Avis de commission | Doc. 13689 | 28 janvier 2015
Contestation, pour des raisons substantielles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie
Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles
A. Conclusions de la commission
(open)La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles est d’avis que la proposition contenue dans le rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe relatif aux pouvoirs de la délégation russe (Doc. 13685) est conforme au Règlement de l’Assemblée et au Statut du Conseil de l’Europe (STE n° 1).
Par ailleurs, compte tenu de son mandat qui lui donne compétence pour examiner toute question relative aux privilèges et immunités des membres de l’Assemblée parlementaire, la commission souhaite présenter un amendement relatif à la situation de Mme Nadiia Shavtchenko, membre de l’Assemblée parlementaire, actuellement détenue en Fédération de Russie.
B. Amendement proposé
(open)Amendement A (au projet de résolution)
Au paragraphe 11, après la deuxième phrase, ajouter la phrase suivante:
«Elle demande que la Fédération de Russie respecte ses obligations de droit international, en tant que Partie à l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe et son Protocole, en vertu desquels Mme Nadiia Savtchenko, membre de l’Assemblée parlementaire, jouit d’une immunité parlementaire européenne».
C. Exposé des motifs, par M. Franken, rapporteur pour avis
(open)1. Introduction
1.1. Réflexions conduites par la commission du Règlement suite à la Résolution 1990 (2014) ayant sanctionné la délégation parlementaire russe
- une liste générale, mais non exhaustive, des droits de participation et de représentation aux activités de l’Assemblée et de ses organes pouvant faire l’objet d’une suspension ou d’une privation, dans le contexte d’une contestation des pouvoirs;
- des principes généraux, visant à encadrer la décision de l’Assemblée afin de respecter l’exigence de sécurité juridique qui doit prévaloir pour toute décision de privation ou de suspension de droits. Ainsi, l’Assemblée doit veiller:
- à ce que la décision soit juridiquement cohérente et rationnelle sur le plan réglementaire;
- à ce que la décision soit compréhensible et lisible;
- à éviter d’adopter des sanctions contradictoires;
- à ne pas adopter de sanctions qui pourraient donner lieu à interprétation quant à leurs conséquences pratiques;
- à la proportionnalité de la «sanction» au regard des violations en cause.
1.2. Précédents et exemples de sanctions prises par l’Assemblée parlementaire
- en avril 2000, l’Assemblée sanctionnait la délégation russe, dont les pouvoirs ratifiés avaient été contestés pour des raisons substantielles en relation avec le conflit en Tchétchénie, en privant ses membres «de leurs droits de vote à l’Assemblée et dans ses organes» (la délégation recouvrait l’intégralité de ses droits de participation et de représentation en janvier 2001, par l’adoption de la Résolution 1241 (2001));
- en janvier 2004, elle suspendait les membres des délégations d’Irlande et de Malte «de leur droit de vote à l’Assemblée et dans ses organes», jusqu’à ce que la composition de ces délégations soit conforme, leurs pouvoirs ayant été contestés pour des raisons formelles au motif que cette composition ne respectait pas les conditions réglementaires de représentation des deux sexes (Résolution 1360 (2004); les délégations concernées ont recouvré leur droit de vote en avril 2004);
- en dernier lieu, en avril 2014, les pouvoirs ratifiés de la délégation russe ont été contestés pour des raisons substantielles en relation avec la violation de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine par les forces armées russes ; l’Assemblée a décidé de suspendre le droit de vote ainsi que certains droits de participation et de représentation de ses membres jusqu’à la fin de la session de 2014 (Résolution 1990 (2014)).
2. Conformité de la demande de contestation des pouvoirs de la délégation parlementaire russe au Règlement
«Les raisons substantielles pour lesquelles les pouvoirs peuvent être contestés sont:
a. une violation grave des principes fondamentaux du Conseil de l’Europe mentionnés à l’article 3 et dans le préambule du Statut; ou
b. le manque de respect persistant des obligations et engagements et le manque de coopération dans le processus de suivi de l’Assemblée».
3. Examen de la proposition de la commission de suivi
«10.1. Les rapports soumis à l’Assemblée ou à la Commission permanente conformément aux
articles 7.2, 8.3, 9.2 et 9.3 doivent contenir un projet de résolution proposant dans son dispositif
l’une des trois alternatives suivantes:
10.1.a. la ratification des pouvoirs, ou la confirmation de la ratification des pouvoirs,
10.1.b. la non-ratification des pouvoirs, ou l’annulation de la ratification des pouvoirs,
10.1.c. la ratification des pouvoirs, ou la confirmation de la ratification des pouvoirs, assortie de la privation ou de la suspension, applicable aux membres de la délégation concernée, de l’exercice de certains des droits de participation ou de représentation aux activités de l’Assemblée et de ses organes.»
«14. Afin de favoriser le dialogue avec la Fédération de Russie, l’Assemblée décide, pour l’instant, de ratifier les pouvoirs de la délégation russe. Mais dans le même temps, soucieuse d’exprimer clairement qu’elle condamne la poursuite des graves violations du droit international commises par la Fédération de Russie en Ukraine, notamment le non-respect du Statut du Conseil de l’Europe et des engagements pris par la Russie au moment de son adhésion à l’Organisation, elle décide de suspendre les droits ci-après de la délégation russe pour la durée de la session 2015 de l’Assemblée:
14.1. droit d’être désigné rapporteur;
14.2. droit d’être membre d’une commission ad hoc d’observation des élections;
14.3. droit de représenter l’Assemblée dans les instances du Conseil de l’Europe ainsi qu’auprès d’institutions et d’organisations extérieures, tant sur instruction qu’à titre occasionnel.
15. Outre les sanctions énoncées aux paragraphes 14.1 à 14.3, l’Assemblée décide de suspendre, lors de l’ouverture de la partie de session de juin 2015, les droits de vote et de représentation de la délégation russe au Bureau de l’Assemblée, au Comité des Présidents et à la Commission permanente s’il devait s’avérer que la Russie n’a pas fait de progrès tangibles et mesurables pour donner suite aux exigences formulées par l’Assemblée aux paragraphes 4.1 à 4.4, 5.1 à 5.3, 7.1 à 7.9, 11 et 12.1 à 12.4 de la présente Résolution et n’a pas apporté sa pleine et entière coopération au groupe de travail mentionné au paragraphe 17 de ladite résolution.
16. L’Assemblée décide d’annuler les pouvoirs de la délégation russe lors de sa partie de session de juin 2015 si aucune avancée n’est constatée pour ce qui concerne la mise en œuvre des protocoles et du mémorandum de Minsk ainsi que les demandes et recommandations de l’Assemblée qui figurent dans la présente résolution, en particulier celles relatives au retrait immédiat des troupes russes de l’est de l’Ukraine.»