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Résolution 2285 (2019)
Un développement urbain durable propice à l’inclusion sociale
1. Des villes qui répondent aux besoins
de tous posent les fondations de sociétés prospères et pacifiques. Les
États membres du Conseil de l’Europe doivent tirer parti de la dynamique
politique créée par le Programme de développement durable à l’horizon
2030 des Nations Unies pour promouvoir leurs réalisations, combler
les lacunes qui subsistent en construisant des communautés urbaines
inclusives et, ainsi, réaliser l’Objectif de développement durable
11 (faire en sorte que les villes et les établissements humains
soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables).
2. Avec l’urbanisation rapide de nos sociétés, il est important
de saisir pleinement les nouvelles occasions et de minimiser les
risques. Aujourd’hui, près de 75 % de la population européenne vit
dans des zones urbaines – un chiffre qui devrait dépasser les 80 %
d’ici à 2050. D’une part, les villes permettent des économies d’échelle,
une utilisation efficace des ressources, l’innovation sociale, le
dialogue interculturel et la solidarité. D’autre part, elles génèrent
de la pollution et d’autres charges sur l’environnement. L’afflux
de population exerce une pression sur l’espace disponible et les
marchés de l’emploi et du logement, ce qui peut entraîner et entraîne
effectivement exclusion, ségrégation et troubles sociaux.
3. L’Assemblée parlementaire est préoccupée par l’étalement urbain
qui exerce une pression massive sur l’environnement et nuit à la
qualité de vie dans les zones urbaines. Les villes sont de plus
en plus affectées par le réchauffement planétaire, auquel elles
contribuent aussi de façon importante. Selon le Programme des Nations
Unies pour l’environnement, les villes sont responsables de 75 %
des émissions mondiales de CO2. La pollution
atmosphérique cause chaque année des centaines de milliers de décès
prématurés en Europe.
4. Le développement urbain implique souvent la prise en compte
de besoins et d’intérêts contradictoires, et nécessite des mécanismes
efficaces de négociation et de prise de décision. Les objectifs
du développement économique peuvent, mais ne doivent pas, entrer
en conflit avec la protection de l’environnement. Dans les villes,
les nouveaux arrivants sont souvent perçus comme une menace pour
le bien-être de la population déjà installée. L’incapacité à résoudre
rapidement ces problèmes et à trouver des solutions viables qui
répondent aux préoccupations de chacun peut mener à la désillusion
vis-à-vis des institutions démocratiques, à des actions de protestation
et à la violence.
5. Dans ce contexte, l’Assemblée note avec préoccupation que,
dans de nombreux pays, le secteur public se désengage en tant que
propriétaire foncier, investisseur et autorité de régulation, ce
qui réduit sa capacité à déterminer l’espace public. L’Assemblée
déplore, en outre, le manque de transparence et de responsabilité dans
la prise de décision actuelle en matière de développement urbain.
6. Il devrait être entendu que tous les partenaires clés unissent
leurs forces et créent des synergies. Les gouvernements, les parlementaires,
les collectivités locales et régionales et les organisations non gouvernementales
ont des rôles complémentaires et doivent travailler en étroite collaboration.
7. Les États membres du Conseil de l’Europe devraient utiliser
les engagements mondiaux et européens en faveur du développement
durable comme cadre d’orientation et incitation à agir. L’Assemblée
souscrit pleinement à l’Objectif de développement durable 11 des
Nations Unies et au Nouveau Programme pour les villes approuvé en
2016 par l’Assemblée générale des Nations Unies, qui offre «une
vision commune pour un monde meilleur et durable – un monde dans
lequel les individus peuvent profiter des mêmes droits et bénéficier équitablement
des opportunités offertes par la ville». L’Assemblée rappelle que
la Charte urbaine européenne II, adoptée par le Congrès des pouvoirs
locaux et régionaux du Conseil de l’Europe en 2008, souligne que
les villes sont des carrefours de civilisations, des espaces de
rencontre où les différences peuvent librement se côtoyer et s’exprimer
dans le respect mutuel.
8. Le Conseil de l’Europe offre une plateforme unique pour partager
les bonnes pratiques et établir des normes communes en matière de
gouvernance démocratique au niveau européen par le biais de ses institutions
– Comité des Ministres, Assemblée parlementaire, Congrès des pouvoirs
locaux et régionaux et Conférence des organisations internationales
non gouvernementales –, plateforme qui devrait être renforcée.
9. L’Assemblée est convaincue que le développement urbain durable
doit se concentrer avant tout sur les personnes et se félicite de
l’émergence des «villes des droits humains», qui ont adopté les
principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme comme
normes directrices de la gouvernance. Le développement durable,
les droits humains et le dialogue interculturel sont intrinsèquement
liés. La ville devrait être un incubateur où ces approches se nourrissent
et se renforcent mutuellement.
