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| Doc. 13611
| 29 septembre 2014
Observation de l'élection présidentielle en Turquie (10 août 2014)
1. Introduction
1. A sa réunion du 22 mai 2014, le Bureau de l'Assemblée
parlementaire a décidé d'observer l’élection présidentielle du 10
août 2014 en Turquie, sous réserve de recevoir une invitation et
d'avoir confirmation de la date, et de constituer une commission
ad hoc composée de 30 membres, plus le corapporteur de la commission
pour le respect des obligations et engagements des Etats membres
du Conseil de l’Europe (commission de suivi). Le Bureau a également
autorisé une mission préélectorale. Le 20 juin 2014, M. Reha Denemeç,
en qualité de président de la délégation turque, a invité l’Assemblée
parlementaire à observer l’élection présidentielle. A sa réunion
du 23 juin 2014, le Bureau a approuvé la composition de la commission ad
hoc (voir annexe 1) et désigné Mme Meritxell Mateu Pi (Andorre,
ADLE) comme présidente.
2. Selon les termes de l'article 15 de l'accord de coopération
signé entre l'Assemblée parlementaire et la Commission européenne
pour la démocratie par le droit («Commission de Venise») le 4 octobre
2004, «[l]orsque le Bureau de l'Assemblée décide d'observer des
élections dans un pays où la législation électorale a été précédemment
examinée par la Commission de Venise, l'un des rapporteurs de la
Commission de Venise sur cette question pourra être invité en qualité
de conseiller juridique à participer à la mission d'observation
de l'Assemblée». Conformément à cette disposition, le Bureau de
l’Assemblée a invité un expert de la Commission de Venise à participer
à la commission ad hoc en qualité de conseiller. Cependant, la Commission
de Venise n’ayant pas soumis d’avis sur la législation électorale
ni apporté d’assistance à la Turquie dans le domaine électoral,
elle n’a pas participé à la mission d’observation de l’élection.
3. La délégation préélectorale était à Ankara les 21 et 22 juillet
2014 pour évaluer la préparation des élections et le climat politique
durant la période qui a précédé l'élection présidentielle du 10
août 2014. La délégation multipartite était composée de six membres
(voir annexe 1).
4. Pendant son séjour à Ankara, la délégation a rencontré les
trois candidats à l’élection présidentielle ou leurs représentants,
à savoir M. Ekmeleddin Ihsanoğlu, candidat commun au Parti républicain
du peuple (CHP) et au Parti d’action nationaliste (MHP); M. Yalcir
Akdoğan, député et principal conseiller de M. Recep Tayyip Erdoğan,
candidat du Parti de la justice et du développement (AKP); et M. Nazmi
Gür, député et représentant de M. Selahattin Demirtaş, candidat
du Parti démocratique du peuple (HDP). Elle a aussi eu un échange
de vues avec le vice-président de la Grande Assemblée nationale,
la délégation turque auprès de l’Assemblée parlementaire du Conseil
de l’Europe, le président de la Commission électorale suprême, le président
du Conseil supérieur de la radio et de la télévision, le chef de
la Mission restreinte d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH
en Turquie et le chef de la délégation de l’Union européenne en
Turquie, ainsi que des représentants de la société civile et des
médias. A l’issue de sa visite, la délégation préélectorale a publié une
déclaration (annexe 2).
5. Pour la mission principale d’observation électorale, la commission
ad hoc est intervenue dans le cadre d’une Mission internationale
d'observation des élections (MIOE), qui comprenait également la
délégation de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, et la Mission
restreinte d’observation des élections (MROE) de l’OSCE/BIDDH. Mme
Vilija Aleknaitė-Abramikienė était la coordinatrice spéciale à la
tête de la mission d'observation à court terme de l'OSCE; Mme Åsa
Lindestam dirigeait la délégation de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE; et
M. l'ambassadeur Geert-Hinrich Ahrens dirigeait la Mission restreinte
d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH.
6. La commission ad hoc s’est réunie à Ankara du 8 au 11 août
2014. Elle a notamment rencontré des représentants des trois candidats
à l’élection présidentielle, des membres de la Commission électorale suprême
(CES) et du Conseil supérieur de la radio et de la télévision (CSRT),
et des représentants de la société civile et des médias. Le programme
des réunions de la commission ad hoc figure en annexe 4.
7. Le jour du scrutin, la commission ad hoc s'est répartie en
16 équipes, qui ont observé les élections à Ankara et dans les environs,
ainsi que dans les régions et communes suivantes: Istanbul, Izmir,
Adana, Gaziantep, Mersin, Diyarbakir, Antalya, Van et Konya.
8. L’élection présidentielle turque du 10 août 2014 a pour la
première fois permis aux électeurs d’élire leur président au scrutin
direct. La commission ad hoc a conclu que les trois candidats, représentant
des sensibilités politiques différentes, ont pu, dans l’ensemble,
mener campagne librement et que la liberté de réunion et d’association
a été respectée. Cependant, le Premier ministre a clairement été
avantagé puisqu’il s’est servi de sa fonction officielle et a profité
d’une couverture médiatique partiale. Le communiqué de presse publié
par la MIOE après les élections figure en annexe 5.
2. Cadre
juridique
9. Dans l’ensemble, le cadre juridique en Turquie est
propice à la tenue d’élections démocratiques, même si des domaines
essentiels doivent être améliorés. La Constitution de 1982, adoptée
alors que le pays était gouverné par les militaires, condamne et
interdit plus qu’elle ne protège les droits fondamentaux et les
libertés fondamentales en ce qu’elle consacre des restrictions injustifiées
du droit à la liberté d'association, de réunion et d’expression,
ainsi que des droits électoraux.
