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Rapport | Doc. 15535 | 23 mai 2022

Le rôle des partis politiques dans la promotion de la diversité et de l’inclusion: une nouvelle Charte pour une société non raciste

Commission sur l'égalité et la non-discrimination

Rapporteur : M. Momodou Malcolm JALLOW, Suède, GUE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15329, renvoi 4598 du 27 septembre 2021. 2022 - Troisième partie de session

Résumé

Le racisme est répandu et profondément enraciné en Europe pour des raisons culturelles et historiques. Les discours haineux sont fréquents et imprègnent la communication publique, y compris le discours politique, notamment en ligne.

Les partis politiques sont les mieux placés pour contribuer à la lutte contre le racisme et l'intolérance, et pour favoriser une société inclusive. Ils contribuent largement à façonner le discours politique, ils sont les principaux gardiens des organes élus et ils jouissent d'une large autonomie dans la réglementation de leur fonctionnement interne.

La Charte des partis politiques européens pour une société non raciste et inclusive est issue de la révision de la précédente Charte qui a été élaborée en 1998 et repose sur le pouvoir d’autorégulation des partis politiques. Elle prend en compte l'évolution du paysage social et politique européen, l'émergence des nouvelles technologies de communication et la montée du racisme et de l'intolérance. Les partis politiques signataires de la Charte s'engagent à défendre les droits humains fondamentaux et les principes démocratiques et à rejeter toute forme de racisme et d'intolérance, et le discours de haine. Les signataires doivent exiger de leurs membres qu'ils se conforment à ces principes. Pour que la Charte ait un impact, le contrôle de son application est crucial. Les organisations de la société civile, les médias et les électrices et électeurs dans leur ensemble ont un rôle à jouer dans la responsabilisation des partis politiques.

A. Projet de résolution 
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			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 12 mai 2022.

