Imprimer
Autres documents liés
Résolution 2206 (2018)
Immunité de juridiction des organisations internationales et droits des personnels
1. L’Assemblée parlementaire rappelle
sa Résolution 1979 (2014) sur
l’obligation des institutions internationales de répondre de leurs
actes en cas de violations des droits de l’homme, qui souligne que
les organisations internationales sont soumises aux obligations
relatives aux droits de l’homme.
2. L’Assemblée note que le droit de la fonction publique internationale
n’est pas codifié et que les litiges du travail sont tranchés conformément
aux normes régissant le fonctionnement de ces organisations internationales,
incluses dans les statuts ou les règlements de ces dernières, et
non pas conformément au droit national.
3. L’Assemblée note que les organisations internationales jouissent
d’une immunité juridictionnelle, qui est une immunité «de fonction»
ne pouvant être levée que dans des cas exceptionnels. Selon la jurisprudence constante
de la Cour européenne des droits de l’homme dans des affaires concernant
des litiges du travail opposant les agents aux organisations internationales,
la levée de cette immunité ne peut être envisagée que s’il n’existe
pas d’«autres voies raisonnables de protection» des droits des intéressés.
4. L’Assemblée souligne que les agents des organisations internationales
jouissent des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantis
par la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5,
«la Convention»), et notamment du droit d’accès à un tribunal et
à un procès équitable en cas de litige avec leurs employeurs (article
6 de la Convention) et du droit à la liberté d’association (article
11 de la Convention), et par la Charte sociale européenne (STE nos 35
et 163). Elle note, néanmoins, que le fonctionnement des organisations
internationales manque souvent de contrôle démocratique et médiatique,
ce qui permet d’occulter certains abus, notamment dans le cas de
litiges du travail.
5. L’Assemblée estime que les États membres du Conseil de l’Europe
devraient davantage surveiller le fonctionnement des organisations
internationales et réfléchir sur la question de savoir si les droits
de l’homme et les libertés fondamentales des agents sont respectés,
et notamment si le personnel dispose d’un accès à un «tribunal»
au sens de l’article 6 de la Convention.
6. Au vu de ce qui précède, l’Assemblée recommande aux États
membres du Conseil de l’Europe et aux organisations internationales
auxquelles ils sont parties:
6.1. d’instaurer,
au sein des organisations internationales, d’«autres voies raisonnables
de protection» juridique des droits des agents, conformément à l’article
6 de la Convention, dans tous les cas où de telles voies de recours
n’existent pas encore (en reconnaissant le cas échéant, tout particulièrement
pour les organisations les plus petites, la compétence de tribunaux
établis au sein d’autres organisations internationales);
6.2. d’assurer que ces voies sont aussi accessibles aux syndicats
ou autres groupes (comme les comités du personnel et les associations
du personnel) œuvrant pour la protection des droits des agents;
6.3. d’introduire des procédures d’appel contre les décisions
des juridictions internes des organisations internationales dans
les litiges du travail, idéalement en créant des tribunaux d’appel
– là où il n’en existe pas encore – pour les juridictions internes
bien établies (comme le Tribunal administratif de l’Organisation
internationale du travail (OIT) et le Tribunal administratif du
Conseil de l’Europe), dont la compétence serait aussi reconnue par
des organisations internationales plus petites;
6.4. d’assurer que les voies de recours internes, à tous les
niveaux, sont indépendantes et impartiales, qu’elles respectent
le principe de l’égalité des armes et rendent des décisions motivées,
et que ces mécanismes sont dotés de moyens pour fonctionner efficacement
et sans ingérence indue, afin que les décisions soient équitables
et prononcées dans un délai raisonnable;
6.5. d’assurer la transparence des travaux des organisations
internationales et de veiller à ce que les informations sur les
procédures relatives aux litiges du travail soient accessibles à
leur personnel.