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Rapport | Doc. 14788 | 03 janvier 2019

Améliorer le suivi des recommandations du CPT: renforcer le rôle de l’Assemblée parlementaire et des parlements nationaux

Commission des questions juridiques et des droits de l'homme

Rapporteur : M. Damir ARNAUT, Bosnie-Herzégovine, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 14373, Renvoi 4327 du 13 octobre 2017. 2019 - Première partie de session

Résumé

Les recommandations formulées depuis longtemps dans les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture, ainsi que l’évidente nécessité pour l’Assemblée parlementaire de continuer à traiter les questions relatives à la détention, soulignent qu’il importe de maintenir et de renforcer les initiatives de prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants dans les États membres du Conseil de l’Europe.

Les travaux approfondis déjà réalisés sur le rôle joué par les parlements nationaux en qualité de garants des droits de l’homme montrent qu’il existe de nombreuses voies prometteuses à explorer, qui permettraient de faire davantage pour assurer une meilleure mise en œuvre des recommandations du CPT par les autorités nationales. La création à l’échelon national de nouveaux mécanismes et structures conformes aux «Principes fondamentaux du contrôle parlementaire des normes internationales relatives aux droits de l’homme» de l’Assemblée ou le renforcement du mandat et des activités des mécanismes et structures existants, ainsi que l’action de mécanismes de surveillance et de suivi plus efficaces, contribueraient à cet objectif.

Les activités de coopération parlementaire de l’Assemblée pourraient comporter des projets destinés à soutenir cette fonction particulière.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 13 décembre
2018.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire salue une nouvelle fois l’action remarquable du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), qui a permis d’importantes améliorations des conditions de détention dans les États Parties à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (ci-après «la convention»). Pourtant les travaux en cours du CPT démontrent clairement que d’autres mesures doivent être prises pour faire de l’Europe un espace sans torture.
2. L’Assemblée a développé depuis des années son rôle de soutien et de promotion de l’action du CPT. L’Assemblée adopte fréquemment des résolutions thématiques relatives aux conditions de détention et à la prévention de la torture et des mauvais traitements, un domaine souvent traité également par les résolutions adoptées dans le cadre de la procédure de suivi. De plus, la commission des questions juridiques et des droits de l’homme a instauré la pratique de procéder à un échange de vues avec le chef de la délégation concerné, chaque fois que le CPT publie une déclaration publique relative à un pays précis.
3. Les parlements nationaux peuvent jouer un rôle essentiel dans la promotion et la protection des normes du CPT, grâce aux nombreuses possibilités dont disposent les parlementaires qui le souhaitent de procéder en amont au passage en revue et à la mise en œuvre des recommandations du CPT, en garantissant ainsi une plus grande transparence et un plus grand engagement pour rendre compte du respect par les États membres de leurs obligations nées de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5) et en favorisant la création d’une culture des droits de l’homme généralisée.
4. À ce propos, l’Assemblée rappelle sa Résolution 1823 (2011) «Les parlements nationaux: garants des droits de l’homme en Europe», dans laquelle elle appelait les parlements à mettre en place et/ou renforcer les structures qui permettraient l’intégration et le contrôle rigoureux de leurs obligations internationales relatives aux droits de l’homme, sur la base des «Principes fondamentaux du contrôle parlementaire des normes internationales relatives aux droits de l’homme», qui figurent en annexe de cette résolution.
5. En conséquence, l’Assemblée:
5.1. encourage sa commission des questions juridiques et des droits de l’homme:
5.1.1. à continuer à développer sa pratique de la tenue d’un échange de vues avec le chef de la délégation concernée chaque fois que le CPT publie une déclaration publique relative à un pays précis;
5.1.2. à envisager l’organisation d’auditions thématiques ad hoc sur de nouvelles normes ou sur les questions en suspens nées de l’action du CPT;
5.2. encourage sa commission des questions juridiques et des droits de l’homme et sa commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe à envisager d’inviter chaque année conjointement le/la Président(e) du CPT à un échange de vues, au cours duquel il/elle pourrait notamment présenter le dernier rapport annuel du CPT;
5.3. décide de continuer à privilégier la question des conditions de détention et de la prévention de la torture et des mauvais traitements, notamment au travers de rapports et de la participation à des activités normatives et de mise en œuvre.
6. L’Assemblée invite les parlements nationaux des États membres:
6.1. à réagir rapidement aux rapports du CPT qui concernent leur propre pays, en particulier en amenant leurs gouvernements à rendre des comptes sur la mise en œuvre en temps utile des recommandations du CPT;
6.2. à donner la priorité aux réformes législatives nécessaires pour assurer la mise en conformité avec les recommandations du CPT;
6.3. à demander à leur gouvernement de prendre immédiatement des mesures efficaces en réponse à toute déclaration publique adoptée par le CPT au titre de l’article 10 de la convention au sujet de leur pays;
6.4. à veiller à ce que le mandat de la structure chargée de l’intégration et du contrôle rigoureux des obligations internationales de l’État en matière de droits de l’homme, mise en place conformément à la Résolution 1823 (2011), comporte la promotion de la mise en œuvre des recommandations du CPT et l’examen des rapports annuels du CPT;
6.5. à rendre plus accessibles les rapports du CPT consacrés à leur propre pays, en les faisant traduire dans la langue nationale, dans la mesure du possible, et en assurant leur mise à disposition dans le centre de documentation parlementaire et sur leur site internet;
6.6. à entretenir des contacts avec les mécanismes nationaux de prévention et toute autre structure nationale pertinente de défense des droits de l’homme au sujet de la mise en œuvre des recommandations du CPT;
6.7. à envisager d’organiser un bilan ponctuel des recommandations du CPT pour recenser les évolutions des normes et les recommandations auxquelles aucune suite n’a été donnée dans leur propre pays, pour commémorer le 30e anniversaire de l’existence du CPT en 2019;
6.8. à coopérer avec la Division de soutien de projets parlementaires de l’Assemblée parlementaire à l’organisation d’activités destinées à renforcer la capacité du parlement à promouvoir la mise en œuvre des recommandations du CPT;
6.9. à interpeller, si besoin est, leur gouvernement pour qu’il prenne toutes les mesures nécessaires pour garantir que les nominations des membres du CPT soient présentées en temps utile.
7. L’Assemblée invite les États membres:
7.1. à coopérer pleinement avec leur parlement national à la mise en œuvre des recommandations du CPT;
7.2. à convenir par avance de la publication automatique des rapports de visite du CPT et des réponses du gouvernement qui s’y rapportent, sous réserve de pouvoir retarder la publication pendant une certaine période dans des circonstances particulières.
8. L’Assemblée invite la Turquie à autoriser immédiatement la publication du rapport de la visite ad hoc du CPT en 2016.

B. Projet de recommandation 
			(2) 
			Projet de recommandation
adopté à l’unanimité par la commission le 13 décembre 2018.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire rappelle sa Résolution … (2019) «Améliorer le suivi des recommandations du CPT: renforcer le rôle de l’Assemblée parlementaire et des parlements nationaux».
2. L’Assemblée réitère l’invitation qu’elle avait précédemment adressée au Comité des Ministres dans sa Recommandation 1968 (2011) «Renforcer les mécanismes de prévention de la torture en Europe», pour qu’il inscrive à son ordre du jour et examine d’urgence toute déclaration publique adoptée par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, au titre de l’article 10 de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE no 126) et qu’il adopte une résolution en ce sens, le cas échéant.

C. Exposé des motifs, par M. Damir Arnaut, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. La proposition de résolution sur laquelle repose le présent rapport rappelle la Résolution 2160 (2017) «25 ans de CPT: progrès accomplis et améliorations à apporter», dans laquelle l’Assemblée parlementaire décidait de «renforcer son rôle en contribuant au suivi des recommandations du CPT, notamment en encourageant les parlements nationaux à adopter une approche proactive à leur égard». Parmi les méthodologies préconisées par l’Assemblée dans la Résolution 2160 (2017) figuraient l’examen, par les commissions parlementaires concernées, des rapports et/ou des déclarations publiques du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants consacrés à leur pays, et notamment les suites à leur donner, ainsi que les questions parlementaires adressées aux gouvernements. La résolution mentionnait les activités de coopération parlementaire de l’Assemblée visant à encourager ces initiatives, ainsi que la possibilité de s’inspirer des pratiques nationales en vigueur pour l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme 
			(3) 
			Doc. 14373, Renvoi 4327 du 13 octobre 2017. J'ai été nommé rapporteur
le 12 décembre 2017..
2. L’Assemblée a rappelé à plusieurs reprises l’action remarquable du CPT et a proposé des moyens de renforcer le CPT, en préservant son efficacité et sa crédibilité, dans sa Résolution 1248 (2001) «Comité européen pour la prévention de la torture (CPT): composition du Comité» et sa Résolution 1540 (2007) «Améliorer les procédures de sélection des membres du CPT», par exemple. Dans sa Résolution 1808 (2011) «Renforcer les mécanismes de prévention de la torture en Europe» et sa Résolution 2160 (2017), l’Assemblée a par ailleurs recommandé que les parlements nationaux et l’Assemblée engagent un dialogue en temps utile pour interroger et saisir les gouvernements sur les questions soulevées par le CPT.
3. Les recommandations du CPT figurent dans les rapports annuels, les déclarations publiques et les rapports de visite de pays établis par le CPT; elles portent sur une grande diversité de situations, depuis les conditions matérielles concrètes des lieux de détention jusqu’au cadre juridique, en passant par la culture institutionnelle, les procédures, les pratiques et les comportements. Le nombre de recommandations formulées par pays est impressionnant. Dans certains pays, le CPT entame sa sixième ou septième visite périodique, suivie à chaque fois d’un rapport qui comporte un certain nombre de recommandations concrètes et réalistes.
4. Aux fins du présent rapport, j’ai adressé un questionnaire aux parlements nationaux pour examiner la situation dans les États membres du Conseil de l’Europe 
			(4) 
			Le questionnaire, envoyé
par l’intermédiaire du Centre européen de recherche et de documentation
parlementaires, contenait les deux questions suivantes: 1) Votre
parlement prend-il des mesures particulières suite à la publication
par le CPT d’un rapport concernant votre pays?; 2) Ces mesures comprennent-elles
certaines visant à promouvoir la mise en œuvre des recommandations
contenues dans le rapport? Si oui, veuillez fournir des détails,
y compris des exemples concrets.. Trente pays y ont répondu et j’aimerais remercier ces parlements 
			(5) 
			Albanie, Allemagne,
Andorre, Autriche, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Chypre,
Espagne, Estonie, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Islande, Italie,
Lettonie, Lituanie, «l'ex-République yougoslave de Macédoine», Norvège,
Pays-Bas, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, Saint-Marin, République
slovaque, Slovénie, Suède, République tchèque, Turquie. de leurs précieuses observations. La commission des questions juridiques et des droits de l’homme a également procédé, en octobre 2018, à l’audition de George Tugushi, expert du CPT, ancien médiateur de Géorgie, membre du Parlement géorgien, et de Barbara Bernath, Secrétaire générale de l’Association pour la prévention de la torture (Genève, Suisse).
5. Avant de poursuivre, j’aimerais cependant attirer l’attention sur certaines distinctions importantes qu’il y a lieu de faire entre les arrêts de la Cour et les recommandations du CPT. La première transparaît dans la terminologie employée: les arrêts de la Cour sont contraignants pour les États défendeurs, alors que les recommandations du CPT ne le sont pas à proprement parler. Toutefois, comme l’a souligné le CPT à de nombreuses reprises, le principe de coopération énoncé à l’article 3 de la Convention qui l’institue (la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE no 126), CEPT) impose aux États d’agir résolument pour améliorer la situation à la lumière de ses recommandations. Il s’agit d’une caractéristique propre au CPT, que n’ont pas les autres organes de suivi ou mécanismes nationaux de prévention. Mais en vertu de l’article 10.2 de cette même convention, l’absence de coopération ou le refus d’améliorer la situation peut uniquement conduire le CPT à faire une déclaration publique sur cette question. Il peut être indispensable que d’autres acteurs interviennent, notamment les parlementaires.

2. Le rôle de l’Assemblée parlementaire

6. Avant de voir comment les parlements nationaux pourraient apporter un meilleur soutien à l’action du CPT, j’aimerais examiner les propositions formulées dans la Résolution 2160 (2017) au sujet de l'Assemblée: renforcer son soutien politique en réagissant de manière appropriée aux déclarations publiques du CPT; renforcer son dialogue actuel avec le CPT, en particulier par l’intermédiaire de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme; et, plus généralement, prêter davantage attention à la prévention de la torture dans les États membres (paragraphe 8).

2.1. Donner aux déclarations publiques du CPT les suites qui conviennent

7. Le rapport de M. Jordi Xuclà 
			(6) 
			Doc. 14280. et la Résolution 2160 (2017) ont été adoptés il y a un peu plus d’un an et aucune modification importante n’a été apportée aux méthodes de travail de l’Assemblée depuis lors. Je renvoie à l’exposé des motifs détaillé de ce rapport pour une description des travaux antérieurs de l’Assemblée, notamment au sujet du rôle qu’elle joue dans la procédure d’élection des membres du CPT, y compris par ses recommandations portant sur la procédure nationale de sélection des candidats, au sujet de la demande faite au Comité des Ministres de réagir aux déclarations publiques du CPT et au sujet de la pratique d’un échange de vues avec le chef de la délégation à l’Assemblée du pays à propos duquel le CPT a formulé une déclaration publique.
8. Depuis l’adoption de la Résolution 2160 (2017) le 26 avril 2017, notre commission a réaffirmé sa pratique de l’échange de vues avec un représentant du CPT et le chef de la délégation nationale concernée après la publication d’une déclaration publique par le CPT 
			(7) 
			Certains
membres de l'Assemblée ont également pris publiquement position:
voir par exemple <a href='http://assembly.coe.int/nw/xml/News/News-View-FR.asp?newsid=5505&lang=1&cat='>La
Présidente de la Sous-commission des droits de l’homme préoccupée
par la déclaration du CPT sur la Bulgarie</a>, 30 mars 2015.. À la suite de la déclaration publique du CPT sur la Belgique du 13 juillet 2017, la commission a examiné le 12 octobre 2017 la question avec M. Hendrik Daems, président de la délégation belge, ainsi qu’avec M. Mark Kelly, deuxième vice-président du CPT et chef de la délégation du CPT qui s’est rendue en Belgique. La commission a alors décidé de réexaminer cette question dans un délai d’un an, afin d’évaluer les progrès réalisés par les autorités belges pour remédier aux problèmes sur lesquels le CPT avait jugé urgent d’attirer l’attention. Au cours de l’exposé qu’il a fait à l’occasion de son audition par la commission en octobre 2018, M. Tugushi a indiqué que le Parlement belge allait bientôt examiner un projet de loi qui comporte des dispositions visant à remédier aux préoccupations exprimées par le CPT à propos de l’absence de service minimum garanti dans les prisons pendant les actions de revendication du personnel pénitentiaire.
9. L’exemple belge montre comment le dialogue et le soutien politique au sein de l’Assemblée peuvent contribuer à la réalisation au niveau national des améliorations importantes et nécessaires recommandées par le CPT. Toutefois, comme l’a indiqué l’expert, M. Tugushi, lorsque le CPT se trouve contraint de faire une déclaration publique, un grave manquement à améliorer la situation nationale à la lumière de ses recommandations s’est déjà produit. Bien que notre commission doive continuer à inscrire systématiquement à son ordre du jour une réaction rapide aux déclarations publiques et l’organisation d’auditions spécifiques, les parlementaires ont naturellement davantage intérêt à éviter que les situations nationales n’atteignent ce point critique.