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1. Le racisme et l'intolérance sévissent en Europe, malgré les efforts déployés par les pouvoirs publics, les organisations de la société civile et de nombreux autres acteurs, pour les éradiquer. Des formes d'intolérance telles que l'afrophobie, l'antitsiganisme, l'antisémitisme, l'islamophobie et la xénophobie, ainsi que les discours de haine en ligne et hors ligne, sont en augmentation. En outre, certains individus et groupes qui sont habituellement victimes de discrimination structurelle et de préjugés généralisés sont confrontés à une hostilité supplémentaire et servent de boucs émissaires à chaque fois que l'Europe est touchée par une crise internationale, comme la crise des réfugié·e·s de 2015, la pandémie de covid-19 et, plus récemment, la guerre d'agression menée par la Fédération de Russie contre l'Ukraine.
2. Le Conseil de l'Europe est depuis longtemps engagé dans la lutte contre le racisme et l'intolérance par l'action de ses organes et instances, en particulier la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI). L'Assemblée parlementaire n'a cessé de contribuer à ces efforts en sensibilisant l'opinion publique aux poussées de haine raciale, de discours de haine et de diverses formes d'intolérance, et en appelant les Etats membres à mettre en œuvre d'urgence les mesures spécifiques qu'elle a prescrites.
3. Rappelant sa Résolution 1967 (2014) «Une stratégie pour la prévention du racisme et de l'intolérance en Europe» et sa Résolution 2275 (2019) «Rôle et responsabilités des dirigeants politiques dans la lutte contre le discours de haine et l'intolérance», l'Assemblée réaffirme que les représentant·e·s des gouvernements et les responsables politiques en général devraient mener avec détermination les efforts visant à éliminer le racisme, la haine et l'intolérance et donner l'exemple en contestant, rejetant et condamnant publiquement les expressions de haine, quelle que soit leur provenance. L'Assemblée réaffirme également que les responsables politiques, ainsi que d'autres personnalités publiques, ont un rôle essentiel à jouer dans la promotion d'un modèle de société qui accueille la diversité et respecte la dignité humaine, et qu’ils doivent incarner ce modèle, car leur statut et leur visibilité leur permettent d'influencer un large public, de donner l'exemple aux autres et de définir dans une large mesure les thèmes et le ton du discours public.
4. Dans ce contexte, les partis politiques sont les mieux placés pour lutter contre le racisme, l'intolérance et les discours de haine, promouvoir la diversité et favoriser l'inclusion dans les sociétés européennes. En période de campagne électorale et dans le cadre de leur activité régulière, leur communication contribue largement à façonner le discours politique. Ils jouissent d'une large autonomie dans la réglementation de leur fonctionnement interne et des devoirs de leurs membres. En outre, en tant que principaux gardiens des organes élus, ils sont les mieux placés pour promouvoir la représentation politique de tous les groupes sociaux et communautés.
5. La Charte des partis politiques européens pour une société non raciste, élaborée sous les auspices de la Commission consultative de l'Union européenne sur le racisme et la xénophobie et ouverte à la signature à Utrecht en 1998, est une initiative louable qui a donné aux partis politiques la possibilité de formaliser leur engagement à défendre les droits humains et les principes démocratiques fondamentaux et à rejeter toute forme de racisme, d'intolérance et de discours de haine. Cette Charte est fondée sur le pouvoir d'autorégulation des partis politiques. En 2003, plus de quatre-vingts partis européens y avaient adhéré.
6. L'Assemblée se félicite de la révision de la Charte entreprise par sa commission sur l'égalité et la non-discrimination en coopération avec l'Intergroupe Anti-racisme et Diversité (ARDI) du Parlement européen, la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), ainsi que du document résultant de ce processus.
7. Compte tenu de l'évolution du paysage social et politique de l'Europe et des manifestations de racisme et d'intolérance qui sont apparues au cours des décennies qui ont suivi l'adoption du document original, sa version révisée a une portée plus large, reflétée par un nouveau titre: Charte des partis politiques européens pour une société non raciste et inclusive.
8. A la lumière de ces considérations, l'Assemblée:
8.1. approuve la Charte révisée des partis politiques européens pour une société non raciste et inclusive et appelle tous les partis politiques démocratiques à la signer et à l'appliquer dans leur fonctionnement interne et leur action publique, notamment en demandant à toutes et tous les membres de s’engager formellement à se conformer à ses principes, en signant la Charte personnellement, et en mettant en place des mécanismes de plainte indépendants;
8.2. invite le Parlement européen et appelle les parlements nationaux des États membres du Conseil de l'Europe à approuver la Charte et à la promouvoir auprès des groupes et partis politiques;
8.3. encourage les acteurs de la société civile, y compris les médias, à observer la conduite des partis politiques et à jouer un rôle proactif en les tenant pour responsables en cas de non-respect de leurs engagements au titre de la Charte.
9. L'Assemblée a l'intention d'examiner périodiquement l'état d'avancement de la mise en œuvre de la Charte et considère que l'Alliance parlementaire contre la haine devrait être associée à la procédure, et qu'elle devrait contribuer à la promotion de la Charte auprès des partis et des groupes politiques.

