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Avis de commission | Doc. 14535 | 24 avril 2018

Le statut des journalistes en Europe

Commission des questions juridiques et des droits de l'homme

Rapporteure : Mme Thorhildur Sunna ÆVARSDÓTTIR, Islande, SOC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 13970, Renvoi 4193 du 22 avril 2016. Commission chargée du rapport: Commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias. Voir Doc. 14505. Avis approuvé par la commission le 23 avril 2018. 2018 - Deuxième partie de session

A. Conclusions de la commission

(open)
1. La commission des questions juridiques et des droits de l’homme félicite la rapporteure de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, Mme Elvira Drobinski-Weiss (Allemagne, SOC) de son rapport et souscrit très largement au projet de résolution.
2. La commission propose quelques modifications qui visent à renforcer encore le projet de résolution sur le plan du droit, surtout en ce qui concerne le droit à la liberté d’expression et à la liberté d’association. Elle souhaite également mettre davantage l’accent sur la protection de la sécurité des journalistes et la nécessité de sanctionner les auteurs de meurtres de journalistes, compte tenu en particulier des récents assassinats de Daphne Caruana Galizia à Malte et de Ján Kuciak en République slovaque. Elle rappelle également qu’elle a traité de certains aspects de l’action des journalistes qui pourraient relever de la catégorie des «défenseurs des droits de l’homme» ou des «donneurs d’alerte» dans sa Résolution 2095 (2016) et sa Recommandation 2085 (2016) «Renforcer la protection et le rôle des défenseurs des droits de l'homme dans les États membres du Conseil de l'Europe» 
			(1) 
			Voir également le rapport
de Mme Mailis Reps (Estonie, ADLE), Doc. 13943., ainsi que dans sa Résolution 2060 (2015) et sa Recommandation 2073 (2015) «Améliorer la protection des donneurs d’alerte» 
			(2) 
			Voir également le rapport
de M. Pieter Omtzigt (Pays-Bas, PPE/DC), Doc. 13791..
3. Enfin, la commission observe l’étroitesse de la définition du journaliste donnée par le rapport et le projet de résolution. La mention dans la résolution de la protection de la liberté d’expression, y compris de la protection des sources, et de la prévention de l’impunité des auteurs de menaces et de représailles devrait correspondre à une approche plus large, téléologique, qui soit le reflet de la réalité actuelle de la manière dont les informations, les analyses et les commentaires sont générés et partagés publiquement, conformément à l’approche déjà adoptée notamment par le Comité des Ministres et le Comité des droits de l'homme des Nations Unies.

B. Amendements proposés

(open)

Amendement A (au projet de résolution)

À la fin du paragraphe 2, ajouter la phrase suivante:

«L’Assemblée observe toutefois que les changements technologiques ont également eu un impact positif sur le travail des journalistes, en particulier en facilitant les recherches, la communication et la création de réseaux internationaux et de bases de données de sources et travaux journalistiques accessibles dans le monde entier.»

Amendement B (au projet de résolution)

Remplacer le paragraphe 6.1 par le paragraphe suivant:

«de respecter pleinement leurs obligations positives nées de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme à l’égard de la liberté d’expression des journalistes et des autres acteurs des médias, et en particulier de leur droit de ne pas révéler leurs sources journalistiques et de leur droit à obtenir ou communiquer des informations;»

Amendement C (au projet de résolution)

Après le paragraphe 6.1, insérer le paragraphe suivant:

«de prendre toutes les mesures nécessaires pour renforcer la sécurité des journalistes et des autres acteurs des médias, pour mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris de nature judiciaire, administrative ou financière, dont ils sont victimes et pour mettre fin à l’impunité des auteurs d’agressions à leur encontre, notamment en menant des enquêtes effectives sur les meurtres et les autres infractions commises contre leur intégrité physique; à ce propos, il importe que les États membres du Conseil de l’Europe mettent en œuvre les lignes directrices énoncées en annexe à la Recommandation CM/Rec(2016)4 du Comité des Ministres sur la protection du journalisme et la sécurité des journalistes et autres acteurs des médias;»

