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Résolution 2204 (2018)

Protéger les enfants touchés par des conflits armés

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 janvier 2018 (8e séance) (voir Doc. 14461, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, rapporteure: Mme Sevinj Fataliyeva). Texte adopté par l’Assemblée le 25 janvier 2018 (8e séance).

1. En Europe et dans le monde, des enfants sont touchés par des guerres et des conflits armés. Ils sont victimes de violences qui mettent leur vie en danger, ou sont témoins de telles violences; ils perdent leurs parents ou d’autres personnes qui s’occupent d’eux, ou en sont séparés; ils sont privés des services sociaux élémentaires, tels que la santé et l’éducation; ou ils sont recrutés comme enfants-soldats et ainsi contraints de participer eux-mêmes aux conflits.
2. Vu d’Europe, nombre de ces enfants semblent vivre dans des lieux très éloignés, qui sont hors de portée des acteurs européens, comme les enfants pris dans les situations de conflit terribles actuellement observées en Irak, en Syrie, au Yémen ou au Myanmar. Pourtant, beaucoup d’enfants vivent aussi dans des régions d’Europe en proie à des conflits dits «non résolus» ou «gelés» ou en situation de post-conflit. Quelle que soit la localisation géographique des conflits, tout pays européen est concerné d’une manière ou d’une autre, que ce soit en tant que membre d’organisation internationale compétente, que partie à des conflits en cours, que partenaire économique de parties en conflit ou que pays recevant des réfugiés en provenance des zones de conflit.
3. L’Assemblée parlementaire est très préoccupée par les conséquences à court et à long terme des conflits armés sur les enfants: ils sont directement touchés dans leur quotidien, dans leur développement physique et psychique et dans leur capacité à faire confiance aux autres êtres humains et aux institutions publiques. Beaucoup d’entre eux en seront traumatisés toute leur vie et verront leurs chances de réussite dans la vie diminuer. Les enfants qui vivent des conflits armés grandissent aussi dans l’idée que la violence est un moyen acceptable de régler les conflits avec d’autres pays ou d’autres groupes ethniques ou religieux, et ils risquent de reproduire ce comportement dans leur vie future.
4. Le droit international est très clair au sujet de la protection des enfants – tout mineur de moins de 18 ans – et de la nécessité de prendre prioritairement en considération leur intérêt supérieur en toutes circonstances (comme prévu par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CIDE)). Les enfants bénéficient de la protection générale des populations civiles et de la protection spéciale accordée par la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre de 1949 et son Protocole additionnel de 1977, comme le rappelle l’article 38.4 de la CIDE, qui appelle les États parties à prendre «toutes les mesures possibles dans la pratique pour que les enfants qui sont touchés par un conflit armé bénéficient d’une protection et de soins».
5. Au vu du décalage manifeste entre les obligations internationales et leur respect par tous les États parties, l’Assemblée appelle les États membres du Conseil de l’Europe:
5.1. à s’investir pour prévenir les conflits et éviter que les enfants y soient entraînés, à la fois par un dialogue politique continu et par la négociation, et en favorisant et en soutenant le développement pacifique durable des pays impliqués dans des conflits en cours ou menacés par l’éclatement d’un conflit;
5.2. à intervenir, à chaque fois qu’ils ont le pouvoir de le faire, pour mettre fin à des conflits en cours en rappelant aux parties aux conflits et à leurs partenaires leurs engagements internationaux, bilatéraux ou dans le cadre d’organisations multilatérales telles que les Nations Unies, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ou le Conseil de l’Europe, et en promouvant la résolution pacifique des conflits, de manière à éviter d’autres victimes innocentes dans les populations civiles, y compris parmi les enfants;
5.3. à éduquer les enfants et les jeunes qui ont vécu des conflits armés traumatisants aux approches non violentes pour mettre fin aux agressions et aux conflits, de manière à leur apprendre à résister à la transmission transgénérationnelle de la violence et à leur permettre de grandir dans une culture de dialogue constructive, utile pour surmonter les différences substantielles entre nationalités ou groupes ethniques, non seulement au moyen d’initiatives européennes prises par le Conseil de l’Europe ou l’OSCE dans leur travail de terrain auprès des jeunes, mais aussi par des approches plus bilatérales;
5.4. à renforcer les mécanismes et actions de protection et de soutien de l’enfance à tous les niveaux par les moyens suivants:
5.4.1. en élaborant des programmes d’aide sociale et en améliorant les conditions et opportunités socio-économiques pour les enfants et leur famille, à la fois dans les pays en conflit et dans les pays accueillant des réfugiés;
5.4.2. en facilitant l’action des organisations internationales et des organisations non gouvernementales (ONG) travaillant sur le terrain en leur apportant un soutien politique et financier correspondant aux besoins effectifs et aux normes internationales (par exemple en termes de nombre garanti de soignants pour un nombre donné d’enfants);
5.4.3. en assurant l’accès des organisations internationales et des ONG aux enfants dans le besoin, et la continuité des programmes dans les zones de conflit;
5.5. à soutenir les enfants-soldats et les autres enfants impliqués de façon active dans les conflits, et à les aider à se réadapter par les moyens suivants:
5.5.1. en les traitant comme des enfants et non comme des adultes délinquants tout au long des procédures;
5.5.2. en les confiant aux soins d’organismes de protection de l’enfance au lieu de les placer en détention, ce qui facilitera leur réinsertion dans la société, notamment dans le système éducatif normal, sur le marché du travail et dans la vie sociale;
5.5.3. en les intégrant, s’il y a lieu, à des actions de consolidation de la paix pour qu’ils puissent partager leurs expériences avec d’autres jeunes (tout en évitant la réactivation du traumatisme);
5.6. à accueillir et soutenir les enfants qui ont quitté les zones de conflit par les moyens suivants:
5.6.1. en apportant une assistance spécialisée aux enfants réfugiés, migrants et déplacés dans leur propre pays, qui ont vécu des situations violentes et traumatisantes, et aux enfants et adolescents de retour de territoires contrôlés par Daech, lorsqu’ils arrivent en lieu sûr, notamment dans différents pays européens, et en particulier en leur apportant une aide et un soutien psychologique, avec des thérapies adaptées au stress post-traumatique, le plus rapidement possible après leur arrivée dans un pays d’accueil;
5.6.2. en formant tous les professionnels qui prennent en charge les enfants réfugiés afin de ne pas réactiver les traumatismes vécus par ces enfants, de ne pas briser leurs mécanismes de protection personnelle et de les aider à se créer de nouvelles expériences de vie positives;
5.6.3. en assurant l’accès des enfants à la langue du pays d’accueil par des programmes d’intégration linguistique adaptés et spécifiques, mis en place par le pays d’accueil à très courte échéance;
5.6.4. en facilitant et en encourageant un accompagnement spécifique à la formation professionnelle des enfants réfugiés, migrants et déplacés dans leur pays, lorsqu’ils arrivent en lieu sûr, notamment dans un pays européen, afin de privilégier à terme une insertion économique et sociale de ces enfants dans le pays d’accueil;
5.7. à participer aux activités européennes concernant les enfants dans les conflits armés et à promouvoir les normes du Conseil de l’Europe existant dans ce domaine, comme la Stratégie du Conseil de l’Europe pour les droits de l’enfant (2016-2021), qui demande que les enfants soient protégés contre les violences, y compris lors de conflits armés, que des actions soient menées pour leur redonner confiance lorsqu’ils ont vécu de telles violences et que des procédures légales et administratives adaptées aux enfants soient mises en place.