B. Exposé des motifs par M. Momodou Malcolm Jallow, rapporteur

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1. Introduction

1. Ces dernières années, nous avons observé une montée du racisme, de l'intolérance et du discours de haine en Europe, comme l'a dénoncé à plusieurs reprises l'Assemblée parlementaire, qui a appelé les Etats membres à agir de toute urgence et sur la base d'une approche stratégique plutôt que ponctuelle. Le racisme est structurel et est profondément ancré dans l'histoire et la culture européennes, comme l'ont souligné de précédents textes de l'Assemblée, notamment le rapport «Lutter contre l'afrophobie, ou le racisme anti-Noir·e·s, en Europe» 
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			Doc. 15306. pour lequel j'étais rapporteur. Outre les discriminations structurelles et les formes de préjugés répandues en Europe, je voudrais souligner que chaque fois qu'une crise particulièrement préoccupante affecte nos sociétés, certains groupes sont confrontés à une hostilité supplémentaire, et servent de boucs émissaires. Par exemple, une intolérance accrue a visé les migrant·e·s, les réfugié·e·s et les personnes d'origine arabe au moment de la crise des réfugié·e·s de 2015, un pic de harcèlement et de violence visant les personnes d'origine chinoise ou perçues comme telles a été observé au début de la pandémie de covid-19, et des théories conspirationnistes antisémites ont circulé, accusant des individus ou des communautés juives en lien avec cette même pandémie.
2. Les partis politiques ont un rôle crucial à jouer dans la lutte contre le racisme et l'intolérance, la promotion de la diversité et de l'inclusion. Ils sont les principaux gardiens des organes élus et contribuent largement à façonner le discours politique. En outre, ils jouissent d'une large autonomie dans la réglementation de leur fonctionnement interne et des devoirs de leurs membres. Sur cette base, en 1998, une Charte des partis politiques européens pour une société non raciste a été élaborée sous les auspices de la Commission consultative de l'Union européenne sur le racisme et la xénophobie (prédécesseur de l'Agence des droits fondamentaux), et ouverte à la signature à Utrecht. La Charte a été approuvée par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI), puis signée par de nombreux partis politiques. Les partis signataires se sont engagés à rejeter toute forme de violence raciste et se sont engagés à œuvrer pour une représentation équitable des groupes victimes du racisme et de l'intolérance.
3. Plus de vingt ans après la rédaction de la Charte originale, le paysage politique et social de l'Europe a considérablement évolué, avec plusieurs éléments entièrement ou partiellement nouveaux. Des organisations populistes sont apparues, souvent issues de mouvements de protestation, puis de plus en plus structurées. Certaines de ces entités ont des plateformes politiques anti-migrant·e·s et xénophobes, qui normalisent et encouragent la propagation du racisme et de l'intolérance dans la société. Une autre évolution importante de ces dernières décennies est l'émergence de la communication en ligne, l'internet et plus récemment les médias sociaux étant devenus des éléments centraux de la communication et des campagnes politiques. Malheureusement, l'environnement en ligne est devenu un théâtre idéal pour les discours de haine et le harcèlement. Ces phénomènes, dont les caractéristiques sont, au moins en partie, propres au monde numérique, appellent à une révision et à une mise à jour des dispositions de la Charte.
4. Avec la Résolution 2275 (2019) «Le rôle et les responsabilités des dirigeants politiques dans la lutte contre le discours de haine et l'intolérance», l'Assemblée recommandait que, compte tenu de la montée du racisme, de la xénophobie et de l'intolérance en Europe, la Charte soit mise à jour et relancée.
5. La première étape de la révision de la Charte a été réalisée par l'Alliance parlementaire contre la haine de l'Assemblée, qui a entrepris de coopérer avec l'Intergroupe Anti-Racisme et Diversité du Parlement européen (ARDI), l’ECRI et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) pour définir des dispositions pertinentes et opportunes et renforcer le soutien politique à la prochaine Charte actualisée. Le 27 novembre 2020, une audition a été organisée conjointement par l'Alliance, la commission sur l'égalité et la non-discrimination et la commission des questions politiques et de la démocratie, avec la participation de représentant·e·s de tous les acteurs concernés, dont Mme Maria Daniella Marouda, présidente de l'ECRI, et M. Nicolae Esanu, membre suppléant de la Commission de Venise. L'audition a permis d'obtenir des contributions pertinentes des participant·e·s sur le contenu de la future Charte révisée, ainsi qu'un soutien politique, exprimé par Mme Samira Rafaela, membre du Parlement européen et coprésidente de l'ARDI, et M. Andreas Nick, premier vice-président de la commission des questions politiques et de la démocratie de l'Assemblée.
6. La Charte telle que révisée par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe et adoptée avec sa Résolution 415 (2017) a également été prise en compte dans le processus de révision. Dans sa résolution, le Congrès a invité les collectivités locales des États membres du Conseil de l'Europe à approuver, diffuser le plus largement possible et promouvoir la Charte dans sa version révisée.

2. Portée et nature de la Charte révisée

7. Tout comme la version originale, la Charte révisée (voir annexe) est basée sur le pouvoir d'autorégulation de chaque parti politique, qui adhère librement aux principes mentionnés dans le document et s'engage à les mettre en œuvre dans son action. Cela signifie également que les partis doivent, et ont le pouvoir, d'exiger de leurs membres qu'ils ou elles respectent les mêmes principes dans leur action individuelle et leur communication politique. À cette fin, comme l'ont suggéré les expert·e·s lors de l'audition, il est nécessaire d'inclure dans le texte de la Charte des sanctions en cas de non-respect. Si l'objectif de ce document est d'avoir un impact positif tangible sur le travail des partis politiques et sur le discours politique en général, il est crucial de s'assurer que les engagements mentionnés dans la Charte soient plus que de la pure rhétorique et une liste de bonnes intentions. La Charte étant basée sur l'autorégulation des partis politiques, il n'est pas question ici de sanctions légales imposées par les autorités publiques à l'encontre des partis politiques, telles que celles décrites dans le Code de bonne conduite dans le domaine des partis politiques adopté par la Commission de Venise et approuvé par l'Assemblée. En fait, il s'agit de sanctions que les partis politiques introduisent dans leur règlement intérieur (généralement contenu dans le statut du parti) et imposent à leurs membres. Les sanctions doivent être proportionnelles à la gravité de l'infraction commise. Il appartient à chaque parti politique de choisir comment traduire ces principes en dispositions spécifiques. Un système crédible et efficace devrait être gradué, allant de sanctions moins sévères, telles que des avertissements, pour des infractions occasionnelles et moins graves, à des mesures plus sévères ayant un impact substantiel sur les activités de la personne membre du parti (par exemple, l'exclusion des mandats internes ou même des listes électorales). La mesure la plus radicale serait probablement l'expulsion d'un·e membre du parti. Comme indiqué dans la Charte, les sanctions peuvent également être financières.

3. Révision de la Charte: contributions et critères

8. Sur la base des échanges au sein de la commission et avec nos homologues, la portée de la Charte en termes de type de discrimination couverte a été substantiellement élargie. Il inclut désormais non seulement la discrimination et la haine fondées sur l'origine ethnique mais aussi les phénomènes suivants: l’afrophobie, l’antitsiganisme, l’antisémitisme, l’islamophobie et la xénophobie, la LGBTI-phobie et le sexisme. Cette liste tient compte de l'élargissement progressif du mandat de l'ECRI et du fait que les discours de haine en ligne et la cyberintimidation ont souvent une motivation LGBTI-phobe et sexiste. La liste n'est pas exhaustive (le texte fait référence à «toutes les formes... telles que:») et, bien entendu, n'exprime pas un ordre de priorité. En fait, l'ordre est alphabétique (d'après la version anglaise). Une référence explicite est faite à la communication en ligne et, en particulier, aux médias sociaux, qui n'existaient pas lorsque la Charte originale a été rédigée, et qui constituent aujourd'hui un motif de préoccupation particulier en matière de stigmatisation et de discours de haine. Sur la base de ce champ d'application élargi, l'intitulé de la Charte a évolué et fait désormais référence à une société «non raciste» mais aussi «inclusive».
9. D'autres ajouts et modifications ont été apportés grâce à l'avis adopté par l'ECRI lors de sa 88ème réunion plénière (29 mars – 1er avril 2022), comme demandé par notre commission. J'ai accueilli favorablement les suggestions de l'ECRI, qui visaient clairement à renforcer le texte. Entre autres, l'ECRI a proposé de renforcer la référence à la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163), d'ajouter une référence aux recommandations de politique générale pertinentes de l'ECRI et d'harmoniser le texte avec les normes du Conseil de l'Europe sur le discours de haine, notamment par une référence à la définition contenue dans la Recommandation de politique générale n°15 sur la lutte contre le discours de haine. La suggestion de renommer la partie sur les sanctions en «Responsabilité» a également été prise en compte. En effet, cette section de la Charte faisait référence à l'élément important qu'est la responsabilité, qui est assurée par les sanctions disciplinaires mais a une portée plus générale que les sanctions elles-mêmes. Comme le souligne l'avis de l'ECRI, outre les outils fondés sur le pouvoir d'autorégulation des partis politiques, d'autres formes de recours peuvent être demandées en vertu de la loi.
10. Au cours de la préparation du rapport, j'ai eu le plaisir de rencontrer et d’avoir un échange de vues avec Sir Tony Lloyd (Royaume-Uni, SOC), rapporteur pour avis sur ce rapport pour la commission des questions politiques et de la démocratie. Sir Tony a exprimé son intérêt et son soutien pour la Charte révisée, ce que je ne peux qu'apprécier. Je crois comprendre que son avis soulignera, entre autres, le rôle important des dirigeant·e·s politiques, et en particulier des chefs de parti, dans l'élaboration d'un discours politique exempt de stigmatisation, de stéréotypes négatifs et de tout autre facteur conduisant à la discrimination et à l'intolérance. En effet, les chefs de parti contribuent largement à définir non seulement les priorités politiques, mais aussi l'attitude et le langage de leur parti. Je suis également d'accord avec l'idée de Sir Tony selon laquelle les partis politiques devraient introduire des mécanismes de plainte indépendants pour traiter les plaintes concernant le racisme et l’intolérance, le discours de haine, l’incitation à la haine raciale et le harcèlement. J'attends avec impatience l'avis de la commission des questions politiques et de la démocratie qui, à ma connaissance, insistera également sur l'importance d'un suivi cohérent de la mise en œuvre de la Charte, et je suis convaincu que le soutien apporté par cette commission renforcera la détermination de l'Assemblée à l'approuver.

4. Conclusions

11. Face à l'augmentation du racisme, de l'intolérance, des discours de haine et de la discrimination à laquelle nous avons assisté ces dernières années, tous les acteurs de la vie publique doivent intensifier leurs efforts pour prévenir et combattre ces fléaux. Les partis politiques partagent cette responsabilité morale et ont le pouvoir d'apporter une contribution positive à cet égard. La Charte des partis politiques européens pour une société non raciste et inclusive est un outil qui peut catalyser les efforts des dirigeant·e·s politiques et permettre aux partis politiques de prendre des engagements formels et publics dans ce domaine. Il appartient à la société civile et au corps électoral, c'est-à-dire à la société dans son ensemble, de demander des comptes aux partis politiques et d'exiger la cohérence dans le respect des principes de la Charte.
12. Le suivi est crucial: pour que la Charte ait un réel impact sur le discours politique, elle doit être adoptée par un grand nombre de partis politiques puis effectivement mise en œuvre par ces derniers, ce qui nécessite des efforts qui doivent être suivis et encouragés. Dans les dernières étapes de la préparation du rapport, j'ai reçu une contribution pertinente du Partenariat européen pour la démocratie, une organisation à but non lucratif qui soutient le processus démocratique par le biais de la recherche, du plaidoyer et de programmes en Europe et ailleurs. Les organisations de la société civile pourraient jouer un rôle important en contrôlant la mise en œuvre de la Charte et en demandant des comptes aux partis politiques en cas de non-respect. Si l'adoption de la Charte donne une visibilité aux références démocratiques d'un mouvement politique et peut renforcer son attrait électoral, le respect de ses principes exige une cohérence qui ne peut être tenue pour acquise. Je considère qu'il est primordial que l'Assemblée continue à coopérer et à renforcer les synergies avec les organisations de la société civile dans ce domaine, notamment par l’intermédiaire de l'Alliance parlementaire contre la haine et de ses membres.

Annexe - Charte des partis politiques européens pour une société non raciste et inclusive

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CHARTE DES PARTIS POLITIQUES EUROPÉENS POUR UNE SOCIÉTÉ NON RACISTE ET INCLUSIVE

NOUS, LES PARTIS POLITIQUES DÉMOCRATIQUES D'EUROPE

Considérant les instruments internationaux des droits de l'homme signés et ratifiés par nos États membres, en particulier la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale;

Considérant l'article 1 de cette Convention qui définit la discrimination raciale comme «... toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, dans des conditions d'égalité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique...»;

Considérant la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment son article 14 qui interdit la discrimination en ce qui concerne les droits prévus par la Convention;

