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Rapport d’observation d’élection | Doc. 13921 | 18 novembre 2015

Observation de l'élection présidentielle au Bélarus (11 octobre 2015)

Auteur(s) : Commission ad hoc du Bureau

Rapporteur : M. Reha DENEMEÇ, Turquie, CE

1. Introduction

1. Lors de sa réunion du 22 juin 2015, le Bureau de l’Assemblée parlementaire a décidé, sous réserve d’y être invité, d’observer l’élection présidentielle au Bélarus. Il a constitué à cette fin une commission ad hoc composée de 11 membres, y compris le rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie sur «La situation au Bélarus» et autorisé une mission préélectorale un mois avant l’élection.
2. Le 15 juillet 2015, l’Assemblée a reçu des autorités du Bélarus une invitation à observer l’élection présidentielle. Le 31 août, le Bureau a pris note des déclarations sur l’absence de conflit d’intérêts des candidat(e)s à la mission d’observation, a validé la composition de la commission ad hoc et a nommé à sa présidence Mme Arpine Hovhannisyan (Arménie, PPE/DC). En raison de sa nomination, comme ministre de la Justice d’Arménie, Mme Hovhannisyan n’a pas pu présider la délégation et la Présidente de l’Assemblée a nommé M. Reha Denemeç (Turquie, CE) comme président de la délégation (voir l’annexe 1).
3. La délégation préélectorale de l’Assemblée s’est rendue à Minsk du 7 au 10 septembre 2015 afin d’évaluer l’état d’avancement des préparatifs et le climat politique pendant la période précédant l’élection présidentielle du 11 octobre 2015. Les membres de la délégation multipartite étaient M. Reha Denemeç (Turquie, CE), chef de délégation, M. Jonas Gunnarsson (Suède, SOC), Mme Marieluise Beck (Allemagne, ADLE), M. Andrej Hunko (Allemagne, GUE) et M. Andrea Rigoni (Italie, ADLE), rapporteur sur «La situation au Bélarus» de la commission des questions politiques et de la démocratie.
4. Lors de sa visite au Bélarus, la délégation préélectorale a rencontré les candidats à l’élection présidentielle ou leurs représentants, les présidents des deux Chambres du Parlement du Bélarus, le ministre des Affaires étrangères, la présidente de la Commission électorale centrale (CEC), le président de la société publique de radio et de télévision, des représentants de la communauté internationale, le chef de la mission d’observation des élections du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe (OSCE/ BIDDH), ainsi que des représentants de la société civile et des médias.
5. Dans la déclaration publiée à la fin de la visite, la délégation préélectorale de l’Assemblée parlementaire a salué l’ouverture des autorités du Bélarus, qui ont invité la délégation à observer l’élection présidentielle, 14 ans après la dernière invitation en 2001. Elle s’est également félicitée du grand nombre d’organisations internationales que le Bélarus a invité à observer l’élection présidentielle, y compris des observateurs de longue durée de l’OSCE/BIDDH, sans soumettre leur travail à des contraintes, conformément aux engagements internationaux du pays. La déclaration publiée par la délégation préélectorale à l’issue de sa visite figure à l’annexe 2.
6. La commission ad hoc est intervenue dans le cadre de la mission internationale d’observation des élections qui comprenait également des observateurs de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE et de la mission d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH.
7. La commission ad hoc s’est réunie à Minsk du 9 au 12 octobre 2015. Dans le cadre du programme des réunions communes, elle a rencontré les candidats présidentiels ou leurs représentants, la présidente de la Commission électorale centrale, le chef de la mission d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH et ses collaborateurs, ainsi que des représentants de la société civile, des organisations internationales et les médias. Le programme des réunions de la commission ad hoc figure à l’annexe 3.
8. Le jour des élections, la commission ad hoc s’est répartie en sept équipes déployées à Minsk, Brest, Borisov et leurs alentours.
9. La mission internationale d’observation des élections a conclu que l’élection présidentielle du 11 octobre a montré que le Bélarus a encore d’importants progrès à accomplir pour honorer l’engagement de tenir des élections démocratiques. Le jour du scrutin, les électeurs ont pu effectuer leur choix de façon transparente en présence de nombreux observateurs nationaux et internationaux. Néanmoins, les procédures de décompte des voix devraient être considérablement améliorées. Une élection ne se limite pas au jour du scrutin. Par conséquent, le Bélarus doit réformer son cadre juridique pour garantir un environnement politique réellement concurrentiel qui est une condition fondamentale pour la stabilité démocratique à long terme du pays. Le communiqué de presse de la mission internationale d’observation des élections publié après l’élection figure à l’annexe 4.

2. Contexte politique et cadre juridique

10. C’est en 1995 que l’Assemblée parlementaire a, pour la première fois, observé les élections législatives au Bélarus. En 1996, elle a observé le référendum sur la Constitution et les élections législatives, ainsi que l’élection présidentielle en septembre 2001.
11. La dernière élection présidentielle s’est déroulée le 19 décembre 2010. Conformément aux résultats officiels, parmi les dix candidats, le président sortant, M. Alexander Loukachenko, a été élu avec 79,67 % des voix (5 122 866 électeurs). M. Andrei Sannikov a obtenu le deuxième pourcentage le plus élevé – 2,56 % (164 000 électeurs). M. Alexander Loukachenko est Président du Bélarus depuis 1994.
12. Le développement de la situation au Bélarus, après la dernière élection présidentielle, se trouvait au centre de l’attention de l’Assemblée parlementaire. La répression de manifestants contestant les résultats de l’élection présidentielle de 2010 et la détention des candidats d’opposition ont donné lieu à un débat d’urgence au cours de la partie de session de janvier 2011 de l’Assemblée, lequel a conduit à l’adoption de la Résolution 1790 (2011). L’Assemblée, dans sa résolution, a réaffirmé sa décision de suspendre les activités qu’elle menait en coopération avec les hautes autorités bélarusses et a invité le Bureau de l’Assemblée à ne pas lever la suspension du statut d’invité spécial du Parlement du Bélarus.
13. Le 10 mars 2011, le Bureau de l’Assemblée a constitué une commission ad hoc sur les détentions, poursuites et condamnations récentes de membres de l’opposition au Bélarus. Un rapport couvrant la période comprise entre le 19 décembre 2010 et le 1er octobre 2011 a été rendu public par décision du Bureau le 7 octobre 2011. L’aggravation constante de la situation des droits de l’homme et des libertés civiles et politiques tout au long de l’année 2011 a conduit à l’adoption de la Résolution 1857 (2012) et de la Recommandation 1992 (2012) sur la situation au Bélarus.
14. Le 27 juin 2013, la commission des questions politiques et de la démocratie de l’Assemblée parlementaire a organisé un échange de vues avec la participation de membres des deux Chambres de l’Assemblée nationale de la République du Bélarus. Les 25 et 26 février 2015, M. Andrea Rigoni (Italie, ADLE), rapporteur sur la situation au Bélarus, s’est rendu en visite dans le pays. Tout en se félicitant de l’esprit d’ouverture témoigné par les autorités du Bélarus, le rapporteur a réitéré la position non négociable de l’Assemblée parlementaire quant à la proclamation d’un moratoire sur les exécutions, en vue d’une abolition de la peine capitale et de la libération de tous les prisonniers politiques.
15. A la suite d’une proposition de M. Rigoni, une délégation du Parlement du Bélarus a été invitée à une conférence régionale des pays du partenariat oriental, organisée par l’Assemblée parlementaire les 4 et 5 juin 2015 à Paris. Le thème de la conférence était «La mise en œuvre du droit à des élections libres: le défi de l’application des législations électorales ainsi que le respect des standards du Conseil de l’Europe».
16. Le 23 août 2015, pendant la campagne préélectorale, les autorités du Bélarus ont libéré six prisonniers politiques, dont un ancien candidat à l’élection présidentielle de 2010, M. Nikolai Statkevich. Le 9 septembre 2015, la délégation préélectorale de l’Assemblée, en visite à Minsk, s’en est félicitée et a demandé instamment aux autorités de poursuivre l’amélioration de la situation des droits de l’homme dans le pays, car c’est une condition essentielle pour la stabilité démocratique durable au Bélarus.
17. Le 23 août 2015, Anne Brasseur, Présidente de l’Assemblée, s’est également félicitée de la libération de six prisonniers politiques par les autorités du Bélarus, en ajoutant néanmoins que ce développement positif devrait être «suivi d’autres mesures concrètes qui permettront d’améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays et la normalisation de ses relations avec le Conseil de l’Europe. L’élection présidentielle du 11 octobre 2015 sera un test important pour les dirigeants du pays quant au sérieux de leur intention de se rapprocher des normes du Conseil de l’Europe en matière de démocratie et de droits de l’homme».
18. La demande du groupe d’initiative de M. Statkevich pour être enregistré comme candidat présidentiel a été rejetée avant la date de la libération de ce dernier. Le 9 septembre 2015, lors de la rencontre avec la délégation préélectorale de l’Assemblée, la Présidente de la Commission électorale centrale du Bélarus a expliqué que ce rejet s’est appuyé sur l’article 60 du Code électoral, lequel stipule que les citoyens désignés comme candidats à la fonction de Président de la République ou à la députation doivent jouir, en vertu de la législation du pays, du droit d’occuper des postes au sein des organes étatiques et autres organisations publiques, et ne doivent donc pas avoir fait l’objet de condamnation. Les représentants du groupe d’initiative de M. Statkevich ont introduit un recours contre la décision de la CEC devant la Cour suprême, qui a validé la décision de la CEC.
19. La République du Bélarus est régie par un système présidentiel avec un président doté de pouvoirs étendus, y compris celui de dissoudre les chambres haute et basse du parlement, de promulguer des décrets présidentiels ayant force de loi pendant les vacances parlementaires, de déclarer l’état d’urgence ou d’imposer la loi martiale. Les élections sont globalement réglementées par la Constitution et le Code électoral. La Constitution garantit un scrutin au suffrage direct, égalitaire et universel à bulletin secret. Le Bélarus est membre associé de la Commission de Venise et membre du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO).
20. Le président est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans lors d’un scrutin majoritaire à deux tours. Pour que l’élection soit valide, il faut que plus de 50 % de l’ensemble des électeurs inscrits y prennent part. Dans le cas où aucun des candidats ne remporte plus de 50 % des suffrages exprimés, y inclus les «bulletins nuls» et les votes «contre tous» lors du premier tour, le second tour a lieu dans les deux semaines suivant le jour du scrutin. Si l’élection est invalidée, celle qui la remplace requiert également une participation de 50 %.
21. La commission ad hoc a été informée des récents amendements apportés au Code électoral en juin 2015 en raison des changements survenus dans les différents lois relatifs à l’interdiction d’un financement en provenance de sources étrangères.
22. D’autres amendements au Code électoral ont été apportés en novembre 2013 prolongeant la période de la campagne de collecte de fonds par la possibilité pour les candidats présidentiels potentiels d’ouvrir un compte bancaire, une fois qu’un groupe d’initiative est enregistré, et augmentant le montant des dons privés et la limite de dépenses pour les campagnes présidentielles.
23. Ces amendements interdisent aussi les actes de perturbation et l’annulation ou le report des élections et d’un référendum. Ces changements ont été introduits en raison de la ratification par le Bélarus de la Convention sur les normes en matière d’élections démocratiques, et les droits et libertés électoraux dans les Etats membres de la Communauté des Etats indépendants (CEI). Avant la ratification de cette convention et l’adoption de ces amendements en novembre 2013, la loi interdisait l’appel au boycott uniquement le jour de l’élection. Avec ce changement de la législation sont interdites toutes les activités visant à boycotter ou appeler à boycotter une élection. A cet égard, certain interlocuteurs de la commission ad hoc de l’Assemblée ont exprimé leurs inquiétudes quant à un éventuel abus de cette disposition.
24. D’une manière générale, il a été constaté lors des élections précédentes que le cadre juridique général ne garantissait pas de manière adéquate la conduite d’élections conformes aux normes internationales. Différents interlocuteurs de la commission ad hoc ont noté que malgré un engagement post-électoral encourageant et une ouverture déterminée des autorités pour examiner les recommandations de l’OSCE/BIDDH, les amendements apportés à la législation électorale après les élections de 2012 n’ont pas pris en compte les recommandations clés telles que la composition équilibrée des commissions électorales et la procédure de vote par anticipation.

3. Administration des élections, inscription des électeurs et des candidats

25. Les élections sont administrées par la Commission électorale centrale (CEC), 153 commissions électorales territoriales (CET) et 6 129 commissions de bureaux de vote (CBV) dont 49 CBV à l’étranger. La CEC est un organe permanent qui a été nommé pour un mandat de cinq ans en 2011, les CET et CBV sont nommées à titre temporaire par les autorités régionales ou locales.
26. Conformément à la Constitution et au Code électoral, le Président de la République nomme six des douze membres de la CEC, dont le président, et peut congédier la totalité de ses membres. Les six autres membres de la CEC sont nommés par la chambre haute du parlement. Tout candidat enregistré à l’élection présidentielle a le droit de nommer un membre avec un vote consultatif pour participer aux réunions de la CEC.
27. Fait positif, les partis politiques et les associations publiques ont le droit de nommer au moins un tiers des membres des CET et des CBV, et un tiers maximum des membres peuvent être des employés de l’Etat. Selon la CEC, une décision a été prise selon laquelle les autorités locales devraient fournir des explications écrites en cas de rejet de candidats de partis ou d’associations publiques en tant que membres des commissions électorales.
28. Néanmoins, divers interlocuteurs représentant l’opposition ont signalé à la commission ad hoc un déséquilibre dans la composition des CET et CBV: à peine 40 membres, sur les environ 69 000 membres que comptent les commissions électorales, représentaient l’opposition.
29. A la suite d’une invitation ouverte et sans réserve aux institutions d’observation, la CEC a fait preuve d’une attitude accueillante envers les observateurs internationaux. La délégation préélectorale de l’Assemblée a salué la volonté des autorités du pays d’inviter un grand nombre d’observateurs internationaux, y compris des observateurs de longue durée du BIDDH, sans soumettre leur travail à des contraintes, conformément aux engagements internationaux du pays. Selon les observateurs du BIDDH, la CEC a adopté toutes les décisions dans les délais prévus en respectant les instructions et les règles en vigueur; les décisions de la CEC ont été publiées sur le site internet.
30. Les citoyens bélarusses âgés de plus de 18 ans le jour du scrutin et résidant de manière permanente ou temporaire au sein d’une circonscription ont le droit de voter. Le 24 septembre 2015, la CEC a pris la décision d’octroyer le droit de vote aux citoyens se trouvant en prison pour les crimes dont la durée de la peine était inférieure à trois mois.
31. L’enregistrement des électeurs est passif. Les listes électorales sont établies pour chaque circonscription par les administrations locales compétentes. Il n’existe aucun registre électoral central au-dessus du niveau des CBV. Le 25 septembre, la CEC a annoncé qu’au total 6 995 181 électeurs étaient inscrits pour l’élection présidentielle, dont 5 742 à l’étranger.
32. Les CBV sont chargées de vérifier et de mettre à jour les listes électorales en effectuant des vérifications porte-à-porte. Les électeurs peuvent être ajoutés aux listes supplémentaires le jour de scrutin à condition de présenter un passeport valide avec la confirmation de résidence dans la circonscription. Ceci est contre les dispositions du Code de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise. Bien qu’un nombre considérable des interlocuteurs de la commission ad hoc ont exprimé leur confiance dans l’intégrité du système d’enregistrement des électeurs, des représentants de certaines organisations non gouvernementales ont exprimé des vues plus critiques sur la question.
33. Tout citoyen né au Bélarus, âgé de plus de 35 ans et résidant de façon permanente dans le pays depuis dix ans, a le droit de se porter candidat à l’élection présidentielle. Les candidats présidentiels sont désignés par des groupes d’initiative composés d’au moins 100 électeurs admissibles. Tout groupe d’initiative est tenu de présenter, auprès de sa CET respective, un minimum de 100 000 signatures en faveur d’un candidat potentiel.
34. La nomination des candidats a débuté 80 jours et a pris fin 50 jours avant le jour du scrutin. L’inscription des candidats a été assurée par la CEC: elle a commencé 35 jours et a fini 25 jours avant le jour de l’élection, c’est-à-dire le 15 septembre 2015 pour cette élection présidentielle. Chaque électeur peut apporter sa signature pour soutenir plusieurs candidats potentiels. Dans les 15 jours suivant la date limite du dépôt des signatures, les CET doivent en vérifier l’authenticité et le nombre.
35. La CEC a enregistré huit groupes d’initiative sur les 15 ayant présenté des demandes, dont les groupes d’initiative du président sortant. La CEC a informé les membres de la délégation que toutes les demandes rejetées ne répondaient pas aux critères d’enregistrement, par exemple le nombre de signatures requises pour enregistrer un groupe d’initiative, les exigences de citoyenneté des signataires ou candidats potentiels, ou du fait de l’existence d’un casier judiciaire du candidat potentiel.
36. La CEC a informé la délégation préélectorale de l’Assemblée de n’avoir été saisie d’aucune plainte concernant la procédure d’enregistrement des candidats présidentiels et la collecte de signatures en faveur d’un candidat potentiel. Durant la visite préélectorale de la délégation, de nombreux interlocuteurs représentant la société civile et l’opposition ont aussi insisté à cet égard sur l’importance d’une égalité des chances pour les candidats présidentiels, qui doivent pouvoir collecter librement des signatures. Ils ont par ailleurs critiqué l’utilisation abusive de ressources administratives en faveur du président sortant pour la collecte des signatures dans les entreprises publiques lors du temps de travail par l’intermédiaire des associations et organisations contrôlées par l’Etat telles que l’Union de la jeunesse du Bélarus, «Belaya Rus», l’Union des femmes et l’Association des vétérans.
37. Le Code électoral ne prévoit pas une procédure claire concernant la sélection et la vérification des signatures. La commission ad hoc de l’Assemblée a souligné l’importance de l’égalité des chances pour tous les candidats à recueillir sans entrave des signatures. Selon certains interlocuteurs de la société civile et des représentants de l’opposition, la procédure de vérification des signatures collectées n’aurait pas été transparente, ce qu’aurait diminué la confiance dans le processus électoral.
38. Le 10 septembre, la CEC a enregistré en tant que candidats présidentiels quatre personnes ayant réussi à collecter plus de 100 000 signatures, soit: M. Alexander Loukachenko, président sortant – 1 753 380 signatures; M. Nicolay Ulakhovich – 149 819 signatures; M. Sergey Haydukovich – 139 877 signatures; et Mme Tatiana Korotkevich – 105 278 signatures. C’est la première fois dans l’histoire du Bélarus qu’une femme a été enregistrée comme candidate.