Amendement D (au projet de résolution)

Remplacer le paragraphe 6.2 par le paragraphe suivant:

«6.2. de revoir leur législation nationale relative au statut des journalistes, en vue:
6.2.1. d’identifier d’éventuels éléments nécessitant une mise à jour, en tenant compte des évolutions technologiques et économiques récentes;
6.2.2. de veiller à ce que cette législation protège les journalistes contre les licenciements arbitraires ou les représailles et contre les conditions de travail précaires susceptibles de les exposer à des pressions indues qui les obligent à s’écarter de l’éthique et des normes journalistiques admises;
6.2.3. de donner une définition juridique des journalistes qui soit suffisamment large pour englober toutes les formes de travail journalistique actuelles, y compris sur internet;
6.2.4. d’abroger la législation disproportionnellement restrictive relative à la diffamation et de veiller à la présence de garanties procédurales adéquates dans les procédures en diffamation engagées à l’encontre des journalistes;»

Amendement E (au projet de résolution)

Au paragraphe 6.5, remplacer les mots «entre travailleurs et employeurs» par les mots «entre les salariés et les freelances, d’une part, et les employeurs, de l’autre».

Amendement F (au projet de résolution)

Après le paragraphe 6.5, ajouter le paragraphe suivant:

«de veiller au respect du droit des journalistes à la liberté d’association, en particulier pour ce qui est de leur adhésion aux syndicats et aux associations de journalistes;»

Amendement G (au projet de résolution)

Après le paragraphe 8, ajouter le paragraphe suivant:

«L’Assemblée appelle les États membres à soutenir la Plateforme pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes, en lui versant des contributions financières adéquates et en coopérant à son fonctionnement, en particulier en réagissant aux alertes et en participant aux suites qui leur sont données à l’initiative du Secrétaire Général.»

Amendement H (au projet de résolution)

Après le paragraphe 8, ajouter le paragraphe suivant:

«L’Assemblée condamne vivement l’assassinat des journalistes Daphne Caruana Galizia à Malte, Ján Kuciak en République slovaque et Maxim Borodin dans la Fédération de Russie. Elle appelle les autorités maltaises et slovaques à mener des enquêtes effectives sur ces décès, conformément aux garanties procédurales qui découlent de l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme.»

