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Avis de commission | Doc. 14361 | 28 juin 2017
Mettre fin aux violences sexuelles et au harcèlement des femmes dans l’espace public
Commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias
A. Conclusions de la commission
(open)1. La commission de la culture,
de la science, de l’éducation et des médias accueille favorablement
le rapport établi par Mme Françoise Hetto-Gaasch
(Luxembourg, PPE/DC) au nom de la commission sur l'égalité et la
non-discrimination. Elle partage l’idée directrice du rapport et
considère que la violence à l’égard des femmes, avec la violence
à l’égard des enfants, est un fléau que la société doit condamner
sans réserve et contre lequel elle doit combattre avec force et
détermination. Malheureusement, il semble que les efforts déjà consentis
n’aient pas été suffisants pour réduire l’ampleur du problème et
en éliminer les causes. Cela mérite une attention continue et particulière
de la part de tous les acteurs sociaux et il faut prendre des mesures concrètes
et déterminées pour obtenir des résultats.
2. La commission salue, de façon générale, le projet de résolution
soumis par la commission sur l’égalité et la non-discrimination.
Sur la suggestion du rapporteur pour avis, elle propose les amendements
ci-après, pour renforcer le texte sur des points précis qui relèvent
de son mandat.
B. Propositions d’amendements
(open)Amendement A (au projet de résolution)
Remplacer le paragraphe 7.5 par le paragraphe suivant:
«à prévoir des activités de sensibilisation sur le respect de la dignité humaine et le règlement non-violent des conflits, et plus précisément sur l’égalité des sexes, les stéréotypes sexuels et le rôle des femmes dans la société, dans les programmes de l’enseignement général, afin de traiter cette question de différents points de vue; et à développer des modules d’apprentissage ciblés sur, par exemple, les conséquences des violences sexuelles et du harcèlement sur les victimes, ou sur le comportement à adopter lorsqu’on est confronté directement ou indirectement à une agression contre les femmes; il faut mettre particulièrement l’accent sur des programmes visant à éduquer ou rééduquer les parents et améliorer leur approche ou compréhension de ce qu’est la violence à l’égard des femmes et pourquoi elle doit être éliminée;»
Amendement B (au projet de résolution)
Après le paragraphe 7.5, insérer le paragraphe suivant:
«à développer des méthodes d’enseignement et des activités scolaires qui contribuent à aborder les causes de la violence, en évitant également de reproduire des relations de pouvoir déséquilibrées et des stéréotypes fondés sur le genre, et donnent aux élèves des opportunités pour contrôler leurs tensions physiques et psychologiques de manière non-violente;»
Amendement C (au projet de résolution)
Après le paragraphe 7.5, insérer le paragraphe suivant:
«à fournir aux enseignants et au personnel scolaire une formation obligatoire pour qu’ils puissent: a) apprendre à repérer les victimes potentielles de violence (enfants victimes de mauvais traitements, témoins de disputes parentales); b) mieux comprendre les différentes formes de violence (physique, psychologique, verbale et comportementale); et c) apprendre à y faire face;»
Amendement D (au projet de résolution)
Après le paragraphe 7.5, insérer le paragraphe suivant:
«à veiller à la présence régulière dans les établissements scolaires de conseillers spécialisés, de médiateurs et/ou de psychologues, qui devraient être disponibles pour les élèves, leurs parents et leurs enseignants, et devraient être formés pour aider ceux qui ont connu la violence, qu’ils soient victimes, auteurs ou témoins;»
Amendement E (au projet de résolution)
Après le paragraphe 7.7, insérer le paragraphe suivant:
«à promouvoir un dialogue avec les fournisseurs de nouveaux produits ou de services de médias, comme les fournisseurs d’accès ou de services internet, fournisseurs de médias de téléphonie mobile et vendeurs de vidéos et de jeux vidéo, pour renforcer leur engagement dans la lutte contre les stéréotypes sexuels et la violence fondée sur le genre, à travers des mesures d’autorégulation appropriées ainsi que des mécanismes de contrôle et de plainte; à encourager une coopération renforcée des fournisseurs de nouveaux médias avec les gouvernements nationaux dans la lutte et l’interdiction de la diffusion dans les médias de contenu violent fondé sur le genre, y compris par des échanges d’informations et des réactions opportuns et rapides lorsque que des contenus sexuellement choquants sont mis en ligne;»
C. Exposé des motifs, par M. Stefan Schennach, rapporteur pour avis
(open)1. Introduction
1. Je tiens d’emblée à remercier
chaleureusement Mme Françoise Hetto-Gaasch
et la commission sur l’égalité et la non-discrimination pour le
rapport sur «Mettre fin aux violences sexuelles et au harcèlement
des femmes dans l’espace public», et pour l’analyse et les propositions
concrètes qu’il contient.
2. La violence à l’égard des femmes, et à l’égard des enfants,
est un fléau que la société doit condamner sans réserve et contre
lequel elle doit combattre avec force et détermination. Cela ne
peut passer uniquement par des mots et des déclarations et nous
devons prendre des mesures concrètes et déterminées pour obtenir des
résultats. Malheureusement, il semble que les actions déjà consenties
n’aient pas été appropriées pour réduire l’ampleur du problème et
en attaquer les causes. Aujourd’hui, il est triste de constater
qu’aucun pays ne peut vraiment considérer qu’il est à l’abri de
ce fléau, ce qui mérite une considération sérieuse.
3. Au-delà du bruit et de l’agitation que peuvent provoquer les
agressions les plus tragiques à l’égard des femmes – et ces agressions
sont en effet trop nombreuses dans nos pays –, je suis, et je crois
que nous devons être, profondément choqués par le fait que la violence
à l’égard des femmes dans l’espace public semble être un phénomène
de routine. L’été dernier, une vidéo choquante d’un Rom battant
sans raison sa femme en public en Albanie est devenue virale et
des enregistrements d’homélies d’imams controversés du Moyen-Orient
encourageant et énumérant les situations où le mari doit battre
sa femme ont été publiés de façon presque quotidienne, en particulier
sur les médias sociaux.
4. Les statistiques que Mme Hetto-Gaasch
signale dans son rapport montrent que non seulement la plupart des
femmes, et en particulier les jeunes femmes, ont déjà fait l’expérience
de la violence, mais encore que la plupart d’entre elles, du fait
d’un sentiment d’insécurité omniprésent, ont tendance à adapter
leur comportement et se sentent même obligées de le faire, en cherchant
à réduire la probabilité d’être confrontées (de nouveau) au comportement
déplaisant, insultant, sinon violent des hommes. De plus, les femmes
victimes de harcèlement sexuel finissent souvent par avoir l’amertume
de constater qu’on leur refuse l’accès à la justice, en raison même
des rapports de force existants et du fait qu’ils sont presque intrinsèquement
en faveur des hommes et non des femmes. Comme Mme Hetto-Gaasch
l’affirme de manière pertinente et concise dans son rapport, c’est
tout simplement inacceptable.
5. Je partage l’idée principale du rapport, qui est également
reprise dans les premières lignes du projet de recommandation: la
violence à l’égard des femmes est la manifestation d’un rapport
de force historiquement inégal entre les femmes et les hommes que
nous n’avons pas encore été capables de corriger; et nous ne pouvons
pas mettre un terme à la violence à l’égard des femmes sans réaliser
des changements essentiels de notre façon de penser.
6. Si nous, qui sommes des responsables politiques et des décideurs,
nous ne sommes pas capables d’agir de façon plus incisive pour empêcher
la violence à l’égard des femmes, peut-être ne valons nous pas mieux
que les personnes qui, lorsqu’elles sont témoins de ces formes si
fréquentes de violence psychologique et physique à l’égard des femmes,
n’osent pas intervenir et les laissent seules face à leur agresseur.
La violence à l’égard des femmes ne se limite pas aux couches de
la société dites fragiles. Il est déjà arrivé que des femmes occupant
des positions politiques fortes et influentes soient visées par
des propos, des actions ou des campagnes incendiaires et discriminatoires.
Avons-nous, nous autres responsables politiques, réagi, et réagi
autant qu’il le faudrait, pour prendre leur défense? Réagir lorsqu’il
y a une vague de protestations n’est pas suffisant; nous devons
constamment assumer notre responsabilité par le biais d’une stratégie
cohérente et globale et d’initiatives durables de long terme pour
soutenir le changement nécessaire de notre façon de penser.
7. Le rapport de Mme Hetto-Gaasch
traite de différents aspects du problème et du rôle de différents acteurs.
Je tiens à contribuer à cette analyse en ajoutant quelques considérations,
dans les deux chapitres à venir, sur deux questions évoquées dans
le rapport et qui sont de la compétence de la Commission de la culture,
de la science, de l’éducation et des médias. Il s’agit du rôle du
système éducatif et des médias dans la lutte contre la violence
à l’égard des femmes. En traitant de ces questions, je tiendrai
compte des travaux pertinents précédents de notre commission.
2. Lutter contre les violences sexistes à l’école par l’éducation
8. Il paraît évident que l’école
et le système éducatif en général devraient jouer un rôle de premier
plan dans la lutte contre les violences sexistes. En effet, l’école
est le lieu où nous devrions apprendre mais aussi commencer à mettre
en pratique les concepts fondamentaux de la dignité humaine, du
respect mutuel, et de l’égalité entre les femmes et les hommes.
L’école est le lieu où l’on doit nourrir l’esprit critique et où
les stéréotypes et les «a priori culturels» doivent être éliminés
– y compris les stéréotypes sexistes, sexuels et négatifs sur le
genre.
9. Comme l’indique le rapport de la commission sur l’égalité
et la non-discrimination, la Convention sur la prévention et la
lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique
(STCE no 210, Convention d’Istanbul)
prend en compte le rôle de l’éducation dans son article 14 selon
lequel: «Les Parties entreprennent, le cas échéant, les actions
nécessaires pour inclure dans les programmes d’étude officiels et à
tous les niveaux d’enseignement du matériel d’enseignement sur des
sujets tels que l’égalité entre les femmes et les hommes, les rôles
non stéréotypés des genres, le respect mutuel, la résolution non
violente des conflits dans les relations interpersonnelles, la violence
à l’égard des femmes fondée sur le genre, et le droit à l’intégrité
personnelle, adapté au stade de développement des apprenants (...)»
10. J’ajouterai que le Conseil de l’Europe souligne, depuis de
nombreuses années, le rôle essentiel de l’éducation dans la promotion
de l’égalité entre les femmes et les hommes (y compris en façonnant
des représentations, des attitudes et des comportements positifs
sur le genre) . Ce rôle
de l’éducation est une condition sine qua non pour parvenir à l’égalité
dans les faits entre les femmes et les hommes dans tous les domaines
de la vie en société.
11. L’éducation contre la violence est certainement la clé; nous
savons cependant que les écoles sont des espaces publics où se déroulent
des formes de violence, y compris des violences sexuelles ou fondées
sur le genre, de nature psychologique, physique ou sexuelle. De
telles violences reproduisent et contribuent à appliquer et à renforcer
les rapports de force déséquilibrés entre les sexes, les inégalités
de genre, les stéréotypes et les rôles imposés par la société.
12. À titre d’exemple, la Commission des femmes et de l’égalité
de la Chambre des Communes a réalisé au Royaume-Uni une enquête
sur le harcèlement et les violences sexuelles dans les écoles. Les
résultats sont fort préoccupants: il en ressort que les filles sont
harcelées, embrassées, tripotées, frappées et agressées sexuellement
dans les établissements de tout le pays. Un sondage à grande échelle
a montré qu’on a signalé à la police 5 500 infractions sexuelles
présumées (dont 600 viols) s’étant produites dans des écoles en l’espace
de trois ans, et qu’environ un tiers des jeunes filles de 16 à 18
ans avait déjà subi des «attouchements sexuels non désirés» dans
leur établissement .
13. Bien que je ne propose pas d’ajouter une recommandation en
ce sens, je tiens à dire que l’initiative de la Chambre des Communes
doit être saluée et que nos propres parlements devraient s’en inspirer
et lancer des enquêtes similaires. En effet, il est important d’être
conscient de l’ampleur du problème. Il ne s’agit pas de se faire
peur, mais on ne peut se contenter de faire l’autruche et de faire
comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes!
14. Bien sûr, même si nous nous concentrons ici sur les violences
sexuelles et fondées sur le genre, nous devons lutter contre toutes
les formes de violence à l’école car de nombreux jeunes garçons
sont aussi victimes de ces violences. Il va sans dire que lutter
contre les violences faites aux enfants à l’école est clairement
de notre responsabilité, mais je préciserai que, comme l’explique
le rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination,
les agresseurs sont souvent des personnes qui ont souffert de violences sexuelles
ou physiques pendant leur enfance. Si les violences à l’école entraînent
des effets négatifs en cascade, il faut donc éliminer la violence
à l’école et veiller à ce que les écoles soient des lieux sûrs pour
tous les enfants, ce qui contribuera certainement à réduire la violence
dans la société et la violence à l’égard des femmes en particulier.
15. Des mesures dans différentes directions sont nécessaires pour
éradiquer la violence à l’école, y compris pour associer les familles
à la lutte contre les violences sexuelles et fondées sur le genre,
à travers l’éducation de leurs enfants et des projets et initiatives
ciblés à l’école. Le rapport de notre commission «Éducation contre la
violence à l’école» et la Résolution 1803 (2011)qui en découle
donnent des lignes directrices détaillées dans ce domaine et il
est vraiment dommage que de tels textes n’aient pas eu de plus grandes
retombées sur les travaux de nos parlements. Même s’il n’est pas
opportun de rappeler toutes nos recommandations dans le cadre du
présent rapport, je crois qu’il pourrait être utile d’en reprendre
et d’en adapter quelques-unes pour élargir la proposition inscrite
à l’alinéa 7.5 du projet de résolution, qui appelle:
«7.5. à mener des actions spécifiques de prévention, notamment en développant des programmes scolaires d'éducation sexuelle et relationnelle, ainsi qu'un soutien au personnel éducatif chargé de les dispenser, dans le but d'informer les enfants sur l’égalité entre les femmes et les hommes, les stéréotypes de genre, l’impact des violences sexuelles sur les victimes et la notion de consentement.»
16. Plutôt que de suggérer des programmes scolaires d’éducation
sexuelle et relationnelle, je défendrais l’idée selon laquelle la
sensibilisation au respect de la dignité humaine et au règlement
non-violent des conflits dans les relations interpersonnelles, et
plus précisément aux questions d’égalité des sexes, des stéréotypes sexuels
et du rôle des femmes dans la société, devrait faire partie des
programmes de l’enseignement général et devrait être abordée sous
différents points de vues en classe, par exemple par l’histoire,
la littérature, l’art, la musique, le sport, la philosophie, la
religion ou l’éthique. Des modules d’apprentissage ciblés pourraient compléter
cette approche pour améliorer la compréhension, par exemple, des
conséquences des violences sexuelles sur les victimes ou des comportements
à adopter lorsqu’on est témoin d’une agression contre les femmes.