4. Campagne électorale, financement de la campagne et couverture médiatique

39. La campagne électorale a commencé le 10 septembre 2015, après l’enregistrement des quatre candidats. Les candidats ont été en mesure de mener leur campagne à travers tout le pays et, en règle générale, sans contrainte.
40. Le président sortant, M. Loukachenko, a construit sa campagne électorale sous le slogan «Pour l’avenir d’un Bélarus indépendant» et a mis l’accent sur les questions de développement économique et de la stabilité régionale, notamment en faisant référence au conflit entre l’Ukraine et la Russie. Sa candidature a été soutenue par un nombre considérable des associations publiques liées au gouvernement, ainsi que par des personnalités publiques connues dans le pays.
41. Le candidat présidentiel M. Haidukevich avait déjà participé aux élections présidentielles de 2001 et 2006 et avait obtenu respectivement 2,48 % et 3,5 % des voix. Il a construit sa campagne électorale sous le slogan «Pour un Bélarus fort», fondé sur la stabilité et sur l’ordre public. Lors de sa campagne électorale il n’a pas critiqué le président sortant et s’est prononcé en faveur de l’intégration euro-asiatique.
42. Le candidat présidentiel M. Ulakhovich a construit sa campagne électorale sous le slogan «Pour la paix, la tranquillité et l’ordre» et a déclaré que le Bélarus fait partie du «monde russe». Il se présente comme «Bélarussien cosaque» avec des liens forts avec l’église orthodoxe. Malgré le fait qu’il était candidat présidentiel, il a soutenu les dirigeants actuels du pays.
43. Mme Korotkevich était la première candidate femme pour la fonction présidentielle au Bélarus. Elle est membre du parti social-démocrate «Hramada», activiste du mouvement «Dis la vérité». Elle a construit sa campagne électorale sous le slogan «Pour des changements pacifiques». Sa plate-forme électorale s’est basée sur les questions de développement socio-économique du pays. Aucun parti politique de l’opposition n’a soutenu sa candidature. Lors de la rencontre avec la délégation préélectorale de l’Assemblée à Minsk le 8 septembre 2015, certains représentants de l’opposition se sont ouvertement interrogés sur son indépendance vis-à-vis des autorités du pays.
44. L’environnement préélectoral a été peu restrictif pour les candidats présidentiels qui ont pu faire campagne en allant à la rencontre des électeurs, en faisant des visites de porte-à-porte, en organisant des rassemblements et en distribuant du matériel de campagne. Cependant, des représentants de la société civile, ainsi que de la candidate présidentielle Mme Korotkevich, ont exprimé des réserves quant à savoir si les candidats étaient en mesure de faire campagne librement et sur un pied d’égalité, notamment eu égard à l’utilisation des ressources administratives en faveur du président sortant.
45. Concernant l’utilisation des ressources administratives et des moyens des associations publiques, un nombre considérable de hauts fonctionnaires ont fait campagne en faveur du président sortant; une manifestation a été organisée par le ministère de la Défense dont les organisateurs demandaient aux familles des militaires et aux militaires en service de voter pour le président sortant; des associations publiques financées par l’Etat ont fait campagne en faveur du président sortant. La Présidente de la CEC a publiquement soutenu la candidature du président sortant. Fait positif, la ministre du Travail et de la Protection sociale, qui dirigeait l’état-major de la campagne électorale du président sortant, a pris congé de son ministère lors de la campagne électorale.
46. Concernant le financement de la campagne électorale des candidats, selon la législation, le candidat ouvre un compte bancaire pour collecter des fonds une fois son groupe d’initiative enregistré. Les contributions ne peuvent être apportées qu’au moyen de virements bancaires. Les candidats peuvent utiliser leurs propres fonds, les contributions des particuliers et des personnes morales. La limite de dépenses pour un candidat était l’équivalent d’environ 115 000 euros. Par comparaison, lors de l’élection précédente cette limite était trois fois moins importante.
47. De plus, un financement de l’Etat était prévu pour l’impression de supports d’information uniformes, avec les données biographiques de tous les candidats, qui ont été distribués via les CBV. Cette disposition peut être évaluée comme positive car elle a assuré l’égalité des candidats concernant les supports d’information destinés aux électeurs. La majorité des interlocuteurs de la commission ad hoc ont considéré positives l’augmentation des dons et des limites de dépenses et la prolongation de la période de collecte de fonds. Toutefois, des préoccupations ont été exprimées concernant les contributions financières réelles des citoyens et des personnes morales aux candidats en raison de la pression et de l’intimidation potentielles exercées sur les donateurs.
48. La CEC a informé la commission ad hoc que, selon la législation, les candidats présidentiels doivent présenter des rapports des recettes et dépenses à la CEC, qui a une responsabilité globale pour le contrôle des finances de la campagne et pour la préparation d’un rapport final dans les cinq jours suivant le jour de l’élection. Des mesures d’enquête peuvent être lancées et des sanctions imposées si un candidat dépasse les limites de financement autorisées de la campagne de 20 %.
49. Le Code électoral prévoit un temps d’antenne gratuit pour les candidats à la télévision et à la radio d’Etat et un espace gratuit dans la presse écrite financée par l’Etat. La CEC a adopté des instructions afin de mettre en œuvre cette disposition. Les chaînes publiques Bélarus 1 et Radio National 1 ont offert à chaque candidat 30 minutes gratuites; le président sortant a décliné cette offre. Le 3 octobre, un débat télévisé a été organisé entre les candidats auquel n’ont pas participé le président sortant et l’un des candidats, qui a envoyé son représentant. A cet égard, la commission ad hoc regrette que tous les candidats n’aient pas participé à ce débat et rappelle que, dans sa déclaration préélectorale, elle avait encouragé tous les candidats présidentiels à y participer, afin de promouvoir le développement de la culture du débat politique au Bélarus et de permettre aux électeurs de faire un choix éclairé.
50. Selon le rapport préliminaire de monitoring des médias du BIDDH, les activités institutionnelles du président sortant ont été largement couvertes par des médias financés par l’Etat et cette couverture a été favorable pour lui. Pendant la période du 7 septembre au 7 octobre, environ 47 % des actualités politiques ont été consacrées au président sortant, 9 % à Mme Korotkevich et 7 % respectivement à M. Haidukevich et M. Ulakhovich.