C. Exposé des motifs, par Mme Thorhildur Sunna Æversdóttir, rapporteure pour avis

(open)
1. Je ne peux que féliciter Mme Drobinski-Weiss de son rapport, qui souligne à juste titre les différences que présente le statut de journaliste dans les divers États membres du Conseil de l’Europe. Le rapport analyse la situation juridique des journalistes, y compris des journalistes freelances, dans un certain nombre de pays choisis et propose des moyens d’améliorer leurs conditions de travail.
2. J’aimerais toutefois proposer quelques amendements au projet de résolution, afin de renforcer sur le plan du droit certaines propositions relatives à l’amélioration du statut des journalistes et à leur droit à la liberté d’expression et d’association. En outre, bien que le rapport porte sur les conditions de travail des journalistes, je considère qu’il devrait également mentionner certains aspects de la sécurité des journalistes. Compte tenu des travaux antérieurs de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme sur ce sujet 
			(3) 
			Voir
plus haut les notes 3 et 4., j’aimerais proposer de mettre davantage l’accent sur la protection de la vie et de l’intégrité physique des journalistes et sur la nécessité de prévenir toute forme de harcèlement à leur encontre, ainsi que d’identifier et de punir les auteurs des assassinats de journalistes (vu en particulier le récent assassinat des journalistes Daphne Caruana Galizia à Malte et Ján Kuciak en République slovaque). Selon la Plateforme du Conseil de l’Europe pour la protection du journalisme et la sécurité des journalistes, 128 journalistes sont actuellement en détention et 14 décès de journalistes n’ont toujours pas été élucidés 
			(4) 
			Au 19 avril 2018, voir
sur: <a href='https://www.coe.int/fr/web/media-freedom'>https://www.coe.int/fr/web/media-freedom.</a>. Le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe a lui aussi fait part de ses préoccupations au sujet de la sécurité des journalistes dans son rapport de 2017 Situation de la démocratie, des droits de l’homme et de l’État de droit. Populisme – Le système de contre-pouvoirs est-il suffisamment puissant en Europe? (ci-après «le rapport de 2017 du Secrétaire Général»). Selon ce rapport, les journalistes subissent bien souvent des menaces, des violences ou d’autres restrictions de leur liberté d’expression et le nombre des représentants emprisonnés de cette profession «a atteint un chiffre sans précédent» 
			(5) 
			Page 35 du rapport.. Il importe par conséquent d’appeler les États membres à soutenir davantage la Plateforme pour la protection du journalisme et la sécurité des journalistes.
3. J’observe en outre l’étroitesse de la définition des journalistes retenue par le rapport et le projet de résolution. À cet égard, j’aimerais rappeler l’Observation générale no 34 du Comité des droits de l’homme des Nations Unies sur l’article 19 (liberté d’opinion et liberté d’expression) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui précise dans son paragraphe 44 que «le journalisme est une fonction exercée par des personnes de tous horizons, notamment des reporters et analystes professionnels à plein temps ainsi que des blogueurs et autres particuliers qui publient eux-mêmes le produit de leur travail, sous forme imprimée, sur l’Internet ou d’autre manière»; dans le même esprit, le Comité des Ministres a adopté en 2016 une Déclaration et une Recommandation 
			(6) 
			Recommandation CM/Rec(2016)4;
voir également la Recommandation CM/Rec(2011)7 du Comité des Ministres
sur une nouvelle conception des médias. sur la protection du journalisme et la sécurité des journalistes et autres acteurs des médias. Comme les blogueurs, par exemple, jouissent du même droit fondamental à la liberté d’expression que les journalistes «classiques» et représentent une source essentielle de reportages et de commentaires indépendants dans de nombreux pays où le contrôle des plus grandes entreprises des médias de masses est dominé par l’État et/ou par un éventail restreint d’intérêts privés puissants et qui se situent sur la même ligne politique, la protection de ces «autres acteurs des médias» est capitale pour la préservation du libre-échange des idées et du pluralisme politique et culturel sur lesquels repose une véritable démocratie. En outre, toute distinction entre «les journalistes professionnels», les blogueurs et les autres acteurs des médias n’est ni nette, ni permanente: Daphne Caruana Galizia, par exemple, a publié des articles de journalisme d’investigation sur son blog privé. La mention, dans la résolution, de la protection de la liberté d’expression, y compris de la protection des sources 
			(7) 
			Plusieurs juridictions
ont reconnu le droit des blogueurs à protéger leurs sources, notamment
la Haute Cour irlandaise (Cornec c. Morrice et Ors [2012] IEHC 387),
la Haute Cour néo-zélandaise (Slater c. Blomfield, [2014] NZHC 2221)
et la cour d'appel de Californie (O’Grady c. Superior Court (Apple),
139 Cal.App. 4th 1423). L'ONG Article 19 estime que les blogueurs
«devraient pouvoir invoquer le droit à protéger leurs sources au
même titre que les journalistes professionnels»; voir «The Right
to Blog: Policy Brief», 2013., et de la prévention de l’impunité des auteurs de représailles devrait correspondre à une approche plus large, téléologique, qui soit le reflet de la réalité actuelle. De même, les donneurs d’alerte (comme Edward Snowden et Chelsea Manning), dont le statut juridique est assez fragile et qui font souvent l’objet de persécutions, devraient également bénéficier des mêmes considérations que les journalistes eux-mêmes, puisqu’ils représentent d’importantes sources journalistiques.
4. En outre, deux autres questions ne sont pas abordées par le projet de résolution et pourraient être traitées par le projet de rapport. J’espère que la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias les examinera en détail à une autre occasion. L’une d’elle est la question de l’anonymat des contributeurs extérieurs mentionnés aux paragraphes 41 et 85 du rapport. Celui-ci ne précise pas clairement qui devrait «s’interroge[r] sur l’anonymat de certains contributeurs pour s’assurer au mieux de leur identité [et] dresse[r] clairement la limite entre information journalistique et communication ou propagande» (paragraphe 41). Bien qu’il importe de lutter contre la propagation des fausses informations et la propagande, cette démarche ne doit pas être entreprise aux dépens du droit des personnes au respect de leur vie privée. L’Assemblée ne devrait pas encourager les États membres du Conseil de l’Europe à commencer à révéler l’identité de chaque contributeur anonyme sous prétexte de préserver la crédibilité de la presse. L’autre question est celle de la diversification des formations proposées par les organisations professionnelles de journalistes (paragraphe 95). À ce propos, il convient également d’examiner la sécurité des données. Les organisations de journalistes pourraient ainsi privilégier, par exemple, les questions suivantes: quelles mesures les journalistes devraient-ils prendre pour préserver la sécurité de leurs données? Comment devraient-ils protéger leurs sources, y compris les donneurs d’alerte? Que pourraient-ils faire eux-mêmes pour assurer leur propre sécurité?

1. Notes explicatives

Amendement A (au projet de résolution)

Le présent amendement vise à mettre l’accent sur les évolutions positives de l’ère du numérique pour les journalistes. Les nouvelles technologies ne représentent pas seulement une menace pour la liberté d’expression et la profession de journaliste, elles offrent également de nouvelles opportunités. Ainsi, les recherches journalistiques sont devenues beaucoup plus faciles, car une immense quantité d’informations est désormais plus aisément et immédiatement accessible. En outre, les journalistes ont la possibilité de communiquer plus facilement entre eux et avec leurs sources. Les réseaux internationaux de journalistes et les bases de données de sources et travaux journalistiques accessibles dans le monde entier sont devenus une réalité et permettent un journalisme collectif à un niveau totalement nouveau, comme le Consortium international de journalistes d’investigation, qui a travaillé sur les «Panama Papers» et les «Paradise Papers», et le projet Signalement de la criminalité organisée et de la corruption, qui a divulgué l’affaire de blanchiment «Laundromat».

Amendement B (au projet de résolution)

Cet amendement vise à reformuler légèrement le paragraphe 6.1 et à séparer la question de la protection des sources journalistiques 
			(8) 
			Voir par exemple Goodwin c. Royaume-Uni, Requête
no 28957/95, arrêt du 27 mars 1196; Voskuil c. Pays-Bas, Requête no 64752/01,
arrêt du 22 novembre 2007, ou Becker
c. Norvège, Requête no 21272/12,
arrêt du 5 octobre 2017, dans lesquels la Cour européenne des droits
de l'homme a conclu à la violation de l'article 10 de la Convention européenne
des droits de l'homme. de celle de la sécurité des journalistes et des autres acteurs des médias (il est proposé de tenir compte de cette dernière dans un amendement distinct, voir l’amendement C). La Cour européenne des droits de l’homme a souligné à de nombreuses reprises que la protection des sources journalistiques était une condition essentielle de la liberté de la presse. L’amendement propose également de mentionner le «droit à obtenir ou communiquer des informations», qui est capital pour le travail des journalistes 
			(9) 
			Voir par exemple Görmüş et autres c. Turquie, arrêt
du 19 janvier 2016, paragraphes 40-45.. Il est par ailleurs proposé de remplacer les termes «professionnels des médias» par «journalistes et autres acteurs des médias», puisque le projet de résolution et le rapport de Mme Drobinski-Weiss (voir en particulier sa partie 2.1) portent sur «le statut des journalistes» et qu’il importe d’étendre la protection proposée aux autres acteurs pertinents des médias, comme le fait la Recommandation CM/Rec(2016)4 du Comité des Ministres.

Amendement C (au projet de résolution)

Cet amendement vise à prendre en compte la question de la sécurité des journalistes et des autres acteurs des médias dans un sous-paragraphe distinct. En outre, nous proposons de souligner la nécessité de prévenir toute forme de harcèlement des journalistes de nature judiciaire, administrative ou financière et de mener des enquêtes effectives sur leur assassinat et les autres infractions commises contre leur intégrité physique. À ce propos, il convient également de rappeler la Recommandation CM/Rec(2016)4 du Comité des Ministres. En annexe à cette recommandation figurent des lignes directrices qui précisent les mesures que les États membres du Conseil de l’Europe pourraient prendre pour garantir la sécurité des journalistes et des autres acteurs des médias. Ces lignes directrices portent sur quatre points essentiels: la prévention, la protection, les poursuites (y compris en mettant l’accent sur la lutte contre l’impunité) et la promotion de l’information, l’éducation et la sensibilisation; elles proposent des recommandations précises à l’intention des États membres pour leur permettre de respecter leurs obligations pertinentes dans chaque point essentiel.

Amendement D (au projet de résolution)

Cet amendement vise à amener les États membres à prendre des éléments supplémentaires en considération lorsqu’ils revoient leur législation nationale relative au statut des journalistes. Nous proposons par conséquent de conserver les mots «identifier d’éventuels éléments nécessitant une mise à jour, en tenant compte des évolutions technologiques et économiques récentes» et de les insérer dans un nouveau paragraphe.

En outre, il serait utile de souligner au paragraphe 6.2.2 que, lorsqu’ils revoient leur législation, les États membres devraient également tenir compte de la question de la protection des journalistes contre «les licenciements arbitraires ou les représailles et contre les conditions de travail précaires susceptibles de les exposer à des pressions excessives qui les obligent à s’écarter de l’éthique et des normes journalistiques admises», comme le soulignent les lignes directrices jointes en annexe à la Recommandation CM/Rec(2016)4 
			(10) 
			Voir le paragraphe
2 de l'annexe à la Recommandation CM/Rec(2016)4 (sous la rubrique
«Prévention»).. La question de la fourniture d’un cadre juridique stable pour le travail des journalistes a été amplement examinée dans le rapport de Mme Drobinski-Weiss (voir la partie 3.3) et mérite d’être mentionnée dans la résolution. Comme l’a souligné le rapport susmentionné du Secrétaire Général de 2017, l’ingérence arbitraire dans le travail des professionnels des médias, les restrictions d’agrément, la censure ou l’autocensure restreignent également la liberté des médias 
			(11) 
			Page 46 du rapport.
Voir également les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
dans lesquels elle a conclu à la violation de l'article 10 du fait
des sanctions infligées aux journalistes par leurs employeurs (respectivement licenciement
et blâme): Fuentes Bobo c. Espagne, Requête
no 39293/98, arrêt du 29 février 2000,
et Wojtas-Kaleta c. Pologne, Requête
no 20436/02, arrêt du 16 juillet 2009..

S’agissant du paragraphe 6.2.3, la question de la définition de la profession de journaliste représente le principal sujet du rapport (voir en particulier les parties 2.1 et 5.1). Bien que la rapporteure n’insiste pas fortement sur cette idée et souligne que l’essence de la profession réside dans ses activités et non dans sa définition, elle estime que «(…) une définition juridique des journalistes peut être utile pour protéger leurs droits (y compris le droit au secret des sources d’information), mais aussi pour opérer une distinction claire entre un journaliste professionnel et un bloggeur. Il pourrait être utile que, dans les pays où il n’y a pas de définition juridique du journaliste, les législateurs se penchent sur cette question» 
			(12) 
			Doc. 14505, paragraphe 79. . Compte tenu de cette proposition de la rapporteure, il serait donc souhaitable de la mentionner dans la résolution et de recommander à certains États membres de réfléchir à une définition du «journaliste» qui soit suffisamment large pour englober toutes les formes de travail journalistique, y compris sur internet (comme certaines catégories de bloggeurs qui ont souvent plus de lecteurs que les médias classiques, et dont Mme Caruana Galizia 
			(13) 
			De nombreux membres
de l'Assemblée, dont moi-même, ont déposé une proposition de résolution
qui appelle à l'élucidation de cet assassinat; voir le Doc. 14479, «L’assassinat de Mme Daphne
Caruana Galizia et l’État de droit, à Malte et ailleurs: veiller
à ce que toute la lumière soit faite». est un exemple tragique).

S’agissant du paragraphe 6.2.4, nous proposons également d’abroger la législation disproportionnellement restrictive en matière de diffamation. Dans certains États membres, notamment en Azerbaïdjan et en Islande, le droit pénal prévoit que la diffamation est passible de peines d’emprisonnement. Même si cette législation n’est pas systématiquement appliquée, elle restreint la liberté d’expression. En outre, en cas d’engagement d’une procédure en diffamation, il importe que les garanties procédurales soient suffisantes pour permettre aux journalistes de jouir de leur droit à un procès équitable consacré à l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5).

Amendement E (au projet de résolution)

Cet amendement vise principalement à remplacer le mot «travailleurs», qui n’est pas adapté aux journalistes, par «employés et freelances». Comme l’explique Mme Drobinski-Weiss dans son rapport, l’externalisation des contrats de travail a considérablement augmenté le nombre de journalistes contraints d’exercer leur profession en qualité de soi-disant «freelances». En dépit du fait que leur statut juridique diffère de celui des journalistes salariés prévu par les dispositions du droit du travail, ils travaillent souvent dans les mêmes conditions que les salariés à plein temps. Il importe d’inclure également cette catégorie de journalistes dans le dialogue avec les «employeurs».

Amendement F (au projet de résolution)

Cet amendement vise à ajouter un nouveau paragraphe pour mettre l’accent sur le droit d’association des journalistes, que consacre l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme. Toute définition du statut de cette profession devrait tenir compte de l’existence de ce droit et le rapport de Mme Drobinski-Weiss souligne à juste titre le rôle des syndicats et/ou des organisations professionnelles.

Amendement G (au projet de résolution)

Cet amendement vise à rappeler l’existence de la Plateforme du Conseil de l’Europe pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes, lancée en avril 2015. Il importe que l’Assemblée appelle les États membres à soutenir davantage la Plateforme, en lui versant des contributions financières adéquates et en coopérant à son fonctionnement, en particulier en réagissant aux alertes et en participant aux suites qui leur sont données à l’initiative du Secrétaire Général.

Amendement H (au projet de résolution)

Cet amendement vise à condamner le récent assassinat de Daphne Caruana Galizia à Malte, de Ján Kuciak en République slovaque et de Maxim Borodin dans la Fédération de Russie et à appeler les autorités nationales compétentes à mener des enquêtes effectives sur leur décès. Le Comité des Ministres a récemment répondu à une question écrite de notre collègue, M. Pieter Omtzigt (Pays-Bas, PPE/DC) sur l’assassinat de Mme Ms Caruana Galizia. Le Comité des Ministres a reçu à deux reprises des informations sur l’enquête judiciaire en cours à Malte et «ne voit aucune raison de prendre des mesures supplémentaires». Il est «certain que les autorités maltaises continueront d’utiliser de manière appropriée les moyens et mécanismes existants au Conseil de l’Europe et au niveau national, dans le plein respect des valeurs et standards fondamentaux du Conseil de l'Europe» 
			(14) 
			Réponse du Comité des
Ministres à la Question écrite no 727
(Doc. 14469), Doc. 14515 du 22 mars 2018.. Dans l’intervalle, un grand nombre de membres de l’Assemblée, dont moi-même, ont déposé une proposition de résolution qui appelle à l’élucidation de l’assassinat de Mme Caruana Galizia 
			(15) 
			«L’assassinat de Mme Daphne
Caruana Galizia et l’État de droit, à Malte et ailleurs: veiller
à ce que toute la lumière soit faite», Doc. 14479. et le Bureau a décidé de saisir notre commission pour rapport 
			(16) 
			Renvoi
4366 du 16 mars 2018. . Comme l’élaboration de ce rapport pourrait prendre un certain temps, il importe d’appeler une nouvelle fois les autorités maltaises à veiller à ce qu’une enquête effective soit menée sur la mort de cette journaliste. En outre, il est également indispensable de condamner l’assassinat de Ján Kuciak, qui a eu lieu le 21 février 2018, et l’assassinat récent de Maxim Borodin et d’appeler les autorités à mener une enquête effective sur ces événements tragiques.