l’accès limité aux prestations sociales qui en résultent. L’inadéquation de leurs qualifications et compétences professionnelles sur le marché du travail, souvent due à la non-reconnaissance de certains diplômes ou qualifications d’un Etat à l’autre, entraîne un gaspillage de ressources humaines. Le faible taux d’emploi dans le secteur public, comparativement à celui des nationaux, est un autre signe clair du manque d’intégration, en particulier des enfants d’immigrés. De tels désavantages économiques et sociaux mènent souvent à l’isolement et à l’extension progressive des ghettos pour immigrés.
6. Si le pourcentage d’immigrés et de leurs descendants dans l’enseignement supérieur est comparable à celui des nationaux dans la plupart des Etats membres du Conseil de l’Europe, les premiers sont fortement surreprésentés dans les rangs de ceux qui présentent le niveau d’éducation le plus faible. Ils rencontrent également des problèmes liés à leur maîtrise insuffisante de la langue.
7. La participation politique des immigrés et de leurs descendants reste très inférieure à la moyenne de celle des citoyens dans la majorité des pays européens. La discrimination fondée sur l’ethnicité et la religion continue d’être source de graves préoccupations et offre un terrain fertile pour les crimes de haine et la violence.
8. Par ailleurs, la récession économique à laquelle sont confrontés les pays européens – couplée à la hausse généralisée du chômage et à l’augmentation des manifestations xénophobes et néoracistes – a provoqué un regain de tension à cet égard.
9. L’Assemblée souligne en particulier la vulnérabilité des migrants âgés restant dans le pays d’accueil et plus particulièrement celle des femmes migrantes âgées qui se retrouvent exposées à l’extrême pauvreté.
10. S’appuyant sur divers indicateurs quantitatifs et qualitatifs, l’Assemblée conclut aux déficiences des politiques publiques en place dans beaucoup d’Etats membres du Conseil de l’Europe concernant différents domaines d’intégration des immigrés et estime qu’il conviendrait de les renforcer afin de promouvoir plus efficacement cette intégration.
11. Dans ce contexte, l’Assemblée salue les initiatives prises dans certains pays en vue de créer des espaces communs permettant aux immigrés et aux nationaux de se rencontrer et de discuter de sujets d’intérêt et de préoccupation communs.
12. Par conséquent, l’Assemblée recommande aux Etats membres:
12.1. de revoir leurs politiques d’intégration actuelles afin d’explorer les moyens d’assurer une meilleure intégration des immigrés;
12.2. d’accroître la coopération entre les gouvernements, les pouvoirs locaux et les organisations non gouvernementales afin de promouvoir la cohésion sociale et la diversité;
12.3. de renouer avec des politiques globales qui assurent une meilleure redistribution de la richesse en direction des populations ayant de faibles ressources (économiques, culturelles et économiques), y compris l’ensemble des populations immigrées, récentes ou moins récentes. Les effets positifs de ces politiques bénéficieront à ceux ayant le plus de difficultés, sans effet stigmatisant pour eux et sans sentiment d’exclusion;
12.4. en particulier, en ce qui concerne le marché du travail:
12.4.1. de faciliter l’accès à la formation professionnelle aux immigrés réguliers et à leurs enfants;
12.4.2. de faciliter la reconnaissance des diplômes obtenus et des qualifications acquises en dehors du pays d’accueil;
12.4.3. d’introduire des mesures efficaces pour lutter contre la discrimination sur le marché du travail;
12.5. en ce qui concerne l’éducation:
12.5.1. de favoriser la maîtrise de la langue du pays d’accueil;
12.5.2. d’encourager les pratiques pédagogiques favorisant la mixité sociale;
12.5.3. de former les enseignants et le personnel scolaire aux pratiques interculturelles;
12.5.4. d’éviter la pratique visant à regrouper et catégoriser les élèves selon leur origine;
12.6. en ce qui concerne la participation démocratique:
12.6.1. de faciliter l’accès à la nationalité du pays d’accueil et d’octroyer des permis de séjour de longue durée;
12.6.2. d’encourager les immigrés à exercer leur liberté d’expression et d’association, notamment au sein de partis politiques, de syndicats ou d’organisations de la société civile;
12.6.3. de veiller à ce que les immigrés puissent faire entendre leur voix dans le processus démocratique en leur accordant en particulier le droit de vote au niveau local;
12.6.4. de reconsidérer, si ce n’est pas déjà fait, l’introduction du droit à la double nationalité;
12.6.5. de faciliter le maintien des liens entre les immigrés et leur pays d’origine;
12.7. en ce qui concerne la non-discrimination:
12.7.1. de prendre des mesures afin de contrer les tentatives visant à faire des immigrés des boucs émissaires dans le contexte économique et social, et d’engager, quand cela est opportun, un débat serein sur l’immigration et ses avantages tant pour les migrants qui sont concernés que pour le pays d’accueil ;
12.7.2. d’encourager le dialogue interculturel et interconfessionnel;
12.8. en ce qui concerne le soutien aux familles:
12.8.1. d’utiliser plus efficacement le regroupement familial en tant qu’instrument d’intégration;
12.8.2. de prendre des mesures d’assistance spécifiques pour aider les migrants âgés, notamment les femmes, à accéder à la protection sociale et aux services de santé.