Imprimer
Autres documents liés

Rapport | Doc. 15842 | 10 octobre 2023

Garantir une paix juste en Ukraine et une sécurité durable en Europe

Commission des questions politiques et de la démocratie

Rapporteur : M. Iulian BULAI, Roumanie, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Décision du Bureau, Renvoi 4758 du 9 octobre 2023. 2023 - Quatrième partie de session

Résumé

Alors que l’invasion militaire à grande échelle de l’Ukraine par la Fédération de Russie entre dans son 20e mois, la communauté internationale ne doit pas perdre de vue son objectif premier: présenter un front uni pour faire cesser l’agression et gagner la paix, une paix globale, juste et durable, garantissant que le règne du droit l’emporte sur le règne de la force.

Parvenir à une paix globale, juste et durable signifie soutenir la victoire de l’Ukraine militairement, financièrement, politiquement et diplomatiquement aux niveaux bilatéral et multilatéral, en apportant son plein soutien à la formule de paix du Président Zelensky.

Il s’agit de reconnaître la nature, l’étendue et la gravité des crimes commis par la Fédération de Russie. La violence perpétrée, le caractère abominable de certains crimes, y compris la déportation d’enfants ukrainiens et la violence sexuelle, et la rhétorique des autorités indiquent une tentative de la Fédération de Russie d’anéantir la nation ukrainienne, menant une guerre génocidaire. Cette politique délibérée rappelle tragiquement une précédente tentative d’extermination de la nation ukrainienne, la Grande Famine (l’Holodomor), dont le 90e anniversaire sera commémoré en novembre 2023, et qui devrait être reconnu comme un génocide.

Cela signifie mettre en place un système complet d’établissement des responsabilités de la Fédération de Russie pour ses crimes tout en investissant dans la reconstruction de l’Ukraine et sa résilience démocratique.

