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Recommandation 2151 (2019)

Création d’un mécanisme de l’Union européenne pour la démocratie, l’État de droit et les droits fondamentaux

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 9 avril 2019 (13e séance) (voir Doc. 14850, rapport de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, rapporteure: Mme Petra De Sutter; Doc. 14862, avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: Lord Richard Balfe; Doc. 14860, avis de la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi), rapporteur: M. Andrej Šircelj). Texte adopté par l’Assemblée le 9 avril 2019 (13e séance).

1. L'Assemblée parlementaire, se référant à sa Résolution 2273 (2019) «Création d’un mécanisme de l’Union européenne pour la démocratie, l’État de droit et les droits fondamentaux», se félicite de la coopération fructueuse entre l'Union européenne et le Conseil de l'Europe visant à assurer un meilleur respect des valeurs communes que sont les droits de l'homme, la démocratie et l’État de droit.
2. Elle rappelle que le Mémorandum d'accord conclu en 2007 entre les deux organisations établit des priorités communes en matière de coopération institutionnelle, qui se fondent sur un partenariat renforcé et une complémentarité, et sont appelées à être mises en œuvre par des stratégies communes. En outre, le mémorandum contient un engagement ferme des deux organisations à «établir des normes communes» afin de promouvoir une Europe sans clivages.
3. L'Assemblée note que les domaines de coopération définis par le Mémorandum d'accord ont été progressivement regroupés sous les piliers du dialogue politique, des activités conjointes et de la coopération juridique. En ce qui concerne la coopération juridique dans les domaines liés à l’État de droit, l’Assemblée constate qu’un certain nombre d’accords de coopération ont été élaborés par la Commission européenne et certains organes d’experts du Conseil de l’Europe, visant à accroître l’échange et le partage d’informations, de connaissances et d’expériences, permettant ainsi de préserver la cohérence des normes de l'État de droit et la complémentarité des actions.
4. L'Assemblée considère toutefois que, compte tenu du contexte politique et institutionnel dans lequel les initiatives de l'Union européenne en matière d'État de droit sont prises et mises en œuvre, les questions liées à l'État de droit requièrent, outre une coopération juridique au niveau technique, que le Comité des Ministres intensifie son action politique.
5. Plusieurs initiatives et mécanismes de l'Union européenne visant à garantir que les États membres de l'Union respectent les normes de l'État de droit ont vu le jour ces dernières années. Ils impliquent différentes institutions, sont fondés sur différents paradigmes et diffèrent par leur nature et leurs effets coercitifs. L'article 7 du Traité sur l’Union européenne a récemment été déclenché par la Commission européenne en ce qui concerne la Pologne et par le Parlement européen en ce qui concerne la Hongrie. Les évaluations fournies par divers organes d’experts du Conseil de l’Europe ont été largement utilisées pour appuyer les deux propositions.
6. L’Assemblée note que le Traité de Lisbonne a modifié la base du dialogue politique entre les deux organisations, les relations de l’Union européenne avec le Conseil de l'Europe relevant depuis de la compétence du Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Dans la mesure où celui-ci ne participe pas directement à l'élaboration et à la mise en œuvre des initiatives de l'Union européenne relatives à l'État de droit, l’Assemblée regrette que, avec la fin des réunions quadripartites, la voix du Conseil de l'Europe, représentée par la présidence du Comité des Ministres et le Secrétaire Général de l’Organisation, ne trouve plus à se faire entendre, sur ces questions, directement au plus haut niveau politique et institutionnel auprès de la présidence de l’Union européenne et de la présidence de la Commission européenne.
7. Compte tenu du contexte actuel et malgré le fondement solide de la coopération juridique existante, l'Assemblée se déclare préoccupée par le fait que, à long terme, la diversité des initiatives liées à l'État de droit impliquant différentes institutions de l'Union européenne risque de compromettre à la fois l'objectif déclaré dans le Mémorandum d’accord de garantir la cohérence du système normatif en Europe, et la complémentarité et l'efficacité des mécanismes de défense des valeurs partagées des droits de l'homme, de la démocratie et de l’État de droit existant dans les deux institutions à l'égard des États qui sont membres à la fois du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne.
8. L’Assemblée réaffirme les termes de sa Recommandation 2060 (2015) sur la mise en œuvre du Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, dans laquelle elle soulignait que «l’objectif ultime du partenariat entre les deux organisations, fondé sur l’acquis et les atouts propres à chacune, est de poursuivre la construction d’un espace commun de protection des droits de l’homme et de garantir la cohérence des normes et le suivi de leur application en Europe», et, afin «d’assurer une coopération juridique approfondie, de renforcer la complémentarité et la cohérence des normes juridiques et d’offrir un cadre unique pour les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit en Europe (…) [demandait au Comité des Ministres] d’assurer une coopération active avec l’Union européenne dans la mise en œuvre du nouveau cadre pour renforcer l’État de droit au sein des États membres de l’Union européenne; [et] de continuer de développer des synergies appropriées entre les mécanismes et organes de suivi du Conseil de l’Europe et tout nouveau mécanisme d’évaluation que l’Union européenne mettra en place».
9. L’Assemblée, jugeant qu’il est fondamental de maintenir la primauté du Conseil de l'Europe dans l'évaluation du respect par les États membres de l'Union européenne des valeurs fondamentales communes, recommande au Comité des Ministres:
9.1. de faire régulièrement le point sur l'état d'avancement des différentes initiatives de l'Union européenne en matière d'État de droit et de les évaluer dans le contexte du Mémorandum d'accord et de ses objectifs de maintien de normes communes et de complémentarité;
9.2. de créer un organe de coordination spécifique chargé de faire rapport de manière régulière au Comité des Ministres sur la question susmentionnée;
9.3. de créer, compte tenu des compétences respectives des organisations, une approche plus intégrée de la prise de décision politique, qui impliquerait directement un dialogue avec l'institution de l'Union européenne concernée chaque fois qu'une évaluation d'un État membre du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne est réalisée, s'il existe un risque d'infraction grave aux normes communes de l’État de droit ou si le manquement a été corrigé ou a cessé d’exister;
9.4. de promouvoir des garanties analogues à l'article 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, selon lesquelles tout mécanisme de l'Union européenne relatif à l'État de droit doit veiller à ce que l'évaluation ou l'action de l'Union européenne ne portera pas atteinte aux procédures existantes relevant des mécanismes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe.