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Résolution 2302 (2019)

La Banque de développement du Conseil de l’Europe: contribuer à la construction d'une société plus inclusive

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 2 octobre 2019 (32e séance) (voir Doc. 14961, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, rapporteure: Mme Nicole Trisse). Texte adopté par l’Assemblée le 2 octobre 2019 (32e séance).

1. La Banque de développement du Conseil de l’Europe («la CEB» ou «la banque»), créée en 1956 sous forme d’accord partiel du Conseil de l’Europe, soutient les investissements à caractère social dans ses 41 États membres. Les liens avec le Conseil de l’Europe sont au cœur de l’identité d’entreprise de la CEB et de la mission sociale qui la distingue dans la grande famille des institutions financières internationales. Ces liens ont inspiré des milliers de projets concrets réalisés dans les États membres et sont aussi à la base de l’évolution de la mission et de la vision stratégique de la CEB.
2. Malgré les complexités économiques, financières et réglementaires qui régissent son activité, sa taille relativement réduite et certaines rigidités structurelles, la CEB montre une remarquable capacité à gérer les risques et à soutenir des investissements à caractère social générant une forte valeur ajoutée dans ses États membres. En plus de soixante ans d’activité, la banque a accumulé un savoir-faire unique et une vaste expérience de la gestion de projets dans des pays présentant des niveaux de développement, des capacités institutionnelles et des besoins sociaux très différents. L’Assemblée parlementaire encourage la CEB à continuer d’accroître ses investissements dans les pays qui ont besoin de plus d’assistance technique et de soutien pour développer leurs capacités institutionnelles.
3. L’Assemblée appuie pleinement les efforts constants de la CEB pour soutenir une croissance inclusive et durable, l’intégration des réfugiés, des personnes déplacées et des migrants, ainsi que l’attention qu’elle porte aux investissements «verts» à la lumière du Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies et de l’Accord de Paris sur les changements climatiques. L’Assemblée est convaincue que les discussions en cours sur le prochain plan de développement de la CEB pour la période 2020-2022 sont l’occasion de mettre plus clairement en lumière le rôle que la CEB peut jouer dans la mobilisation collective de ses parties prenantes pour réaliser les Objectifs de développement durable des Nations Unies.
4. De plus, au vu de l’attention croissante portée par le Conseil de l’Europe aux droits sociaux, du rapport du Secrétaire Général au Comité des Ministres (Helsinki, 16-17 mai 2019) et de l’objectif déclaré d’édifier une société plus inclusive, l’Assemblée pense que les décideurs politiques nationaux devraient, avec la CEB, s’intéresser prioritairement aux besoins des groupes de population les plus défavorisés, aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural. L’Assemblée perçoit le potentiel qu’offrent les études thématiques de la banque sur les défis posés par les inégalités socio-économiques en Europe pour inspirer des décisions politiques et de futurs projets structurels dans ce domaine afin de traiter avec l’attention requise les causes et les effets des inégalités croissantes conduisant à la pauvreté.
5. L’Assemblée regrette que certains États membres du Conseil de l’Europe (l’Andorre, l’Arménie, l’Autriche, l’Azerbaïdjan, Monaco, la Fédération de Russie, le Royaume-Uni et l’Ukraine) n'aient pas encore adhéré à la CEB et encourage ces huit États à reconsidérer leur position, dans l'intérêt de leur population.
6. L’Assemblée salue l’usage accru par la CEB d’instruments de financement novateurs, du financement direct de collectivités locales dans ses États membres et des partenariats public-privé pour des projets de développement social et durable. Au sujet des premiers, l’Assemblée note que la CEB a émis en 2017 son premier prêt plurisectoriel, dont le but est de donner aux collectivités locales une plus grande souplesse pour financer leurs projets d’infrastructures sociales relevant de plusieurs secteurs d’intervention. La CEB a également émis sa première obligation d’inclusion sociale, renforçant ainsi sa propre capacité à financer des projets prioritaires dans les domaines du logement social, de l’éducation et de la formation professionnelle, ainsi que de la création d’emplois. En conséquence, les collectivités territoriales ont été les bénéficiaires directes d’environ 33 % des prêts approuvés par la CEB en 2018.
7. L’Assemblée se félicite de la gestion avisée par la CEB de ses ressources en capital et de ses réserves. Elle relève que l’affectation régulière des bénéfices annuels aux réserves permet à la banque d’accroître progressivement sa capacité à cofinancer un plus grand nombre de projets à forte valeur sociale. Cette capacité pourrait augmenter de manière encore plus sensible si les actionnaires de la banque pouvaient envisager de rester ouverts à une nouvelle augmentation du capital de la CEB, de reconstituer de manière plus substantielle les fonds fiduciaires existants et de solliciter un soutien supplémentaire de la part des donateurs et des institutions partenaires.
8. L’Assemblée apprécie l’avancée progressive de la réforme de la gouvernance de la CEB, dont le but est de continuer à améliorer son efficience, comme l’indique la Résolution 434 (2018) du conseil de direction de la CEB, notamment en ce qui concerne le réexamen, en temps utile, des compétences, des fonctions et du nombre des vice-gouverneurs. L’Assemblée encourage le conseil de direction à poursuivre dans cette voie, en particulier pour ce qui est des propositions de réforme les plus consensuelles, y compris celles mises en avant lors de la dernière Revue stratégique de la CEB.
9. L’Assemblée salue le professionnalisme, l’engagement et l’efficacité des agents de la CEB, dévoués à la mission de la banque et essentiels à la poursuite sans heurt de ses ambitions futures. Il convient de continuer à cultiver cette force interne, qui s’appuie sur des «pôles de talents» caractérisés par un bon équilibre entre les hommes et les femmes, une grande expérience professionnelle et la diversité des nationalités représentées, en offrant aux agents, qu’ils soient déjà en poste ou nouvellement recrutés, des possibilités de développement personnel satisfaisantes grâce à la formation et à la mobilité, afin qu’ils puissent acquérir de nouvelles qualifications et compétences dans des domaines tels que l’intelligence artificielle et la prospective.
10. Au vu des considérations qui précèdent, l’Assemblée recommande au Conseil de direction de la CEB:
10.1. de continuer à rationaliser la gouvernance de la banque afin d’optimiser ses structures et procédures internes pour permettre une plus grande souplesse et une plus grande rapidité dans la prise de décision, et pour alléger le système de vote de manière à mettre à jour ces aspects avec les pratiques modernes de gestion en vigueur dans les organisations similaires;
10.2. de profiter des discussions en cours sur le prochain plan de développement de la CEB pour la période 2020-2022:
10.2.1. pour aligner plus étroitement les activités de la banque sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et ses 17 objectifs de développement durable, afin de permettre le renforcement des capacités institutionnelles dans les États membres;
10.2.2. pour renforcer la stratégie d'assistance de la banque à ses États membres afin:
10.2.2.1. de s’attaquer plus efficacement aux causes et aux conséquences des inégalités socio-économiques;
10.2.2.2. de réaliser une plus grande cohésion territoriale dans l’offre de services publics en milieu urbain et rural, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, aux soins médicaux, au logement, à la mobilité et à l’emploi;
10.2.3. pour soutenir l’engagement de la banque visant à faciliter l’intégration à long terme des migrants et des réfugiés, en particulier par l’intermédiaire du marché du travail, des équipements éducatifs, des soins de santé et du logement social;
10.2.4. pour envisager de renforcer les activités de prêt portant sur la création de centres de jeunesse à vocations multiples offrant des services d’orientation professionnelle et d’aide sociale, favorisant l’engagement civique, la diversité culturelle et l’égalité des chances, et proposant une aide pour la garde des enfants aux familles vivant dans la pauvreté ou en risque de pauvreté, en référence à la Recommandation CM/Rec(2015)3 sur l’accès des jeunes des quartiers défavorisés aux droits sociaux;
10.2.5. pour accroître le soutien aux efforts déployés par la banque afin de créer de nouvelles opportunités d’activité économique dans une conjoncture difficile marquée par la faiblesse des taux d’intérêt, pour lever des fonds au moyen d’émissions obligataires «thématiques» répondant à des objectifs sociaux spécifiques, et pour poursuivre le développement des outils internes de sélection et d’évaluation des projets en fonction de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, afin de contribuer à transformer les risques en opportunités;
10.2.6. pour s’assurer que la CEB se réfère aussi, au besoin, aux conclusions annuelles du Comité européen des Droits sociaux (CEDS) concernant les différents pays lors de la sélection des projets en fonction de leurs retombées sur le plan social;
10.2.7. pour intensifier les relations de la CEB avec le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe, afin de tirer parti des possibilités d'identifier des projets potentiels au niveau local et d'optimiser la mise en œuvre des projets déjà approuvés;
10.3. d’envisager de revoir la pertinence des critères actuels de définition des pays cibles de la CEB et éventuellement de les actualiser à la lumière des progrès accomplis dans le développement de ces pays;
10.4. de renforcer les liens avec le Conseil de l’Europe et d’examiner les moyens qui pourraient permettre d’améliorer la visibilité de la CEB, par exemple en utilisant des voies de communication communes, et d’inciter de nouveaux États à adhérer à la banque;
10.5. de profiter des opportunités pour exploiter plus intensivement le savoir-faire généré par divers groupes de réflexion et institutions de recherche, en particulier par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
11. L'Assemblée attend avec intérêt la réponse écrite du Conseil de direction de la CEB aux recommandations ci-dessus.