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Résolution 2232 (2018)
Assurer un équilibre entre l’intérêt supérieur de l’enfant et le besoin de garder les familles ensemble
1. Rappelant sa Résolution 2049 (2015) et sa Recommandation 2068 (2015) «Services
sociaux en Europe: législation et pratiques de retrait d’enfants
à leurs familles dans les États membres du Conseil de l’Europe»,
l’Assemblée parlementaire réaffirme que les enfants ont le droit
d’être protégés de toute forme de violence, de maltraitance et de
négligence. Ils ont cependant aussi le droit de ne pas être séparés
de leurs parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes
ne décident, sous réserve de révision judiciaire, qu’une telle séparation
est absolument nécessaire dans l’intérêt supérieur de l’enfant.
Même lorsqu’une telle séparation est nécessaire, les enfants ont
le droit d’entretenir régulièrement des relations personnelles et
des contacts directs avec leurs deux parents, sauf si cela est contraire
à l’intérêt supérieur des enfants.
2. Malgré l’existence de normes internationales et européennes
claires dans ce domaine des droits de l’enfant, force est de constater
que les décisions de retrait, d’adoption, de placement et de réunification continuent
à ne pas être appliquées de manière uniforme dans les États membres
du Conseil de l’Europe. D’autres mesures s’imposent donc pour combler
le fossé entre ces normes et leur mise en œuvre, ainsi que pour
améliorer la collecte de données et la recherche susceptibles d’éclairer
les responsables politiques sur la meilleure façon de procéder en
ce qui concerne l’application des normes.
3. Les États membres du Conseil de l’Europe qui ont ratifié les
traités des Nations Unies et les instruments du Conseil de l’Europe
relatifs aux droits de l’enfant sont appelés à les mettre en œuvre
et à agir conformément à leurs dispositions dans le contexte des
décisions de retrait, d’adoption, de placement d’enfant et de réunification
de la famille.
4. L’Assemblée réaffirme que l’intérêt supérieur de l’enfant
devrait être pris en considération de façon primordiale pour toutes
les actions concernant les enfants, conformément à la Convention
des Nations Unies relative aux droits de l’enfant. Cependant, la
mise en application de ce principe dépend en pratique du contexte et
des circonstances spécifiques. Il est quelquefois plus facile de
dire ce qui n’est pas dans l’intérêt supérieur de l’enfant tel qu’être
maltraité par ses parents ou être retiré de sa famille sans raison
valable.
5. Tenant compte de cette mise en garde, l’Assemblée réitère
les recommandations formulées dans sa Résolution 2049 (2015) et invite
les États membres du Conseil de l’Europe à se concentrer sur le
processus afin d’obtenir les résultats les meilleurs pour les enfants
comme pour leurs familles. Les États membres devraient:
5.1. assurer des procédures adaptées
aux enfants, qu’il s’agisse d’un retrait, d’un placement ou d’une réunification;
il s’agit notamment de garantir la participation pleine et entière
de l’enfant concerné en faisant appel à un personnel correctement
formé et éduqué pour parler aux enfants et les écouter, de manière
à ce que l’opinion de l’intéressé soit non seulement entendue, mais
également prise en considération, à la condition que cette opinion
ne soit pas contraire à son intérêt supérieur;
5.2. apporter le soutien nécessaire aux familles en temps utile
et dans un esprit positif afin d’éviter d’avoir à prendre des décisions
de retrait en premier lieu et de faciliter la réunification de la
famille lorsque cela est possible et sert l’intérêt supérieur de
l’enfant; il faut notamment établir une meilleure collaboration
avec les parents, en vue d’éviter d’éventuelles erreurs fondées
sur des malentendus, des stéréotypes ou des discriminations, erreurs
qu’il sera difficile de corriger plus tard, une fois la confiance perdue;
5.3. veiller à ce que les systèmes de protection de l’enfance
soient ouverts et transparents, de manière à renforcer la légitimité
du système et la confiance qu’il inspire; cela inclut le fait de
veiller à ce que les décisions soient solidement étayées à toutes
les étapes du processus et à ce que les procédures judiciaires soient
abordables, adaptées aux enfants et accessibles, et que la collecte
de données et la recherche soient améliorées;
5.4. veiller à ce que l’ensemble du personnel prenant part
à des décisions de retrait et de placement, y compris les juges,
soit réellement qualifié et régulièrement formé (notamment aux normes internationales
et européennes), à ce qu’il dispose de ressources suffisantes pour
prendre des décisions dans un délai raisonnable et ne soit pas surchargé
par un trop grand nombre d’affaires;
5.5. s’efforcer de limiter au minimum les pratiques de retrait
de l’enfant à la naissance, de justification d’une décision de placement
sur l’écoulement du temps et d’adoption sans le consentement des parents,
et de n’y avoir recours que dans les cas extrêmes. Chaque fois que
cela sert l’intérêt supérieur de l’enfant, des efforts devraient
être faits pour maintenir les liens familiaux;
5.6. lorsque la décision de retirer un enfant de sa famille
a été prise, garantir:
5.6.1. que de telles décisions sont
une réponse proportionnée à une évaluation crédible et vérifiable
par les autorités compétentes démontrant qu’il y a un risque de
préjudice réel et sérieux pour l’enfant, et pouvant faire l’objet
d’une révision judiciaire;
5.6.2. qu’une décision détaillée est transmise aux parents et
qu’un exemplaire de celle-ci est aussi conservé. Il importe que
la décision soit expliquée à l’enfant dans une forme adaptée à son âge
ou, à défaut, qu’il ait accès à cette décision. Il convient que
la décision mentionne les circonstances qui ont conduit à ce choix
et indique les motifs du retrait;
5.6.3. que la décision de retirer les enfants est une décision
de dernier ressort et ne s’applique que pendant la période nécessaire;
5.6.4. que les frères et sœurs sont placés ensemble dans tous
les cas où un tel placement n’est pas contraire à leur intérêt supérieur;
5.6.5. que les enfants, dans la mesure où cela sert leur intérêt
supérieur, sont placés au sein du cercle familial élargi en vue
de minimiser la rupture de leurs liens familiaux;
5.6.6. que le fait de réunir la famille et/ou d’avoir accès à
la famille est pris en considération à intervalle régulier, selon
le cas, en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant et de
son point de vue;
5.6.7. que les visites et les contacts sont planifiés de façon
à maintenir le lien familial et en vue de la réunification, sauf
si c’est manifestement inapproprié;
5.6.8. que toutes les procédures sont menées en toute indépendance,
avec égalité de moyens pour les deux parties et parité entre les
ressources disponibles de la famille et du système de protection
de l’enfance;
5.6.9. que les aspects religieux, ethniques et culturels ainsi
que les liens avec la fratrie sont pris en compte lors d’un placement;
5.7. garantir que les contrôles et contrepoids appropriés sont
intégrés dans le système de protection de l’enfance, en incluant
des audits réguliers ainsi qu’un contrôle parlementaire, si nécessaire.