10. Depuis le référendum constitutionnel de 2007, le Président
turc est élu au suffrage universel direct et non plus selon un système
indirect d'élection. Les modifications constitutionnelles ont également
ramené le mandat présidentiel de sept à cinq ans et autorisent le
Président à effectuer un second mandat de cinq ans. En 2012, la
Turquie a adopté la loi sur l’élection présidentielle (LEP), qui
réglemente divers aspects du nouveau système électoral. Le fait
que la loi de 1961 sur les dispositions fondamentales relatives
aux élections et aux registres des électeurs (loi sur les dispositions
fondamentales), qui réglemente toutes les élections, n’a pas été
harmonisée avec la LEP et est source d’ambiguïtés. La Commission
électorale suprême a adopté des règles et des décisions visant à
compléter le cadre juridique mais, dans certains cas, les règles
de la CES, notamment celles relatives à la campagne électorale et
à son financement, ne développaient pas la législation de manière
effective, n’étaient pas du ressort de la CES ou allaient à l’encontre
de la loi.
11. Désormais, pour la première fois, la LEP réglemente dans une
certaine mesure le financement des campagnes électorales; la loi
sur les dispositions fondamentales a été modifiée afin d’y intégrer
des dispositions relatives au vote des électeurs turcs résidant
à l’étranger; les restrictions quant à l’utilisation des langues
non-officielles ont été assouplies, et la loi sur les dispositions
fondamentales a été modifiée en mars 2014 afin d’autoriser à faire
campagne dans d’autres langues que le turc (à noter que le parlement
a adopté, le 10 juillet 2014, une loi cadre qui permet la poursuite
des négociations en vue de trouver une solution à la question kurde).
Cependant, les règles de la CES imposaient toujours le turc comme
langue principale pour les campagnes et les spots politiques.
12. La LEP oblige les candidats à l’élection présidentielle à
démissionner de certaines fonctions publiques, mais ne fait pas
spécifiquement mention des fonctions de Premier ministre, de ministres
ou de députés.
13. La loi ne crée pas de cadre juridique pour l’observation nationale
et internationale des élections, à l’encontre de la recommandation
de l’Assemblée parlementaire
et
de la Commission de Venise dans le Code de bonne conduite en matière
électorale
.
Des observateurs internationaux ont bien été invités et autorisés
à superviser l’élection, mais ils ont rencontré des difficultés
pour accéder à certains bureaux de vote, où manifestement les commissions
des urnes ne connaissaient pas les droits des observateurs. Les
partis politiques ont le droit de nommer des observateurs, mais
aucune disposition n’est prévue pour leur accréditation. Comme les
citoyens observateurs, ils n’ont pu intervenir qu’en collaboration
avec les partis politiques ou selon le bon vouloir des commissions
des urnes sur une base ad hoc.
3. Administration
des élections, enregistrement des listes et des candidats présidentiels
14. L'organisation du scrutin reposait sur une administration
électorale comportant quatre niveaux: la CES (organe permanent composé
de 11 membres, magistrats de haut rang élus par leurs pairs pour
un mandat de six ans), 81 commissions électorales provinciales (CEP),
1 067 commissions électorales de district (CED) et 165 574 commissions
des urnes. Une CED a été créée à Ankara afin de coordonner les activités
des 1 186 commissions des urnes à l’étranger.
15. Les partis politiques habilités peuvent nommer des représentants
ou des membres sans droit de vote dans les commissions électorales
des quatre niveaux. Bien qu’il ait présenté un candidat à l’élection présidentielle,
le HDP ne faisait pas partie des partis habilités. Il a néanmoins
été autorisé à désigner un représentant sans droit de vote à la
CES, mais pas dans les commissions des niveaux inférieurs ni en
qualité de membres des commissions des urnes.
16. Les électeurs résidant à l’étranger ont pour la première fois
pu voter sans avoir à se présenter à la frontière, conformément
à la demande faite par l’Assemblée parlementaire
. Le vote a été possible
dans 54 pays (du 31 juillet au 3 août) et dans 42 bureaux de vote
frontaliers (du 26 juillet au 10 août). D’après la CES, la procédure
pour affecter les électeurs expatriés aux bureaux de vote a été
problématique. Leurs bulletins de vote ont été transportés à Ankara
pour y être dépouillés.
17. L’enregistrement des électeurs est passif. Le registre électoral
central permanent est géré par la CES et est relié à un registre
géré par le ministère de l’Intérieur. Au total, les électeurs habilités
à voter étaient 52 894 120 en Turquie et 2 798 670 à l’étranger.
18. La qualité des listes électorales était considérée comme globalement
fiable. Il n’y avait cependant pas de voie de recours judiciaire
effective en cas de litige puisqu’il n’était pas possible de faire
appel des décisions de l’administration électorale.
19. Les appelés du contingent, les élèves militaires et les détenus
condamnés pour des crimes intentionnels, quelle que soit la gravité
de l’infraction, n’étaient pas autorisés à voter. Le 20 juin 2014,
la CES a décidé d’autoriser tous les condamnés qui n’étaient pas
incarcérés à voter, appliquant ainsi, en partie, un arrêt de la
Cour européenne des droits de l’homme de septembre 2013, selon lequel
la privation du droit de vote imposée en Turquie aux personnes condamnées
à une peine de prison est trop vaste et porte atteinte au droit
à des élections libres.
20. Tout candidat à l'élection présidentielle doit être âgé d'au
moins 40 ans, avoir terminé des études supérieures et remplir les
conditions d’éligibilité pour devenir membre du parlement – ce qui
exclut toute personne reconnue coupable d’infractions dont la liste,
non-exhaustive, couvre un large éventail d’infractions, et tous
ceux qui n’ont pas accompli leur service militaire. Ces restrictions
(à l’exception de l’âge minimum) sont incompatibles avec le droit
fondamental de se présenter à une élection.