2.2. Procéder à une audition annuelle conjointe sur le rapport annuel du CPT et à des auditions thématiques ad hoc

10. La Résolution 2160 (2017) (paragraphe 9) préconisait également que notre commission et la commission de suivi de l’Assemblée réfléchissent ensemble au fait d’inviter chaque année le président du CPT à procéder à un échange de vues au cours duquel pourrait être présenté notamment le rapport annuel du CPT. Les présidents des délégations à l’Assemblée des pays dont les rapports de visites du CPT sont mentionnés dans le rapport annuel et les représentants pertinents de la société civile pourraient être invités à participer à cet échange de vues. Il s’agit d’une proposition intéressante, car elle donne aux membres l’occasion de préciser tout malentendu et leur permettrait de se sentir plus impliqués dans la meilleure utilisation possible des rapports au sein de leur parlement national et dans les travaux de l’Assemblée sur les évolutions nationales, les tendances européennes et toute amélioration indispensable d’urgence, aussi bien au niveau politique que sur un plan concret. Si certains rapports ne sont pas publics, les membres de l’Assemblée pourraient encourager l’État concerné à en autoriser la publication.
11. L’étude du rapport annuel du CPT pourrait également conduire à l’organisation d’auditions thématiques ad hoc sur de nouvelles normes ou des questions en suspens, si possible dans le cadre des débats thématiques que notre commission a récemment mis en place pendant nos réunions habituelles. Cette démarche présente également l’avantage de n’occasionner aucun frais supplémentaire pour l’Assemblée. L’organisation d’une audition annuelle conjointe pourrait cependant devoir être examinée de manière plus approfondie au vu de la situation budgétaire actuelle de l’Assemblée. D’une part, les commissions sont encouragées à réduire le nombre de réunions tenues en dehors des parties de session, ce qui leur laisse moins l’occasion d’exercer ces activités qui demandent inévitablement beaucoup de temps. D’autre part, les restrictions budgétaires peuvent entraîner une diminution du nombre de rapports qui pourront être finalisés par les rapporteurs pour être présentés lors des réunions de commissions, ce qui leur laissera plus de temps pour d’autres activités, comme l’échange de vues proposé. Il importe que notre commission réfléchisse davantage à cette idée pour déterminer si elle correspond à ses priorités, compte tenu de la situation. Cette proposition devrait également être examinée par la commission de suivi, au vu de ses propres priorités et ressources.

2.3. Rendre compte de la prévention de la torture en Europe

12. Quant à l’attention plus soutenue que l’Assemblée devrait porter à la prévention de la torture dans les États membres, rappelons tout d’abord le rapport actuellement élaboré par notre commission sur la protection des droits de l’homme lors du transfèrement des détenus (rapporteur: M. Emanuel Mallia, Malte, SOC). L’Assemblée a également traité au cours de ces dernières années d’autres questions liées à la détention, notamment dans la Résolution 2223 (2018) sur les détenus handicapés en Europe, la Résolution 2154 (2017) sur garantir l’accès des détenus à un avocat, la Résolution 2122 (2016) sur la détention administrative, la Résolution 2082 (2015) sur le sort des détenus gravement malades en Europe, la Résolution 2077 (2015) sur l’abus de la détention provisoire dans les États parties à la Convention européenne des droits de l’homme et la Résolution 2020 (2014) sur les alternatives au placement en rétention d’enfants migrants. Les questions relatives à la détention occupent également une place de premier plan dans des rapports d’ordre plus général sur les migrations, comme la Résolution 2174 (2017) sur les répercussions sur les droits de l’homme de la réponse européenne aux migrations de transit en Méditerranée. Elles apparaissent également dans des rapports spécialement consacrés à certains pays, comme dans la Résolution 2240 (2018) sur l’accès illimité des organes de suivi des droits de l’homme du Conseil de l’Europe et des Nations Unies aux États membres, y compris aux «zones grises», la Résolution 2157 (2017) «Les droits de l’homme dans le Caucase du Nord: quelles suites à donner à la Résolution 1738 (2010)?» et la Résolution 2133 (2016) sur les recours juridiques contre les violations des droits de l’homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes. Elles figurent aussi de manière récurrente dans les rapports de la commission de suivi (par exemple la Résolution 2203 (2018) sur l'évolution de la procédure de suivi de l'Assemblée (janvier-décembre 2017) et l’examen périodique du respect des obligations de l’Estonie, de la Grèce, de la Hongrie et de l’Irlande, la Résolution 2156 (2017) sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Turquie et la Résolution 2149 (2017) sur l’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (septembre 2015-décembre 2016) et l’examen périodique du respect des obligations de l’Autriche, de la République tchèque, du Danemark, de la Finlande, de la France et de l’Allemagne, ainsi que dans les travaux de notre propre commission sur l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme (par exemple la Résolution 2178 (2017), la Résolution 2075 (2015) et les rapports qui les accompagnent). Plusieurs de ces résolutions s’accompagnent de recommandations adressées au Comité des Ministres, dans lesquelles l’Assemblée appelle généralement les gouvernements à continuer d’accorder la plus grande attention à la prévention de la torture et au respect de la dignité humaine en détention 
			(8) 
			Voir,
par exemple, la Recommandation
2132 (2018) sur les détenus handicapés en Europe, la Recommandation 2099 (2017) «Les droits de l’homme dans le Caucase du Nord: quelles
suites à donner à la Résolution
1738 (2010)?», la Recommandation
2110 (2017) sur la mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne
des droits de l’homme, la Recommandation
2081 (2015) sur l’abus de la détention provisoire dans les États
parties à la Convention européenne des droits de l’homme et la Recommandation 2056 (2014) sur les alternatives au placement en rétention d’enfants
migrants..
13. J’espère que ce centre d’intérêt persistera. C’est en rendant compte de la sorte et en continuant à examiner attentivement les sujets de préoccupation pertinents et les avancées nationales que les membres de l’Assemblée contribuent à la sensibilisation aux activités et aux normes du CPT, et finalement à la prise de mesures par les parties prenantes concernées, en vue de mettre en œuvre une politique de «tolérance zéro à l’égard de la torture» dans l’ensemble des États membres européens. À ce propos, il importe que les commissions de l’Assemblée continuent à écouter les experts compétents, en tenant compte de leurs interventions lors des auditions en commission ou de leurs conclusions écrites sur des points précis, et que les membres de l’Assemblée participent aux conférences pertinentes. Les rapporteurs et les rapporteurs généraux ont également la possibilité d’effectuer des visites d’études 
			(9) 
			Voir,
par exemple, <a href='http://assembly.coe.int/nw/xml/News/News-View-FR.asp?newsid=5616&lang=1&cat='>Roumanie
et Monténégro: visite d’information du rapporteur sur les détenus
gravement malades en Europe</a>, 22 mai 2015. et d’assurer un suivi des questions essentielles de l’action du CPT, sous réserve de la disponibilité des ressources nécessaires 
			(10) 
			Voir, par exemple,
la <a href='http://www.assembly.coe.int/nw/xml/News/News-View-FR.asp?newsid=7239'>déclaration</a> de la commission qui exhorte la Fédération de Russie
à libérer les ressortissants ukrainiens détenus pour des chefs d'accusation
motivés par des considérations politiques, sous forme de suites
données à la Résolution
2231 (2018), 10 octobre 2018..