5. Jour du scrutin

51. Le jour du scrutin a été calme et le vote bien organisé. La commission ad hoc a pris note de la présence de représentants des candidats et d’observateurs nationaux dans un nombre considérable des bureaux de vote visités. La CEC a annoncé que 36,6 % des électeurs ont voté lors des cinq jours précédant le jour du scrutin. Cette procédure de vote anticipé est prévue par la législation électorale sans justification.
52. La commission ad hoc a identifié un certain nombre d’insuffisances dans les bureaux de vote visités:
  • lors du déroulement du scrutin, en général, il a été interdit aux observateurs de s’approcher des membres du bureau de vote pour vérifier les listes d’électeurs et les signatures; cette interdiction est prévue par le Code électoral;
  • les membres de la commission ad hoc ne pouvaient pas systématiquement s’approcher des tables pour observer le comptage des bulletins lors de dépouillement; cette interdiction est également prévue par le Code électoral;
  • les procédures ne sont pas détaillées, au détriment de la transparence du dépouillement des voix et de la publication des résultats; la mauvaise qualité des urnes et des scellés sur les urnes a également été mentionnée;
  • des cas ont été relevés de non-respect des procédures du comptage et d’établissement des protocoles.
53. Le 16 octobre 2015, la CEC a annoncé les résultats officiels de l’élection présidentielle: M. Loukachenko a obtenu 83,5 % (5 102 478 voix); Mme Korotkevich a obtenu 4,4 % (271 426 voix); M. Haidukevich a obtenu 3,3 % (201 945) et M. Ulakhovich a obtenu 1,7 % (102 131 voix). Le taux de participation a été de 87,2 %. M. Loukachenko a été élu Président de la République du Bélarus.

6. Conclusions et recommandations

54. La commission ad hoc a conclu que l’élection présidentielle du 11 octobre 2015 a montré que le Bélarus a encore d’importants progrès à accomplir pour honorer les engagements de tenir des élections démocratiques. Le jour de scrutin, les électeurs ont pu effectuer leur choix de façon transparente en présence de nombreux observateurs nationaux et internationaux. Néanmoins, une élection ne se limite pas au jour du scrutin. Les procédures de décompte des voix, ainsi que celles réglementant le travail des observateurs le jour de scrutin, devraient être considérablement améliorées afin de renforcer la confiance dans le processus électoral.
55. Le Bélarus devrait réformer le cadre juridique électoral pour garantir un environnement politique réellement concurrentiel qui est une condition fondamentale pour la stabilité démocratique à long terme du pays.
56. L’environnement préélectoral a été calme, peu restrictif pour les candidats présidentiels qui étaient en mesure, en règle générale, de mener leur campagne à travers tout le pays, sans contrainte. La commission ad hoc s’est félicitée de la libération des prisonniers politiques au début de la campagne préélectorale et a demandé instamment aux autorités de poursuivre l’amélioration de la situation des droits de l’homme dans le pays.
57. La commission ad hoc a été informée de cas d’utilisation de ressources administratives et de moyens des associations publiques, financées par l’Etat, faisant campagne en faveur du président sortant; un nombre considérable de hauts fonctionnaires auraient également été impliqués activement dans la campagne électorale en faveur du président sortant. A l’avenir les autorités du Bélarus devraient prendre des mesures pour éviter ce genre de pratiques.
58. La commission ad hoc salue l’ouverture des autorités du Bélarus, qui ont invité l’Assemblée parlementaire à observer l’élection présidentielle, 14 ans après la dernière invitation en 2001. Elle se félicite également du grand nombre d’organisations internationales que le Bélarus a invitées à observer l’élection présidentielle, y compris des observateurs de longue durée du BIDDH, sans soumettre leur travail à des contraintes, conformément aux engagements internationaux du pays. Néanmoins, la commission ad hoc est convaincue que la législation électorale doit être améliorée afin de permettre aux observateurs internationaux d’effectuer leur travail efficacement, notamment le jour des élections, sans interférer dans le fonctionnement des commissions électorales. Ceci pourrait renforcer la confiance dans tout le processus électoral.
59. En ce qui concerne le financement de la campagne électorale, les candidats ont pu utiliser leurs propres fonds et les contributions de particuliers et de personnes morales. De plus, un financement public a été prévu pour l’impression de supports d’information uniformes consacrés aux candidats et destinés aux électeurs afin d’assurer leur égalité. Toutefois, des préoccupations ont été exprimées par certains interlocuteurs concernant les contributions financières réelles des citoyens et des personnes morales aux candidats en raison de la pression et de l’intimidation potentielles exercées sur les donateurs.
60. Concernant la couverture des médias, le Code électoral prévoit un temps d’antenne gratuit pour les candidats à la télévision et à la radio d’Etat et un espace gratuit dans la presse écrite financée par l’Etat. Les chaînes publiques Bélarus 1 et Radio National 1 ont offert à chaque candidat le temps d’antenne gratuit prévu. La commission ad hoc a constaté que les activités institutionnelles du président sortant ont été largement couvertes par des médias financés par l’Etat et cette couverture lui a été favorable. A cet égard, la commission ad hoc rappelle que les radiodiffuseurs publics sont tenus d’assurer l’égalité d’accès à tous les candidats, sans accorder de traitement de faveur au président sortant.
61. La commission ad hoc souligne l’importance du travail des acteurs de la société civile impliqués dans l’observation des élections. Elle estime que les autorités du Bélarus devraient poursuivre leur coopération avec l’Assemblée parlementaire et avec la Commission de Venise, afin d’améliorer le cadre juridique et les pratiques électorales du Bélarus.
62. La commission ad hoc estime que le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire, par leurs différents programmes de coopération, y compris ceux du partenariat oriental, devraient continuer à œuvrer afin d’améliorer le cadre juridique électoral et sa mise en œuvre au Bélarus.

Annexe 1 – Composition de la commission ad hoc

(open)

Sur la base des propositions des groupes politiques de l’Assemblée, la commission ad hoc se composait comme suit:

Reha DENEMEÇ (Turquie, CE), Président

  • Groupe socialiste (SOC)
    • Jonas GUNNARSSON, Suède*
    • Birute VESAITE, Lituanie
    • Luc RECORDON, Suisse
  • Groupe du Parti populaire européen (PPE/DC)
    • Thierry MARIANI, France
    • Emanuelis ZINGERIS, Lituanie
  • Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE)
    • Marieluise BECK, Allemagne*
    • Luis Alberto ORELLANA, Italie
  • Groupe des conservateurs européens (CE)
    • Reha DENEMEÇ, Turquie*
  • Groupe pour la gauche unitaire européenne (GUE)
    • Andrej HUNKO, Allemagne*
  • Rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie
    • Andrea RIGONI, Italie*
  • Secrétariat de l’Assemblée parlementaire
    • Chemavon CHAHBAZIAN, Chef de la Division d’observation des élections et de la coopération interparlementaire
    • Sonia SIRTORI, Chef du Bureau du Secrétaire Général de l’Assemblée parlementaire
    • Franck DAESCHLER, Assistant administratif principal, Division d’observation des élections et de la coopération interparlementaire

* membres de la délégation préélectorale

Annexe 2 – Déclaration de la mission préélectorale

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Une délégation préélectorale de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) s’est rendue à Minsk pour une évaluation du processus préélectoral et de la préparation de l’élection présidentielle prévue le 11 octobre 2015.

09/09/2015 – La délégation préélectorale a salué l’ouverture des autorités du Bélarus, qui ont accueilli l’APCE 14 ans après la dernière invitation, en 2001. Elle se félicite également du grand nombre d’organisations internationales que le Bélarus a invitées à observer la prochaine élection présidentielle, y compris des observateurs de longue durée du BIDDH, sans soumettre leur travail à des contraintes, conformément aux engagements internationaux du pays.

La Commission électorale centrale (CEC) a informé la délégation des différentes étapes de préparation du scrutin présidentiel, dont la collecte des signatures en vue de l’inscription des candidats présidentiels. Six candidats ont déposé auprès de la CEC un nombre suffisant de signatures (plus de 100 000) pour être inscrits comme candidats présidentiels. D’après la CEC, aucune plainte n’a été déposée auprès de ses services. Le 10 septembre, à l’issue de la vérification des signatures, la CEC annoncera les noms des candidats inscrits.

De nombreux interlocuteurs représentant la société civile et l’opposition extra-parlementaire ont souligné l’importance d’une égalité des chances pour les candidats présidentiels, qui doivent pouvoir collecter librement des signatures; ils ont précisé qu’il faut empêcher le détournement des moyens administratifs en faveur du président sortant.

S’agissant des commissions électorales, divers interlocuteurs représentant l’opposition ont signalé à la délégation un déséquilibre dans la composition des commissions régionales et de circonscription. Les partis politiques et les associations publiques ont le droit de désigner au moins un tiers des membres de ces commissions, mais les représentants de l’opposition déplorent qu’à peine 40 membres, sur les 69 000 que comptent les commissions électorales, représentent l’opposition.

Le 23 août, pendant la campagne préélectorale, les autorités du Bélarus ont libéré six prisonniers politiques, dont un ancien candidat présidentiel. La délégation préélectorale de l’APCE s’en félicite et a demandé instamment aux autorités de poursuivre l’amélioration de la situation des droits de l’homme dans le pays, condition essentielle pour une stabilité démocratique durable au Bélarus.

Le Code électoral prévoit du temps d’antenne gratuit pour les candidats présidentiels sur les chaînes nationales de la télévision et de la radio, ainsi qu’un espace gratuit dans la presse écrite subventionnée par l’Etat. Certains interlocuteurs de la délégation ont fait observer que l’environnement médiatique s’était détérioré ces dernières années, en raison de procès pour diffamation et de sanctions administratives infligées aux journalistes. La délégation préélectorale de l’APCE rappelle que les radiodiffuseurs publics sont tenus d’assurer l’égalité d’accès à tous les candidats, sans accorder de traitement de faveur au président sortant. La délégation a appris qu’un débat télévisé entre les candidats présidentiels était prévu le 3 octobre 2015. La délégation a encouragé tous les candidats présidentiels à y participer, afin de promouvoir le développement de la culture du débat politique au Bélarus et de permettre aux électeurs de faire un choix éclairé.

Des représentants des autorités bélarusses ont affirmé à la délégation de l’APCE que toutes les mesures nécessaires seront prises pour garantir la transparence du processus électoral, y compris pendant le scrutin et le dépouillement.

La délégation a rencontré les Présidents des deux Chambres du Parlement du Bélarus, le ministre des Affaires étrangères, la Présidente de la CEC, le Président de la société publique de radio et de télévision, les candidats présidentiels ou leurs représentants, des représentants de la communauté internationale, le chef de la mission d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH, ainsi que des représentants de la société civile et des médias.

L’Assemblée parlementaire enverra une délégation de 11 membres pour observer l’élection présidentielle du 11 octobre 2015.

Membres de la délégation: Reha Denemeç (Turquie, CE), Chef de la délégation; Jonas Gunnarsson (Suède, SOC); Marieluise Beck (Allemagne, ADLE); Andrej Hunko (Allemagne, GUE); Andrea Rigoni (Italie, ADLE), Rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie sur la situation au Bélarus

Annexe 3 – Programme de la mission d’observation d’élections (9-12 octobre 2015)

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Vendredi 9 octobre 2015

11:00-12:00 Réunion interne de la commission ad hoc de l’APCE:

  • Ouverture par M. Reha Denemeç, Chef de la délégation
  • Débriefing des membres de la délégation préélectorale
  • Information concernant le déploiement, les questions logistiques et la distribution des dossiers par le secrétariat de l’APCE

Réunions communes des délégations parlementaires

13:00-13:15 Interventions des chefs des délégations:

  • M. Kent Harstedt, coordinateur spécial des observateurs à court terme de l’OSCE
  • M. Reha Denemeç, Chef de la délégation de l’APCE
  • M. Jim Walsh, Chef de la délégation de l’AP-OSCE

13:15-14:45 Réunion avec les membres de l’équipe de l’OSCE/BIDDH

15:00-15:45 Réunion avec Mme Lidya Yermoshina, Présidente de la Commission électorale centrale

15:45-18:45 Réunions avec les candidats ou leurs représentants:

  • M. Sergey Haidukevich
  • M. Andrey Dmitriev, représentant de Mme Tatiana Korotkevich
  • Mme Mariana Shchotkina, Chef de l’état major de campagne de M. Alexandr Loukachenko
  • M. Nikolai Ulakhovich

Samedi 10 octobre 2015

09:30-10:30 Représentants de l’opposition:

  • M. Anatol Liabedzka
  • M. Siarhei Kaliakin
  • M. Mikola Statkevich
  • M. Viktar Tsiareshchanka

10:30-11:30 Table ronde avec des représentants de la société civile:

  • M. Aleh Hulak, Belarusian Helsinki Committee
  • M. Uladzimir Labkovich, Human Rights Centre «Viasna»
  • M. Dzianis, Observation de la campagne électorale «Droit de choisir en 2015»
  • Mme Raisa Mikhailovskaia, Centre documentaire du Bélarus

11:30-12:30 Table ronde avec des représentants des médias:

  • M. Ales Antsipenka, Belarusian Association of Journalists
  • M. Ales Lipay, Directeur de l’agence de presse privée «Belapan»
  • M. Marat Markov, Vice-président de la société de télévision et de radio d’Etat
  • M. Artsiom Schraibman, observateur politique de l’agence de presse TUT.by

13:00-13:30 Réunion d’information OSCE/BIDDH (sécurité, coordination, formulaires)

13:30-14:00 Information sur le déploiement et réunion avec les conducteurs et assistants linguistiques

Dimanche 11 octobre 2015

Toute la journée Ouverture des bureaux de vote

Observation du scrutin

Fermeture des bureaux de vote – dépouillement

Lundi 12 octobre 2015

08:00-8:45 Réunion de débriefing de la délégation de l’APCE

09:30-11:00 Réunion des chefs des délégations

14:30 Conférence de presse

Annexe 4 – Communiqué de presse de la mission internationale d’observation des élections (MIOE)

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Malgré une campagne électorale pacifique, les observateurs appellent à des réformes pour remédier aux insuffisances considérables observées lors de l’élection présidentielle au Bélarus

12/10/2015 – L’élection tenue le 11 octobre a montré une nouvelle fois que le Bélarus a encore d’importants progrès à accomplir pour honorer les engagements de tenir des élections démocratiques qu’il a contractés envers l’OSCE. «Ceci souligne la nécessité d’une volonté politique d’engager un processus global de réforme», ont conclu les observateurs internationaux dans un communiqué préliminaire publié aujourd’hui. Ils ont constaté certaines améliorations spécifiques et une attitude positive. Cependant, certains problèmes importants, en particulier lors du décompte des voix et de la présentation des résultats, ont compromis l’intégrité du scrutin. D’après le communiqué, la campagne et l’élection elle-même se sont déroulées sans heurts.

«Il est clair que le Bélarus a encore d’importants progrès à accomplir pour remplir ses engagements démocratiques. La libération récente de prisonniers politiques et l’attitude accueillante dont les autorités ont fait preuve envers les observateurs constituent des évolutions positives. Cependant, l’espoir que cela a suscité chez nous en ce qui concerne le processus électoral en général a été largement déçu», a déclaré Kent Harstedt, coordinateur spécial et chef de la mission d’observation de courte durée de l’OSCE. «Etant donné les promesses faites précédemment, j’ai été particulièrement déçu par les insuffisances constatées dans le décompte des voix et la présentation des résultats. Nous espérons que le gouvernement bélarusse aura la volonté politique de lancer un profond processus de réforme, que nous sommes prêts à soutenir.»

Tous les candidats ont pu mener campagne dans le pays et exprimer leurs messages librement. D’après les observateurs, la campagne a été discrète mais s’est intensifiée lors des deux dernières semaines. Seul un candidat, dont le programme était axé essentiellement sur des questions socio-économiques, a critiqué ouvertement le président sortant, ce qui offrait un choix limité aux électeurs.

Le jour du scrutin, le processus électoral a été évalué positivement dans 95 % des bureaux de vote observés. Cependant, de nombreux observateurs n’ont pas été autorisés à vérifier les listes électorales et des signatures apparemment identiques ont été constatées dans 47 bureaux de vote. Le processus de dépouillement des bulletins a donné lieu à une évaluation négative dans 30 % des bureaux, ce qui témoigne d’importants problèmes. Quant à la présentation des résultats, elle a été évaluée négativement et considérée comme peu transparente dans 25 % des bureaux observés.

