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Rapport d’observation d’élection | Doc. 14564 | 31 mai 2018

Observation de l’élection présidentielle au Monténégro (15 avril 2018)

Rapporteur : M. Jonas GUNNARSSON, Suède, SOC

1. Introduction

1. Le 19 janvier 2018, le président du Parlement du Monténégro, M. Ivan Brajović, a fixé la date de l’élection présidentielle au 15 avril 2018. Le même jour, il a adressé à l’Assemblée parlementaire une invitation à observer le scrutin. Au cours de sa réunion du 22 janvier 2018, le Bureau de l’Assemblée a décidé de constituer une commission ad hoc composée de 12 membres issus des différents groupes politiques de l’Assemblée selon le système D’Hondt (PPE/DC: 3, SOC: 3, CE: 2, ADLE: 2, GUE: 1, GDL: 1), ainsi que des deux corapporteurs de la commission de suivi. Lors de sa réunion du 26 janvier 2018, le Bureau a approuvé la composition de la commission ad hoc et nommé M. Jonas Gunnarsson (Suède, SOC) à la tête de la délégation. La liste des membres figure à l’annexe 1.
2. Conformément à l’accord de coopération signé entre l’Assemblée parlementaire et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) le 4 octobre 2004, un représentant de la Commission de Venise a été invité à se joindre à la commission ad hoc en qualité de conseiller juridique.
3. La commission ad hoc s’est rendue au Monténégro du 13 au 16 avril 2018 pour observer l’élection présidentielle du 15 avril. Elle est intervenue dans le cadre d’une mission internationale d’observation électorale (MIOE), aux côtés de délégations du Parlement européen et de la mission d’observation électorale du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE/BIDDH) présente dans le pays depuis le 7 mars 2018. Le programme des réunions de la délégation est reproduit à l’annexe 2.
4. Le jour du scrutin, la commission ad hoc de l’Assemblée s’est scindée en huit équipes qui ont observé le déroulement de l’élection à Podgorica et dans ses environs, ainsi que dans les régions et municipalités de Nikšić, Danilovgrad, Cetinje, Bar, Ulcinj, Tivat et Kotor. La commission ad hoc a conclu que l’élection présidentielle tenue le 15 avril 2018 au Monténégro a respecté les libertés fondamentales, que le scrutin a été bien organisé, et que les électeurs avaient le choix entre un large éventail de candidats. Concernant la campagne électorale, des cas d’utilisation abusive des ressources publiques et des allégations crédibles de pressions exercées sur les électeurs en faveur du candidat du parti au pouvoir ont été signalés. La commission ad hoc a souligné qu’il s’agissait hélas de problèmes récurrents au Monténégro, au même titre que les allégations crédibles d’achat de voix et de recrutement d’agents publics en période électorale. L’absence du candidat du parti au pouvoir lors des deux débats télévisés a nui à la capacité des électeurs à faire un choix éclairé. Le communiqué de presse publié par la mission internationale d’observation électorale fait l’objet de l’annexe 3.
5. La commission ad hoc tient à remercier les autorités et le Parlement monténégrins, ainsi que le Bureau de Programme du Conseil de l’Europe à Podgorica pour le soutien apporté à la délégation, mais aussi la mission d’observation de l’OSCE/BIDDH pour son excellente coopération.

2. Contexte politique et cadre juridique

6. Il s’agissait du troisième scrutin présidentiel organisé dans le pays depuis son indépendance en juin 2006. L’Assemblée parlementaire a observé toutes les élections présidentielles et législatives tenues au Monténégro depuis 2001.
7. Le 17 décembre 2010, l’Union européenne a accordé au Monténégro le statut officiel de pays candidat. Le 27 janvier 2015, l’Assemblée a décidé de clore la procédure de suivi et d’engager un dialogue post-suivi, tout en soulignant dans le même temps que la procédure de suivi serait rouverte si le pays ne parvenait pas à mener à bien une série de réformes concernant le processus électoral, l’indépendance du pouvoir judiciaire, la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, et la situation des médias 
			(1) 
			Voir la Résolution 2030 (2015) et le Doc.
13665 sur le respect des obligations et engagements du Monténégro..
8. Le Monténégro est doté d’un système politique mixte, présidentiel et parlementaire, les deux institutions étant élues au suffrage universel. Le président est élu pour un mandat de cinq ans et ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. Le président sortant, M. Filip Vujanović (Parti démocratique des socialistes, DPS), avait été réélu au premier tour de l’élection présidentielle de 2013, avec 51,2 % des voix. Le candidat indépendant, Miodrag Lekić, soutenu par tous les partis d’opposition, n’avait pas reconnu les résultats en raison d’accusations de fraude électorale.
9. Dans son rapport sur l’observation des élections de 2013, l’Assemblée a conclu que le jour du scrutin, les citoyens du Monténégro ont fait librement leur choix entre les deux candidats présidentiels, ajoutant qu’en pratique, certaines améliorations devaient encore être apportées afin de garantir un processus électoral sans utilisation abusive des ressources de l’État.
10. Lors des élections législatives d’octobre 2016, le DPS a remporté 36 des 81 sièges. Avec l’appui des sociaux-démocrates et des partis des minorités, ils ont conservé la majorité parlementaire dont ils jouissent depuis 1991. Après les élections, Milo Đukanović 
			(2) 
			M. Đukanović a occupé
le poste de Premier ministre pendant 17 ans et celui de Président
du Monténégro pendant près de cinq ans de janvier 1998 à novembre 2002,
étant l’un des plus anciens dirigeants en exercice en Europe depuis
la chute du communisme., un dirigeant politique de longue date, s’est retiré volontairement du gouvernement, cédant le poste de Premier ministre à son adjoint, Duško Marković.
11. Dans son rapport sur l’observation des élections législatives de 2016, l’Assemblée a relevé les défaillances suivantes: des allégations de corruption, de nouvelles accusations d’utilisation abusive de ressources administratives, des manœuvres d’intimidation du parti au pouvoir ainsi que l’achat de voix et des financements étrangers de part et d’autre. Le manque d’exhaustivité de la législation électorale, les prétendues inexactitudes du registre électoral et l’absence d’examen critique de la part des médias ont également été sources de préoccupation.
12. La période post-électorale a été marquée par des tensions politiques, tous les partis d'opposition ayant refusé de reconnaître les résultats et boycotté le parlement, faisant état de corruption généralisée et d’irrégularités dans le processus électoral. Ils ont également demandé la conduite immédiate d’une enquête approfondie sur les allégations d’abus ainsi que le règlement de l’affaire qualifiée de «tentative de coup d’État» le jour du scrutin 
			(3) 
			Voir le Doc. 14203, rapport sur l’observation des élections législatives
au Monténégro (16 octobre 2016), et document AS/Mon (2017) 31..
13. Le 5 juin 2017, malgré les nombreuses manifestations organisées durant le processus d’adhésion et le boycott continu du parlement par l’opposition, le Monténégro a rejoint l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). Ce débat sur l’adhésion à l’OTAN et, plus largement, sur l’alignement international du pays, s’est poursuivi au cours de l’actuelle campagne présidentielle.
14. En décembre 2017, 21 membres de l’opposition (18 du Front démocratique, 2 du parti Monténégro uni et 1 indépendant) sont revenus au parlement mais n’ont pas participé au processus législatif. Le 19 janvier, conformément à la Constitution, le président du parlement a annoncé la tenue de l’élection présidentielle le 15 avril.
15. Le Monténégro est doté d’un système politique mixte, présidentiel et parlementaire, les deux institutions étant élues au suffrage universel. Le Président du Monténégro est élu au suffrage universel, direct et égal et au scrutin secret, dans une circonscription nationale unique, pour un mandat de cinq ans. Il ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. Un candidat doit recueillir au moins la moitié des suffrages exprimés pour être élu au premier tour. À défaut, un deuxième tour est organisé dans les 14 jours entre les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix.
16. La commission ad hoc rappelle que le Monténégro a signé et ratifié la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5) et son protocole additionnel (STE no 9) qui consacrent un certain nombre de principes essentiels pour une démocratie effective et véritable, tels que le droit à des élections libres (article 3 du Protocole additionnel), la liberté d'expression, la liberté de réunion et d'association, ainsi que l'interdiction de discrimination (articles 10, 11 et 14 de la Convention).
17. La Constitution, la loi relative à l'élection du Président du Monténégro 
			(4) 
			La
loi relative à l'élection du Président du Monténégro (Journal officiel de la République du Monténégro,
nos 17/07, 8/09 et 12/16). (loi sur l’élection présidentielle) et la loi sur l’élection des conseillers et des représentants 
			(5) 
			La
loi sur l’élection des conseillers et des représentants (Journal officiel de la République du Monténégro,
nos 4/98, 17/98, 14/00, 9/01, 41/02,
46/02, 48/06, 46/11, 14/14, 47/14 et 12/16). (loi électorale) sont les principaux textes législatifs régissant la conduite de l’élection présidentielle. La loi sur l’élection présidentielle contient des dispositions spécifiques portant notamment sur l’inscription des candidats, la présentation des bulletins de vote et les critères d’éligibilité, d’autres aspects étant couverts par la loi électorale. Plusieurs autres lois et réglementations viennent compléter ces textes, dont la loi sur le registre électoral 
			(6) 
			La loi sur le registre
électoral (Journal officiel de la République
du Monténégro, nos 010/14,
020/15 et 092/17)., celle sur le financement des entités politiques et des campagnes électorales 
			(7) 
			La loi sur le financement
des entités politiques et des campagnes électorales (Journal officiel de la République du Monténégro,
no 52/14), telle qu’amendée en 2017., ainsi que la loi sur les médias électroniques 
			(8) 
			La loi sur les médias
électroniques (Journal officiel de la
République du Monténégro, nos 046/10,
040/11, 053/11, 06/13, 055/16 et 092/17)., et les instructions et décisions de la Commission électorale d’État (CEE).
18. La loi électorale a été profondément modifiée en 2014 et a pris en compte plusieurs des recommandations antérieures de la Commission de Venise et de l’OSCE/BIDDH, s’agissant notamment de la composition et des compétences de l’administration électorale. Par ailleurs, de nouvelles dispositions sur l’inscription des électeurs et des candidats et le vote à domicile ont été introduites.
19. Le 29 décembre 2017, la loi sur le registre électoral, la loi sur les partis politiques, la loi sur le financement des entités politiques et des campagnes électorales et celle sur les médias électroniques ont été amendées à la majorité simple. De nouvelles mesures ont ainsi été introduites afin de protéger la vie privée des électeurs, en restreignant le droit des partis et des organisations de la société civile d’accéder aux données à caractère personnel figurant dans le registre électoral et de les copier. Des obligations supplémentaires ont également été imposées, notamment celle de rendre compte du financement des campagnes électorales et de dévoiler le nom des sponsors de publicités électorales dans les médias.
20. Des modifications de la loi électorale ont aussi été proposées par le groupe de travail parlementaire concerné mais n’ont pas été adoptées par le parlement, la majorité requise des deux tiers n’ayant pu être obtenue en raison du boycott de l’opposition. Un certain nombre de recommandations n’ont ainsi pas été suivies d’effet.
21. La Commission de Venise et le BIDDH ont souligné, dans leurs recommandations, plusieurs omissions et ambiguïtés relevées dans le cadre juridique, y compris dans les instructions et décisions de la CEE, qui sont susceptibles de nuire à la cohésion et à l’intégrité du processus électoral. Il s’agit notamment de l’absence de règles sur la vérification des signatures de soutien ou de sanctions pour les violations liées à ces signatures, ou encore l’absence de réglementation sur les procédures de résolution des litiges, la compilation des résultats et le financement des campagnes.

3. Administration électorale

22. L’élection a été administrée dans le cadre d’un système à trois niveaux comprenant la Commission électorale d’État (CEE), 23 commissions électorales municipales (CEM) et 1 214 commissions électorales de bureau de vote (CEBV). La CEE et les CEM sont des organes permanents qui exercent un mandat de quatre ans, tandis que les CEBV sont constituées pour chaque élection. Malgré les recommandations antérieures de la Commission de Venise, la loi électorale ne contient aucune disposition relative à l’impartialité et au professionnalisme des organes chargés d’administrer les élections 
			(9) 
			Voir la Section II.3.1
du Code de bonne conduite en matière électorale de la Commission
de Venise..
23. La CEE est composée de onze membres. Son président est nommé par le parlement au même titre que les dix membres permanents: quatre sont proposés par la majorité parlementaire, quatre par l’opposition parlementaire (l’un d’entre eux exerce la fonction de secrétaire en charge du service administratif), un membre est désigné par une minorité nationale (le groupe politique minoritaire ayant remporté le plus de voix lors des dernières élections), et un membre est un représentant de la société civile (ce poste est vacant depuis novembre 2016).
24. Les CEM sont composées d’un président et de quatre membres désignés par les assemblées municipales correspondantes: deux sont proposés par la majorité et deux par l’opposition. Le président est nommé par le parti ayant remporté le plus grand nombre de mandats lors des dernières élections municipales. Le secrétaire est nommé sur proposition de l’opposition. La composition des CEM n’assure pas la représentation des minorités nationales, contrairement à la recommandation formulée par la Commission de Venise.
25. Les CEBV sont constituées au plus tard dix jours avant la date des élections et se composent d’un président et de quatre membres, ainsi que leurs suppléants, nommés sur proposition des partis politiques représentés dans les assemblées municipales. À titre exceptionnel, et à la demande expresse d’un candidat, la composition d’une CEBV peut être modifiée jusqu’à 12 heures avant l’ouverture d’un bureau de vote 
			(10) 
			À la demande justifiée
d'un parti politique ou d'un groupe d'électeurs qui a acquis le
droit de proposer des représentants à la composition permanente
des CEBV.. Beaucoup de membres de CEBV ont été changés peu de temps avant le jour du scrutin.
26. En plus des membres de la CEE, des CEM et CEBV évoqués ci-dessus, chaque candidat à l’élection présidentielle est en mesure de désigner, dans les vingt jours avant la date du scrutin (cinq jours s’agissant des CEBV) un représentant autorisé, ayant le droit de participer aux travaux et à la prise de décisions à tous les niveaux de l’administration électorale. Sur les sept candidats à la présidentielle, six ont exercé ce droit au niveau de la CEE et quatre à celui des CEM. Les mandats des représentants autorisés prennent fin après la publication des résultats électoraux.
27. La CEE a respecté la plupart des délais légaux. Elle a tenu des réunions régulières mais celles-ci n’étaient pas suffisamment préparées et se sont avérées parfois chaotiques, donnant lieu à plusieurs reprises, à un manque d'instructions claires sur les procédures à suivre du jour du scrutin, la vérification des signatures ou la résolution des litiges électoraux. Les réunions de la CEE étaient ouvertes aux observateurs mais sont restées fermées aux médias, malgré les recommandations antérieures de la Commission de Venise et du BIDDH.

4. Liste électorale et inscription des candidats

28. L'inscription des électeurs est passive. Le registre électoral est permanent et tenu de manière centralisée par le ministère de l’Intérieur qui se fonde sur les données figurant dans les registres des ressortissants, des résidents, des décès ou encore des naissances. La CEE exerce un rôle de supervision de la mise en œuvre des dispositions légales relatives au registre électoral et bénéficie d’un accès électronique. Le Tribunal administratif est chargé d’examiner toute plainte liée au registre électoral.
29. Le ministère de l’Intérieur a fait savoir aux citoyens, par le biais des médias et de son site web, qu'ils pouvaient vérifier les données les concernant sur son site, du 21 janvier au 31 mars, et demander des corrections. Malgré le manque de clarté ou de cohérence du format de présentation de ces informations, 12 282 demandes ont été faites (soit 2,3 % du nombre total d'électeurs inscrits au registre électoral).
30. Les modifications apportées en 2017 à la loi sur le registre électoral visent à renforcer la protection des données à caractère personnel des électeurs en limitant l’accès au registre électoral aux partis politiques et aux organisations de la société civile, dans les locaux du ministère de l’Intérieur, et en interdisant toute copie de ces données 
			(11) 
			La
Constitution garantit la protection des données à caractère personnel,
interdit leur utilisation à des fins autres que celles pour lesquelles
elles ont été collectées et dispose que toute personne a le droit
d’être informée de la collecte de données à caractère personnel
la concernant et peut bénéficier de la protection des tribunaux
en cas d’abus.  
			(12) 
			Deux organisations
ont demandé un aperçu du registre électoral: le Centre pour la transition
démocratique et le Réseau pour l’affirmation du secteur non-gouvernemental
(MANS)..
31. Tous les citoyens âgés de 18 ans ou plus le jour du scrutin, domiciliés au Monténégro depuis 24 mois au moins avant la date des élections et n’ayant pas été déclarés frappés d’une incapacité mentale par un tribunal, ont le droit de voter. Cette condition de durée de résidence a été régulièrement critiquée dans les précédents avis et recommandations de la Commission de Venise et de l’OSCE/BIDDH. Elle est contraire, en particulier, aux principes énoncés dans le Code de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise 
			(13) 
			Voir l’Avis conjoint
de la Commission de Venise et de l’OSCE/BIDDH, CDL-AD(2011)011,
paragraphes 24-26. Voir également la Section I.1.1.c.iii du Code
de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise,
qui énonce qu’une condition de durée de résidence ne peut être imposée,
pour les nationaux, que pour les élections locales ou régionales. .
32. La liste électorale a été clôturée 10 jours avant la date du scrutin et la CEE a annoncé que le nombre d’électeurs inscrits s’élevait à 532 599, pour une population totale monténégrine de 642 550 habitants 
			(14) 
			Le
dernier recensement effectué en 2011 faisait état de 625 266 habitants.
Quelque 511 405 électeurs étaient inscrits sur les listes électorales
pour le scrutin présidentiel de 2013, et 528 817 pour les élections
législatives de 2016 (+3,4 % par rapport à 2013). <a href='https://www.monstat.org/eng/page.php?id=393&pageid=57'>https://www.monstat.org/eng/page.php?id=393&pageid=57.</a> selon les estimations de juillet 2017, soit une différence d’environ 110 000 personnes. D’après ces chiffres, le corps électoral représente plus de 80 % de la population, ce qui est un pourcentage relativement élevé. Les statistiques du recensement effectué en 2011 faisaient état de 162 844 habitants âgés de 0 à 19 ans. De nombreux interlocuteurs de la commission ad hoc de l'Assemblée ont remis en question l'exactitude du registre électoral, alléguant que la liste électorale contenait des électeurs vivant à l'étranger 
			(15) 
			La
législation n’autorise pas le vote à l’étranger, mais les électeurs
vivant à l’étranger ne peuvent pas être supprimés des listes électorales
s’ils conservent une résidence dans le pays. ou décédés. Les minorités constituent environ 18 % du corps électoral.
33. Le processus d’inscription des candidats a débuté le 19 janvier et s’est achevé le 26 mars 2018. Tous les citoyens jouissant du droit de vote et ayant résidé au Monténégro pendant au moins 10 ans au cours des 15 années précédentes peuvent se présenter aux élections.
34. Les candidats peuvent être proposés par des partis politiques ou un groupe de citoyens avec le soutien d'au moins 1,5 % du total des électeurs inscrits, soit près de 8 000 électeurs. Si ce seuil est assez facile à atteindre pour le DPS, le parti au pouvoir depuis 27 ans qui compte quelque 100 000 membres (près d’un cinquième du nombre total d’électeurs), cela peut s'avérer plus difficile pour les partis de moindre envergure. Cette exigence de 1,5 % n'est pas conforme au Code de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise, qui précise que la loi ne devrait pas requérir la signature de plus de 1% de l'électorat 
			(16) 
			Voir
le paragraphe I.1.3.ii du Code de bonne conduite en matière électorale
de la Commission de Venise..
35. Par ailleurs, et malgré les recommandations antérieures, les électeurs ne peuvent toujours soutenir qu’un seul candidat, ce qui, en principe, est susceptible de limiter le pluralisme politique 
			(17) 
			Voir le paragraphe
77 des Lignes directrices de la Commission de Venise sur la réglementation
des partis politiques, selon lequel «afin de renforcer le pluralisme
et la liberté d’association, la législation ne doit pas autoriser
les citoyens à signer uniquement la liste de soutien d’un seul parti».. Un parti politique ou un groupe de citoyens ne peut présenter qu'un seul candidat. Deux partis politiques ou plus sont en mesure de proposer un candidat commun.
36. Plusieurs interlocuteurs de la commission ad hoc ont critiqué cet exercice de collecte de signatures, surtout dans un pays comme le Monténégro à la population relativement peu nombreuse et où, comme indiqué dans les précédents rapports d'observation électorale, les électeurs, en particulier les agents publics, font l’objet de pressions et d’intimidations. Certains représentants de candidats ont souligné un point qui a par la suite été confirmé par les résultats, à savoir qu'un ou deux des candidats étaient susceptibles de recueillir un nombre de suffrages inférieur à celui des signatures de soutien. Fait positif, conformément à une décision de la Cour constitutionnelle, les électeurs n’ont plus à apposer leur signature sur les listes de leur choix face aux représentants des CEM.
37. Le 12 mars, la CEE a mis en place une application en ligne permettant aux électeurs de vérifier si leur nom figurait sur une liste de soutien. Un certain nombre de médias, et quelques candidats, ont reproché à la CEE d’avoir introduit cette application après l’inscription de trois des candidats. Compte tenu de cette décision tardive et d’un certain flou juridique, la procédure de vérification des signatures était en contradiction avec le Code de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise qui exige que les règles en la matière soient équitables et appliquées sur un pied d’égalité à tous les partis 
			(18) 
			Voir
le paragraphe I.1.3.iii du Code de bonne conduite en matière électorale
de la Commission de Venise.. Au total, plus de mille plaintes pour falsification de signature ont été déposées auprès du bureau du procureur.
38. Enfin, sept candidats dont six hommes et, pour la première fois, une femme, se sont présentés à cette élection. Le processus d’inscription des candidats était inclusif et la CEE a enregistré tous les candidats ayant soumis les documents requis. Après tirage au sort, l'ordre d’apparition des noms sur les bulletins de vote était le suivant: M. Marko Milačić, nommé par le parti «Vrai Monténégro» (PCG); M. Mladen Bojanić, nommé par le Front démocratique (DF), Monténégro démocratique (DCG), Action unie pour la réforme (URA) et le Parti populaire socialiste (SNP); M. Hazbija Kalač, nommé par le Parti justice et réconciliation (SPP); M. Vasilije Miličković, présenté par un groupe de citoyens; M. Dobrilo Dedeić, nommé par la coalition serbe; Mme Draginja Vuksanović, nommée par le Parti social-démocrate (SDP); et M. Milo Đukanović, nommé par le parti au pouvoir, le DPS.