17. Il ne s’agit pas seulement d’informer, mais aussi de s’assurer
que les élèves comprennent et apprennent. Pour atteindre ce résultat
et pour mettre en œuvre ce que notre Assemblée a souligné dans la Résolution 1803 (2011), les méthodes et activités éducatives devraient:
- contribuer à s’attaquer aux causes de la violence, en évitant également que certains élèves se retrouvent isolés ou exclus;
- encourager la participation active des élèves et le travail en équipe, en prenant soin de les orienter vers une atmosphère collaborative saine et en évitant de reproduire le déséquilibre des rapports de force et les stéréotypes fondés sur le genre;
- donner la possibilité aux élèves de contrôler leurs tensions physiques ou psychologiques de manière non violente, par exemple par le biais d’activités sportives et/ou artistiques.
18. Cela pose également la question du soutien au personnel éducatif.
Dans ce domaine, je suggère d’être plus explicites et de recommander
que les enseignants et le personnel scolaire reçoivent une formation obligatoire
pour mieux comprendre les différentes formes de violence (physique,
psychologique, verbale et comportementale) et apprendre à y faire
face.
19. Enfin, en m’appuyant de nouveau sur la Résolution 1803 (2011), j’ajoute que le personnel scolaire devrait compter
des conseillers spécialisés, des médiateurs et/ou des psychologues,
qui devraient être disponibles pour les élèves, leurs parents et
leurs enseignants, et devraient être formés pour aider ceux qui ont
connu la violence, qu’ils soient victimes, auteurs ou témoins.
20. Sur la base de ces considérations, je propose cinq amendements
au projet de résolution.
3. Le rôle des médias dans la lutte contre les violences sexistes
21. Les médias sont un outil puissant
pour forger les perceptions de la société, ses idées, attitudes
et son comportement, et donc notre façon de penser. C’est pourquoi
il est si important qu’ils aillent dans le sens d’un renforcement
de l’égalité des sexes. Il est bon de rappeler que le Conseil de
l’Europe, et bien sûr notre Assemblée, travaillent sur le sujet
depuis de nombreuses années.
22. En juillet 2013, le Comité des Ministres a adopté la Recommandation
CM/Rec (2013)1 sur l’égalité entre les femmes et les
hommes et les médias. Même si le thème était plus général, les lignes
directrices figurant en annexe de cette recommandation font également
référence à la question des violences fondées sur le genre.
23. En particulier, la ligne directrice no 1
affirme que «(...) les États membres devraient adopter un cadre juridique
approprié visant à faire respecter le principe de la dignité humaine
ainsi que l'interdiction dans les médias de toute discrimination
fondée sur le genre et de toute incitation à la haine ou à toute
forme de violence fondée sur le genre».
24. La ligne directrice no 4 ajoute
que «les organismes de médias devraient être encouragés à adopter
des systèmes d’autorégulation, des codes de conduite, de déontologie
et de supervision internes, et à élaborer des normes pour une couverture
médiatique qui fasse la promotion de l’égalité entre les femmes
et les hommes, afin de promouvoir des politiques internes cohérentes
et des conditions de travail visant à (…) une image, un rôle et
une visibilité des femmes et des hommes sans stéréotypes, en évitant
les publicités sexistes ainsi qu’un langage et des contenus susceptibles
de favoriser les discriminations sexistes, l’incitation à la haine
et à une violence fondée sur le genre».
25. La trousse d’apprentissage pour un journalisme éthique dans
le domaine du genre de la WACC et de la FIJ (2012) souligne le rôle central joué
par les médias pour mettre fin à la violence fondée sur le genre
et affirme que: «Les reportages sur la violence à l’égard des femmes
portent une responsabilité d’autant plus importante (…), tout reportage
ne brisant pas le silence qui entoure fréquemment ces actes criminels
de viol, d’agression et de féminicide soutient le statu quo qui
minimise et justifie les répercussions de la violence, en plus de
mettre en danger les femmes partout ailleurs». Cependant, les observateurs
dénoncent un «parti pris sexiste» dans la représentation médiatique
des femmes, y compris le fait que la couverture des violences sexuelles
est souvent dédaigneuse ou aguicheuse .
26. Dans ce domaine, le paragraphe 7.7 du projet de résolution
paraît pertinent; il appelle «à engager un dialogue avec les médias
sur leur responsabilité à communiquer objectivement sur les violences
sexuelles et le harcèlement dans l’espace public et les inciter
à donner de la visibilité aux campagnes de sensibilisation et aux
associations œuvrant contre les violences faites aux femmes».
27. Cependant, je ferai la même remarque qu’à propos des écoles:
même si la contribution des médias à la lutte contre les violences
sexistes est essentielle, ceux-ci, et en particulier les médias
sociaux, sont des outils à travers lesquels de nombreuses personnes
continuent d’entretenir des stéréotypes sexuels et dont l’utilisation
est détournée pour exercer une violence psychologique et du harcèlement
en ligne fondé sur le genre. Le rapport de notre commission «Violence
véhiculée dans et par les médias» a traité, dans une certaine mesure,
ce problème et a souligné que la violence dans les médias peut prendre
différentes formes, allant de la violence implicite ou verbale à
la description de violences psychologiques ou physiques, y compris les
violences sexuelles.
28. Le rapport de la Commission des femmes et de l’égalité de
la Chambre des Communes, que j’ai cité plus haut, souligne que «[l]’accès
généralisé à la pornographie semble avoir des conséquences négatives
sur la perception du sexe, des relations et du consentement chez
les enfants et les jeunes. Il existe des preuves d’une corrélation
entre l’exposition fréquente des enfants à la pornographie et les
comportements néfastes. Le genre de pornographie auquel beaucoup
d’enfants sont exposés est souvent plus extrême que ne le pensent les
adultes» (paragraphe 204).
29. Dans le même esprit, notre rapport sur la «Violence véhiculée
dans et par les médias» se référait à des avis qualifiés selon lesquels
la possession d’images de sévices commis sur des enfants augmente
la probabilité que la personne visionnant ces images aille ensuite
commettre des crimes sexuels sur des enfants. Le même rapport analysait
également les conséquences des jeux vidéo violents et soulignait
qu’ils provoquent un comportement agressif de deux façons distinctes.
La première est la déshumanisation: le joueur nie le caractère humain
d’une autre personne, ce qui provoque un désengagement moral. Le
second mécanisme est la désensibilisation. Quand nous sommes témoins
d’un acte violent, nous réagissons de façon émotionnelle et physiologique,
mais ces réactions peuvent être désensibilisées: les enfants qui
jouent à des jeux vidéo violents possèdent moins d’empathie que
les enfants qui n’y jouent pas. Cela peut avoir des conséquences
majeures dans la vraie vie: des recherches ont montré que cela peut
nous rendre moins enclins à aider les personnes qui nécessitent
un secours.
30. La Résolution 2001
(2014) sur la violence véhiculée dans et par les médias comprend
de nombreuses recommandations pour limiter la violence dans les
médias, qui prennent en compte le rôle des fournisseurs de nouveaux
services ou produits médiatiques, comme les fournisseurs d’accès
et de services internet, les fournisseurs de médias de téléphonie
mobile ainsi que les vendeurs de vidéos et de jeux vidéo. Afin de
mettre un terme aux violences sexuelles et au harcèlement des femmes,
je propose d’inclure dans le projet de résolution une recommandation
spécifique demandant aux États membres d’encourager ces partenaires
à s’engager plus encore dans la lutte contre les violences fondées
sur le genre. Telle est la logique de la proposition d'amendement
E.
31. Pour conclure, j’espère que ces propositions seront considérées
comme constructives et soutenues par Mme Hetto-Gaasch
et la commission sur l’égalité et la non-discrimination.