«Le 11 octobre, les électeurs ont pu effectuer leur choix de façon transparente en présence de nombreux observateurs nationaux et internationaux. Néanmoins, les processus de décompte des voix doivent être considérablement améliorés. Une élection ne se limite pas au jour du scrutin. Par conséquent, le Bélarus doit réformer son cadre juridique pour garantir un environnement politique réellement concurrentiel. C’est là une condition fondamentale pour la stabilité démocratique à long terme du pays», a déclaré Reha Denemeç, chef de la délégation de l’APCE. «L’APCE et la Commission de Venise du Conseil de l’Europe sont prêtes à coopérer avec le Bélarus à cet égard», a-t-il ajouté.

Au rang des éléments positifs, après la libération, en 2014, de plusieurs prisonniers politiques reconnus comme tels par la communauté internationale, le président a ordonné la libération des derniers de ces prisonniers au mois d’août dernier. Les institutions représentées au sein de la mission internationale d’observation des élections espèrent que ces libérations marqueront la fin de ce type de poursuites et cloront définitivement ce chapitre.

«Dans un contexte international particulièrement tourmenté, je salue le rôle constructif qu’a joué récemment le Bélarus en facilitant le dialogue concernant l’Ukraine. Aussi, il était essentiel que la communauté internationale s’intéresse de près à cette élection. Or, cette opportunité n’a pas été pleinement saisie», a déclaré Jim Walsh, Chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE. «Des améliorations considérables doivent encore être apportées, essentiellement en ce qui concerne la représentativité des commissions électorales et l’intégrité et la transparence des procédures de décompte des voix. Nous espérons que les autorités conserveront l’attitude constructive dont elles ont fait preuve envers nos missions dans la poursuite de notre objectif commun», a-t-il ajouté.

Le communiqué précise que, sur les 15 groupes ayant cherché à recueillir des signatures de soutien, la Commission électorale centrale (CEC) en a enregistré 8, puis a retenu 4 candidats. Tous les groupes ont pu recueillir des signatures dans le pays. Seules sont éligibles les personnes n’ayant pas été condamnées au pénal; des activités telles que la participation à des manifestations non autorisées peuvent entraîner le rétablissement de sanctions qui avaient été levées. La vérification des signatures n’a pas été suffisamment transparente, ce qui met en doute l’intégrité du processus.

Malgré un environnement médiatique restrictif, les candidats ont bénéficié d’une tribune pour exprimer leurs idées. Le suivi des médias a fait apparaître que l’importante couverture des activités du président en exercice dans le cadre de ses fonctions officielles a largement avantagé ce dernier en termes de visibilité. En outre, certains médias publics ont orienté leurs reportages de façon à véhiculer des messages politiques lui étant favorables. Tous les candidats ont bénéficié d’un accès libre aux médias publics et d’un temps de parole égal sur ces derniers, et ce sans censure, ce dont ils se sont félicités. De plus, les médias ont relayé des informations concernant les électeurs, et, le 3 octobre, un débat télévisé a été diffusé en direct, auquel tous les candidats, à l’exception du président en exercice, étaient représentés.

Tandis que, dans une initiative louable, l’un des ministres du gouvernement a démissionné pour mener la campagne du président en exercice, d’autres fonctionnaires et responsables de haut rang ont milité pendant leurs heures de travail en faveur de ce dernier, est-il mentionné dans le communiqué. Un certain nombre des manifestations organisées dans cet objectif ont eu lieu dans des entreprises publiques et certaines associations et institutions soutenues par l’Etat ont également fait campagne en faveur du président sortant, créant ainsi un terrain inéquitable et effaçant la frontière entre les intérêts partisans et l’Etat.

Malgré l’implication encourageante dont ont fait preuve les autorités depuis la dernière élection présidentielle, le cadre juridique reste inchangé pour l’essentiel. Ce dernier avait été préalablement jugé inadapté pour garantir la conduite d’élections conformes aux engagements de l’OSCE et à d’autres normes internationales, ont déclaré les observateurs. D’après ces derniers, certaines dispositions et lois en vigueur, datant entre autres de 2011 et de 2012, limitent les libertés fondamentales que constituent que la liberté d’association, de réunion et d’expression.

«Des travaux visant à améliorer le cadre électoral doivent être effectués; par ailleurs, les recommandations émises précédemment, notamment en ce qui concerne l’équilibre de l’administration électorale et les procédures relatives au jour du scrutin, ne sont toujours pas prises en compte. En outre, il est clairement nécessaire d’améliorer la transparence et l’indépendance de l’administration électorale», a déclaré l’Ambassadeur Jacques Faure, chef de la mission d’observation à long terme des élections du BIDDH de l’OSCE, ajoutant que les lois et le cadre électoral, en l’état actuel, restreignent les libertés fondamentales.

A la suite d’une invitation ouverte et sans réserve aux institutions d’observation, la CEC a fait preuve d’une attitude accueillante envers les observateurs internationaux. Cependant, l’absence de critères juridiques clairs et transparents pour la sélection des membres des commissions électorales de niveau inférieur a laissé aux autorités locales toute latitude dans le processus de nomination, qui n’a pas été inclusif. En outre, le système d’inscription des électeurs est excessivement permissif dans la mesure où il autorise les inscriptions le jour même du scrutin dans les bureaux de vote, sans garanties juridiques suffisantes.

Trois groupes d’observateurs indépendants constitués de citoyens ont mené des observations à long terme et publié leurs constatations régulièrement. Quelque 43 500 citoyens et plus de 900 observateurs internationaux ont été accrédités, y compris l’APCE, pour la première fois depuis 2001. Environ deux tiers des observateurs citoyens représentaient des associations publiques subventionnées par l’Etat. Les droits des citoyens et des observateurs internationaux sont très précisément prévus par la loi et ont fait l’objet d’une interprétation et d’une mise en œuvre restrictive. Enfin, les observateurs n’ont pas été autorisés à suivre tous les stades du processus.