10. À la lumière de ce qui précède, l’Assemblée appelle les États
membres du Conseil de l’Europe:
10.1. en
ce qui concerne le droit interne:
10.1.1. à élaborer et à
renforcer les politiques et stratégies nationales pour un développement urbain
inclusif et durable;
10.1.2. à veiller à ce que le secteur public dispose d’une influence
et d’un pouvoir réglementaire suffisants;
10.1.3. à mettre en place des mesures incitatives et à réduire
les obstacles qui empêchent les collectivités locales de donner
la priorité à la cohésion sociale dans leurs projets de développement
urbain;
10.1.4. à promouvoir un développement urbain fondé sur les droits
humains afin que personne ne soit laissé de côté, et à prêter attention
aux besoins spécifiques des enfants, des personnes âgées, des femmes,
des migrants et des réfugiés, des pauvres et des personnes handicapées;
10.1.5. à créer un environnement juridique et institutionnel propice
au développement urbain durable, y compris à des initiatives locales;
10.1.6. à promouvoir une utilisation mixte de l’espace urbain,
combinant logement, emploi et loisirs, afin de réduire l’utilisation
des transports et d’améliorer la qualité de vie;
10.1.7. à utiliser la planification du développement urbain pour
faciliter l’interaction entre les différents groupes de population
en appliquant, par exemple, des quotas de logements sociaux dans
les grands projets immobiliers;
10.1.8. à soutenir la recherche sur le développement urbain durable,
inclusif et fondé sur les droits humains;
10.1.9. à promouvoir la solidarité – intra-muros, avec les zones
environnantes et avec les villes partenaires à l’étranger – au moyen
de mécanismes de redistribution, de la «diplomatie des villes» et
d’autres moyens appropriés;
10.1.10. à promouvoir la bonne gouvernance conformément aux 12
Principes de bonne gouvernance démocratique du Conseil de l’Europe;
10.2. en ce qui concerne la participation:
10.2.1. à
promouvoir le dialogue social et la participation des citoyens à
la définition des principes d’un développement urbain de qualité,
à la mise en place des politiques correspondantes, et au suivi et
à l’évaluation de leur mise en œuvre;
10.2.2. à utiliser pleinement les outils de la démocratie électronique
pour permettre une participation transparente et inclusive de la
population à la gouvernance locale;
10.2.3. à veiller à ce que les élections locales soient un moyen
efficace de représenter les besoins divers de la population, y compris
ceux des groupes vulnérables;
10.2.4. à prendre en considération les Lignes directrices relatives
à la participation civile à la prise de décision politique (CM(2017)83-final)
du Comité des Ministres, ainsi que sa Recommandation CM/Rec(2018)4
sur la participation des citoyens à la vie publique au niveau local;
10.2.5. à promouvoir et à utiliser la Charte européenne révisée
sur la participation des jeunes à la vie locale et régionale (Recommandation
128 (2003) du Congrès), l’outil d’évaluation de la participation
des enfants du Conseil de l’Europe et la version adaptée aux enfants
du programme urbain «Les villes de nos rêves» élaboré par le Bureau
de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies
chargée de la question de la violence à l’encontre des enfants,
en coopération avec d’autres partenaires;
10.3. en ce qui concerne leurs engagements au niveau du droit
international:
10.3.1. à adopter et à promouvoir le Code
de conduite européen pour toutes les personnes participant à la
gouvernance locale et régionale (Résolution 433 (2018) du Congrès);
10.4. en ce qui concerne la coopération internationale:
10.4.1. à participer au programme «Cités interculturelles» du
Conseil de l’Europe, qui assiste les villes dans la révision et
le développement des stratégies interculturelles globales;
10.4.2. à utiliser pleinement les possibilités de coopération
offertes par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, le Comité
européen sur la démocratie et la gouvernance (CDDG) et le Centre
d’expertise pour la bonne gouvernance;
10.4.3. à tirer parti des possibilités de soutien que la Banque
de développement du Conseil de l’Europe (CEB) offre à ses États
membres et à leurs collectivités locales par le biais de financements,
d’une assistance technique et de partenariats pour une croissance
durable et inclusive, d’actions en faveur du climat et de l’intégration
des réfugiés, des personnes déplacées et des migrants;
10.4.4. à participer au prix de l’Europe, qui est la plus haute
distinction qui puisse être décernée à une ville européenne pour
ses actions dans le domaine européen.
11. L’Assemblée invite les parlements nationaux (et, le cas échéant,
les parlements régionaux):
11.1. à
soutenir les actions visant à atteindre l’Objectif de développement
durable 11 des Nations Unies en mettant en place des cadres législatifs
ainsi qu’un contrôle budgétaire et démocratique;
11.2. à réaffirmer leur attachement à une approche du développement
urbain fondée sur les droits humains en cherchant systématiquement
à analyser les inégalités et à compenser les pratiques discriminatoires
et les répartitions inéquitables des pouvoirs;
11.3. à encourager un débat public inclusif et à soutenir le
développement de mécanismes décisionnels efficaces et transparents
pour le développement urbain.