3. Le rôle des parlements nationaux

14. Comme nous l’avons indiqué plus haut, la Résolution 2160 (2017) comporte deux propositions concrètes principales: faire des rapports du CPT l’objet d’un examen des commissions parlementaires et de questions au gouvernement et promouvoir le renforcement du rôle des parlements nationaux grâce aux activités de coopération parlementaire de l’Assemblée. Les travaux de l’Assemblée qui visent à favoriser l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme sont instructifs pour ces deux aspects.

3.1. Quel rôle les parlementaires jouent-ils dans la surveillance du respect des recommandations du CPT?

3.1.1. Remarques générales sur le rôle joué par les parlements dans la mise en œuvre des normes du CPT

15. Bien que les considérations juridiques évoquées dans mon introduction puissent apparemment rendre la situation plus compliquée d’un autre point de vue, le rôle joué par les parlements dans la mise en œuvre des recommandations du CPT est parfois plus simple. La responsabilité directe des autorités nationales à l’égard des conditions de détention est presque systématique, ce qui signifie que les gouvernements sont immédiatement compétents pour procéder aux réformes nécessaires. La surveillance parlementaire de l’exécutif peut donc représenter un moyen particulièrement efficace de promotion des changements dans ce domaine.
16. Dans sa Résolution 1823 (2011) «Les parlements nationaux: garants des droits de l’homme en Europe», l’Assemblée rappelait que les parlements nationaux «sont essentiels à la mise en œuvre effective des normes internationales applicables en matière de droits de l’homme à l’échelon national et [qu’]ils accomplissent leur mission de protection des droits de l’homme [notamment] en demandant des comptes à l’exécutif, en établissant des relations avec les institutions nationales chargées de la protection des droits de l’homme et en favorisant la création d’une culture des droits de l’homme omniprésente. Les membres de l’Assemblée ont, de par leur double mandat de membres de l’Assemblée et de leurs parlements nationaux respectifs, l’obligation particulière de contribuer à cette action».
17. La Résolution 1823 (2011) encourage les parlementaires à superviser la définition et l’application des normes relatives aux droits de l’homme par les autorités judiciaires et administratives nationales et les exhorte à examiner attentivement le travail de l’exécutif de leur pays, notamment à l’égard de la mise en œuvre des normes internationales applicables aux droits de l’homme. Elle appelle également les parlements à mettre en place et/ou renforcer les structures qui permettraient l’intégration et le contrôle rigoureux de leurs obligations internationales relatives aux droits de l’homme, sur la base des «Principes fondamentaux du contrôle parlementaire des normes internationales relatives aux droits de l’homme», qui figurent en annexe (les «Principes fondamentaux»). Ces Principes fondamentaux portent sur le cadre et les attributions adéquats, l’accès à une expertise indépendante et la coopération avec les autres institutions, y compris les institutions nationales de défense des droits de l’homme, et la société civile. Dans sa Résolution 2075 (2017) «La mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme», l'Assemblée appelle à nouveau les États parties à mettre en œuvre les «Principes fondamentaux». Le Secrétaire général des Nations Unies a également déclaré dans son rapport d’août 2017 que «si les droits de l’homme doivent être une préoccupation commune à toutes les commissions parlementaires, la création d’une commission chargée exclusivement des questions de droits de l’homme constitue un signal politique fort et devrait être encouragée» 
			(11) 
			Renforcement de l’action
de l’Organisation des Nations Unies dans le domaine des droits de
l’homme par la promotion de la coopération internationale et importance
de la non-sélectivité, de l’impartialité et de l’objectivité, Rapport du
Secrétaire général, 21 août 2017, A/72/351, paragraphe 35..
18. Le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a lui aussi rappelé «le rôle crucial que les parlements jouent notamment en traduisant les engagements internationaux en politiques et lois nationales et, partant, en contribuant au respect par chaque État Membre de l’Organisation des Nations Unies de ses obligations et engagements en matière des droits de l’homme, et au renforcement de l’état de droit» 
			(12) 
			«Contribution
des parlements aux travaux du Conseil des droits de l'homme et à
son Examen périodique universel», A/HRC/30/L.23, 29 septembre 2015,
et Résolution adoptée par le Conseil des droits de l'homme le 23
juin 2017, A/HRC/RES/35/29.. La Déclaration de Bruxelles de 2015 sur «La mise en œuvre de la Convention européenne des droits de l’homme, notre responsabilité partagée» a elle aussi rappelé le rôle essentiel joué par les parlements nationaux pour garantir et protéger les droits de l’homme au niveau national.
19. De plus, dans son récent rapport, le Conseil des droits de l’homme a reconnu davantage encore le rôle fondamental joué par les parlements dans la promotion et la protection des droits de l’homme, en prolongeant et en amplifiant les principes identiques énoncés par l’Assemblée en 2011 et en élaborant des «projets de principes sur les parlements et les droits de l’homme» (les «projets de principes»), qui feront l’objet d’un plus ample examen dans le cadre d’une consultation des membres des commissions parlementaires des droits de l’homme 
			(13) 
			«Contribution des parlements
aux travaux du Conseil des droits de l'homme et à son Examen périodique
universel», <a href='http://undocs.org/fr/A/HRC/38/25'>A/HRC/38/25</a>, 17 mai 2018; voir en particulier l'annexe I pour les
«projets de principes sur les parlements et les droits de l'homme».. Le rapport qualifie également les parlements de «gardiens du rôle essentiel des organisations de la société civile» auprès desquelles ils recueillent «les faits nouveaux et les préoccupations en rapport avec les droits de l’homme». Il ajoute que «les parlements sont, de par leur position sans équivalent, à même de contribuer à combler les lacunes de la mise en œuvre des droits de l’homme, de prévenir leurs violations et d’assurer une meilleure protection, surtout des groupes vulnérables». Le rapport précise en outre que «les parlements assurent le lien entre les domaines internationaux et nationaux des droits de l’homme, en agissant comme l’un des principaux canaux au travers desquels les recommandations des mécanismes internationaux et régionaux de protection des droits de l’homme parviennent jusqu’à l’échelon national, en particulier dans le cadre de leurs compétences législatives, d’affectation budgétaire et de surveillance». Il ressort de ce qui précède que les initiatives destinées à favoriser la possibilité de renforcer le rôle joué par les parlements dans la phase de prévention et de mise en œuvre des recommandations du CPT devraient être profitables aux instances dirigeantes.

3.1.2. Un dialogue renforcé avec l’exécutif sur la mise en œuvre des recommandations du CPT

20. Les parlements nationaux ont avant tout un rôle essentiel à jouer en demandant à leurs gouvernements de rendre compte de leurs actes 
			(14) 
			Les
parlements nationaux devraient par exemple, si besoin est, demander
à leurs gouvernements de prendre toutes les mesures qui s'imposent
pour garantir que les nominations des membres du CPT soient présentées
en temps utile.. Il importe de renforcer le dialogue entre les gouvernements et les parlements, en particulier sur les questions relatives aux recommandations du CPT qui portent sur les normes générales européennes et les normes propres à chaque pays. Les deux tiers au moins des réponses données par les services de recherche parlementaires indiquent que les activités exercées par les parlements dans le domaine de la mise en œuvre des normes du CPT s’inscrivent dans le cadre de leur surveillance générale de l’action du gouvernement.
21. Il ressort de mes recherches que les débats parlementaires sont très souvent provoqués par une situation précise. Par exemple, le Conseil national de la République slovaque a réagi à des cas de mauvais traitements commis par les pouvoirs publics et a examiné des amendements à la législation qui visaient à se conformer aux recommandations du CPT 
			(15) 
			Dans
sa réponse à mon questionnaire, l'institut parlementaire de la République
slovaque a mentionné un débat consacré par le Conseil national à
l'éventuelle révision de la réglementation des forces de police
à l'égard du traitement des personnes confinées à certains secteurs
géographiques précis. Le débat portait sur une «directive de mise
en œuvre des activités visant à se conformer aux recommandations
du CPT» prise par le président des forces de police le 26 janvier 2015.. Bien que les parlements aient, selon moi, davantage de possibilités d’agir par anticipation de plusieurs manières, comme je m’y référerai plus avant, ce type d’approche réactive, pour reprendre les termes employés par M. Tugushi au cours de notre audition, reste essentiel pour l’action des gouvernements. Il importe que les rapports du CPT fournissent aux parlements les moyens de réagir efficacement aux politiques et aux pratiques gouvernementales relatives aux recommandations du CPT. De leur côté, les gouvernements peuvent utiliser toute nouvelle information tirée des débats parlementaires publics et des questions parlementaires écrites ou orales habituelles dans leurs rapports de mise en œuvre et dans leurs réformes pertinentes. Les parlements deviennent le pendant essentiel de la mise en œuvre adéquate des recommandations du CPT par les gouvernements 
			(16) 
			Voir par exemple la <a href='http://www.dekamer.be/kvvcr/showpage.cfm?section=qrva&language=fr&cfm=qrvaXml.cfm?legislat=54&dossierID=54-B165-866-2794-2017201824031.xml'>question
orale du député belge Gilles Vanden Burre</a> de juin 2018 et la réponse écrite sur la situation des
détenus, dans laquelle il mentionne les constatations faites par
le CPT à la suite de sa dernière visite en 2017, <a href='https://rm.coe.int/16807913b1'>CPT/Inf(2018)8</a>. Voir également la <a href='http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-51355QE.htm'>question
du député français Sergio Coronado</a> de 2014 et la réponse du gouvernement sur la pratique
consistant à réveiller les détenus pendant la nuit, mentionnée par
le CPT dans son rapport consacré à sa visite effectuée en 2010 en
France, <a href='https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=0900001680696082'>CPT/Inf(2012)13</a>, paragraphe 67..
22. Selon M. Tugushi, plusieurs commissions parlementaires nationales ont procédé à l’audition de représentants du CPT et d’autres experts nationaux et internationaux lorsque des projets de loi pertinents ou des propositions budgétaires étaient déposés devant le parlement. Il considère que certains exemples montrent clairement que les parlementaires mentionnent expressément les rapports du CPT lorsqu’ils débattent de nouvelles dispositions législatives sur les prisons. Il a évoqué l’utilisation par des parlementaires belges de considérations du CPT à l’occasion de l’examen d’un projet de loi sur le service pénitentiaire et le statut des détenus en 2005. Les parlementaires français ont également été attentifs aux rapports du CPT lors de l’examen d’un projet de loi sur les prisons quelques années plus tard. J’encourage les parlements nationaux à adopter ce type de pratique de façon quasi systématique.
23. Les rapports de visites du CPT sont adressés aux gouvernements de manière confidentielle pour faciliter une coopération étroite avec les autorités nationales. Toutefois, il importe que ces rapports soient rapidement publiés après leur transmission, comme ce devrait être le cas pour les réponses des gouvernements. Cette démarche permettrait aux parlements de mieux connaître les questions relatives au CPT et de faciliter le dialogue pertinent entre les parlements et les gouvernements. L’Assemblée s’est félicitée en particulier du fait que les États soient de plus en plus nombreux à autoriser «à l’avance la publication automatique des rapports de visite du CPT et des réponses du gouvernement qui s’y rapportent, sous réserve de la possibilité de retarder la publication pendant une certaine période dans des circonstances particulières» 
			(17) 
			Résolution 2160 (2017), paragraphes 7.1 et 7.2. Cette publication automatique
a également été encouragée par le Comité des Ministres dans sa réponse
à la Recommandation 2100
(2017), du 30 novembre 2017, Doc. 14445. Voir également la Résolution 1808 (2011), la Recommandation
1968 (2011) et la réponse du Comité des Ministres du 21 février
2012, Doc.12877.. En faisant le point sur les faits nouveaux survenus depuis que mon collègue, M. Jordi Xuclà (Espagne, ADLE), a indiqué dans son exposé des motifs de la Résolution 2160 (2017) 
			(18) 
			Voir
le Doc. 14280, paragraphe 39. Voir également la liste présentée sur
le site internet du CPT, disponible sur le lien suivant: <a href='https://www.coe.int/en/web/cpt/faqs'>www.coe.int/en/web/cpt/faqs#automatic-procedure</a>. que huit pays (à savoir l’Autriche, la Bulgarie, la Finlande, le Luxembourg, la République de Moldova, Monaco, la Suède et l’Ukraine) avaient accepté de recourir à la «procédure de publication automatique», je n’ai trouvé qu’un pays à ajouter à cette liste: le Danemark. Je réitère par conséquent l’appel lancé par l’Assemblée aux États membres en faveur de la publication rapide et systématique de ces rapports, car elle permet aux parlements nationaux «de contribuer au processus de mise en œuvre des recommandations contenues dans ces rapports» 
			(19) 
			Le CPT a ajouté dans
son tout dernier rapport annuel que «le fait d’autoriser la publication
des documents relatifs aux visites est un indicateur du fort niveau
d’engagement dans la mise en œuvre des recommandations du CPT. (…)
Le CPT se félicite de pouvoir constater que le Comité des Ministres
tout comme l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ont
récemment encouragé les États qui ne l’ont pas encore fait à demander
à l’avance la publication automatique des futurs rapports de visite
du CPT et des réponses gouvernementales correspondantes». 27e Rapport
général du CPT, 1er janvier au 31 décembre
2017, <a href='https://rm.coe.int/16807bc1d0'>CPT/Inf(2018)4</a>.. Si besoin est, cette procédure donne aux parlementaires la possibilité de réagir aux situations qui exigent d’urgence l’action du gouvernement ou d’utiliser les informations les plus récentes sur la situation de leur pays lorsqu’ils examinent des problèmes de longue date et des réformes nationales.
24. De plus, il importe que les rapports du CPT soient rendus plus accessibles aux parlementaires et au grand public grâce à une traduction dans leur langue nationale, dans la mesure du possible, et qu’ils soient disponibles dans les centres de documentation des parlements nationaux et sur des sites internet régulièrement mis à jour. Cette méthode donnerait sans aucun doute aux parlementaires et aux autres organisations davantage d’occasions de participer, grâce aux divers canaux de dialogue disponibles, de demander des comptes à leurs gouvernements, de faire connaître au grand public leur propre point de vue et de protéger les normes du CPT.

3.1.3. Un dialogue renforcé avec les mécanismes nationaux de prévention et les autres organes similaires

25. La prévention de la torture est devenue une responsabilité partagée qui exige une approche politique intégrée. À cette fin, les parlements nationaux sont fortement encouragés à entretenir des liens avec les institutions nationales de défense des droits de l’homme, notamment les mécanismes nationaux de prévention et les médiateurs, afin d’assurer une collecte des informations et un débat approfondis sur la mise en œuvre des normes applicables en matière de torture et de détention.
26. Dans les États Parties au Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la torture (OPCAT), les mécanismes nationaux de prévention ont des compétences et un mandat similaires à celui du CPT et sont établis en permanence dans le pays. 37 mécanismes nationaux de prévention exercent leurs activités dans les États membres du Conseil de l’Europe 
			(20) 
			Voir la <a href='https://apt.ch/fr/opcat-database/'>base
de données de l’OPCAT</a> pour consulter la liste des pays qui ont désigné leur
mécanisme national de prévention. Neuf États membres du Conseil
de l'Europe (Andorre, Belgique, Irlande, Islande, Lettonie, Monaco, Fédération
de Russie, Saint-Marin et République slovaque) ne sont pas Parties
à l’OPCAT et n'ont donc pas désigné de mécanisme national de prévention.
La Bosnie-Herzégovine est Partie à l’OPCAT, mais n'a pas désigné
de mécanisme national de prévention.. L’Assemblée a reconnu dans sa Résolution 2160 (2017) que les mécanismes nationaux de prévention sont «une expression concrète de la subsidiarité». Le médiateur parlementaire de Norvège m’a par exemple indiqué que le CPT a été une source importante de normes et de méthodologie depuis l’établissement d’un mécanisme national de prévention dédié en 2014. Les méthodes de travail du mécanisme national de prévention de Norvège se sont fortement inspirées de la méthodologie établie et utilisée par le CPT, y compris dans le cadre des visites des lieux de détention.
27. Il n’est guère surprenant que la majorité des pays qui ont répondu au questionnaire mentionnent le mandat de leur mécanisme national de prévention ou de leur médiateur, qui vise à assurer le respect des obligations de mise en œuvre des normes du CPT. Les synergies entre ces institutions indépendantes et les parlements sont donc essentielles pour que ces derniers puissent donner suite efficacement aux recommandations du CPT. L’immense majorité d’entre elles ont déjà un contact direct avec les parlements. Selon l’Association pour la prévention de la torture, 27 d’entre elles sont des institutions de médiateurs qui présentent leur rapport annuel au parlement; c’est également le cas de certains mécanismes nationaux de prévention spécialisés, comme l’Inspection nationale des prisons (Her Majesty’s Inspectorate of Prisons) du Royaume-Uni ou la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté en France. En Autriche, le médiateur (Volksanwaltschaft) est le principal organe de suivi des recommandations du CPT. Il accorde dans ses rapports une attention particulière au suivi préventif des droits de l’homme en général et aux questions relatives au CPT en particulier. Ces rapports sont ensuite examinés par la «commission du médiateur» du Conseil national. Comme les membres de la commission du médiateur ont le droit de s’exprimer devant le parlement, ils mettent l’accent sur ces questions dans le cadre de la procédure de la commission du budget.
28. Tout en respectant l’exigence d’indépendance des mécanismes nationaux de prévention fixée par l’OPCAT, les parlements peuvent jouer un rôle important en réfléchissant à d’autres possibilités d’interaction avec ces institutions. Les rapports du CPT peuvent servir à renforcer la nécessité de ratifier l’OPCAT et à désigner les mécanismes nationaux de prévention en fonction. Les parlements peuvent apporter leur soutien aux propositions et recommandations des mécanismes nationaux de prévention. En outre, il convient d’établir un dialogue ad hoc avec les mécanismes nationaux de prévention et les autres instances similaires, si possible conjointement avec le gouvernement, à la suite de chaque publication de rapport de visite ou de déclaration publique du CPT ou, si besoin est, dans le cadre de l’adoption de projets de loi pertinents ou de décisions budgétaires. Ces synergies renforcées pourraient être énoncées dans un protocole d’accord.

3.2. Une action en amont en faveur des normes du CPT

3.2.1. Mécanismes et outils parlementaires destinés à faire le bilan et la promotion des recommandations du CPT

29. L’examen des rapports de visites et des déclarations publiques du CPT devraient avoir lieu peu de temps après leur publication, indépendamment du fait qu’un projet de loi soit examiné ou non. Ainsi, la commission permanente spéciale de l’égalité, de la jeunesse et des droits de l’homme du Parlement grec a examiné, dès leur publication, les observations préliminaires du CPT à la suite de la visite ad hoc effectuée par ce dernier en avril 2018 
			(21) 
			<a href='https://rm.coe.int/16808afaf6'>CPT/Inf(2018)20</a>.. Le Parlement portugais m’a indiqué qu’il envisageait à l’heure actuelle de procéder à l’audition de dirigeants du gouvernement et de membres de l’administration et à la visite de prisons, à la suite de la présentation à la commission des questions constitutionnelles du parlement de la récente publication du rapport du CPT sur sa visite périodique effectuée en 2016 
			(22) 
			<a href='https://rm.coe.int/168078e1c8'>CPT/Inf(2018)6.</a>.
30. Il serait également opportun que les parlements examinent systématiquement les rapports annuels du CPT et qu’ils aient la possibilité d’examiner des questions thématiques qui ne sont pas encore abordées par le rapport de visite du pays, comme l’a expliqué Mme Bernath de l’Association pour la prévention de la torture lors de notre audition. Je souscris également à la proposition de Mme Bernath, qui préconise que les parlements nationaux procèdent à un bilan ponctuel de l’évolution concrète et des questions en suspens. Cette démarche pourrait être effectuée conjointement par les parlements nationaux et les mécanismes nationaux de prévention ou les autres instances nationales de suivi, ainsi que par le CPT. Elle pourrait privilégier un thème particulier ou un type de lieu de détention et pourrait débuter par une comparaison entre le premier rapport de visite du CPT et son rapport (public) le plus récent. Ce type d’analyse permettrait utilement au parlement de définir ses priorités stratégiques. Le choix de la forme de ces événements (durée, public ciblé, etc.) et de l’activité de compte rendu devra être défini par les parlements en fonction des ressources allouées, des priorités, du temps disponible et des exigences concurrentes des travaux parlementaires.
31. En outre, il importe que les parlementaires deviennent les porte-parole des droits de l’homme, en particulier de la prévention de la torture, en participant aux campagnes générales et aux événements interactifs. À cette fin, il serait extrêmement opportun d’organiser des événements de sensibilisation et des programmes de formation destinés aux parlementaires et à leur personnel parlementaire sur les droits de l’homme, et plus particulièrement sur les normes du CPT. Les parlementaires peuvent prendre part à la définition de leurs besoins et des ressources disponibles pour ces activités.
32. Les visites des lieux de détention se révèlent très utiles pour la sensibilisation des parlementaires aux conditions de détention et à la situation des détenus. En Europe, plusieurs parlements octroient un mandat spécial aux parlementaires ou à des commissions spéciales pour la visite des prisons et des autres lieux de détention 
			(23) 
			En 2014, l'Assemblée
a envoyé un questionnaire auquel 36 États membres ont répondu. Elle
a indiqué dans son <a href='https://pace.coe.int/fr/web/as-mig/immigration-detention'>«Guide
à l’intention des parlementaires – Visites de centres de rétention
pour migrants</a>» de 2014 que «dans 10 pays, les parlementaires ont le
droit de visiter tous les centres de rétention: cela peut être prévu
expressément (Belgique, Italie, France, Lituanie et Pologne) ou
implicitement par la législation ou la réglementation (comme en
Autriche et en Norvège) ou être un droit qui découle simplement
du statut général des parlementaires (Hongrie, Moldova et Portugal).
Dans certains pays tels que la Roumanie ou la Finlande, la possibilité
de visiter les centres de rétention découle du droit général des
parlementaires d’être informés, comme le garantit la Constitution.
Dans une large majorité de pays, le droit n’est pas formulé par
la loi, mais la possibilité existe. Les parlementaires doivent donc
agir de leur propre initiative. Cela signifie que les parlementaires
doivent demander l’autorisation de visite à l’avance. Certains pays
tels que la Lettonie, «l’ex-République yougoslave de Macédoine»
et la Suisse (au niveau cantonal) accordent à un comité, une commission
ou un groupe de travail parlementaire spécifique le droit de visiter
régulièrement les centres de rétention».. Ces visites n’équivalent pas à des visites de suivi, mais permettent au contraire aux parlementaires d’être confrontés à la réalité des lieux de détention. En pareil cas, les rapports du CPT sont autant d’outils de travail inestimables. Ils permettent aux parlementaires de comprendre comment les recommandations du CPT sont mises en œuvre. L’expérience des visites devrait être utile pour les parlementaires qui rédigent des projets de loi et leur conférerait une plus grande autorité lorsqu’ils adressent des questions à leurs gouvernements sur les problèmes posés par la détention. Rappelons que l’Assemblée a publié en 2014, en coopération avec l’Association pour la prévention de la torture, un «Guide à l’intention des parlementaires – Visites de centres de rétention pour migrants», qui vise à sensibiliser, à encourager et à aider les parlementaires à la visite des lieux de rétention des migrants en situation irrégulière et des demandeurs d’asile. Bon nombre des principes directeurs énoncés dans ce guide sont applicables à d’autres lieux de détention.
33. La sensibilisation du grand public aux normes du CPT, lorsqu’elle s’effectue dans le cadre de leurs fonctions habituelles, n’occasionne pas de dépenses importantes, mais certaines activités et certains outils doivent parfois être spécialement inscrits au nombre des priorités budgétaires. Certaines activités exigent en effet un secrétariat spécialisé et une logistique particulière, mais ceux-ci peuvent être organisés de manière peu coûteuse au regard des résultats. Lorsque les ressources sont limitées, les parlementaires peuvent par exemple, pour commencer, visiter un centre de détention situé dans leur circonscription et éviter ainsi des frais de voyage et d’hébergement excessifs. La mise à disposition des normes dans la langue nationale sur un site internet, que ce soit par l’intermédiaire d’un centre de documentation parlementaires ou d’une autre structure, exige une coordination entre les parties prenantes du parlement et du gouvernement et, là encore, les ressources nécessaires.

3.2.2. Les structures parlementaires destinées à faire le bilan et la promotion des recommandations du CPT par le parlement

34. Comme nous l’avons vu plus haut, les «Principes fondamentaux» de l'Assemblée de 2011 recommandent que les «parlements nationaux établissent des structures parlementaires adéquates pour garantir le suivi et le contrôle rigoureux et régulier du respect des obligations internationales en matière de droits de l’homme, qu’il s’agisse de commissions des droits de l’homme spécifiques ou de structures analogues adéquates, dont les compétences doivent être clairement définies et consacrées par la loi». Selon les projets de principes sur les parlements et les droits de l’homme («projets de principes») élaborés en 2018 par le Conseil des droits de l’homme, «une commission parlementaires des droits de l’homme doit avoir le mandat le plus étendu possible, qui prend en compte l’ensemble des droits de l’homme définis en droit interne et en droit international». Elle doit être définie par «un mandat précis, qui fixe son objet et ses buts». Cette méthode devrait renforcer l’efficacité, la précision et la crédibilité de l’action que les parlementaires visent à réaliser. Les structures parlementaires établies conformément à ces principes devraient également agir pour donner suite aux recommandations du CPT rapidement et de manière effective.
35. Les études réalisées par la Division de soutien de projets parlementaires (DSPP) de l’Assemblée en 2016 montrent que de nombreux parlements nationaux possèdent des commissions ou sous-commissions spécialement consacrées aux droits de l’homme (notamment l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Finlande, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, la Lettonie, le Monténégro, la Roumanie, le Royaume-Uni et la République tchèque); d’autres pays ont adopté une approche intégrée, dans laquelle toutes les commissions sont en principe compétentes pour aborder les aspects relatifs aux droits de l’homme des questions relevant de leur mandat (par exemple le Danemark, les Pays-Bas, la Fédération de Russie et la Suède). Les structures parlementaires de certains pays présentent un caractère hybride, qui réunit les deux conceptions (par exemple l’Allemagne, l’Arménie, Chypre, la Géorgie, l’Italie et la Lituanie). Les gouvernements de plusieurs pays font systématiquement rapport au parlement sur les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme qui concernent leur pays (par exemple l’Allemagne, la Croatie, la Hongrie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni) 
			(24) 
			«Le
rôle des parlements dans la mise en œuvre des normes de la CEDH
[Convention européenne des droits de l’homme]: vue d’ensemble des
structures et des mécanismes existants, Note de fond», <a href='https://pace.coe.int/documents/10643/695436/20142110-PPSDNotefondstandardsCEDH-FR.pdf/b9269fd5-1d1e-43bd-9722-146f28e0b3c9'>PPSD(2016)19</a>, 31 octobre 2016.. Un rapport de 2018 de la DSPP fait état de nouveaux progrès réalisés entre 2015 et 2017, à propos de nouvelles commissions ou sous-commissions parlementaires des droits de l’homme qui ont été créées en Arménie, en Géorgie, en République de Moldova et en Ukraine 
			(25) 
			«PACE activities implemented
in the framework of the Partnership for Good Governance (PGG) in
2015-2017: Summary Report», <a href='https://pace.coe.int/documents/10643/4306264/PPSD-2018-06-FR.pdf/8390041e-8b55-4931-8d49-e5e170edffc5'>PPSD(2018)06rev</a>, 19 avril 2018..
36. Les réponses au questionnaire révèlent également que les rapports du CPT sont présentés à des commissions parlementaires spécialement mandatées. Pourtant, cette mesure ne suffit pas toujours à assurer leur examen adéquat par les parlementaires. Le Parlement néerlandais, par exemple, m’a indiqué que, même si les suites données par le gouvernement au dernier rapport du CPT avaient figuré à l’ordre du jour de la commission permanente de la sécurité et de la justice, aucun parlementaire n’avait fait état de la moindre préoccupation au sujet du rapport du CPT au cours du débat qui leur avait été consacré. En outre, le rapport de 2016 de la DSPP rappelait que «malgré les avantages potentiels d’une commission ou d’une sous-commission spécialisée dans les droits de l’homme, laisser le soin de l’examen de la conformité aux droits de l’homme à un seul et unique organe spécialisé risque de créer un “silo” au sein du Parlement et de décourager l’intégration dans les travaux d’autres commissions des droits de l’homme et des questions connexes relatives à l’État de droit. De plus, l’existence même d’une commission spécialisée ne garantit pas l’efficacité de la mise en œuvre; l’efficacité de ces structures dépend davantage de facteurs tels que la volonté politique et l’accès à des conseils juridiques spécialisés».
37. De fait, il importe que l’Assemblée garde ces considérations à l’esprit et continue à soutenir le rôle important des parlements nationaux en appelant à la mise en place de ces structures, si elles n’existent pas encore dans leurs États membres, et à leur renforcement lorsqu’elles sont déjà présentes. Le renforcement de ces structures implique avant tout que les parlements nationaux aient la volonté politique d’assurer leur bon fonctionnement et que les compétences de ces structures soient «clairement définies et consacrées par la législation», comme le soulignent les «Principes fondamentaux». J’encourage tout particulièrement chaque parlement à veiller à ce que les normes du CPT figurent véritablement dans les procédures et le mandat de ces structures. M. Tugushi a par exemple expliqué que le Parlement géorgien avait établi des mécanismes spécifiques de suivi de l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi que des recommandations adressées par les organes conventionnels des Nations Unies et au titre de l’Examen périodique universel. Ces mécanismes ont facilité la présentation et l’examen des rapports pertinents du gouvernement au cours des auditions de la Commission des questions juridiques et de la Commission des droits de l’homme et de l’intégration des citoyens. Le Parlement géorgien et d’autres parlements pourraient envisager d’inclure les recommandations du CPT dans le même cadre.
38. Les rapporteurs généraux particuliers ou les correspondants des questions relatives au CPT au sein de ces structures parlementaires pourraient être désignés parmi les membres connus pour leurs compétences dans le domaine des droits de l’homme ou pour leur expérience professionnelle dans les domaines qui relèvent de la Convention européenne pour la prévention de la torture. Des programmes de formation et des activités de sensibilisation, qui donnent accès à une expertise externe indépendante, peuvent être destinés à ces structures spécifiques et à leur personnel. Comme l’indique le rapport de 2016 de la DSPP, il est particulièrement important de mettre en place un personnel parlementaire professionnel, car il «garantit une continuité entre les législatures et permet la création d’une “mémoire institutionnelle” liée aux travaux de la commission des droits de l’homme». Ces structures offriraient également un terrain plus favorable à la consultation et à l’entretien de contacts avec les mécanismes nationaux de prévention, les médiateurs et les autres instances similaires, les organes internationaux (par exemple le CPT, l’Assemblée parlementaire, le Sous-comité des Nations Unies pour la prévention de la torture, etc.), ainsi qu’avec les représentants de la société civile qui œuvrent en faveur de la prévention de la torture. Il importe d’examiner les questions relatives à la fourniture de ressources financières et humaines suffisantes pour permettre aux structures d’exercer efficacement leurs fonctions.

3.3. Les possibilités d’activités de coopération parlementaire

39. Le soutien réciproque entre parlements grâce à une série d’activités de l’Assemblée peut se révéler très utile pour la sensibilisation des parlements nationaux aux normes et aux outils de prévention de la torture. Cette assistance technique et politique dispensée entre parlements peut favoriser l’établissement de structures et de mécanismes parlementaires de prévention de la torture et de protection des droits de l’homme. Le dialogue entre parlements offre par ailleurs un moyen de renforcer, dans le cadre d’une coopération, la volonté politique et l’engagement en faveur de la mise en œuvre des normes du CPT et des suites à donner aux recommandations du CPT.
40. La DSPP a mené ces dernières années diverses activités de coopération avec les parlementaires et les agents des parlements nationaux. Les activités pertinentes pour le présent rapport peuvent être regroupées dans les quatre catégories suivantes:
  • les séminaires destinés aux parlementaires et consacrés à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants en général (par exemple en avril 2016 à Strasbourg, en mars 2017 à Borjomi et en juin 2017 et novembre 2018 à Budapest);
  • les séminaires destinés aux parlementaires et consacrés au rôle joué par les parlements dans la surveillance de l’exécution des arrêts de la Cour (par exemple en octobre 2013 à Londres, en février 2014 à Varsovie, en octobre 2014 à Madrid, en septembre 2015 à Tbilissi et en avril 2017 à Strasbourg);
  • les séminaires destinés aux agents des parlements nationaux et consacrés à la Convention en général (par exemple en juin 2012, en septembre 2013, en janvier et septembre 2014, en mars 2015 et en septembre 2016, à chaque fois à Strasbourg);
  • les séminaires consacrés aux visites des parlementaires dans les centres de rétention pour migrants, suivis de visites accompagnées dans ces centres (par exemple en décembre 2012 à Strasbourg, en octobre 2013 à Zurich, en novembre 2014 à Calais, en mai 2015 à Amsterdam (Schiphol) et en novembre 2016 à Vordernberg).
41. Bien que tous ces séminaires abordent des questions qui peuvent être liées aux recommandations du CPT, la DSPP devrait concevoir des activités qui portent plus particulièrement sur les normes et les recommandations du CPT et sur leur mise en œuvre par les parlements nationaux. Il convient toutefois de noter que la situation budgétaire actuelle a contraint à réduire les activités de coopération parlementaire de l’Assemblée. Le 26 janvier 2017, le Bureau de l’Assemblée a décidé que les activités de coopération seraient en principe limitées à celles pour lesquelles un financement supplémentaire est assuré (par les programmes conjoints de l’Union européenne, des contributions volontaires, y compris des projets précis comme les campagnes parlementaires, etc.). Bien que certaines des activités mentionnées ci-dessus aient été financées par des sources extérieures, en particulier par l’Union européenne, cet élément doit être pris en compte lors de l’examen des possibilités futures d’activités de coopération pertinentes pour le présent rapport. Il importe d’encourager les donateurs extérieurs, y compris les États membres de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe qui versent des contributions volontaires, à financer les activités de coopération décrites ici. L’Assemblée devrait inviter le Comité des Ministres à garantir, conjointement avec la DSPP, que la dimension parlementaire des activités de coopération figure dans les divers programmes financés et organisés pour la mise en œuvre des normes et des recommandations du CPT par les États membres.

4. Conclusions et recommandations de politique générale

42. Les recommandations formulées depuis longtemps dans les rapports du CPT, ainsi que l’évidente nécessité pour l’Assemblée de continuer à traiter les questions relatives à la détention, soulignent qu’il importe de maintenir et de renforcer les initiatives de prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants dans les États membres du Conseil de l’Europe. À cet égard, les parlements nationaux ont un rôle important à jouer. Malgré les importants progrès réalisés pour développer la capacité des parlements nationaux à agir en qualité de garants des droits de l’homme à l’égard des droits de l’homme en général et de la surveillance de l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme en particulier, on ne peut affirmer qu’il en va de même pour les recommandations du CPT. Comme l’interdiction en toutes circonstances de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, qui représentent peut-être l’atteinte la plus flagrante à la dignité humaine fondamentale, est une norme impérative du droit international, il s’agit clairement d’un domaine dans lequel l’impératif moral est particulièrement marqué.
43. Les travaux approfondis déjà réalisés sur le rôle joué par les parlements nationaux en qualité de garants des droits de l’homme montrent qu’il existe de nombreuses voies prometteuses à explorer, qui permettraient de faire davantage pour assurer une meilleure mise en œuvre des recommandations du CPT par les autorités nationales. La création à l’échelon national de nouveaux mécanismes et structures conformes aux «Principes fondamentaux du contrôle parlementaire des normes internationales relatives aux droits de l’homme» ou le renforcement du mandat et des activités des mécanismes et structures existants, ainsi que l’action de mécanismes de surveillance et de suivi plus efficaces, contribueraient à cet objectif. Les activités de coopération parlementaire de l’Assemblée pourraient comporter des projets destinés à soutenir cette fonction particulière, comme cela a été fait pour renforcer le rôle joué par les parlements nationaux dans la surveillance de l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme.