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Avis de commission | Doc. 14024 | 19 avril 2016

Prévenir la radicalisation d’enfants en s’attaquant à ses causes profondes

Commission sur l'égalité et la non-discrimination

Rapporteure : Mme Gabriela HEINRICH, Allemagne, SOC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 13778, Renvoi 4134 du 22 juin 2015. Commission chargée du rapport: Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, voir Doc. 14010 et Addendum. Avis approuvé par la commission le 18 avril 2016. 2016 - Deuxième partie de session

A. Conclusions de la commission

(open)
1. La commission sur l’égalité et la non-discrimination félicite la rapporteure de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable pour son rapport et souscrit, dans l’ensemble, au projet de résolution proposé.
2. La commission présente néanmoins neuf amendements, qui visent à compléter et renforcer le projet de résolution.

B. Amendements proposés au projet de résolution

(open)

Amendement A (au projet de résolution)

Au paragraphe 3, première phrase, remplacer «renforcent la radicalisation religieuse» par «promeuvent l’exclusion et peuvent encore renforcer la radicalisation religieuse des enfants et des jeunes».

Amendement B (au projet de résolution)

Au paragraphe 4.1.2, après «en encourageant leur participation», ajouter «et à leur donner les outils pour adopter une approche critique de l’information et pour réfléchir attentivement à ce qu’ils lisent et à ce qu’on leur dit;»

Amendement C (au projet de résolution)

Après le paragraphe 4.1.2, ajouter le nouveau paragraphe suivant:

«à développer l’enseignement de l’histoire du fait religieux en insistant sur la dimension pacifique des religions, tout en sensibilisant les enseignants et en développant les programmes scolaires dans ce domaine.»

Amendement D (au projet de résolution)

Au paragraphe 4.2.1, après «à soutenir», ajouter «les familles de jeunes radicalisés ainsi que».

Amendement E (au projet de résolution)

A la fin du paragraphe 4.2.1, ajouter «afin de prendre en compte le nombre croissant de jeunes filles et de femmes radicalisées;».

Amendement F (au projet de résolution)

Après le paragraphe 4.2.1, insérer le nouveau paragraphe suivant:

«à développer des contre-discours en s’appuyant sur les témoignages de personnes ayant quitté les mouvements extrémistes ou terroristes.»

Amendement G (au projet de résolution)

Après le paragraphe 4.2.2, insérer le nouveau paragraphe suivant:

«à encourager les mosquées à adopter une approche plus axée sur la prévention, mettant en valeur l’islam en tant que religion pacifique, et à développer davantage leurs activités en matière de prévention, en particulier à l’égard des jeunes et s’agissant de la manière dont l’islam est présenté sur Internet;»

Amendement H (au projet de résolution)

Au paragraphe 4.4.1, après «la compréhension et le respect mutuels entre», insérer «et au sein des».

Amendement I (au projet de résolution)

Au paragraphe 4.4.2, après «à mener des campagnes», insérer «de sensibilisation et de prévention».

C. Exposé des motifs, par Mme Gabriella Heinrich, rapporteure pour avis

(open)
1. Les attaques terroristes qui ont ensanglanté plusieurs Etats membres du Conseil de l’Europe en 2014, 2015 et 2016 ont mis en lumière l’ampleur du phénomène de radicalisation menant au terrorisme. Les explications de ce phénomène sont complexes et nécessitent une analyse approfondie et objective afin de ne pas tomber dans le piège des idées reçues et des stéréotypes qui mènent tout droit vers la stigmatisation, la discrimination et la haine.
2. La forme de radicalisation qui est aujourd’hui l’objet de toutes les attentions est la radicalisation religieuse. Les récents attentats terroristes commis sur le territoire européen sont en effet revendiqués par leurs auteurs comme relevant du djihad. Il faut toutefois se souvenir qu’il existe d’autres formes de radicalisation que la radicalisation religieuse. Elle peut en effet être politique, comme cela était le cas dans les années 70 où la radicalité s’exprimait plutôt dans les mouvements d’extrême-gauche. Les mouvements d’extrême-droite en Europe peuvent également être vus comme une forme de radicalisation. De même, les attaques d’Utoya en Norvège en 2011 sont l’expression de la radicalisation politique de leur auteur, sans aucune dimension religieuse. Il existe également des mélanges entre la radicalisation religieuse et la radicalisation politique. De plus, les différents types de radicalisation sont interdépendants, de telle manière que la radicalisation religieuse peut mener à la radicalisation politique et vice-versa.

La discrimination et l’Islamophobie

3. Je voudrais exprimer mon soutien à la position de la rapporteure selon laquelle l’islamophobie peut parfois être un facteur aggravant dans certains engrenages menant au terrorisme. Lors d’une audition organisée en juin 2015 par l’Alliance parlementaire contre la haine et la commission des questions sociales, de la santé et du développement, le Professeur Tahir Abbas avait ainsi souligné les liens entre la radicalisation et l'islamophobie comme étant toutes deux la résultante du contexte social actuel. Il avait rappelé que les musulmans nés en Europe impliqués dans le djihadisme violent sont très peu nombreux et que «l’extrémisme est souvent une conséquence de la marginalisation et du désengagement, de ceux qui ne sont pas à même de faire entendre leur voix dans leur contexte social. Ceci vaut pour les musulmans, mais aussi pour d’autres groupes défavorisés 
			(1) 
			AS/Ega/Alliance (2015)
PV 03, Procès-verbal de l’audition organisée le 23 juin 2015 sur
le thème «Prévenir l’islamophobie dans la lutte contre la radicalisation
des jeunes».».
4. Dans son avis sur le rapport «Combattre le terrorisme tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l'Europe», la commission sur l’égalité et la non-discrimination avait également souligné que «l’approche politique en vue d’empêcher la survenance d’actes terroristes futurs est tout aussi cruciale que les réponses immédiates aux événements qui se sont déjà produits. Les réponses politiques à long terme doivent toujours être pensées en ayant à l’esprit qu’on ne peut parvenir à une cohésion durable, y compris un sentiment partagé d’appartenance à la nation, dans une société dont des pans importants de la population se sentent exclus ou victimes de discrimination. Le discours polémique stigmatisant des individus ou des groupes en raison de leur origine nationale ou ethnique, de leur religion, de leur couleur de peau, de leur nationalité ou de leur “race” supposée fait déjà beaucoup de mal au tissu de nos sociétés européennes 
			(2) 
			Doc. 13966, avis de commission (rapporteure: Mme Gülsün
Bilgehan, Turquie, SOC).». Ce phénomène peut être qualifié de néoracisme. Il se manifeste dans les Etats membres du Conseil de l’Europe sous différentes formes. L’une d’elle, le «racisme sans race», est, comparé au racisme traditionnel, «tout aussi délétère puisqu’il tend à justifier la discrimination envers certains groupes et individus 
			(3) 
			Résolution 2069 (2015) de l’Assemblée «Reconnaître et prévenir le néoracisme»
(rapporteure: Mme Milena Santerini, Italie,
SOC), paragraphe 1.».
5. Je pense qu’il est important de rappeler que les actes d’individus ne doivent pas être imputés et supportés par un groupe tout entier. Nous ne devons pas accepter l’idée d’une responsabilité collective pour des actes individuels. Pourtant, les amalgames perdurent. Bien que les attentats terroristes récents n’aient pas été suivis d’explosions de violence à l’égard de personnes de confession musulmane, une augmentation des actes anti-musulmans a toutefois été constatée. En France, les chiffres fournis en janvier 2016 par la Délégation interministérielle contre le racisme et l’antisémitisme (Dilcra) sur le nombre d’actes anti-musulmans a révélé une augmentation de 223 % entre 2014 et 2015. Il est d’ailleurs à signaler que les femmes musulmanes qui portent le voile sont parmi les premières victimes de ces actes.
6. Ce constat nous oblige à une grande vigilance et à un effort de pédagogie pour ne pas attiser la haine envers un groupe de la population et ne pas entrer dans un cercle vicieux qui aboutirait à plus de haine, plus de discrimination et plus de radicalisation en réaction. Tel est l’objectif de l’amendement que je voudrais proposer au paragraphe 3 du projet de résolution (amendement A).
7. Je voudrais souligner que les parlementaires ont une responsabilité particulière dans ce contexte en raison du grand pouvoir de communication et d’expression qui leur est donné dans les tribunes publiques et les médias. En tant que membre de l’Alliance parlementaire contre la haine, j’encourage ainsi vivement les membres de l’Assemblée parlementaire à rejoindre l’Alliance et à prendre position publiquement contre toutes les formes de racisme, d’intolérance et de haine.

Chiffres et portraits de jeunes radicalisés

8. Les chiffres varient sans cesse à la hausse s’agissant du nombre d’Européens partis rejoindre Daech en Syrie et en Irak. En France, 500 citoyens et résidents auraient participé à l’action militaire dans ces deux pays; ils seraient 750 provenant du Royaume-Uni 
			(4) 
			Doc. 13937, Rapport de la commission des questions politiques et
de la démocratie «Les combattants étrangers en Syrie et en Irak»
(rapporteur: M. Dirk Van der Maelen, Belgique, SOC), p. 9.. D’autres Etats membres du Conseil de l’Europe sont également touchés. Tel est par exemple le cas de la Bosnie-Herzégovine où plus de 200 citoyens bosniens auraient rejoint Daech 
			(5) 
			Rodolfo Toè, «Guerre
en Syrie: 70 enfants bosniens au côté de Daech», Courrier des Balkans, 10 février
2016. ou de la Fédération de Russie dont 4 000 ressortissants seraient en Syrie et en Irak auprès de Daech. Les portraits disponibles de ces personnes radicalisées montrent qu’il n’existe pas un profil unique. Toutefois, leur point commun est leur jeune âge: la plupart de ces Européens sont âgés de moins de 30 ans. Je me félicite ainsi que la rapporteure de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable ait inclus les jeunes adultes dans le champ d’étude de son rapport, sans le restreindre aux mineurs comme initialement envisagé.
9. Compte-tenu notamment du jeune âge de ceux qui sont les plus radicalisés, il est particulièrement important, en matière de prévention, d’apprendre aux enfants et aux adolescents à avoir une approche critique des informations qu’ils reçoivent. Il est tout aussi important de leur apprendre à nuancer les discussions (pour éviter la simplification excessive), ainsi qu’à réfléchir attentivement à ce qu’ils lisent et ce qu’on leur dit (amendement B).
10. Un politologue français, Olivier Roy, a décrit le phénomène actuel en parlant d’une «islamisation de la radicalité», par opposition à une prétendue «radicalisation de l’Islam». En ce sens, l’Islam n’apparaît que comme le «produit» disponible pour permettre l’expression de cette radicalisation. Les portraits de la plupart des jeunes passés à l’action terroriste montrent qu’ils ne s’intéressent généralement pas à la théologie, fréquentent peu les mosquées ou se sont convertis très peu de temps avant de se radicaliser 
			(6) 
			Voir en ce sens les
portraits contenus dans l’ouvrage de Marc Trévidic, «Terroristes
– les 7 piliers de la déraison», 2013.. Je suis pour ma part convaincue que l'identité religieuse n’est pas la cause directe de la radicalisation et que de nombreux jeunes radicalisés ne sont pas du tout croyants. Au contraire, une identité religieuse stable semble prévenir la radicalisation. Tout comme l’éducation religieuse dans les écoles et les autres institutions religieuses, les mosquées devraient être davantage encouragées à mettre en valeur la dimension pacifique des religions, tout en menant des activités dans le domaine de la prévention (amendement C).
11. Olivier Roy observe également qu’en Syrie ces djihadistes «ne font que la guerre: aucun ne s’intègre ou ne s’intéresse à la société civile. Et s’ils s’attribuent des esclaves sexuelles ou recrutent des jeunes femmes sur Internet pour en faire des épouses de futurs martyrs, c’est bien qu’ils n’ont aucune intégration sociale dans les sociétés musulmanes qu’ils prétendent défendre 
			(7) 
			Olivier Roy, «Le djihadisme
est une révolte générationnelle et nihiliste», Le Monde, 24 novembre 2015.». Dans son témoignage publié en janvier 2016, une jeune femme partie en Syrie décrit la mainmise de Daech sur la ville de Rakka en la qualifiant «d’armée d’occupation 
			(8) 
			Sophie Kasiki, «Dans
la nuit de Daech. Confession d’une repentie», 2016, p. 102ss.». Ces témoignages sont précieux et constituent certainement les meilleurs arguments pour dissuader des jeunes gens de rejoindre Daech.
12. Dans son avis sur le rapport «Combattre le terrorisme tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l'Europe», la commission sur l’égalité et la non-discrimination avait déjà observé que «la radicalisation, au sens où le sujet adopte des points de vue (quelque peu) extrêmes, conteste les normes de la société et a une attitude rebelle, est courante au sein de la jeunesse. De nombreux jeunes et moins jeunes adoptent des opinions religieuses fondamentalistes ou perçues par les autres comme telles. Toutefois, cela ne signifie pas qu’ils représentent un risque pour la société, autrement dit qu’ils chercheront à exprimer ces opinions par des moyens violents. La grande majorité des individus qui ont des opinions religieuses ultra-orthodoxes ou fanatiques ne sont pas et ne deviendront jamais des terroristes. Ce qui distingue les terroristes des autres personnes est que, d’une façon ou d’une autre, ils sont arrivés à la conclusion que le fait qu’ils commettent des actes violents (y compris des assassinats le cas échéant) dans le but de répandre la terreur est moins grave que le fait que d’autres personnes transgressent les principes qu’ils défendent 
			(9) 
			Doc. 13966, avis de commission (rapporteure: Mme Gülsün
Bilgehan, Turquie, SOC), p. 5.».
13. Le 11 mars 2016, la commission sur l’égalité et la non-discrimination a entendu le témoignage émouvant de Mme Véronique Roy Burin dont le fils est parti pour le djihad en Syrie en 2014 après s’être converti à l’Islam quelques années auparavant. A la suite de la mort de son fils en janvier 2016, Mme Roy Burin continue de participer à des campagnes de sensibilisation afin de contribuer à la prévention de la radicalisation des jeunes. Elle a expliqué à la commission qu’elle n’a remarqué ou compris les signes de radicalisation que très tard dans le processus et elle a souligné le sentiment d’abandon des familles qui se retrouvent seules face à ces situations. C’est pour cette raison que je voudrais proposer d’ajouter une référence explicite au besoin de soutien des familles dans le projet de résolution (amendement D).

Les femmes et la radicalisation menant au terrorisme

14. En tant que membre de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, je voudrais exprimer ma préoccupation face au nombre croissant de jeunes filles et de femmes radicalisées. Selon l’Institut pour le dialogue stratégique, 550 femmes occidentales se trouvent actuellement dans des zones contrôlées par Daech 
			(10) 
			«Becoming Mulan? Female
Western migrants to ISIS», Institute for Strategic Dialogue, 2015,
p. 8.. Elles représenteraient 10 % à 20 % des combattants étrangers dans certains pays 
			(11) 
			Sasha Havlicek et Farah
Pandith, «Comment nos filles deviennent des “califettes”», Le Monde, 28 janvier 2015.. Il s’agit souvent de jeunes filles d’environ 18 ans ou moins, certaines âgées de 15 ans à peine 
			(12) 
			Les
jeunes filles représentent la majorité (51) des 84 mineurs français
présents en Syrie (Le Monde,
3 mars 2016).. Ces femmes se rendent en Syrie seules ou bien avec leur mari, voire toute leur famille, emmenant parfois des enfants en bas âge 
			(13) 
			Dans son ouvrage intitulé
«Dans la nuit de Daech», Sophie Kasiki explique comment elle s’est
rendue à Raqqa en emmenant son fils de quatre ans. Elle a fui et
est revenue en France après deux mois passés en Syrie..
15. Lors de l’audition organisée par la commission sur l’égalité et la non-discrimination le 11 mars 2016, Mme Melanie Smith, chercheuse au Centre international d’études sur la radicalisation et la violence politique (ICSR) et à l’Institut pour le dialogue stratégique, a présenté ses travaux de recherche sur l’extrémisme féminin. Il ressort de ces recherches que les femmes radicalisées ne correspondent pas à un profil type 
			(14) 
			Till
Martyrdom Do Us Part: Gender and the ISIS Phenomenon, Erin Marie
Saltman et Melanie Smith, Institute for Strategic Dialogue, 2015,
p. 5.. Elles peuvent être originaires de la classe moyenne et ne pas avoir de lien fort avec l’Islam. Certaines se sont converties récemment; d’autres viennent de familles musulmanes modérées sur le plan religieux.
16. Ces femmes sont souvent recrutées via les réseaux sociaux, généralement par d’autres femmes, pour construire «le califat» de «l’Etat islamique» (Daech) c’est-à-dire devenir des épouses des combattants djihadistes et les mères de la future génération. Contribuer à la création d’un nouvel Etat apparaît être un facteur d’attraction pour des jeunes femmes, de même que la promesse de sororité avec d’autres femmes partageant les mêmes valeurs. Elles peuvent aussi partir pour des raisons humanitaires en vue d’aider leurs frères et sœurs syriens dans les hôpitaux. Il ne faut toutefois pas simplifier leurs motivations ni sous-estimer leur dangerosité. Il apparaît en effet qu’elles ont également un rôle d’incitation à la violence qui fait craindre des passages à l’acte terroriste de plus en plus fréquents.
17. La résolution récente de l’Assemblée parlementaire sur «Les combattants étrangers en Syrie et en Irak» a également exprimé l’inquiétude de l’Assemblée face à la proportion croissante de femmes et de jeunes femmes qui partent rejoindre Daech. L’Assemblée appelle les Etats membres et les observateurs et les Etats dont les parlements ont le statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire «à prendre dûment en compte le nombre croissant de femmes et de jeunes filles qui partent rejoindre Daech, à adopter une approche différenciée par sexe en matière de prévention et de réinsertion, à développer des contre discours ciblant plus particulièrement les femmes et les jeunes filles et à tirer pleinement parti du rôle social et familial des femmes dans la lutte contre l’extrémisme violent 
			(15) 
			Résolution 2091 (2016) sur les combattants étrangers en Syrie et en Irak, paragraphe
21.12.». Je voudrais me joindre à cette recommandation.
18. Les témoignages des femmes et jeunes filles revenues de Syrie et d’Irak doivent en effet être mieux utilisés dans les programmes de prévention. Tel est l’objectif des amendements E et F que je propose au projet de résolution. Les descriptions des conditions de vie, particulièrement dures pour les femmes qui se retrouvent souvent enfermées, sont de puissants contre-discours pour les jeunes filles et des femmes qui souhaitent partir en Syrie et en Irak, bien loin de l’idéal utopique mis en avant par Daech pour attirer de nouvelles recrues. Mme Melanie Smith a expliqué lors de l’audition organisée le 11 mars 2016 que les témoignages de femmes revenues rappellent que la Syrie et l’Irak sont des zones de guerre ce qui implique le manque de services de base avec des conséquences graves sur la santé, en particulier pour les femmes enceintes. De plus, rejoindre Daech est généralement un aller-simple et le retour est extrêmement difficile et dangereux.
19. S’agissant de la radicalisation religieuse, je suis d’avis qu’il est crucial qu’un dialogue soit engagé, non seulement entre les religions, par exemple les Musulmans et les Chrétiens, mais également au sein des communautés musulmanes et chrétiennes. Pour prévenir la radicalisation causée par le fanatisme religieux, les religions et leurs théologiens devraient initier le débat sur des questions telles que: le contenu religieux des grandes religions promeut-il le fanatisme ou la radicalisation religieuse? Je propose pour cette raison les amendements G, H et I.
20. Pour conclure, je voudrais citer le rapport publié le 14 mars 2016 par le International Crisis group qui souligne que: «Si les racines sont complexes, le catalyseur est évident. Le glissement de la plupart des révolutions arabes de 2011 vers le désordre ou le chaos a constitué une aubaine exceptionnelle pour les extrémistes. Les mouvements se sont renforcés au fur et à mesure que les crises s’envenimaient et évoluaient, tandis que l’argent, les armes et les combattants circulent, et que la violence s’intensifie. L’inimitié croissante entre les Etats conduit les puissances régionales à moins se soucier des extrémistes que de leurs rivaux traditionnels, à exploiter la lutte contre l’EI pour combattre leurs ennemis ou à se servir des jihadistes comme leur bras armé. Au Moyen-Orient, en particulier, la progression des jihadistes résulte plutôt de l’instabilité plutôt qu’il n’en est le moteur; est causée davantage par la radicalisation durant les crises que par une situation préexistante; et doit plus aux affrontements entre leurs ennemis qu’à leurs propres forces. Un mouvement jihadiste parvient rarement à se consolider ou à gagner du terrain en dehors d’une zone de guerre ou d’un Etat en déliquescence.» 
			(16) 
			International
Crisis Group, «Exploiter le chaos: l’Etat islamique et al-Qaeda»,
Rapport spécial Crisis Group, 14 mars 2016. Nous devons tirer les conséquences de ce constat: afin de prévenir efficacement l’extrémisme violent et la radicalisation menant au terrorisme, nous devons sans plus de délai investir dans la prévention des conflits.