21. Les candidats à l’élection présidentielle doivent aussi avoir
le soutien de 20 députés au moins, alors que chaque député ne peut
soutenir qu’un seul candidat. La possibilité de se présenter en
tant que candidat indépendant est limitée: 12 hommes et une femme
ont voulu se présenter en tant que candidats indépendants mais n’ont
pas été enregistrés par la CES au motif qu’ils n’avaient pas le
soutien du nombre requis de députés.
22. Les partis représentés au parlement et les partis ayant recueilli
ensemble plus de 10 % des suffrages aux dernières élections peuvent
présenter un candidat à la présidentielle. C’était le cas des trois
candidats en lice: M. Recep Tayyip Erdoğan, candidat de l’AKP; M. Ekmeleddin
Ihsanoğlu, candidat commun au CHP et au MHP; et M. Selahattin Demirtaş,
candidat du HDP.
4. Campagne électorale
et environnement médiatique
23. La campagne électorale a officiellement démarré le
11 juillet (conformément à la LEP). La loi sur les dispositions
fondamentales avait fixé la fin de la campagne électorale au 9 août,
à 18 heures. La CES a cependant décidé que la date du lancement
officiel de la campagne serait le 31 juillet (en vertu de la loi
sur les dispositions fondamentales, qui dispose que la campagne
officielle commence 10 jours avant la date du scrutin), s’écartant
ainsi de la LEP et reportant de près de trois semaines l’application
d’importantes interdictions et garanties relatives à la campagne
prévues dans la législation, dont l’utilisation des ressources administratives
de l’État et des fonctions officielles à des fins électorales. La
situation a manifestement profité à M. Erdoğan.
24. Dans l’ensemble, les libertés fondamentales ont été respectées
pendant la période préélectorale et les candidats ont pu mener leur
campagne librement. Cependant le Premier ministre s’est servi des
manifestations officielles pour faire sa promotion et a donc eu
un net avantage sur les autres candidats. Il a sillonné le pays dans
le cadre de ses fonctions officielles et a combiné ses déplacements
avec des activités liées à la campagne organisées par l’AKP, parfois
même par l’administration locale. Le Premier ministre a également fait
campagne lors d’inaugurations de projets d’équipements publics.
25. L’utilisation abusive des ressources de l’Etat et l’absence
d’une distinction claire entre les activités de l'Etat et celles
des partis vont clairement à l’encontre du Rapport sur l'usage abusif
des ressources administratives pendant les processus électoraux
adopté par la Commission de Venise
.
26. S’agissant du financement des campagnes électorales, la loi
plafonne les dons des particuliers pour chaque tour de scrutin à
l’équivalent d’un mois de salaire du plus haut fonctionnaire; la
CES a fixé ce montant à 9 082,51 TL (environ 3 150 €). Les candidats
ne peuvent ni recevoir de fonds publics ni contracter d’emprunts.
M. Erdoğan a reçu 55 millions TL de dons (environ 19 millions €),
M. Ihsanoğlu 8,5 millions TL (environ 3 millions €) et M. Demirtaş
1,2 million TL (environ 420 000 €).
27. La loi ne prévoit pas d’autre source de financement que les
dons de particuliers. Cependant elle ne plafonne pas l’utilisation
par les candidats de leurs fonds personnels. Cela, ajouté à l’absence
d’un plafond pour les dépenses totales de campagne, a créé des déséquilibres
entre les candidats et est contraire à l’avis de la Commission de
Venise sur ce point
.
28. La couverture médiatique de la campagne a favorisé le Premier
ministre, les grandes chaînes de télévision rendant longuement compte
de sa campagne au détriment de celles des autres candidats, qu’elles n’ont
que peu couvertes. Ce déséquilibre était accentué par la prédominance
de spots publicitaires politiques payants en faveur de M. Erdoğan
et par l’absence de définition claire de l’obligation d’impartialité
incombant aux radios et télévisions. Du fait de ce déséquilibre
dans les médias, les électeurs n’ont eu qu’un accès limité à des
informations pluralistes sur les autres options politiques.
29. D’après le rapport de monitoring des médias de la MOEL de
l'OSCE/BIDDH, trois chaînes de télévision sur les cinq supervisées,
notamment la chaîne publique TRT1, ont clairement favorisé le Premier
ministre dans les journaux télévisés, les actualités et les émissions
de débat. TRT1 a consacré 51 % de son information sur la campagne
à M. Erdoğan, contre 32 % à M. İhsanoğlu et 18 % à M. Demirtaş.
De plus, 25 % des informations consacrées à M. İhsanoğlu étaient
négatives, tandis que celles sur M. Erdoğan étaient presque exclusivement positives.
TRT a respecté son obligation légale d’attribuer 30 minutes d’antenne
à chaque candidat. ATV a consacré 70 % de son information sur la
campagne à M. Erdoğan, 18 % à M. İhsanoğlu et 11 % à M. Demirtaş; 49 %
des informations consacrées à M. İhsanoğlu étaient négatives. NTV
a consacré 7 0% de son information sur la compagne à M. Erdoğan,
et seulement 18 % à M. İhsanoğlu et 11 % à M. Demirtaş; la chaîne
a couvert tous les candidats de manière positive/neutre. CNN TÜRK
a consacré 54 % de son information sur la campagne à M. Erdoğan;
elle s’est toutefois montrée critique en diffusant 28 % d’informations
négatives. La chaîne a consacré respectivement 27 % et 20 % de son
information à MM. İhsanoğlu et Demirtaş. Samanyolu TV a fait preuve
d'un parti pris évident contre M. Erdoğan et en faveur de M. İhsanoğlu,
le Premier ministre ayant certes droit à 62 % de l’information,
mais 92 % étaient négatives. MM. İhsanoğlu et Demirtaş ont eu droit à
28 % et 11 % de l’information sur la campagne. Sur les chaînes supervisées,
M. Erdoğan a occupé près de sept heures de spots politiques payants,
alors que M. İhsanoğlu a acheté 36 minutes et M. Demirtaş 19 minutes.
30. Il n’y a pas eu de débat télévisé en direct entre les trois
candidats à l’élection présidentielle.
5. Jour du scrutin
31. Le jour du scrutin, les membres de la commission
ad hoc ont pu relever que, globalement, le scrutin s’est déroulé
correctement. Dans l’ensemble, il a été organisé avec professionnalisme
et efficacité. La plupart des commissions des urnes étaient bien
préparées et ont respecté les procédures électorales.
32. Cependant, dans de nombreux bureaux de vote supervisés, tous
les partis politiques habilités n’étaient pas présents en tant que
membres des commissions des urnes. Les observateurs des partis politiques
et des citoyens étaient présents dans moins d’un bureau de vote
sur deux. Comme indiqué précédemment, dans certains bureaux de vote,
les observateurs internationaux n’ont pas été autorisés à observer
le processus de vote (très vraisemblablement en raison d’un manque
d’information des commissions des urnes). Quelques cas isolés de
violence ont été signalés en cours de journée.
33. Les membres de la commission ad hoc ont attiré l’attention
sur plusieurs dysfonctionnements dans les bureaux de vote où ils
se sont rendus:
- dans au moins
un bureau de vote d’Ankara, il était possible de voter peu avant
l’ouverture officielle du scrutin à 8 heures;
- le dépouillement a démarré 30 minutes avant la clôture
officielle du scrutin à 17 heures, dans un bureau de vote de la
région de Van (alors que 380 électeurs, sur 386 inscrits, avaient
déjà voté);
- des partisans de M. Erdoğan ont été vus en train de distribuer
des collations et de l’eau à l’entrée d’un bureau de vote d’Ankara;
- une équipe s’est rendue dans un hôpital d’Ankara, où elle
a relevé que rien n’avait été prévu pour permettre aux malades de
voter;
- dans un bureau de vote installé dans une école d’Ankara,
une équipe a relevé que le directeur de l’établissement, bien que
n’étant pas membre du bureau de vote, se sentait responsable du
processus de vote et est intervenu en conséquence;
- quelques cas isolés de vote en famille ont été signalés;
- des personnes handicapées ont rencontré des difficultés
pour accéder à certains bureaux de vote;
- à Diyarbakir, dans un bureau de vote ouvert dans une prison,
seulement la moitié des détenus ont pu voter (pour des raisons expliquées
à la section 3).
34. La CES a annoncé les résultats de l’élection le 15 août 2014:
- M. Recep Tayyip Erdoğan: 51,79 %
- M. Ekmeleddin Ihsanoğlu: 38,44 %
- M. Selahattin Demirtaş: 9,76 %.
Le taux
de participation a été de 74,13 %.
6. Conclusions
35. L’élection présidentielle du 10 août 2014 a marqué
une pierre blanche dans la vie politique en Turquie: à la suite
de la réforme constitutionnelle de 2007, 53 millions de Turcs ont,
pour la première fois, élu le Président de la République au suffrage
universel direct, conférant ainsi à celui-ci une nouvelle forme
de légitimité avec une relation plus directe avec les citoyens.
La Turquie est entrée dans une nouvelle ère politique.
36. La commission ad hoc a pris note que le parlement a adopté,
le 10 juillet 2014, une loi cadre permettant de poursuivre les négociations
en vue de résoudre la question kurde. Elle se félicite de la possibilité
de faire campagne dans d’autres langues que le turc, dont le kurde.
37. La Commission électorale suprême et l’administration électorale
ont fait preuve de professionnalisme et la qualité des listes électorales
a été considérée comme globalement fiable. Il n’y avait cependant
pas de voie de recours judiciaire effective en cas de litige puisqu’il
n’était pas possible de faire appel des décisions de l’administration
électorale. Ceci est contraire aux normes de la Commission de Venise
et il faut y remédier.
38. Les trois candidats à la première élection présidentielle
directe en Turquie ont globalement pu faire campagne librement et
la liberté de réunion et d’association a été respectée. Cependant,
le Premier ministre a disposé d’un avantage incontestable par rapport
aux autres candidats en tirant profit de sa position officielle pour
faire campagne et d’une couverture médiatique partiale.
39. Le jour de l’élection, le scrutin a été généralement organisé
de manière professionnelle et efficace et les procédures électorales
ont en grande partie été respectées.
40. Cependant, la commission ad hoc rappelle qu’un processus électoral
ne se résume pas, de loin, au seul jour du scrutin.
41. Elle a identifié plusieurs dysfonctionnements auxquels les
autorités turques devront remédier pour améliorer les processus
électoraux, en particulier une couverture médiatique déséquilibrée,
l’utilisation abusive de ressources administratives et les dispositions
relatives au financement des campagnes.
42. Alors que le cadre juridique était jugé globalement propice
à la tenue d’élections démocratiques, le manque de clarté et l’absence
de responsabilités bien définies se sont traduits par des incohérences
dans son application. Il y a notamment des divergences entre la
loi de 2012 et les lois antérieures régissant les élections en général.
43. L’introduction récente de règles de financement des campagnes
constitue un progrès, bien que ces règles ne traitent pas des financements
provenant de sources privées ou des partis et ne prévoient ni contrôle satisfaisant
du financement des campagnes, ni sanctions en cas d’infraction.
La commission ad hoc se félicite des premières mesures adoptées
pour réglementer le financement des campagnes politiques – notamment les
plafonds fixés pour les dons individuels. Elle considère cependant
que la législation devrait fixer un plafond pour les dépenses de
campagne, afin de permettre un suivi satisfaisant des dépenses et
de garantir l’égalité des chances entre tous les candidats. La législation
devrait être améliorée afin de préciser le rôle des partis politiques
et régler la question des contributions en nature et des ressources
personnelles des candidats. Le mécanisme actuel de suivi des comptes
de campagne devrait être amélioré.
44. La commission ad hoc a relevé que le Premier ministre n’était
pas tenu par la loi de démissionner et aussi que l’utilisation de
ressources administratives était interdite par la loi. Faute de
réglementation stricte, sa fonction a donné au Premier ministre
un accès disproportionné à des ressources et aux médias, et l’utilisation qui
a été faite des ressources administratives à des fins électorales
a été intensive. La commission ad hoc demande aux autorités turques
d’adopter une réglementation plus claire et plus stricte en ce qui
concerne les activités menées par des responsables politiques en
fonction qui présentent leur candidature à une élection présidentielle.
45. Tous les radiodiffuseurs, y compris la Société turque de radiotélévision,
étaient tenus d’assurer une couverture médiatique impartiale et
équilibrée de la campagne, sans aucune autocensure. Or malgré les dispositions
existantes, la couverture médiatique de la campagne a été déséquilibrée.
La commission ad hoc invite instamment tous les acteurs politiques,
en particulier le Conseil supérieur de la radio et de la télévision et
la Cour électorale suprême, à appliquer la loi et les mesures prévues
dans la législation plus efficacement à l’avenir, et à garantir
un temps d’antenne égal à tous les candidats.
46. La commission ad hoc se réjouit de la possibilité donnée pour
la première fois aux citoyens turcs résidant à l’étranger de voter
en dehors de leur pays. Elle a cependant relevé la persistance de
certains problèmes liés en particulier à la sécurité des bulletins
pendant leur transport vers la Turquie pour le comptage. Aussi,
les électeurs turcs résidant à l’étranger devaient obtenir, avant
la période électorale, un rendez-vous de leur représentation diplomatique
nationale pour pouvoir s’inscrire sur les listes électorales, et
obtenir ce rendez-vous était parfois difficile. Sur près de 2,8
millions d’électeurs expatriés, seulement 232 000 ont voté. Les procédures
devraient être simplifiées en vue des futures élections.
47. L’introduction d’une disposition légale claire réglementant
l’accréditation des observateurs nationaux et internationaux est
nécessaire pour les futures élections, en ce qu’elle permettra d’améliorer
la transparence et la confiance dans le processus électoral dans
son ensemble. Les observateurs devraient pouvoir observer librement
toutes les étapes du processus électoral. La commission ad hoc formule
le vœu que les autorités turques remédient à ce point d’ici les
prochaines élections.
48. Des améliorations considérables restent nécessaires pour instaurer
l’équité dans le domaine électoral en Turquie et la commission ad
hoc espère que ce sera chose faite lors des prochaines élections
législatives, prévues en 2015.
49. Le Conseil de l’Europe est prêt à apporter son expertise et
à continuer de travailler avec la Turquie afin de la soutenir dans
ses efforts pour satisfaire aux normes du Conseil de l’Europe.
Annexe 1 – Composition
de la commission ad hoc
(open)
Sur la base des propositions des groupes
politiques de l’Assemblée, la commission ad hoc se composait comme
suit:
- Meritxell MATEU PI (Andorre,
ADLE), Chef de la délégation
- Groupe socialiste (SOC)
- Andreas GROSS, Suisse
- Tadeusz IWIŃSKI*, Pologne
- Birute VESAITE, Lituanie
- Bernadette BOURZAI, France
- Ingrid ANTICEVIC-MARINOVIC, Croatie
- Kostas TRIANTAFYLLOS, Grèce
- Florin IORDACHE, Roumanie
- Athina KYRIAKIDOU, Chypre
- Carina HÄGG, Suède
- Groupe du Parti populaire
européen (PPE/DC)
- Viorel
Riceard BADEA, Roumanie
- Zsolt CSENGER-ZALÁN, Hongrie
- Jim D’ARCY, Irlande
- Foteini PIPILI, Grèce
- Marietta de POURBAIX-LUNDIN*, Suède
- Konstantinos TZAVARAS, Grèce
- Emanuelis ZINGERIS, Lituanie
- Groupe démocrate européen
(GDE)
- Robert NEILL,
Royaume-Uni
- Ingebjørg GODSKESEN*, Norvège
- Alliance des démocrates et
des libéraux pour l’Europe (ADLE)
- Mark VERHEIJEN, Pays-Bas
- Meritxell MATEU PI*, Andorre
- Doris FIALA, Suisse
- Andrea RIGONI, Italie
- Groupe pour la gauche unitaire
européenne (GUE)
- Andrej
HUNKO*, Allemagne
- Grigore PETRENCO, République de Moldova
- Rapporteure de la commission
de suivi (ex officio)
- Secrétariat
- Bogdan TORCĂTORIU, Administrateur,
Division de la coopération parlementaire et de l’observation des
élections Secrétariat de l’Assemblée parlementaire
- Sylvie AFFHOLDER, Secrétaire, commission de suivi
- Danièle GASTL, Assistante, Division de la coopération
parlementaire et de l’observation des élections
- Anne GODFREY, Assistante, Division de la coopération parlementaire
et de l’observation des élections
* membres de la mission préélectorale (20-23 juillet 2014)
Annexe 2 – Programme de
la mission préélectorale (20-22 juillet 2014)
(open)
Lundi
21 juillet 2014
9h00-10h00 Réunion de la délégation de l’Assemblée parlementaire
10h15-11h15 Rencontre avec l'Ambassadeur Geert-Hinrich Ahrens,
Chef de la mission d'observation électorale de l'OSCE/BIDDH, Mme
Polyna Lemos, Chef adjoint, et leur équipe
11h30-12h30 Rencontre avec l'Ambassadeur Stefano Manservisi,
Chef de la Délégation de l'Union européenne en Turquie, M. François Naucodie
(Politique étrangère et de sécurité commune) et Mme Aycan Akdeniz
(Politique intérieure)
14h30-15h30 Réunion avec des représentants des médias:
- Aljazeera: Ece Goksedef
- BIANET: Erol Onderoglu
- Cihan News Agency: Vedat Denizli
- Diplomatic Observer Magazine: Ali Faruk Imre et Ceren
Saydam
- Today’s Zaman: Aydin Albayrak
15h45-16h45 Réunion
avec des représentants de la société civile:
- Association for Monitoring Human Rights (AMER): Selin
Dagistanli, Nezat Tastan
- Checks and Balances Network: Suleyman Basa, Mehmet Kaya
- Human Rights Association: Öztürk Türkdoğan
- Transparency International: E. Oya Ozarslan
17h20-18h15 Réunion avec M. Ekmeleddin Ihsanoğlu, candidat
commun à l’élection présidentielle du Parti républicain du peuple
(CHP) et du Parti du mouvement nationaliste (MHP)
18h30-20h00 Réunion avec M. Yalçın Akdoğan, MP (AK Party),
Conseiller du Premier Ministre
Mardi 22 juillet 2014
9h30-10h30 Réunion avec M. Sadi Güven, Président du Conseil
suprême des élections (SBE)
11h00-12h00 Réunion avec M. Sadık Yakut, Vice-Président de
la Grande Assemblée Nationale
12h00-12h30 Réunion avec des représentants du Conseil supérieur
de la radio et de la télévision (RTSC):
- Prof Dr Davut Dursun, Président
- Prof Dr Hasan Tahsin Fendoğlu, Vice-Président
- Ali Öztunç, membre (du CHP)
- Esat Çiplak, membre (du MHP)
- Süleyman Demirkan, membre
(et des fonctionnaires
de divers départements: de l’Intérieur; des Affaires juridiques;
et du suivi et de l’évaluation)
15h00-16h00 Réunion avec M. Mustafa Şentop, Vice-Président
du parti AK, en charge des affaires électorales (avant la réunion,
présentation powerpoint par M. İbrahim Uslu, Chef de l’ANAR (Ankara
Social Research Center))
16h15-17h15 Réunion avec M. Nazmi Gür, membre du HDP, également
membre de la délégation de la Turquie auprès de l’Assemblée parlementaire
20h20 Iftar offert par
M. Denemec avec la participation des membres de la commission ad
hoc, du secrétariat et des membres de la délégation de la Turquie
Annexe 3 – Déclaration
de la délégation préélectorale de l’Assemblée
(open)
Strasbourg, 23.07.2014 – Une délégation multipartite
composée de six membres(*) de l’Assemblée parlementaire du Conseil
de l’Europe (APCE) s’est rendue à Ankara du 21 au 22 juillet 2014,
à l’invitation de la délégation turque auprès de l’APCE, pour une
visite préélectorale préalable à l’élection présidentielle du 10 août.
Elle a rencontré les trois candidats à l’élection présidentielle
ou leurs représentants, à savoir:
- Ekmeleddin
Ihsanoğlu, candidat commun au parti républicain du peuple (CHP)
et au parti d’action nationaliste (MHP);
- Yalcin Akdoğan, député, conseiller principal de Recep
Tayyip Erdoğan, candidat du parti de la justice et du développement
(AKP);
- Nazmi Gür, député, représentant de Selahattin Demirtaş,
candidat du parti démocratique des peuples (HDP).
La
délégation a également eu un échange de vues avec le Vice-Président
de la Grande Assemblée nationale, la délégation turque auprès de
l’APCE, les présidents de la Commission électorale suprême et du
Conseil supérieur de la radio et de la télévision, le chef de la
mission d’observation des élections en Turquie de l’OSCE/ BIDDH,
le chef de la délégation de l’UE en Turquie, des représentants de
la société civile et les médias.
La délégation a noté que l’élection présidentielle du 10 août
2014 serait un moment crucial pour la vie politique en Turquie:
suite à la réforme constitutionnelle de 2007, 53 millions de Turcs
vont, pour la première fois, élire au suffrage universel direct
le Président de la République, conférant ainsi à celui-ci une légitimité
accrue. Cela inaugurera une ère politique nouvelle en Turquie. La
délégation a salué la possibilité de conduire la campagne électorale
dans des langues autres que le turc, y compris le kurde.
La délégation a été informée que le Parlement a adopté, le
10 juillet 2014, une loi-cadre permettant la poursuite des négociations
en vue de la résolution de la question kurde.
La délégation se réjouit de la possibilité offerte pour la
première fois à près des 3 millions de citoyens turcs résidant à
l’étranger de voter en dehors de leur pays. Elle invite instamment
les autorités à assurer le bon déroulement de ces élections organisées
dans 53 pays et à apporter les garanties nécessaires pour veiller
à ce que les bulletins soient transportés en toute sécurité jusqu’en
Turquie en vue de leur dépouillement en toute transparence.
La délégation salue les premières mesures adoptées pour réglementer
le financement des campagnes électorales, notamment la limitation
des dons individuels. Elle estime cependant qu’il serait nécessaire
de renforcer la législation par l’introduction d’un plafonnement
des dépenses de campagne pour permettre un contrôle adéquat des
dépenses des fonds et pour assurer une égalité entre tous les candidats.
La législation devrait également être améliorée afin de préciser
le rôle des partis politiques, la question des contributions en nature
et des ressources personnelles des candidats, etc. La délégation
a souligné les faiblesses du mécanisme actuel de contrôle des comptes
de campagne.
La délégation a pris acte du fait que le Premier ministre
actuel était l’un des candidats à l’élection présidentielle. Elle
note que le Premier ministre n’est pas tenu par la loi de démissionner,
mais aussi que l’utilisation de ressources administratives est interdite
par la loi. Elle a cependant exprimé sa préoccupation du fait que
cette position donne au Premier ministre un accès disproportionné
à des ressources et à une couverture médiatique en l’absence de
réglementation stricte. La question de l’utilisation abusive de
ressources administratives a été évoquée à plusieurs reprises lors
des rencontres. La délégation a donc invité les autorités à adopter
une réglementation plus claire et plus stricte en ce qui concerne
les activités menées par des responsables politiques en exercice
qui présentent leur candidature à une élection présidentielle.
La délégation a rappelé que tous les radiodiffuseurs, y compris
la Société turque de radiotélévision (TRT), étaient tenus d’assurer
une couverture médiatique impartiale et égalitaire de la campagne,
à l’abri de toute autocensure. La délégation a déploré l’absence
de réaction rapide des organes de l’Etat pour remédier à la couverture
médiatique déséquilibrée pendant la campagne en dépit des dispositions
légales existantes. La délégation invite instamment tous les acteurs,
en particulier le Conseil supérieur de la radio et de la télévision et
la Commission électorale suprême, à appliquer de manière plus efficace
la loi, à utiliser les mesures prévues dans la législation et à
assurer un temps de parole égal pour tous les candidats.
La délégation a noté qu’il y avait, en général, une bonne
confiance dans la conduite du scrutin le jour des élections. Elle
réitère cependant ses préoccupations relatives aux insuffisances
de la réglementation des dépenses de campagne, à l’utilisation abusive
des ressources administratives par l’un des candidats et à une couverture
médiatique déséquilibrée. L’introduction d’une disposition légale
claire d’accréditation des observateurs nationaux et internationaux
lors de futures élections contribuerait à renforcer la transparence
et la confiance dans le processus électoral dans son ensemble. Les
observateurs sont tenus d’observer toutes les étapes du processus
électoral (vote, dépouillement, établissement et enregistrement
du procès-verbal).
La délégation préélectorale espère que les élections permettront
aux citoyens turcs de s’exprimer librement et de jouer un rôle actif
à l’occasion de la première élection directe de leur Président.
Une délégation complète d’environ 30 observateurs de l’APCE
retournera dans le pays pour observer l’élection du 10 août 2014.
(*) Membres de la délégation: Meritxell Mateu Pi (Andorre,
ADLE), chef de délégation; Tadeusz Iwinski (Pologne, SOC); Marietta
de Pourbaix-Lundin (Suède, PPE/DC); Ingebjørg Godskesen (Norvège,
GDE); Andrej Hunko (Allemagne, GUE); Josette Durrieu (France, SOC),
rapporteure de l’APCE pour le dialogue postsuivi avec la Turquie
Annexe 4 – Programme de
la mission d’observation de l’élection (8-11 août 2014)
(open)
Vendredi
8 août 2014
9h15-10h00 Réunion de la délégation de l’Assemblée parlementaire
10h15-10h30 Ouverture par les chefs des délégations parlementaires:
- Mme Meritxell Mateu Pi, Chef
de la délégation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe
- Mme Ms Åsa Lindestam, Chef de la délégation de l’Assemblée
parlementaire de l’OSCE
10h30-12h00 Réunion avec
la mission limitée d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH:
Introduction et vue d’ensemble:
- Ambassadeur Geert-Hinrich Ahrens, Chef de la mission limitée
d’observation de l’élection de l’OSCE/BIDDH
Cadre juridique:
- Mme
Marla Morry, Analyste juridique
Contexte politique et campagne :
- M. Vadim Zhdanovich, Analyste politique
Financement de la campagne:
- M. Zorislav Antun Petrović, Analyste du financement de
la campagne
Médias:
- Mme Elma Šehalić,
Analyste médias
Procédures de vote:
- M. Pavel Cabacenco,
Analyste des élections
Questions et réponses
14h15-14h30 OSCE/BIDDH MOEL expert en sécurité, M. Fergus
Harvey Anderson
14h30-15h15 Réunion avec des membres du Conseil suprême des
élections:
- M. Mehmet Kürtül
- Mme Nilgün İpek
- M. Ali Kaya
- M. İlhan Hanağası
- M. İbrahim Zengin
15h15–17h45 Réunion
avec des représentants des candidats présidentiels:
- Prof Dr Ali Tekin, directeur
de la campagne de M. le Prof. Dr. Ekmeleddin İhsanoğlu, candidat
commun à l’élection présidentielle du Parti républicain du peuple
(CHP) et du Parti du mouvement nationaliste (MHP)
- M. Adil Zazani, Représentant de M. Selahattin Demirtaş,
candidat présidentiel du parti Paix et démocratie (HDP)
- M. Mustafa Şentop, représentant du Premier Ministre Recep
Tayyip Erdoğan, candidat présidentiel du parti Justice et développement
(AKP)
Samedi 9 août 2014
9h00-10h00 Réunion avec des représentants des médias:
- M. Aydın Albayrak, chroniqueur,
Today’s Zaman
10h00-11h00 Réunion avec des représentants
de la société civile:
- Mme E.
Oya Ozaslan, Présidente, Transparency International
- Mme Feray Salman, Présidente, Human Rights Platform
- M. Ozturk Turkdogan, Président, Human Rights Association
- Mme Çiğdem Sever, représentante d’Ankara, Association
of Monitoring Equal Rights
- M. Mehmet Pancaroğlu, représentant d’Ankara, Vote and
Beyond
11h30-12h00 Réunion avec des membres du Conseil supérieur
de la radio et de la télévision (RTSC):
- M. Ali Öztunç
- M. Hamit Ersoy
12h00-12h30 Réunion avec
la mission de longue durée de l’OSCE/BIDDH déployée à Ankara
12h30-13h00 Réunion avec les chauffeurs et interprètes des
équipes de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE et de l’APCE déployées
à Ankara
Dimanche 10 août 2014
Observation du vote
Lundi 11 août 2014
8h30-9h30 Réunion de la délégation de l’APCE (débriefing)
13h30 Conférence de presse conjointe
Annexe 5 – Déclaration
de la Mission Internationale d’Observation des Elections (MIOE)
(open)
Election présidentielle
en Turquie: les candidats ont pu mener campagne librement, mais
dans des conditions inégales, selon les observateurs internationaux
Strasbourg, 11.08.2014 – Dans une déclaration publiée aujourd’hui,
les observateurs internationaux ont indiqué que les trois candidats,
représentant des sensibilités politiques différentes, ont pu, dans
l’ensemble, mener campagne librement et que la liberté de réunion
et d’association a été respectée lors de l’élection présidentielle
turque du 10 août. Cependant, le Premier ministre a disposé d’un
avantage incontestable par rapport aux autres candidats en tirant
profit de sa position officielle pour faire campagne et d’une couverture médiatique
partiale.
Pour la coordinatrice spéciale de la mission d’observation
de courte durée de l’OSCE, Vilija Aleknaitė Abramikienė, la première
élection présidentielle au suffrage direct a démontré le dynamisme
de la vie politique en Turquie et les premiers résultats indiquent
qu’il peut y avoir un sain équilibre entre les forces politiques. «Toutefois,
a-t-elle souligné, les problèmes que nous avons relevés, notamment
la couverture médiatique déséquilibrée, doivent être réglés pour
donner pleinement corps aux aspirations démocratiques du peuple».
La Commission électorale suprême (CES) et l’administration
électorale ont fonctionné de manière professionnelle et la qualité
des listes électorales était globalement fiable, selon la déclaration
préliminaire. Il n’y a cependant pas de voie de recours judiciaire
effective en cas de litige puisqu’il n’est pas possible de faire appel
des décisions de l’administration électorale.
«Le fait que des représentants des partis politiques aient
été présents hier dans des bureaux de vote de tout le pays constitue
un mécanisme de contrôle important», selon Åsa Lindestam, Chef de
la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE. «J’espère
que les citoyens et les ONG auront aussi le droit d’observer les
élections à l’avenir, ce qui permettra d’intégrer pleinement l’énergique
société civile du pays au processus électoral», a-t-elle ajouté.
Les observateurs internationaux ont relevé que la couverture
médiatique de la campagne favorisait le Premier ministre, les grandes
chaînes de télévision rendant longuement compte de sa campagne et
n’offrant qu’une couverture limitée de celles des autres candidats.
Ce déséquilibre était accentué par la prédominance de spots publicitaires
politiques payants en faveur du Premier ministre et par l’absence
de définition claire de l’obligation d’impartialité incombant aux
radios et télévisions.
«L’élection du président au suffrage direct n’est que le premier
signe d’une nouvelle phase dans le développement démocratique de
la Turquie», selon Meritxell Mateu Pi, Chef de la délégation de
l’APCE. «Nous continuerons à travailler avec la Turquie et à la
soutenir dans ses efforts pour respecter les normes du Conseil de
l’Europe.»
La campagne, très active et pacifique, a été toutefois marquée
par l’utilisation abusive des ressources de l’Etat, l’organisation
d’activités de campagne lors de manifestations publiques officielles
et, dans certains cas, par des attaques visant la campagne de l’un
des candidats. La modification du cadre légal, qui a permis de faire campagne
dans des langues minoritaires, a été positive, même si des règles
fixées récemment par l’administration électorale imposent toujours
le turc comme langue principale pour les campagnes et la publicité
électorales. En raison de la décision de la CES d’appliquer une
loi antérieure à Loi de 2012 sur l’élection présidentielle, la durée
de la campagne a été de dix jours, alors que les activités de campagne
ont débuté pratiquement trois semaines avant l’entrée en vigueur
des principales règles régissant la campagne électorale.
Pour l’ambassadeur Geert-Hinrich Ahrens, Chef de la mission
d’observation électorale de courte durée de l’OSCE/BIDDH, cette
décision de la CES a contribué à l’inégalité des conditions, en
dépit des garanties prévues par la loi. «L’application à retardement
de ces dispositions et l’utilisation abusive des ressources de l’Etat
ont profité au candidat du parti au pouvoir.»
Alors que le cadre légal était jugé globalement propice à
la tenue d’élections démocratiques, le manque de clarté et l’absence
de responsabilités bien définies se sont traduit par des incohérences
dans son application. Il y a notamment des divergences entre la
loi de 2012 et les lois antérieures régissant les élections en général. L’introduction
récente de règles de financement des campagnes constitue un progrès,
bien que ces règles ne traitent pas des financements provenant de
sources privées ou des partis et ne prévoient ni contrôle satisfaisant
du financement des campagnes, ni sanctions en cas d’infraction.
Au rang des éléments positifs, l’introduction du vote à l’étranger
a permis à pratiquement trois millions d’électeurs résidant à l’étranger
de voter. Par contre, les appelés du contingent, les élèves militaires
et les détenus condamnés pour des crimes intentionnels ne sont pas
autorisés à voter.
Dans le petit nombre de bureaux de votes visités par les observateurs
internationaux, le scrutin a été généralement organisé de manière
professionnelle et efficace; les membres des bureaux de vote étaient
bien préparés et ont globalement respecté les procédures.