5. Campagne électorale, financement de la campagne et couverture par les médias

39. La loi électorale ne régit pas les dates de début et de fin officielles de la campagne; elle précise simplement que le droit à un temps d'antenne gratuit sur le radiodiffuseur public prend effet le jour de l'inscription des candidats et expire 24 heures avant le jour du scrutin.
40. La campagne a démarré trois semaines avant le jour des élections et après la date limite pour l’inscription des candidats, à savoir le 26 mars. La campagne des candidats a dans l’ensemble été peu disputée et globalement pacifique.
41. Les autorités ont accordé l'accès aux lieux publics sur un pied d'égalité, mais seul le candidat du parti au pouvoir a tenu de vastes rassemblements, ses concurrents ayant, pour l’essentiel, organisé des événements modestes. La visibilité de la campagne a été principalement assurée par de nombreux panneaux d'affichage. Mais là encore, ils mettaient surtout en vedette le candidat du parti au pouvoir. La campagne a aussi été menée au moyen de démarchage en porte-à-porte, d’annonces dans les médias traditionnels et en recourant aux médias sociaux. Le ton de la campagne a été en grande partie respectueux et les candidats ont pu faire campagne sans restrictions.
42. La campagne des candidats à la présidentielle était principalement axée sur les questions de lutte contre la corruption et la criminalité organisée, sur le chômage, la sécurité, les migrations ou encore sur des sujets de politique étrangère: l’intégration à l’Union européenne et la question de l’adhésion à l’OTAN ou la campagne pro-russe et anti-OTAN.
43. Beaucoup d’interlocuteurs de la commission ad hoc, aussi bien de l’opposition que de la société civile, ont fait état de cas d’utilisation abusive de ressources administratives, généralement en faveur du candidat du parti au pouvoir, et de recrutement massif d’agents publics, malgré les restrictions en la matière en période électorale, l’achat de voix et la collecte de documents d’identité afin d’empêcher les électeurs de voter. Ces problèmes ont eu un impact négatif sur la campagne et affecté la confiance du public dans le processus électoral démocratique. Ils sont récurrents au Monténégro et ont été évoqués dans la plupart des précédents rapports d’observation électorale de l’Assemblée parlementaire.
44. Tout en étant pluraliste, le paysage médiatique du Monténégro est le reflet des clivages politiques. Comme l’ont indiqué certains des interlocuteurs de la commission ad hoc, les médias subissent des pressions politiques et économiques en raison de leur manque d’autonomie financière. Compte tenu du marché limité de la publicité, la majorité des médias sont tributaires des fonds publics, des propriétaires d’entreprises ou de l’aide internationale. D’aucuns estiment que le financement des médias, ainsi que le financement sélectif et non transparent de services publics par le biais de la publicité, exercent une influence indue sur les médias. Par ailleurs, la propriété des médias est souvent difficile à déterminer. Malgré l’utilisation croissante d’internet, la télévision reste la principale source d’information dans le pays.
45. La loi électorale réglemente la couverture médiatique de la campagne et impose au radiodiffuseur public d’offrir à tous les candidats un accès libre et équitable. Comme le veut la législation, le radiodiffuseur de service public (RTCG) a accordé à tous les candidats un temps d’antenne gratuit et organisé deux débats télévisés. À cet égard, la commission ad hoc a regretté que le candidat du parti au pouvoir n’ait pas participé à ces débats qui constituent une procédure démocratique permettant aux électeurs de faire un choix éclairé.
46. Une nouvelle équipe dirigeante a été nommée à la tête de la RTCG en mars 2017. Depuis lors, elle a subi les critiques de la part du parti au pouvoir qui l’accusait de promouvoir les partis d’opposition et leurs visions. À la fin de l’année 2017, dans des décisions controversées, le parlement a remplacé deux membres du Conseil de la RTCG ainsi qu’un membre de l’Agence pour les médias électroniques (qui est en charge de la régulation des médias) du fait de soupçons de conflits d’intérêts.
47. Certains interlocuteurs de la commission ad hoc ont exprimé leurs préoccupations face aux manœuvres d’intimidation de journalistes. Depuis 2004, quelque 76 agressions de journalistes ont été signalées, or beaucoup de ces affaires n’ont pas encore été résolues 
			(19) 
			Dans son rapport d’étape
2016, l’Union européenne a rappelé qu’«aucun progrès n’a été enregistré
dans la résolution des affaires concernant des attaques menées contre
des journalistes».. Malgré la diminution de ces attaques ces dernières années, une bombe a explosé le 1er avril devant le domicile d’un journaliste 
			(20) 
			L’incident a eu lieu
à Bijelo Polje. D’après la police, cet acte d’intimidation était
lié aux activités professionnelles de la victime et non aux élections. , et plusieurs représentants des médias se sont dits inquiets pour eux-mêmes et pour leurs proches.
48. La loi sur le financement des entités politiques et des campagnes électorales interdit les contributions de donateurs anonymes, de syndicats, de communautés religieuses, d’organisations non gouvernementales ou financées par l’État ainsi que les dons en provenance de sources étrangères. Tout citoyen peut donner jusqu’à € 2 000 à chaque candidat, les personnes morales pouvant faire des dons allant jusqu'à € 10 000. Un candidat peut dépenser jusqu'à 1,6 million d'euros pendant toute la durée de la campagne, ce qui peut paraître énorme compte tenu de la taille du Monténégro et de sa population. La loi ne fait pas de distinction entre les contributions reçues des partis ou d'autres personnes morales 
			(21) 
			La
loi n’établit aucune distinction entre les cotisations des adhérents
et les autres fonds transférés des comptes du parti vers le compte
en banque dédié ouvert par le candidat. .
49. Selon de nombreux interlocuteurs, à l’exception du candidat du parti au pouvoir, les candidats en lice disposaient de ressources limitées. Par ailleurs, le financement de la campagne de certains d’entre eux manquait de transparence. L’Agence pour la prévention de la corruption est chargée de la supervision d’ensemble des règles encadrant le financement des campagnes, mais les représentants de la société civile et des médias ont critiqué son travail. Le système de financement des partis politiques et des candidats à la présidentielle semble très généreux comparé aux salaires et aux pensions financés par le budget d’État du Monténégro.
50. Comme ce fut le cas lors des élections précédentes, les candidats ont généralement omis de déclarer les dons en nature et l’Agence pour la prévention de la corruption n’a pas réagi de manière appropriée et efficace à ce manquement aux règles. De nombreux interlocuteurs de la commission ad hoc ont mis en doute l'impartialité de l'Agence et émis des critiques concernant son fonctionnement et sa transparence ainsi que sa réticence à coopérer avec les organisations de la société civile en ne publiant, ou en ne leur communiquant, aucune information. Ils ont déploré la superficialité des rapports financiers transmis à cet organisme par les candidats et l’absence de ventilation des coûts permettant un meilleur contrôle public des dépenses. Ils estiment par ailleurs que les dépenses de campagne sont sous-évaluées, notamment celles liées aux annonces publicitaires dans les médias car il est impossible de connaître les prix facturés par ces derniers aux différents candidats.

6. Scrutin et dépouillement

51. Dans les bureaux de vote visités le jour du scrutin, les membres de la commission ad hoc ont constaté que les opérations d’ouverture, de vote et de dépouillement étaient effectuées avec professionnalisme et de manière ordonnée. Les membres des bureaux de vote ont pleinement coopéré avec les huit équipes de l’Assemblée parlementaire déployées dans le pays.
52. Selon les statistiques de l’OSCE/BIDDH, l’ouverture du scrutin a fait l’objet d’une évaluation positive dans 48 des 50 bureaux de vote observés; il en est de même des opérations de vote dans 97 % des bureaux visités et du travail des membres des commissions de bureaux de vote dans 99 % des cas; la clôture du vote et le dépouillement ont été jugés positifs dans 44 des 46 observations; malgré l’absence de procédures écrites, les membres des CEM étaient bien organisés et le processus de compilation des résultats a fait l’objet d’une évaluation positive dans tous les 17 CEM observées.
53. Les lacunes suivantes, principalement d’ordre technique, ont été observées par les membres de la commission ad hoc tout au long du scrutin et pendant la clôture du vote et le dépouillement:
  • plus de la moitié des bureaux de vote n’étaient pas accessibles aux personnes à mobilité réduite, et dans 30 % des cas, l’agencement des lieux n’était pas adapté aux électeurs en fauteuil roulant;
  • le secret du vote, bien que généralement respecté, risquait d’être compromis dans 28 % des bureaux de vote en raison de la disposition des isoloirs;
  • dans 16 % des observations, les électeurs se sont vus refuser le droit de voter, essentiellement parce qu'ils ne figuraient pas sur la liste électorale du bureau de vote en question;
  • dans certains bureaux de vote, des cas de non-respect involontaire des mesures légalement requises avant l’ouverture des urnes ont été constatés 
			(22) 
			Comme
le comptage des bulletins non utilisés (11 cas), des coupons de
contrôle et des bordereaux signés des dispositifs d’identification
électronique des électeurs (15 cas). ;
  • dans 10 observations, des membres extérieurs à la CEBV ont participé au dépouillement et dans 16 cas, un ou plusieurs membres de CEBV ont refusé de signer les procès-verbaux;
  • pour les prochaines élections, les bureaux de vote devraient être équipés d’urnes transparentes.
54. Les observateurs à long terme du BIDDH ont également fait état de soupçons d’achats de voix et d’utilisation de listes pour repérer des électeurs dans plusieurs bureaux de vote. Des rapports similaires des représentants autorisés ont paru dans les médias et le procureur du parquet de Bijelo Polje a reçu deux plaintes émanant de la police. Le jour du scrutin, les CEM ont enregistré six réclamations alléguant des violations des règles de campagne, d’enregistrements vidéo au sein de bureaux de vote, d’achats de voix et de manœuvres d’intimidation d’électeurs.
55. Compte tenu de ce qui précède, les membres de la commission ad hoc ont fait part de leurs préoccupations devant le nombre de bureaux de vote dont les listes électorales comptaient moins d’une centaine d’électeurs; cette situation pouvait nuire au secret du vote et favoriser l’achat de voix dans la mesure où il était plus facile de contrôler les suffrages exprimés par les électeurs.
56. Le 28 avril 2018, la commission électorale d’État a entériné les résultats définitifs des élections dont le taux de participation s’est élevé à 63,92 %. M. Milo Đukanović a été élu Président du Monténégro avec 53,90 % des voix, M. Mladen Bojanić recueillant 33,40% des suffrages; Mme Draginja Vuksanović 8,20 %; M. Marko Milačić 2,81%; M. Hazbija Kalač 0,80 %; M. Vasilije Miličković 0,48% et M. Dobrilo Dedeić 0,41 %; avec 5 997 bulletins nuls (1,76 %). Il convient de noter que, pris conjointement, les quatre derniers candidats représentent moins de 5 % des voix et trois d'entre eux ont obtenu moins de suffrages que le nombre de signatures de soutien requises pour se présenter à cette élection.

7. Conclusions et recommandations

57. La délégation d’observation de l’Assemblée parlementaire a conclu au respect des libertés fondamentales lors de l’élection présidentielle du 15 avril 2018 au Monténégro, ajoutant que le scrutin a été bien organisé et que les électeurs ont fait leur choix parmi un large éventail de candidats, même si le candidat et chef du parti au pouvoir a bénéficié d’avantages institutionnels consolidés pendant les 27 années d’exercice du pouvoir de son parti.
58. Le cadre juridique électoral offre dans l’ensemble une base solide pour la conduite d’élections démocratiques, et les amendements récemment adoptés témoignent de la volonté générale des autorités d’engager une réforme dans ce domaine. Cependant, l’absence de règles sur la vérification des signatures de soutien ou de sanctions pour les violations liées à ces signatures, ou encore l’absence de réglementation sur les procédures de résolution des litiges et le financement de la campagne, ont nui à l’intégrité du processus électoral.
59. En ce qui concerne la campagne électorale, la délégation de l'Assemblée a noté son caractère pacifique, soulignant que les candidats ont pu faire campagne librement, et que les libertés fondamentales, notamment les libertés de réunion, de circulation et d’association, ont été respectées. Toutefois, des allégations crédibles d’achat de voix, de recrutement d’agents publics en période électorale et de pressions exercées sur les électeurs, des caractéristiques malheureusement récurrentes des élections au Monténégro, ont ébranlé la confiance des électeurs dans le processus électoral.
60. À l’issue des élections législatives de 2016, l’opposition a refusé de reconnaître les résultats et boycotté le parlement. Ce boycott s’est poursuivi après l’adhésion du Monténégro à l’OTAN. À cet égard, la commission ad hoc insiste sur la responsabilité qui incombe à tous les acteurs politiques, y compris à ceux de l’opposition, d’assurer le fonctionnement démocratique du parlement et ses travaux législatifs.
61. Le scrutin a été bien administré sur un plan général. La CEE a respecté la plupart des délais légaux mais la politisation persistante des organes et institutions électoraux reste un sujet de préoccupation. Il convient par ailleurs d’établir une distinction claire des responsabilités qui relèvent de la CEE et des autres institutions compétentes en ce qui concerne l’inscription des électeurs. La délégation de l’Assemblée a également salué l’ouverture d’esprit dont ont fait preuve les membres des bureaux de vote le jour des élections et leur volonté sincère de coopérer avec les observateurs internationaux.
62. S’agissant de la couverture médiatique de la campagne présidentielle, la délégation a noté que le paysage médiatique du Monténégro est pluraliste mais qu’il reflète les divisions politiques et fait l’objet de pressions politiques et économiques en raison d’un manque d’autonomie financière. Conformément à la loi, le radiodiffuseur public a accordé à tous les candidats, sur un pied d’égalité, un temps d’antenne gratuit et a organisé deux débats télévisés. À cet égard, la délégation de l’Assemblée a regretté que le candidat du parti au pouvoir n’ait pas participé à ces débats qui constituent une procédure démocratique permettant aux électeurs de faire un choix éclairé.
63. En ce qui concerne le financement de la campagne électorale des candidats, plusieurs interlocuteurs ont fait savoir à la délégation de l’Assemblée que, à l’exception du candidat du parti au pouvoir, les candidats en lice disposaient de ressources limitées. La délégation de l’Assemblée est convaincue de la nécessité de renforcer la transparence et l’obligation de rendre compte du financement des campagnes et de mettre en place des mécanismes efficaces pour vérifier le respect de la loi par le biais d’audits. À ce propos, les représentants de la société civile et des médias ont critiqué le travail de l’Agence pour la prévention de la corruption.
64. La délégation d’observation de l’Assemblée invite les autorités du Monténégro à poursuivre leur coopération avec l’Assemblée parlementaire et la Commission de Venise afin de résoudre les problèmes constatés lors de l’élection présidentielle du 15 avril 2018 et d’améliorer le cadre juridique électoral du pays ainsi que ses pratiques électorales.

Annexe 1 – Composition de la commission ad hoc

(open)

Sur la base des propositions des groupes politiques de l’Assemblée, la commission ad hoc se composait comme suit:

Président: M. Jonas GUNNARSSON (SOC, Suède)

Groupe du Parti populaire européen (PPE/DC)

  • Mme Boriana ÅBERG, Suède
  • Mme Marie-Christine DALLOZ, France

Groupe Socialistes, démocrates et verts (SOC)

  • M. Paolo CORSINI, Italie
  • Mme Didem ENGIN, Turquie
  • M. Jonas GUNNARSSON, Suède

Groupe des conservateurs européens (CE)

  • M. Oleksii GONCHARENKO, Ukraine
  • M. Suat ÖNAL, Turquie

Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE)

  • Mme Emilie Enger MEHL, Norvège
  • M. Robert TROY, Irlande

Groupe pour la gauche unitaire européenne (GUE)

  • M. Marco NICOLINI, Saint-Marin

Groupe des démocrates libres (GDL)

  • M. Fazil MUSTAFA, Azerbaïdjan

Corapporteurs de la commission de suivi (ex officio)

  • M. Andrea RIGONI, Italie
  • M. Ionut-Marian STROE, Roumanie

Commission de Venise

  • Mme Mirjana LAZAROVA-TRAJKOVSKA, «l'ex-République yougoslave de Macédoine»

Secrétariat

  • M. Chemavon CHAHBAZIAN, Chef de Division, Division de l’observation des élections et de la coopération interparlementaire
  • M. Franck DAESCHLER, Assistant administratif principal, Division de l’observation des élections et de la coopération interparlementaire
  • M. Michael JANSSEN, Administrateur, Commission de Venise

Annexe 2 – Programme de la Mission internationale d’observation des élections (MIOE)

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Vendredi 13 avril 2018

10h00 – 11h00 Réunion interne de la commission ad hoc

  • ouverture par le chef de la délégation
  • information par les corapporteurs
  • cadre juridique et développements récents, Commission de Venise
  • information par le Secrétariat

11h00 – 12h30 Briefing conjoint des délégations parlementaires

11h00 – 11h15 Allocutions d’ouverture

  • M. Jonas Gunnarsson, chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire
  • M. Fabio Massimo Castaldo, chef de la délégation du Parlement européen

11h15 – 11h30 Réunion avec des représentants de la communauté internationale:

  • Ambassadeur Maryse Daviet, chef de la Mission de l’OSCE au Monténégro
  • Réunion avec l’Ambassadeur Aivo Orav, chef de la délégation de l’Union européenne au Monténégro

11h30 – 12h30 Briefing par l’équipe de coordination de la mission du BIDDH – Partie 1:

  • introduction et développements récents – Mme Tana de Zulueta, chef de mission
  • contexte politique et campagne – M. Mauro Calvo, analyste politique
  • cadre juridique, appels et recours – Mme Yelena Kovalyova, analyste juridique
  • médias – M. Giuseppe Milazzo, Analyste média
  • administration électorale, enregistrement des électeurs – Mme Vania Anguelova, Analyste électorale

14h00 – 14h45 Réunion avec les représentants des médias:

  • Agence pour les Médias électroniques – M. Abaz Beli Džafić, directeur
  • TVCG – Mme Tatjana Perović, rédacteur des programmes informatifs
  • Daily Vijesti – M. Željko Ivanović, directeur exécutif
  • Pink TV – Mme Ivana Šebek, directrice générale

14h45 – 15h30 Réunion avec les représentants des ONG impliquées dans l’observation des élections:

  • Centre pour le suivi et la recherche (CeMI) – Mme Nikoleta Tomović, directrice exécutive
  • Réseau pour l’affirmation du secteur des ONG (MANS) – Mme Vanja Ćalović Marković, directrice exécutive
  • Centre pour la démocratie et les droits de l’homme (CEDEM) – Mme Milena Bešić, directrice

15h30 – 17h50 Réunion avec les sept candidats à la présidentielle et/ou leurs représentant(e)s:

– M. Mladen Bojanić (DF, DCG, URA, SNP)

– M. Dobrilo Dedeić (Coalition serbe)

– M. Tarzan Milošević, DPS directeur politique, représentant de M. Milo Đukanović (DPS)

– M. Hazbija Kalač (SPP)

– M. Vladislav Dajković, PCG, secrétaire général et directeur pour les élections, représentant de M. Marko Milačić (PCG)

– M. Vasilije Miličković (Groupe d’action citoyen)

– M. Ivan Vujović, chef du bureau de campagne, représentant de Mme Draginja Vuksanović (SDP)

18h00 – 19h00 Réunion avec les chauffeurs et les interprètes

Samedi 14 avril 2018

09h30 – 10h00 Agence pour la prévention de la corruption – M. Dušan Drakić, chef de section pour la mise en œuvre des mesures de contrôle du financement des entités politiques et des campagnes électorales, et Mme Marina Mićunović, chef de section département de la coopération internationale et des standards

10h00 – 10h45 Commission électorale d’État – M. Budimir Šaranović, président

10h45 – 12h15 Briefing par l’équipe de coordination de la mission du BIDDH – Partie 2:

  • Mme Vania Anguelova, analyste électorale, et M. Don Bisson, chef de mission adjoint
  • M. Robert Bystricky, statisticien – formulaires d’observation
  • Briefing par les observateurs de long terme du BIDDH
  • Formation, stylo électronique – M. Kyle Bowers, expert opérations

Dimanche 15 avril 2018

07h00 Observation du vote

20h00 Observation de la fermeture et du dépouillement du scrutin

Lundi 16 avril 2018

15h00 Conférence de presse conjointe

Annexe 3 – Communiqué de presse de la Mission internationale d’observation des élections (MIOE)

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Élection présidentielle au Monténégro: respect des libertés fondamentales et avantage institutionnel pour le candidat du parti au pouvoir, déclarent les observateurs internationaux

Podgorica, 16 avril 2018 – Les libertés fondamentales ont été respectées lors de l’élection présidentielle du 15 avril au Monténégro, bien que le candidat du parti au pouvoir ait bénéficié d’un avantage institutionnel, ont conclu aujourd’hui les observateurs internationaux dans une déclaration préliminaire. Les candidats ont pu faire campagne librement et les médias leur ont fourni un espace pour présenter leurs positions, mais le manque d’analyses de la part des journalistes et l’absence du favori lors des débats télévisés ont nui à la capacité des électeurs à faire un choix éclairé, indique la déclaration.

Sur le plan technique, les élections ont été administrées convenablement, mais la transparence et le professionnalisme de la Commission électorale centrale restent un sujet de préoccupation. Le jour du scrutin s’est déroulé dans l’ordre, malgré quelques irrégularités de procédure, ont déclaré les observateurs.

«Il est à souligner que les libertés fondamentales, par exemple les libertés de réunion et d’expression, ont été respectées lors de l’élection, et que les candidats ont pu faire campagne librement et se faire entendre des électeurs par le biais des médias», a affirmé Tana de Zulueta, chef de la mission d’observation électorale de longue durée du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE. «Cela étant, les candidats n’ont pas pu concourir sur un pied d’égalité, le favori ayant bénéficié des avantages que son parti, qu’il dirige, a consolidés pendant ses 27 années d’exercice du pouvoir.»

La campagne des sept candidats à l’élection – six hommes et, pour la première fois, une femme – a dans l’ensemble été peu disputée. Les représentants de l’opposition et de la société civile ont fait état de soupçons concernant le recrutement massif d’agents publics, malgré les restrictions en la matière en période électorale, l’achat de voix et la collecte de documents d’identité afin d’empêcher certains électeurs de voter. Les allégations récurrentes de pressions exercées sur les électeurs pour qu’ils soutiennent le candidat du parti au pouvoir ont eu un impact négatif sur le contexte de la campagne.

Le radiodiffuseur de service public a dûment rempli son obligation d’accorder un temps d’antenne gratuit aux candidats. Il a organisé des entretiens avec les candidats et diffusé deux débats, auxquels le candidat du parti au pouvoir n’a cependant pas participé. Les médias privés examinés ont suivi des lignes politiques. Faute d’un plafonnement légal des dépenses publicitaires, les candidats qui ont pu s’acheter davantage de temps d’antenne ont été avantagés, ont déclaré les observateurs.

«Hier, le scrutin a été extrêmement bien organisé, et les électeurs avaient le choix entre un large éventail de candidats. Concernant la campagne électorale, des cas d’utilisation abusive des ressources publiques et des allégations crédibles de pressions exercées sur les électeurs en faveur du candidat du parti au pouvoir ont été signalés», a indiqué Jonas Gunnarsson, chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. «Hélas, il s’agit de problèmes récurrents, déjà notés lors d’élections passées au Monténégro. Les débats télévisés entre candidats à la présidence sont une procédure démocratique qui permet aux électeurs de faire un choix éclairé, et la délégation de l’APCE regrette que le candidat du parti au pouvoir n’ait pas participé à ces débats.»

Les candidats ont pu utiliser des fonds publics et privés pour faire campagne et recevoir des dons en espèces ou en nature de la part de personnes physiques et morales. Ils devaient en rendre compte régulièrement pendant la campagne et soumettre un rapport final – mis en ligne – dans un délai de trente jours après le scrutin. Les dons privés ont majoritairement été faits par des personnes physiques, et les candidats ont principalement dépensé les fonds pour leur campagne dans les médias.

La législation électorale offre une base solide pour la conduite d’élections démocratiques, et les récents amendements incorporant plusieurs recommandations du BIDDH et de la Commission de Venise du Conseil de l’Europe sont le signe d’une volonté générale d’engager une réforme électorale, indique la déclaration. On note toutefois des oublis et des ambiguïtés, comme l’absence de règles sur la vérification des signatures de soutien ou de sanctions pour les violations liées à ces signatures. L’absence de réglementation sur les procédures de résolution des conflits, la compilation des résultats et le financement de la campagne a également nui à l’intégrité du processus électoral. La CEC a manqué de cohérence dans ses efforts pour préciser certains aspects de la législation au moyen de directives et de décisions.

«Si les libertés fondamentales ont réellement été respectées, et si l’administration de l’élection est un point positif, des travaux sont encore nécessaires concernant la législation relative aux élections, et plus généralement la réforme électorale», a déclaré Fabio Massimo Castaldo, chef de la délégation du Parlement européen. «Les acteurs politiques monténégrins concernés devront travailler ensemble pour remédier efficacement à ces insuffisances, en vue d’avancer vers la réalisation de leurs aspirations européennes.»

Les électeurs, les candidats et les organes qui désignent ceux-ci peuvent contester les actes et décisions des commissions électorales auprès des commissions de degré supérieur. Plus d’un millier de recours de ce type ont été déposés par des électeurs, portant sur des soupçons de falsification concernant les signatures de soutien ou l’utilisation abusive de données à caractère personnel dans les listes de ces signatures. Trois recours ont été déposés devant la CEC et un autre devant une commission de degré inférieur au cours de la période préélectorale, concernant la nomination de présidents de commission électorale de bureau de vote. Dans la pratique, la résolution des litiges électoraux est à la discrétion de diverses autorités publiques, qui ont parfois échoué à garantir un recours juridique efficace.

La CEC a respecté la plupart des délais légaux, mais a manqué de transparence: des décisions n’ont pas été rendues publiques et ses réunions n’étaient pas accessibles aux médias. Bien qu’elle ait tenu des réunions régulières, celles-ci n’étaient pas suffisamment préparées ni organisées. La législation électorale ne comporte aucune disposition exigeant l’impartialité et le professionnalisme des membres des organes d’administration électorale. Les membres de la CEC représentant des partis d’opposition, les médias et les organisations d’observation citoyenne ont fait part de leur préoccupation concernant la prise de décisions suivant des lignes partisanes. Les réunions des commissions électorales municipales étaient le plus souvent ouvertes aux observateurs, et certaines de ces commissions ont publié leurs décisions.