Considérant le Protocole n° 12 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui introduit une interdiction générale de la discrimination qui s'applique à la jouissance de tout droit prévu par la loi;

Considérant la Charte sociale européenne révisée, en particulier son article 19, paragraphe 1, selon lequel les Parties s'engagent notamment à prendre toutes les mesures appropriées, dans la mesure où la législation nationale le permet, contre la propagande trompeuse en matière d'émigration et d'immigration, et son article E (non-discrimination);

Considérant le Traité d'Amsterdam qui permet à la Communauté européenne de «... prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée sur... la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions...» et facilite la coopération policière et judiciaire dans le cadre des États membres pour prévenir et combattre le racisme et la xénophobie;

Considérant la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui, dans son article 21, «interdit toute discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou toute autre croyance, les opinions politiques, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle;»

Considérant les textes pertinents adoptés par la Commission pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), notamment le Code de bonne conduite dans le domaine des partis politiques et les Lignes directrices sur la réglementation des partis politiques, qui intègrent l'égalité et la non-discrimination parmi les principes pour lesquels les partis politiques devraient lutter;

Tenant compte des recommandations de politique générale adoptées par la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI), en particulier celles sur la lutte contre le discours de haine, le racisme et la discrimination anti-musulman·e·s et l'antisémitisme;

Tenant compte des textes pertinents adoptés par le Parlement européen et l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, notamment ceux relatifs à la lutte contre les discours de haine, l'afrophobie ou le racisme anti-Noir·e·s, l'antitsiganisme, l'antisémitisme, l'islamophobie ou le racisme anti-musulman·e·s et toutes autres formes d'intolérance;

Reconnaissant que les droits fondamentaux tels qu'ils sont consacrés par les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme signés et ratifiés par les États membres et les autres normes pertinentes comprennent le droit à un discours et à un débat politiques libres et sans entrave;

Soucieux du fait que, selon ces mêmes instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, les libertés politiques ne sont pas absolues compte tenu du droit tout aussi fondamental d'être protégé contre la discrimination raciale et que, par conséquent, on ne peut permettre que les libertés politiques soient utilisées abusivement pour exploiter, provoquer ou susciter des préjugés fondés sur la race, la couleur, l'origine ethnique ou la nationalité, ou dans le but de chercher à s'attirer la sympathie de l'électorat pour des préjugés fondés sur ces motifs;

Rappelant que l'Europe tire de son histoire un devoir de mémoire, de vigilance et d'opposition à toutes les formes de racisme et d'intolérance, y compris l'afrophobie / racisme anti-Noir·e·s, l'antitsiganisme, l'antisémitisme, l'islamophobie / racisme antimusulman·e·s, la LGBTI-phobie, le sexisme, la xénophobie, ainsi que les crimes de génocide, les crimes contre l'humanité ou les crimes de guerre et la négation, la banalisation, la justification ou l'apologie publiques de ces crimes;

Profondément préoccupés par la résurgence d'une rhétorique présentant les personnes migrantes et réfugiées comme une menace et un fardeau pour la société, ce qui accroît les réactions négatives du public à l'égard de l'immigration et des immigré·e·s;

Profondément préoccupés par l'augmentation des crimes de haine dans les États membres du Conseil de l'Europe et par la propagation du discours de haine, y compris dans le discours politique, notamment en ligne et en particulier par le biais des médias sociaux;

Conscients des tâches et responsabilités particulières des partis politiques en tant qu'acteurs d'un processus politique démocratique, en défendant, en exprimant et en témoignant des principes fondamentaux d'une société démocratique; en offrant une plate-forme de discussion sur des questions où il peut y avoir des divergences d'opinion, en intégrant des points de vue différents dans le processus de prise de décision politique, permettant ainsi à la société de résoudre les conflits d'intérêts et d'opinion entre divers groupes sociaux par le dialogue plutôt que par l'exclusion et le conflit; et en sélectionnant des représentant·e·s à divers niveaux pour une participation active au processus politique;

Convaincus que le libre exercice des droits politiques peut et doit aller de pair avec la défense ferme du principe de non-discrimination et est inhérent au processus démocratique lui-même;

Convaincus en outre que la représentation des groupes minoritaires dans le processus politique fait partie intégrante du processus démocratique, puisque les partis politiques sont, ou devraient s'efforcer d'être, le reflet de la société;

ADHÉRONS AUX PRINCIPES DE BONNE PRATIQUE SUIVANTS ET NOUS ENGAGEONS À:

  • Défendre les droits humains et les principes démocratiques fondamentaux et rejeter toutes les formes de racisme et d'intolérance, les discours de haine, l'incitation à la haine raciale et le harcèlement;
  • Prendre position de manière ouverte, ferme et proactive contre le racisme, la xénophobie, la haine et l'intolérance, quels qu'en soient les motifs et les manifestations;
  • Refuser d'afficher, de publier ou de faire publier, de distribuer ou d'approuver de quelque manière que ce soit, dont en ligne, des points de vue et des positions qui préconisent, promeuvent ou incitent, ou dont on peut raisonnablement s'attendre à ce qu'ils préconisent, promeuvent ou incitent, sous quelque forme que ce soit, le dénigrement, la haine ou la diffamation d'une personne ou d'un groupe de personnes, ainsi que tout harcèlement, insulte, stéréotype négatif, stigmatisation ou menace à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes et la justification de tous les types d'expression précédents, sur la base de la «race», de la couleur, de l'ascendance, de l'origine nationale ou ethnique, de l'âge, du handicap, de la langue, de la religion ou des convictions, du sexe, du genre, de l'identité de genre, de l'orientation sexuelle, de l’origine sociale et d'autres caractéristiques ou statuts personnels, à traiter fermement le discours de haine et tout sentiment ou comportement haineux dans nos propres rangs et à s'engager dans des contre-discours et des discours alternatifs;
  • Traiter de manière responsable et équitable les sujets sensibles relatifs à ces groupes; éviter les stéréotypes négatifs et la stigmatisation;
  • S'abstenir de toute forme d'alliance ou de coopération politique à tous les niveaux avec tout parti politique qui incite aux préjugés raciaux ou ethniques et à la haine raciale;
  • S'efforcer d'obtenir une représentation équitable des groupes susmentionnés à tous les niveaux de nos partis politiques, avec une responsabilité particulière pour la direction du parti de stimuler et de soutenir le recrutement de candidat·e·s issu·e·s de ces groupes pour des fonctions politiques ainsi que pour l'adhésion,

Et nous nous engageons en outre à prendre les mesures appropriées pour garantir que toutes les personnes qui travaillent ou s'associent de quelque manière que ce soit à l'une de nos activités, y compris les campagnes électorales, soient conscientes des principes susmentionnés et agissent à tout moment en conformité avec ceux-ci.

RESPONSABILITÉ

Afin d'assurer que ces principes soient respectés par les membres du parti de manière à avoir l'impact positif qu'ils sont censés avoir, nous nous engageons à appliquer des sanctions en cas de non-respect, sur la base des règles suivantes:

  • Les sanctions disciplinaires s'appliqueront aux membres des partis politiques dont les paroles ou les actions, en ligne ou autrement, enfreignent les principes susmentionnés, sapant ainsi la contribution de leur parti à la création d'une société ouverte, inclusive et non raciste;
  • Les sanctions doivent être proportionnelles à la gravité de l'infraction commise; elles peuvent être financières ou autres et peuvent inclure l'exclusion temporaire des fonctions internes, l'exclusion des listes électorales et l'expulsion du parti.

ÉLIGIBILITÉ À L'ADHÉSION ET DÉFINITION DU PARTI POLITIQUE

Tous les partis politiques démocratiques sont encouragés à signer la présente Charte et à se conformer à ses engagements. Dans ce contexte, sur la base de la définition fournie par la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) dans ses Lignes directrices sur la réglementation des partis politiques, un parti politique est «une association libre d'individus dont l'un des buts est d'exprimer la volonté politique du peuple en cherchant à participer à la direction de la vie publique d'un pays et à l'influencer, notamment par la présentation de candidats aux élections», qu'il se désigne lui-même comme un parti, un mouvement ou autre.