Garantir une paix globale, juste et durable implique de rétablir le respect de l’État de droit, notamment l’obligation pour tous les États de s’abstenir de recourir à la menace ou à la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 10 octobre
2023.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire condamne une nouvelle fois avec la plus grande fermeté la guerre brutale d’agression en cours de la Fédération de Russie contre l’Ukraine – qui est un crime en soi – et les atrocités graves, persistantes et à grande échelle et les autres violations du droit international, du droit international humanitaire et des droits humains dont la Fédération de Russie se rend coupable, par l’intermédiaire de ses dirigeants politiques et militaires, de ses forces armées et de ses auxiliaires.
2. Réaffirmant sa solidarité avec le peuple ukrainien et faisant écho à la déclaration de Reykjavík adoptée par les chefs d’État et de gouvernement lors du 4e Sommet du Conseil de l’Europe (16 et 17 mai 2023), l’Assemblée réitère son engagement inébranlable à se tenir aux côtés de l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra jusqu’à sa victoire et son soutien à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, y compris ses eaux territoriales.
3. L’Assemblée réitère sa non-reconnaissance de la tentative d’annexion illégale par la Fédération de Russie de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol, ainsi que de certaines parties des régions ukrainiennes de Donetsk, Kherson, Louhansk et Zaporijjia, qui viole le droit international, et constitue une menace directe pour la sécurité internationale, avec de graves conséquences pour la communauté internationale. Elle réaffirme qu’elle est disposée à continuer d’exercer des pressions contraignantes sur la Fédération de Russie pour contrer ses actions illégales en prenant de nouvelles mesures contre la Fédération de Russie.
4. Le Conseil de l’Europe a été créé au lendemain de la seconde guerre mondiale, en tant que projet de paix, avec la conviction que la consolidation de la paix fondée sur la justice et la coopération internationale est d’un intérêt vital pour la préservation de la société humaine et de la civilisation. Depuis sa création, le Conseil de l’Europe contribue à renforcer les droits humains, la démocratie et l’État de droit parmi ses membres, dont le nombre s’est considérablement accru après la fin de la guerre froide, de sorte qu’il englobe aujourd’hui la quasi-totalité des pays européens.
5. Trente ans après le 1er Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe organisé à Vienne, qui a donné un signal d’espoir à tous les États européens partageant l’aspiration politique à créer un espace juridique commun, un espace commun de paix et une communauté de valeurs, une guerre d’agression à grande échelle occupe le devant de la scène au cœur du continent, dans le contexte d’une dégradation de la situation sécuritaire, caractérisée par des conflits ouverts et gelés, une escalade des tensions et des menaces hybrides. Cet état de fait confirme qu’il faut faire preuve de fermeté en exigeant des États du Conseil de l’Europe qu’ils respectent pleinement leurs engagements et obligations en tant que membres de l’Organisation, car leur adhésion aux normes du Conseil de l’Europe est aussi une garantie de sécurité réciproque, qui est inhérente au principe de sécurité démocratique.
6. Alors que l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine dure depuis plus de neuf ans et que son invasion militaire à grande échelle de l’Ukraine entre dans son 20e mois, la communauté internationale ne doit pas perdre de vue son objectif premier: présenter un front uni pour faire cesser l’agression et gagner la paix, une paix globale, juste et durable, pour que le règne du droit l’emporte sur le règne de la force. Sans une paix globale, juste et durable en Ukraine, il ne peut y avoir de sécurité durable en Europe; sans un système efficace de gouvernance mondiale fondé sur le droit international, il ne peut y avoir de paix et de sécurité internationales.
7. Pour parvenir à la paix, il faut concourir à la victoire de l’Ukraine militairement, financièrement, politiquement et diplomatiquement, aux niveaux bilatéral et multilatéral. L’Assemblée a déjà apporté son plein soutien à la formule de paix du Président Zelensky, qui constitue la proposition la plus complète pour instaurer une paix globale, juste et durable en Ukraine, soulignant qu’il ne peut y avoir de pourparlers de paix que dans les conditions fixées par l’Ukraine et après le retrait des troupes et de l’équipement militaire russe du territoire entier de l’Ukraine. Il faut intensifier les efforts pour expliquer à l’opinion publique et aux partenaires internationaux les enjeux que représente cette guerre pour la sécurité en Europe et pour la préservation d’un système de gouvernance mondiale fondé sur la prééminence du droit.
8. Pour parvenir à une paix globale, juste et durable, il faut reconnaître la nature, l’étendue et la gravité des crimes commis par la Fédération de Russie. Les violences qui sont perpétrées, le caractère abominable de certains crimes, notamment la déportation d’enfants ukrainiens et la violence sexuelle, et la rhétorique des autorités indiquent que la Fédération de Russie tente d’anéantir la nation ukrainienne en menant une guerre génocidaire. Cette politique délibérée rappelle tragiquement une précédente tentative d’extermination de la nation ukrainienne, la Grande Famine (l’Holodomor), dont le 90e anniversaire sera commémoré en novembre 2023.
9. Des dizaines de milliers de civils ont disparu et ont été illégalement enlevés, emmenés dans des camps de filtration, et privés de liberté à la suite de la guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine. Environ 2 000 de ces victimes de disparitions forcées ont plus de 70 ans. Le non-respect par la Fédération de Russie de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre n’est qu’un exemple du manquement flagrant et systématique de la Fédération de Russie à l’égard de ses obligations juridiques internationales.
10. Depuis le début de l’invasion militaire à grande échelle, la Fédération de Russie n’a pas hésité à utiliser comme une arme les migrants, l’énergie, l’écocide, le levier économique, la passeportisation de citoyens ukrainiens et la déportation forcée d’enfants ukrainiens. Les élections et référendums truqués et illégaux organisés par la Fédération de Russie dans les territoires illégalement et temporairement occupés de l’Ukraine – tout dernièrement du 8 au 10 septembre 2023 – sont une parodie de démocratie et une militarisation des libertés politiques. De même, la décision de la Fédération de Russie de quitter l’initiative céréalière de la mer Noire en juillet 2023 est aussi une militarisation du commerce et de l’alimentation, destinée à accroître l’instabilité mondiale et à affaiblir la détermination de la communauté internationale à soutenir l’Ukraine.
11. Pour parvenir à une paix globale, juste et durable, il faut mettre en place un système complet d’établissement des responsabilités de la Fédération de Russie pour ses crimes. À cet égard, l’Assemblée salue le lancement, sous la forme d’un Accord partiel élargi du Conseil de l’Europe, du Registre des dommages causés par l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine. S’inscrivant dans la dynamique politique créée par le Sommet de Reykjavík, elle appelle à nouveau à la mise en place d’un mécanisme international d’indemnisation des victimes et à la création d’un tribunal international spécial chargé d’ouvrir des enquêtes et d’engager des poursuites à l’encontre des dirigeants politiques et militaires de la Fédération de Russie pour le crime d’agression contre l’Ukraine.
12. Pour parvenir à une paix globale, juste et durable en Ukraine, il faut investir dans sa reconstruction pour que le pays soit viable sur les plans économique, social, environnemental et politique. La reconstruction matérielle selon le principe «Reconstruire en mieux» doit s’appuyer sur des institutions publiques fortes et résilientes à tous les niveaux, sur une bonne gouvernance démocratique et sur la protection des droits humains et des libertés fondamentales, dans le respect de l’État de droit. À cet égard, l’Assemblée appelle à nouveau à soutenir largement le Plan d’action pour l’Ukraine 2023-2026, qui est essentiel pour reconstruire en mieux la résilience démocratique en Ukraine.
13. La manière dont la communauté internationale répond à la guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine déterminera le cours de l’histoire européenne et se répercutera sur le système de gouvernance mondiale dans les années à venir. La Fédération de Russie a violé de manière flagrante et éhontée les principes les plus fondamentaux inscrits dans la Charte des Nations Unies et a paralysé le fonctionnement du Conseil de sécurité de cette organisation. Pour garantir une paix globale, juste et durable, il faut rétablir le respect de l’État de droit, notamment l’obligation pour tous les États de s’abstenir de recourir à la menace ou à la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, comme le souligne le point 5 de la formule de paix du Président Zelensky.
14. Au vu de ces considérations, l’Assemblée:
14.1. décide de reconnaître la Grande Famine (l’Holodomor) comme un acte de génocide visant à briser l’épine dorsale de la nation, de la langue et de la culture ukrainiennes, et commémore ses victimes;
14.2. encourage les parlements des États membres du Conseil de l’Europe et les autres parlements qui ne l’ont pas encore fait à adopter des résolutions qui commémorent les victimes de l’Holodomor et reconnaissent qu’il s’agit d’un génocide.
15. En ce qui concerne la création d’un système complet d’établissement des responsabilités, l’Assemblée:
15.1. apporte son plein soutien à l’Accord partiel élargi du Conseil de l’Europe sur le Registre des dommages causés par l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine et invite le plus grand nombre de pays possible à y adhérer;
15.2. appelle les pays représentés à la Conférence des Participants du Registre des dommages à progresser rapidement pour faire en sorte que le Registre des dommages soit opérationnel dès que possible et que le Registre s'appuie, entre autres sources, sur des informations provenant d'organisations non gouvernementales et de défenseurs des droits humains ukrainiens et à fournir des rapports périodiques sur son fonctionnement;
15.3. appelle les États membres et non membres et les autres États à avancer rapidement vers les étapes suivantes en matière de responsabilité et de justice, à savoir la mise en place d’un mécanisme d’indemnisation global, comprenant une commission internationale chargée d’examiner les demandes d’indemnisation des dommages consignés au Registre des dommages, et un fonds d’indemnisation pour payer les décisions d’indemnisation des dommages accordés par la commission, en particulier en confisquant et en utilisant autrement les avoirs de la Fédération de Russie afin de payer des dommages de guerre en Ukraine;
15.4. appelle le «groupe restreint» des pays disposés à soutenir la création d’un tribunal international spécial pour le crime d’agression à parvenir à un accord sur la forme juridique d’un tel mécanisme dès que possible, en tenant compte de la nécessité de maximiser sa légitimité internationale et d’éviter autant que possible les éventuels problèmes juridiques, s’agissant en particulier de la possibilité que des suspects clés se prévalent d’une immunité personnelle ou fonctionnelle;
15.5. appelle la communauté internationale à soutenir fermement la Cour pénale internationale (CPI) et l’équipe commune d’enquête (ECE) afin d’ouvrir des enquêtes et d’engager des poursuites sur les nombreux crimes de guerre et crimes contre l’humanité que les soldats russes, leurs commandants et leurs auxiliaires ont commis ou ordonnés en Ukraine depuis le début de l’agression en 2014, et à soutenir les initiatives visant à traduire en justice les responsables du transfert forcé d’enfants ukrainiens;
15.6. étant solidaire de toutes les victimes ukrainiennes de disparitions forcées, de leurs familles et de leurs proches, invite la communauté internationale à exiger:
15.6.1. que la Fédération de Russie dresse une liste des personnes détenues illégalement à la suite de l’agression contre l’Ukraine en vue de sa transmission à l’Organisation des Nations Unies, l’Ukraine ou un pays tiers qui assurera leur retour en Ukraine;
15.6.2. la libération immédiate et inconditionnelle des victimes de disparitions forcées, le démantèlement des camps de filtration, et la punition des auteurs de ces crimes.
16. Rappelant l’allocution prononcée par le Président Zelensky devant l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2023, l’Assemblée appelle tous les États qui défendent l’ordre international fondé sur des règles:
16.1. à soutenir la formule de paix du Président Zelensky;
16.2. à soutenir l’Ukraine dans sa lutte pour défendre son indépendance, sa souveraineté et son intégrité territoriale en lui apportant une assistance politique, financière, juridique, humanitaire et militaire, et en mobilisant les ressources qui seront nécessaires pour financer la reconstruction de l’Ukraine, réparer les dommages causés à l’environnement et restaurer le riche patrimoine culturel et religieux du pays.
17. Saluant l’initiative prise par le Conseil de l’Union européenne d’organiser une réunion des ministres des Affaires étrangères à Kyiv le 2 octobre 2023, pour la première fois dans un État non membre de l’Union européenne, l’Assemblée appelle les parlements et les gouvernements des États membres du Conseil de l’Europe à n’épargner aucun effort pour soutenir l’Ukraine sur la voie de l’adhésion à l’Union européenne en tant que membre à part entière.
18. Saluant les conclusions de la Conférence européenne des présidentes et présidents de parlement, tenue à Dublin les 28 et 29 septembre 2023, qui ont souligné le rôle que les parlements nationaux peuvent jouer dans la définition de l’avenir de l’Europe, l’Assemblée:
18.1. invite les parlements des États membres et non membres à soutenir l’Ukraine:
18.1.1. en demandant aux gouvernements de rendre compte de leur détermination à assurer la victoire de l’Ukraine et une paix globale, juste et durable;
18.1.2. en prévoyant les ressources budgétaires correspondantes et en prenant les décisions législatives qui s’imposent;
18.1.3. en sensibilisant leurs citoyens aux enjeux de la guerre;
18.1.4. en œuvrant à la mise en place d’un système efficace d’établissement des responsabilités de la Fédération de Russie;
18.1.5. en faisant tout leur possible pour assurer le retour, dans leur famille, des enfants ukrainiens déportés;
18.1.6. en agissant pour remédier à la situation alarmante des prisonnières et prisonniers politiques ukrainiens détenus illégalement par la Fédération de Russie afin que toutes celles et tous ceux qui sont injustement incarcérés pour leurs convictions politiques soient immédiatement libérés;
18.2. encourage les parlements à renforcer la diplomatie parlementaire, le dialogue interparlementaire et les efforts diplomatiques pour amener les alliés à soutenir l’Ukraine au niveau mondial, et à promouvoir un système multilatéral de gouvernance mondiale fermement ancré dans l’État de droit;
18.3. contribue, par son expertise et ses conseils, à renforcer la capacité institutionnelle de la Verkhovna Rada et à accroître la résilience démocratique de l’Ukraine;
18.4. encourage les parlements à participer activement à la dimension parlementaire de la plateforme internationale de Crimée, y compris à prendre part à son deuxième sommet qui se tiendra à Prague, en République tchèque, les 23 et 24 octobre 2023;
18.5. invite les parlements des États membres à maintenir ouverts les canaux de dialogue et de coopération avec les forces d’opposition démocratiques de la Fédération de Russie et du Bélarus qui respectent les valeurs du Conseil de l’Europe et soutiennent la victoire de l’Ukraine.

B. Exposé des motifs par M. Iulian Bulai, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. La guerre d’agression à grande échelle, non provoquée, injustifiée et illégale menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine cause des souffrances, des pertes et des destructions incommensurables dans tout le pays. Elle provoque un écocide et le déplacement massif de civils, perturbe l’économie mondiale et déstabilise l’ordre international établi au lendemain de la seconde guerre mondiale.
2. Comme l’ont rappelé les chefs d’État et de gouvernement lors du 4e Sommet du Conseil de l’Europe, l’Organisation est l’expression d’un projet de paix, né de «la conviction que la consolidation de la paix fondée sur la justice et la coopération internationale est d’un intérêt vital pour la préservation de la société humaine et de la civilisation» 
			(2) 
			<a href='https://edoc.coe.int/fr/le-conseil-de-l-europe-en-bref/11618-unis-autour-de-nos-valeurs-declaration-de-reykjavik.html'>Unis
autour de nos valeurs – Déclaration de Reykjavík</a>.. Cette conviction, inscrite dans le Statut du Conseil de l’Europe en 1949 
			(3) 
			Série des traités européens
– STE n° 1, <a href='https://rm.coe.int/1680935bd1'>Statut
du Conseil de l'Europe</a>, 5 mai 1949., est toujours aussi forte aujourd’hui, alors qu’une guerre d’agression à grande échelle occupe à nouveau le devant de la scène en Europe.
3. Au moment où l’invasion à grande échelle entre dans son 20ème mois, les démocraties ne doivent pas perdre de vue leur objectif premier qui est d’y mettre fin et de gagner la paix. Une paix qui soit globale, juste et durable. Faute de rétablissement complet de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, de justice pour les victimes et d’obligation pour l’agresseur de rendre des comptes, il ne saurait y avoir de paix durable en Ukraine, et sans une paix globale, juste et durable en Ukraine, il ne peut y avoir de sécurité durable en Europe.
4. Ces concepts sont au cœur de la résolution intitulée «Principes de la Charte des Nations Unies sous-tendant une paix globale, juste et durable en Ukraine» adoptée de manière symbolique par l’Assemblée générale des Nations Unies à la veille du premier anniversaire de l’invasion à grande échelle par la Russie 
			(4) 
			Assemblée générale
des Nations Unies, <a href='https://undocs.org/Home/Mobile?FinalSymbol=A%2FRES%2FES-11%2F6&Language=E&DeviceType=Desktop&LangRequested=False'>A/RES/ES-11/6</a>, 23 février 2023.. L’Assemblée parlementaire les a également réitérés dans une multitude de textes qu’elle a adoptés depuis le début de l’invasion à grande échelle, ajoutant que des pourparlers de paix peuvent avoir lieu uniquement sous les conditions fixées par l’Ukraine et appuyant pleinement la formule de paix du Président Zelensky 
			(5) 
			Voir
plus récemment, la Résolution
(2506) 2023, 22 juin 2023..
5. Au moment où nous écrivons ces lignes, nous apprenons avec consternation qu’une nouvelle attaque russe a tué 52 civils dans le village de Hroza. L’horreur de cette violence nous rappelle la grande famine (l’Holodomor), infligée au peuple ukrainien par l’Union soviétique, dont le 90e anniversaire sera commémoré en novembre 2023.

2. La situation sur le terrain

2.1. Développements militaires

6. En juin 2023, l’armée ukrainienne a lancé sa contre-offensive, se heurtant à la résistance des forces russes retranchées derrière de multiples lignes de défense composées de fossés antichar, d’obstacles appelés «dents de dragon» et de fortifications. L’armée ukrainienne est parvenue à percer la première ligne de défense fortifiée russe à proximité du village de Verbove, dans la région occidentale de Zaporijjia, et progresse vers la ville de Bakhmout dans la région de Donetsk. Le 22 septembre, le quartier général de la flotte russe de la mer Noire en Crimée occupée a été visé par une frappe de précision ukrainienne, qui aurait tué ou blessé plusieurs officiers russes. Cette frappe pourrait influer sur la supériorité et les capacités navales russes en mer Noire.
7. Les 23 et 24 juin 2023, les membres du groupe Wagner, placés sous le commandement direct de leur chef d’alors Evgueni Prigojine, ont occupé le quartier général du district militaire russe du sud dans la ville de Rostov-sur-le-Don, puis ont tenté d’avancer vers Moscou, rencontrant et combattant les forces de l’armée régulière russe sur leur chemin.
8. Les troupes ont stoppé leur marche vers la capitale après la conclusion d’un accord entre Evgueni Prigojine et Vladimir Poutine, négocié par Alexandre Loukachenka, allié de ce dernier. Selon les termes de cet accord, et comme l’a déclaré M. Poutine dans les médias, M. Prigojine restait un «homme libre» et les forces du groupe Wagner qui avaient jusqu’alors combattu en Ukraine avaient le choix de se rendre au Bélarus, de rejoindre les rangs de l’armée régulière russe ou de se démobiliser. Par ailleurs, la société militaire privée du groupe Wagner pouvait continuer à opérer dans d’autres parties du monde 
			(6) 
			<a href='https://fr.euronews.com/2023/06/27/mutinerie-de-wagner-poutine-et-prigojine-ferment-la-parenthese'>https://fr.euronews.com/2023/06/27/mutinerie-de-wagner-poutine-et-prigojine-ferment-la-parenthese</a>.. Le 23 août 2023, M. Prigojine et d’autres membres éminents du groupe Wagner ont trouvé la mort dans le crash d’un jet privé en Russie. Des enquêtes seraient en cours. Cette mutinerie témoigne de tensions croissantes au sein de l’élite russe et d’une possible remise en question du leadership de M. Poutine. Elle a été suivie de purges au sein de l’armée dans les semaines qui ont suivi 
			(7) 
			<a href='https://www.bbc.com/news/world-europe-66590916'>www.bbc.com/news/world-europe-66590916</a>..
9. Le 29 septembre 2023, Vladimir Poutine a signé un décret ordonnant la conscription de 130 000 personnes entre octobre et décembre 2023, y compris des citoyens ukrainiens détenteurs d’un passeport russe dans les territoires temporairement occupés de l’Ukraine 
			(8) 
			Institute for the Study
of War (Institut pour l’étude de la guerre), <a href='https://www.understandingwar.org/backgrounder/russian-offensive-campaign-assessment-september-30-2023'>“Russian
Offensive Campaign Assessment”</a>, 30 septembre 2023.. Par ailleurs, les forces russes sont en train de construire une nouvelle ligne ferroviaire visant à relier les villes temporairement occupées de Marioupol, Volnovakha et Donetsk au territoire russe, une initiative qui leur offrirait une voie alternative au pont de Crimée pour acheminer du matériel militaire et des fournitures civiles vers les territoires temporairement occupés.

2.2. Élections illégales organisées en Ukraine par la Fédération de Russie

10. Le recours par la Fédération de Russie à des élections et des référendums truqués et illégaux pour tenter de légitimer son occupation illégale est un simulacre de démocratie et une militarisation des libertés politiques.
11. Depuis 2014, la Fédération de Russie a tenu des élections et des référendums truqués et illégaux dans les territoires temporairement occupés de l’Ukraine, en violation flagrante du droit international. L’Assemblée a précédemment reconnu que les simulacres de «référendums» organisés par la Fédération de Russie sur le territoire ukrainien ne sauraient servir de fondement à une quelconque modification du statut de ces régions ukrainiennes, et représentent une escalade de l’agression contre l’Ukraine 
			(9) 
			Résolution 2482 (2023) «Questions juridiques et violations des droits de l'homme
liées à l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine»..
12. Les dernières tentatives illicites de la Fédération de Russie d’organiser, du 8 au 10 septembre 2023, de prétendus processus électoraux dans les territoires ukrainiens temporairement occupés constituent une nouvelle violation des principes et des normes universellement reconnus du droit international. Dans une déclaration commune, le Président du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, Krišjānis Kariņš, le Président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, Tiny Kox, et la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, Marija Pejčinović Burić, ont clairement indiqué que cette mascarade électorale n’a de toute évidence aucune validité au regard du droit international et ont condamné l’organisation de ces scrutins, qu’ils qualifient de nouvelle illustration du mépris dont fait preuve la Fédération de Russie à l’égard des valeurs de la démocratie, des droits humains et de l’État de droit 
			(10) 
			Conseil de l’Europe, <a href='https://www.coe.int/en/web/portal/full-news/-/asset_publisher/y5xQt7QdunzT/content/id/249627835?_com_liferay_asset_publisher_web_portlet_AssetPublisherPortlet_INSTANCE_y5xQt7QdunzT_languageId=fr_FR'>«Déclaration
commune sur les élections illégitimes qui se sont tenues dans les
territoires de l’Ukraine temporairement occupés par la Russie»</a>, 10 septembre 2023..

2.3. Violations du droit humanitaire et des droits humains

13. Les forces russes bombardent aveuglément chaque jour les villes ukrainiennes, menant des frappes de missiles à longue portée, des attaques de drones et d’autres armes, que les systèmes de défense aérienne ukrainiens ne parviennent qu’en partie à détourner, et à mesure que la guerre se poursuit, le nombre de victimes ne cesse d’augmenter.
14. Les données recueillies par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) montrent que la grande majorité des victimes résulte de l’utilisation «d’armes explosives à large rayon d’impact», c’est-à-dire de tirs d’artillerie, des chars et des systèmes de roquettes à lancement multiple, des missiles de croisière et balistiques et des frappes aériennes.
15. Dans l’ensemble, les estimations les plus récentes du HCDH font état de 9 701 civils tués et de 17 748 blessés en Ukraine depuis le début de l’invasion militaire de la Russie à grande échelle contre l’Ukraine. Toutefois, les chiffres réels sont probablement bien plus élevés, le HCDH ayant fait savoir que les informations peuvent être incomplètes ou encore en cours de collecte et de vérification, en particulier dans les zones en proie aux combats les plus intenses et qui restent sous occupation temporaire de la Russie (telles que Marioupol, Lissitchansk, Popasna et Severodonetsk) 
			(11) 
			<a href='https://www.ohchr.org/en/news/2023/09/ukraine-civilian-casualty-update-24-september-2023'>«Ukraine:
civilian casualty update 24 September 2023», OHCHR</a>..
16. L’invasion militaire russe à grande échelle est également à l’origine d’une crise humanitaire sans précédent, provoquant le déplacement massif de civils fuyant le conflit, le plus important jamais observé en Europe depuis la seconde guerre mondiale. Selon les données recueillies par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), au 19 septembre 2023, quelque 6,2 millions d’Ukrainiens se trouvaient à l’étranger 
			(12) 
			<a href='https://data.unhcr.org/en/situations/ukraine/location'>Ukraine
Refugee Situation (unhcr.org)</a>.. De plus, d’après les estimations de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), datant de mai 2023, près de 5,1 millions de personnes étaient déplacées à l’intérieur de l’Ukraine. Parmi elles, 7 % avaient été déplacées hors du pays avant d’y retourner, mais restaient toujours en situation de déplacement 
			(13) 
			<a href='https://dtm.iom.int/fr/node/26206'>«Ukraine
– Internal Displacement Report – General Population Survey Round
13 (June 2023)», Displacement Tracking Matrix (iom.int)</a>..
17. Le conflit cause par ailleurs des dommages incalculables à l’environnement ukrainien, au point de constituer un crime d’écocide. Les inondations provoquées par la destruction du barrage de Kakhovka par la Russie en sont l’exemple le plus flagrant. Selon les données communiquées par les autorités ukrainiennes au Conseil de l’Europe 
			(14) 
			<a href='https://ecozagroza.gov.ua/en'>https://ecozagroza.gov.ua/en</a>., 2 534 cas de dommages environnementaux ont été enregistrés depuis le début du conflit. Ils se traduisent par une augmentation de la pollution et des atteintes aux réserves naturelles et aux écosystèmes protégés, à la biodiversité ainsi qu’aux ressources en eau douce qui mettront des dizaines d’années à retrouver leur état initial et pourraient même ne jamais s’en remettre. La question de la sécurité nucléaire est également une préoccupation majeure. En fait, le tout premier point de la formule de paix du Président Zelensky appelle au rétablissement des conditions de sécurité autour de la plus grande centrale nucléaire d'Europe, la centrale nucléaire de Zaporijjia, qui est actuellement sous occupation russe.
18. Les forces russes en Ukraine ont perpétré de graves crimes de guerre et des crimes contre l’humanité en violation du droit international humanitaire et des droits humains, qui ont été signalés dès les premiers jours de l’invasion. La Commission internationale indépendante d’enquête sur l’Ukraine établie par le HCR 
			(15) 
			54e session
du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, «<a href='https://www.ohchr.org/en/press-releases/2023/09/un-commission-inquiry-ukraine-finds-continued-systematic-and-widespread-use'>Oral
Update of the Independent International Commission of Inquiry on
Ukraine</a>», 25 septembre2023. et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (BIDDH/OSCE) 
			(16) 
			OSCE, <a href='https://www.osce.org/odihr/548629'>«Third
Interim Report on reported violations of international humanitarian
law and international human rights law in Ukraine»</a>, 17 juillet 2023. ont produit des éléments de preuve constants, attestant de crimes de guerre perpétrés par les forces russes, dont plusieurs attaques aveugles menées à l’aide d’armes explosives dans des zones peuplées et touchant des infrastructures civiles telles que des bâtiments résidentiels et des établissements de santé. Les preuves témoignent également de violations généralisées et systématiques de l’intégrité personnelle, notamment des exécutions sommaires, des actes de torture, des mauvais traitements infligés aux prisonniers de guerre et des violences sexuelles.
19. La Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe suit également de près la situation en Ukraine. Elle effectue des visites régulières dans le pays et rédige des rapports sur différentes questions 
			(17) 
			<a href='https://www.coe.int/fr/web/commissioner/country-monitoring/ukraine'>Ukraine
– Travail pays – Commissaire aux droits de l'homme (coe.int)</a>. En avril 2023, elle a présenté un rapport sur la lutte des Tatars de Crimée pour les droits humains («Crimean Tatars’ struggle for human rights», en anglais seulement) 
			(18) 
			Commissaire aux droits
de l’homme, «<a href='https://rm.coe.int/report-on-crimean-tatars-by-dunja-mijatovic-commissioner-for-human-rig/1680aaeb4b'>Crimean
Tatars’ struggle for human rights</a>» (anglais seulement), avril 2023., qui met en exergue les nombreux schémas de violations des droits humains commises à l’encontre des Tatars de Crimée tout au long de leur histoire, en particulier après l’occupation temporaire et la tentative d’annexion illégales de la Crimée en 2014 par la Fédération de Russie.
20. Le 4 octobre 2023, la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe a présenté au Comité des Ministres un rapport sur la situation des droits humains en Crimée depuis le début de l’invasion à grande échelle 
			(19) 
			SG/Inf(2023)29,
«<a href='https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=0900001680ac6e0f'>Situation
des droits humains en République autonome de Crimée et dans la ville
de Sébastopol, Ukraine</a>», 31 août 2023.. Le rapport souligne que, même si la péninsule n’a pas été le théâtre d’hostilités à grande échelle au cours de l’année passée, les forces russes ont largement exploité la Crimée pour leur offensive terrestre ainsi que pour mener de nombreuses attaques aériennes, notamment à l’aide de la flotte de la mer Noire, dont le quartier général se situe à Sébastopol. L’effort militaire russe s’est également appuyé sur la conscription et l’enrôlement militaire illégaux de la population de la péninsule, sur ses capacités logistiques et sanitaires, ainsi que sur l’exploitation d’autres ressources du territoire temporairement occupé. En outre, il apparait que nombre des pratiques abusives en matière de droits humains et de violations ont été reconduites et amplifiées dans les territoires temporairement occupés en 2022 des régions de Donetsk, Kherson, Louhansk et Zaporijjia. Le Comité des Ministres a donc invité la Secrétaire Générale à examiner plus avant la situation des droits humains dans tous les territoires de l’Ukraine temporairement contrôlés ou occupés par la Fédération de Russie, et a encouragé la Commissaire aux droits de l’homme à faire de même 
			(20) 
			Comité
des Ministres, 1477e réunion, <a href='https://search.coe.int/cm/pages/result_details.aspx?ObjectId=0900001680accd66'>Décisions
CM/Del/Dec(2023)1477/2.4</a>, 4 octobre 2023.
21. L’une des préoccupations les plus sérieuses a trait au crime de génocide. La commission d’enquête du HCR s’est également dite préoccupée par les allégations de génocide en Ukraine, s’agissant en particulier du discours officiel russe diffusé par les radiodiffuseurs d’État et autres médias russes qui peut constituer une incitation à commettre un génocide. L’Assemblée a exprimé des inquiétudes similaires dans sa Résolution 2482 (2023) «Questions juridiques et violations des droits de l’homme liées à l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine», dans laquelle elle soulignait que le processus dit de «désukrainisation», présente des caractéristiques d’incitation publique au génocide ou révèle une intention génocidaire de détruire le groupe national ukrainien en tant que tel ou au moins une partie de celui-ci.
22. Les méthodes employées par l’armée russe dans cette guerre d’agression contre l’Ukraine et les actes des autorités russes illégitimes dans les territoires ukrainiens temporairement occupés montrent que la rhétorique russe n’est pas une menace en l’air. Les massacres de Boutcha et d’Irpine et ceux découverts dans d’autres villes libérées de l’occupation russe, l’utilisation de puissants explosifs et même d’armes thermobariques et à sous-munitions dans des zones densément peuplées constituent des crimes de guerre, au même titre que la destruction complète de la ville de Marioupol et les bombardements intensifs d’autres villes et localités ukrainiennes. La traque méthodique et les opérations de «filtrage» de patriotes ukrainiens ainsi que les mauvais traitements qui leur sont infligés dans des chambres de torture improvisées par les autorités d’occupation illégale, ou encore l’incorporation de force dans l’armée russe d’hommes vivant dans les régions temporairement occupées de l’Ukraine, témoignent de l’intention des occupants d’anéantir la nation ukrainienne partout où ils le peuvent. La destruction du patrimoine culturel revêt une importance particulière dans ce contexte: en septembre 2023, l’UNESCO avait recensé au moins 291 sites culturels endommagés 
			(21) 
			<a href='https://www.unesco.org/en/ukraine-war/damages-and-victims'>www.unesco.org/en/ukraine-war/damages-and-victims</a>..
23. Dans la même veine, des infrastructures civiles vitales comme les hôpitaux, les marchés, les centrales électriques, les réseaux de chauffage urbain (qui assurent la production de chaleur à partir de systèmes centralisés et sa distribution aux bâtiments résidentiels et commerciaux), et les installations de stockage et de transformation des denrées alimentaires sont systématiquement visées et détruites. Le dernier exemple en date est l’attaque brutale au missile sur un café et une épicerie du village de Hroza, dans la région de Kharkiv, le 5 octobre 2023, qui a coûté la vie à au moins 51 personnes 
			(22) 
			<a href='https://edition.cnn.com/europe/live-news/russia-ukraine-war-news-10-05-23/index.html'>https://edition.cnn.com/europe/live-news/russia-ukraine-war-news-10-05-23/index.html</a>.. Selon les estimations de l’École d’économie de Kyiv, le montant total des dommages de guerre directs en Ukraine dont plus de la moitié causés aux logements et aux infrastructures, s’élevait en juin 2023 à 150,5 milliards de dollars 
			(23) 
			École d'économie de
Kyiv, “<a href='https://kse.ua/about-the-school/news/the-total-amount-of-direct-damage-to-ukraine-s-infrastructure-caused-due-to-the-war-as-of-june-2023-exceeded-150-billion/'>The
total amount of direct damage to Ukraine’s infrastructure caused
due to the war as of June 2023 exceeded $150 billion</a>”, 2 août 2023.. Les chiffres réels pourraient cependant être bien plus élevés.
24. La guerre d’agression menée par la Russie affecte l’ensemble de l’économie ukrainienne: en 2022, le PIB national a enregistré une chute vertigineuse de 30 % 
			(24) 
			<a href='https://www.imf.org/external/datamapper/NGDP_RPCH@WEO/UKR?zoom=UKR&highlight=UKR'>www.imf.org/external/datamapper/NGDP_RPCH@WEO/UKR?zoom=UKR&highlight=UKR</a>.. En entravant l’accès de l’Ukraine au marché international, du fait de la perturbation des chaînes d’approvisionnement et des routes commerciales, les exportations en provenance de ce pays ont été fortement réduites. Les répercussions se sont fait sentir au niveau mondial, notamment en ce qui concerne l’exportation de céréales. La décision prise par la Fédération de Russie de se retirer en juillet 2023 de l’initiative céréalière de la mer Noire 
			(25) 
			<a href='https://edition.cnn.com/2023/07/17/europe/russia-ukraine-grain-deal-intl/index.html'>https://edition.cnn.com/2023/07/17/europe/russia-ukraine-grain-deal-intl/index.html</a>. qui permettait le transport sécurisé des céréales en provenance d’Ukraine, a contraint le pays à trouver des solutions alternatives et a eu une incidence sur ses exportations ainsi que sur l’accès mondial à ses réserves de céréales. De plus, la Fédération de Russie n’a pas hésité à attaquer les infrastructures de stockage de céréales dans le port d’Odessa 
			(26) 
			<a href='https://www.reuters.com/world/europe/russia-hits-port-grain-silo-ukraines-odesa-region-official-2023-08-02/'>www.reuters.com/world/europe/russia-hits-port-grain-silo-ukraines-odesa-region-official-2023-08-02/</a>., et les autorités russes ont expressément indiqué qu’elles avaient «la capacité de remplacer les céréales ukrainiennes» sur les marchés mondiaux 
			(27) 
			<a href='https://edition.cnn.com/2023/10/05/economy/russia-wheat-exports-ukraine-war/index.html'>https://edition.cnn.com/2023/10/05/economy/russia-wheat-exports-ukraine-war/index.html</a>.. Cette attitude témoigne d’une tentative de militarisation du commerce et de l’exportation de denrées alimentaires – une menace vitale pour la sécurité mondiale, contre laquelle le deuxième point de la formule de paix du Président Zelensky est dirigé.
25. Dans sa Résolution 2482 (2023), l’Assemblée indiquait déjà que certains des actes commis par les forces russes contre les civils ukrainiens pourraient relever de l’article II de la Convention sur le génocide (à laquelle l’Ukraine et la Fédération de Russie sont toutes deux parties), notamment le transfert forcé d’enfants à des fins de russification. Les enlèvements de dizaines de milliers d’enfants ukrainiens et leur placement dans des camps d’internement dans des régions éloignées de Russie constituent un crime contre l’humanité et pourraient bien être considérés comme un élément de génocide.
26. De même, dans sa Résolution 2495 (2023) «Déportations et transferts forcés d’enfants et d’autres civils ukrainiens vers la Fédération de Russie ou les territoires ukrainiens temporairement occupés: créer les conditions de leur retour en toute sécurité, mettre fin à ces crimes et sanctionner leurs auteurs», l’Assemblée a encore appuyé cette conclusion, en défendant la nécessité de recueillir, d’enregistrer et d’évaluer de façon méticuleuse les preuves du crime de génocide. En outre, elle a invité la Cour pénale internationale à examiner avec tout le sérieux requis les possibilités d’engager une action pénale pour crime de génocide contre la politique d’État de la Fédération de Russie à l’égard des enfants ukrainiens actuellement sous son contrôle.
27. Il convient de noter que la Cour pénale internationale a déjà délivré des mandats d’arrêt à l’encontre du Président russe Vladimir Poutine et de la commissaire russe aux droits de l’enfant Maria Lvova-Belova, estimant qu’il existe des motifs raisonnables de croire que la responsabilité de chacun des suspects est engagée à raison du crime de guerre de déportation illégale de population et du crime de guerre de transfert illégal de population depuis certaines zones temporairement occupées de l’Ukraine vers la Fédération de Russie, ces crimes ayant été commis à l’encontre d’enfants ukrainiens 
			(28) 
			Cour pénale internationale, <a href='https://www.icc-cpi.int/fr/news/situation-en-ukraine-les-juges-de-la-cpi-delivrent-des-mandats-darret-contre-vladimir'>communiqué
de presse, 17 mars 2023</a>..

2.4. Reconnaître l’Holodomor en tant que génocide

28. Les politiques génocidaires menées par la Fédération de Russie à l’encontre de l’Ukraine doivent être mises en corrélation avec une tentative antérieure d’anéantissement de la nation ukrainienne, à savoir la grande famine ou Holodomor, dont le 90e anniversaire sera commémoré en novembre 2023.
29. L’Holodomor a tué entre 4 et 8 millions d’Ukrainiens, principalement dans les campagnes, à I’abri du regard des observateurs étrangers postés dans les villes. Des documents secrets publiés après la «révolution orange» ont révélé le caractère intentionnel de la famine. Elle visait principalement les Ukrainiens de la République socialiste soviétique d’Ukraine ainsi que ceux vivant dans d’autres régions de l’Union soviétique.
30. Cette famine artificielle a été précédée d’une série de simulacres de procès, de disparitions forcées et d’autres formes de répression visant les élites intellectuelles ukrainiennes, l’épine dorsale culturelle de la nation ukrainienne. Le génocide n’implique pas d’exterminer tous les membres du groupe cible: il suffit d’en briser l’épine dorsale culturelle en rendant les conditions de vie impossibles au point de détruire le groupe en tant que tel.
31. Alors que plusieurs États membres du Conseil de l’Europe ont déjà reconnu l’Holodomor comme un génocide 
			(29) 
			<a href='https://holodomormuseum.org.ua/en/recognition-of-holodomor-as-genocide-in-the-world/'>https://holodomormuseum.org.ua/en/recognition-of-holodomor-as-genocide-in-the-world/</a>., au même titre que le Parlement européen en décembre 2022 
			(30) 
			<a href='https://www.europarl.europa.eu/news/en/press-room/20221209IPR64427/holodomor-parliament-recognises-soviet-starvation-of-ukrainians-as-genocide'>www.europarl.europa.eu/news/en/press-room/20221209IPR64427/holodomor-parliament-recognises-soviet-starvation-of-ukrainians-as-genocide</a>., il est temps que l’Assemblée agisse dans ce sens et demande aux parlements nationaux des États membres et non membres qui ne l’ont pas encore fait de suivre cet exemple. Cette reconnaissance attendue de longue date constituerait un hommage symbolique mais aussi puissant au peuple ukrainien et en particulier aux victimes de ce crime horrible, comme l’Assemblée l’avait déjà évoqué dans sa Résolution 1723 (2010) «Commémoration des victimes de la Grande Famine (Holodomor) en ex-URSS».
32. L’Assemblée poursuivra son action par l’intermédiaire de sa Commission des questions juridiques et des droits de l’homme sur la base de la proposition de résolution «Commémoration du 90e anniversaire de l’Holodomor de 1932-1933 en Ukraine» afin d’établir la vérité historique et d’exposer les arguments juridiques qui conduisent à la conclusion que l’Holodomor constituait un génocide 
			(31) 
			 Proposition de résolution, Doc. 15728,
21 mars 2023..

3. Soutien apporté par le Conseil de l’Europe à l’Ukraine

33. «Nous demeurerons aux côtés de l’Ukraine, aussi longtemps qu’il le faudra» 
			(32) 
			Conseil de l’Europe,
Unis autour de nos valeurs – Déclaration de Reykjavík, (2023).. La Déclaration de Reykjavík, adoptée lors du 4e Sommet du Conseil de l’Europe, constitue un engagement clair et se veut l’expression du plein soutien des États membres de l’Organisation à l’égard de l’Ukraine et de son peuple. Depuis le début de la guerre d’agression à grande échelle menée par la Fédération de Russie, le Conseil de l’Europe est aux côtés de l’Ukraine. La réponse ferme du Comité des Ministres qui a bénéficié de l’appui unanime de l’Assemblée, à savoir l’exclusion de la Fédération de Russie du Conseil de l’Europe, a été l’une des premières mesures adoptées à ce titre.
34. Par ailleurs, des mesures concrètes ont été prises concernant la participation de la Fédération de Russie aux conventions ouvertes du Conseil de l’Europe (celles ouvertes aux États non membres de l’Organisation), chaque organe conventionnel décidant, sur la base de ses règles de procédure, des modalités de restriction ou limitation de la participation de la Fédération de Russie dans l’organe respectif 
			(33) 
			Comité des Ministres, <a href='https://search.coe.int/cm/Pages/result_details.aspx?ObjectId=0900001680a6f609'>CM/Del/Dec(2022)1438/2.3</a>, 30 juin 2022..
35. Le Conseil de l’Europe a mobilisé son savoir-faire et ses ressources pour aider l’Ukraine. Il a notamment mis son expertise au service du procureur général du pays dans le cadre des enquêtes sur les violations des droits humains, a proposé ses compétences techniques à l’Ukraine et aux pays voisins pour faire face aux déplacements massifs de la population civile du pays, et a veillé à ce que l’Ukraine adhère à la Banque de développement de l’Organisation en juin 2023. La première opération dans le pays depuis l’adhésion de l’Ukraine à la Banque a commencé en septembre 2023 en vue de financer des réparations de logements pour des ménages vulnérables dans les zones touchées par le conflit. La Banque a approuvé des prêts à hauteur de 1,3 milliard d’euros pour répondre aux besoins à long terme des réfugiés ukrainiens et des pays d’accueil.
36. Le Plan d’action du Conseil de l’Europe pour l’Ukraine «Résilience, relance et reconstruction» 2023-2026 a été élaboré avant tout pour accompagner le processus de reconstruction et de reprise économique en Ukraine. Il prévoit en outre l’octroi d’un soutien pour renforcer la résilience des institutions publiques ukrainiennes, consolider la gouvernance démocratique et l’État de droit et protéger les droits fondamentaux des citoyens. Ce Plan d’action conjugue l’expertise du Conseil de l’Europe aux efforts déployés par l’Ukraine pour se relever des ravages causés par les actes de la Fédération de Russie, et aussi pour soutenir le programme de réforme de l’Ukraine dans une perspective européenne, à la suite de la décision du Conseil européen du 23 juin 2022 d’accorder à l’Ukraine le statut de candidat à l’Union européenne.
37. Les besoins de financement pour le cadre de coopération quadriennal prévu par le Plan d’action sont estimés à 50 millions d’euros. Au 28 septembre 2023, les contributions versées à ce titre ont déjà permis de couvrir 39 % des besoins 
			(34) 
			Conseil de l’Europe,
Direction de la coordination des programmes, <a href='https://www.coe.int/fr/web/programmes/resource-mobilisation-at-a-glance'>«La
mobilisation des ressources en un coup d'œil</a>», consultée le 4 octobre 2023.. La poursuite de ce soutien sera essentielle pour assurer le lancement de projets dans les axes d’intervention prioritaires et faire face à l’évolution des besoins et des priorités des autorités ukrainiennes.
38. Les États membres du Conseil de l’Europe ont également manifesté clairement leur soutien résolu à l’Ukraine au sein de l’Assemblée, les délégations nationales, les groupes politiques et les parlementaires à titre individuel contribuant à rallier l’appui des parlements, des gouvernements et des citoyens à la cause de l’Ukraine.
39. Lors de la Conférence européenne des présidentes et présidents de parlement qui s’est tenue à Dublin les 28 et 29 septembre 2023 
			(35) 
			<a href='https://rm.coe.int/conclusions-dublin-2023/1680acbc9a'>Conclusions</a> de la Conférence européenne des présidentes et présidents
de parlement, Dublin, 28-29 septembre 2023., ces derniers ont réaffirmé leur solidarité avec le peuple ukrainien et leur engagement indéfectible à se tenir aux côtés de l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra. Le rôle des parlements nationaux en tant que gardiens de la démocratie et de l’ordre international fondé sur le droit a été mis en exergue. Les parlementaires sont à cet égard bien placés pour montrer la voie, continuer à expliquer aux citoyen·ne·s quels sont les véritables enjeux de cette guerre, demander des comptes aux gouvernements et veiller à ce que la détermination ne faiblisse pas. En recourant à la diplomatie parlementaire et au dialogue interparlementaire, les parlementaires peuvent continuer de mobiliser des alliés en faveur de l’Ukraine et promouvoir le système multilatéral de gouvernance mondiale, fermement ancré dans l’État de droit.
40. Les parlements ont un rôle tout aussi important à jouer pour assurer à l’Ukraine un soutien au niveau national lui permettant d’exercer son droit à la légitime défense, et pour commencer à mobiliser les ressources qui seront nécessaires pour financer la reconstruction du pays, réparer les dommages causés à l’environnement et restaurer, dans toute sa richesse, le patrimoine culturel et religieux national. Les parlements devraient également contribuer, en fournissant expertise et conseils, à assurer à la Verkhovna Rada une capacité institutionnelle accrue, à renforcer la résilience démocratique de l’Ukraine, et à préparer son entrée dans l’Union européenne en tant que membre à part entière.
41. À Dublin, les présidentes et présidents des parlements ont également réaffirmé leur engagement en faveur des principes énoncés dans la formule de paix en dix points du Président Zelensky, et leur ferme soutien à l’établissement d’un mécanisme d’indemnisation et d’un tribunal international spécial pour le crime d’agression 
			(36) 
			Idem..

4. Soutenir la victoire de l’Ukraine

4.1. Soutien militaire

42. La Fédération de Russie se prépare à de longues années de guerre. Le ministère des Finances a déclaré que le montant total des dépenses de défense nationale s’élèvera à 10 800 milliards de roubles en 2024 
			(37) 
			<a href='https://tass.com/economy/1683837'>https://tass.com/economy/1683837</a>., soit une hausse de 70 % du budget alloué à la défense par rapport à 2023, ce qui équivaudra à 30 % des dépenses publiques totales et à 6 % de son PIB 
			(38) 
			<a href='https://www.huffingtonpost.co.uk/entry/russian-defence-spending-to-surge-as-kremlim-prepares-for-multiple-years-of-war-in-ukraine_uk_65193d6ce4b0521d3236cf18'>www.huffingtonpost.co.uk/entry/russian-defence-spending-to-surge-as-kremlim-prepares-for-multiple-years-of-war-in-ukraine_uk_65193d6ce4b0521d3236cf18</a>.. Dans le même temps, les autorités ukrainiennes prévoient de poursuivre les opérations pendant l’hiver. Dès lors, il sera d’autant plus important de veiller à ce que l’Ukraine dispose des moyens suffisants lui permettant de continuer sa progression à moyen et à long terme 
			(39) 
			Institute
for the Study of War (Institut pour l'étude de la guerre), «<a href='https://www.understandingwar.org/backgrounder/it’s-time-west-embrace-ukraine’s-way-war-not-doubt-it'>It’s
Time for the West to Embrace Ukraine’s Way of War, Not Doubt It</a>», 25 septembre 2023..
43. À cet égard, l’Assemblée devrait encourager les États membres du Conseil de l’Europe à renforcer leur soutien et à démentir le message distillé par le Kremlin faisant état d’une «lassitude à l’égard de la guerre» chez les partenaires de l’Ukraine. Le 2 octobre 2023, les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne se sont réunis pour la première fois dans un État non membre, à Kyiv, adressant ainsi un important message de soutien à l’Ukraine. Comme l’a déclaré le haut représentant de l’Union européenne, M. Josep Borrell, l’aide militaire, civile et humanitaire apportée jusqu’à présent par l’Union européenne a atteint le chiffre de 85 milliards d’euros 
			(40) 
			<a href='https://www.eeas.europa.eu/eeas/ukraine-press-remarks-high-representative-josep-borrell-russia’s-information-manipulation-its_en'>www.eeas.europa.eu/eeas/ukraine-press-remarks-high-representative-josep-borrell-russia%E2%80%99s-information-manipulation-its_en</a>., ce qui est, avec les engagements des autres États membres, le montant le plus élevé au monde 
			(41) 
			<a href='https://www.ifw-kiel.de/topics/war-against-ukraine/ukraine-support-tracker/'>Kiel
Institute for the World Economy | Ukraine Support Tracker</a>.. M. Borrell a également réaffirmé l’engagement de l’Union européenne à former jusqu’à 40 000 soldats ukrainiens dans les mois à venir.
44. Par ailleurs, le 30 septembre 2023, les États-Unis ont évité in extremis le «shutdown», la paralysie de l’administration fédérale. Le maintien du soutien américain à l’effort de guerre de l’Ukraine est essentiel, sachant notamment que les États-Unis sont le premier contributeur à l’aide militaire au pays: dès juillet 2023, ils avaient fourni 46,6 milliards de dollars sous forme d’assistance à la sécurité, d’armes, ainsi que de prêts et subventions pour l’achat d’armes et de matériel militaire 
			(42) 
			<a href='https://www.cfr.org/article/how-much-aid-has-us-sent-ukraine-here-are-six-charts'>«How
Much Aid Has the U.S. Sent Ukraine? Here Are Six Charts», Council
on Foreign Relations (cfr.org)</a>..
45. Le Danemark, les Pays-Bas et la Norvège se sont engagés en août 2023 à livrer des avions de combat F-16 à l’Ukraine pour ce qui concerne les derniers développements en termes de fourniture de matériel militaire, tandis que d’autres pays apporteront leur soutien à la formation des pilotes ukrainiens. Les premiers avions devraient ainsi être déployés au début de l’année 2024. En attendant, le premier groupe de chars M1 Abrams de fabrication américaine est arrivé en Ukraine et devrait bientôt être opérationnel sur le terrain. Les avions de combat et les chars contribueront, nous l’espérons, de manière significative à la contre-offensive. Il convient toutefois de fournir aussi un soutien supplémentaire en termes de munitions et d’obus d’artillerie, en augmentant leur production, comme l’a demandé le Président Zelensky lors de sa réunion avec les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne tenue à Kyiv 
			(43) 
			<a href='https://www.president.gov.ua/en/news/nasha-spilna-peremoga-pryamo-zalezhit-vid-nashoyi-z-vami-spi-86013'>www.president.gov.ua/en/news/nasha-spilna-peremoga-pryamo-zalezhit-vid-nashoyi-z-vami-spi-86013</a>..

4.2. Soutien politique et diplomatique

46. La guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine se déroule sur le champ de bataille, mais également dans le tribunal de l’opinion publique. Soutenir la victoire de l'Ukraine, c’est donc aussi déployer des efforts diplomatiques pour maintenir et accroître le soutien à l’Ukraine dans la communauté internationale et au niveau des pays, en veillant à ce que les gouvernements tiennent leurs promesses et que l’opinion publique soit bien informée des enjeux de cette guerre.
47. Apporter un soutien politique et diplomatique est un aspect important de la défense de l’Ukraine et du système multilatéral international. Il est absolument essentiel de renforcer le soutien diplomatique en appelant tous les États désireux de maintenir un ordre de paix international fondé sur des règles à soutenir l’Ukraine et à isoler la Fédération de Russie, afin de protéger les principes d’intégrité territoriale et de souveraineté, tant au niveau bilatéral qu’au sein des institutions multilatérales.
48. La réunion informelle des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne à Kyiv, en octobre 2023, a montré la détermination et l’unité des pays européens. Le débat public de haut niveau en septembre 2023 sur le multilatéralisme efficace et le maintien de la paix et de la sécurité en Ukraine, organisé par l’Albanie, présidence tournante du Conseil de sécurité des Nations Unies, a également été un événement important sur ce plan. Pour les dirigeants internationaux, le dialogue, la diplomatie et une paix juste sont clairement une nécessité. Le débat a néanmoins mis en évidence des divergences de vues entre certains États ou groupes.
49. Les BRICS, par exemple, se sont abstenus de condamner la guerre d'agression illégale de la Fédération de Russie contre l'Ukraine 
			(44) 
			<a href='https://brics2023.gov.za/wp-content/uploads/2023/08/Jhb-II-Declaration-24-August-2023-1.pdf'>XVe
Sommet des BRICS, Déclaration de Johannesburg II</a>, 23 août 2023.. Par l’entremise de cette plateforme et le renforcement des relations bilatérales avec certains pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, la Fédération de Russie cherche à éviter les sanctions et à développer ses relations commerciales. Cette approche se manifeste dans les efforts qu’elle déploie pour élargir le groupe, la première vague d’élargissement ayant été annoncée lors du XVe sommet des BRICS, qui s’est tenu en août 2023. Ainsi, l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis deviendront membres à part entière des BRICS en janvier 2024 
			(45) 
			<a href='https://www.thepresidency.gov.za/speeches/media-briefing-remarks-brics-chair%2C-president-cyril-ramaphosa%2C-announcing-outcomes-xv-brics-summit'>Allocution
de synthèse du président des BRICS, le Président Cyril Ramaphosa,
devant les médias pour annoncer les résultats du XVe sommet des
BRICS</a>, 24 août 2023..
50. Le soutien politique au niveau national est tout aussi crucial. Les effets de la guerre d’agression de la Russie entraînent de nettes répercussions sur le coût de la vie, les marchés de l’énergie, l’environnement et la sécurité alimentaire partout dans le monde. Des messages politiques efficaces resteront nécessaires pour maintenir un large front de solidarité avec l’Ukraine, face aux fausses informations diffusées par la Fédération de Russie, qui propagent l’idée que les sanctions internationales qui lui sont imposées et les actions des partisans de l’Ukraine sont la cause de problèmes intérieurs. L’Assemblée a précédemment noté que la responsabilité incombe au régime agresseur. Ces sanctions n’auraient pas été nécessaires si la Fédération de Russie n’avait pas enfreint gravement le droit international 
			(46) 
			Résolution 2506 (2023) «Les conséquences politiques de la guerre d’agression
de la Fédération de Russie contre l’Ukraine», juin 2023..

5. Une paix globale, juste et durable

5.1. Soutenir la reconstruction de l’Ukraine

51. L’effort de reconstruction de l’Ukraine après la guerre pourrait être le plus important de l’histoire moderne. L’Ukraine a déjà montré qu’il était possible de reconstruire un pays pendant qu’une guerre s’y déroule, et il est indispensable de planifier la reconstruction d’après-guerre le plus tôt possible. La reconstruction de l’Ukraine ne peut être une réussite que si l’avenir de ce pays s’inscrit à long terme au cœur de l’Europe, au sens géographique, mais aussi politique: l’intégration européenne est absolument essentielle au redressement de l’Ukraine.
52. Dans une évaluation conjointe publiée en mars 2023, le Gouvernement ukrainien, le Groupe de la Banque mondiale, la Commission européenne et les Nations Unies ont estimé le coût de la reconstruction et du redressement de l’Ukraine à 411 milliards de dollars américains (soit 383 milliards d’euros). Cette estimation couvre la période d’un an qui sépare l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, et le premier anniversaire de la guerre, le 24 février 2023. Le coût de la reconstruction et du redressement, qui devrait s’étendre sur dix ans, prend en compte les besoins en fonds publics ainsi que les besoins en fonds privés 
			(47) 
			<a href='https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2023/03/23/updated-ukraine-recovery-and-reconstruction-needs-assessment'>www.worldbank.org/en/news/press-release/2023/03/23/updated-ukraine-recovery-and-reconstruction-needs-assessment</a>..
53. Pour mener à bien un processus de reconstruction, on peut tirer d’intéressants enseignements des efforts considérables de réforme et de reconstruction qui ont été déployés en Europe occidentale après la seconde guerre mondiale, en Europe centrale et orientale après la fin de la guerre froide, et dans les Balkans occidentaux après les guerres dans l’ex-Yougoslavie. Dans tous ces cas, le processus d’intégration politique européenne a joué un rôle clé en jetant les bases d’une stabilité et d’une prospérité accrues 
			(48) 
			<a href='https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA2200-1.html'>www.rand.org/pubs/research_reports/RRA2200-1.html</a>.. La sécurité est aussi un élément essentiel pour poser les fondations solides de la reconstruction de l’Ukraine. En outre, une reconstruction réussie nécessitera la mise en place de liens solides en matière de commerce et d'investissement internationaux et un environnement accueillant pour les entreprises internationales.
54. Le Conseil national pour le redressement de l’Ukraine a adopté son Plan de relance en juillet 2022. L’objet de ce plan est de trouver des solutions efficaces pour une relance rapide des processus économiques et sociaux vitaux et des écosystèmes naturels les plus essentiels du pays. Il vise également à définir un plan de modernisation pour assurer une croissance économique accélérée et durable ainsi que le bien-être de la population 
			(49) 
			<a href='https://www.urc-international.com/urc2022-recovery-plan'>www.urc-international.com/urc2022-recovery-plan</a>..
55. La Conférence sur la relance de l’Ukraine 2023, organisée à Londres les 21 et 22 juin 2023 conjointement par le Royaume-Uni et l’Ukraine, a permis de renforcer les engagements de soutien international à l’Ukraine et s’est attachée à attirer des investissements internationaux pour la reconstruction du pays, les discussions ayant surtout porté sur la meilleure façon de permettre au secteur privé d’investir dans le programme ukrainien de transformation et de réforme 
			(50) 
			<a href='https://www.gov.uk/government/publications/ukraine-recovery-conference-2023-ukraine-and-uk-co-chairs-statement'>www.gov.uk/government/publications/ukraine-recovery-conference-2023-ukraine-and-uk-co-chairs-statement</a>.. La Conférence sur la relance de l’Ukraine 2024 sera accueillie par l’Allemagne et il sera important de maintenir l’élan des conférences précédentes.
56. Le peuple ukrainien est le meilleur atout de ce processus; son bien-être doit être une priorité. Les acteurs locaux sont les mieux placés pour juger des besoins de leur communauté et ils peuvent apporter leurs réseaux et leur expertise pour faciliter l’accès aux services essentiels. Les donateurs, les gouvernements et les institutions devraient donc s’engager à fournir des ressources qui permettent aux communes de prendre l’initiative là où elles sont le mieux placées pour agir.

5.2. Soutenir la résilience démocratique de l’Ukraine

57. Les institutions démocratiques de l’Ukraine à tous les niveaux sont mises à l’épreuve par l’agression russe et ont su bien résister malgré les difficultés rencontrées. Il sera fondamental de les rendre plus résilientes encore, pour que s’instaure après la guerre une société ukrainienne prospère et que l’Ukraine progresse sans heurts vers l’intégration dans l’Union européenne.
58. Par ses activités de coopération pluridimensionnelles, le Conseil de l’Europe confirme qu’il est l’un des premiers partenaires de l’Ukraine. Le Plan d’action pour l’Ukraine 2023-2026 
			(51) 
			Plan d’action du Conseil
de l’Europe pour l’Ukraine «<a href='https://rm.coe.int/action-plan-ukraine-2023-2026-fre/1680aa8281'>Résilience,
relance et reconstruction</a>» 2023-2026. vise à renforcer la protection des droits humains, la réforme et l’efficacité du système judiciaire et la promotion d’une bonne gouvernance démocratique.
59. L’un des principaux défis concerne l’organisation d’élections libres et équitables lorsque les conditions seront réunies. Le Conseil de l’Europe soutient déjà les autorités ukrainiennes en apportant son expertise sur les réformes législatives qui seront nécessaires pour que les élections se déroulent selon les normes internationales et reflètent véritablement la volonté de l’électorat 
			(52) 
			Voir les projets du
Conseil de l’Europe «<a href='https://www.coe.int/en/web/kyiv/reform-of-the-electoral-practice-in-ukraine'>Soutenir
l’organisation d’élections démocratiques après la guerre en Ukraine</a>» et «<a href='https://www.coe.int/en/web/kyiv/promoting-civil-participation-in-democratic-decision-making-in-ukraine'>Renforcer
la résilience démocratique par la participation civique pendant
la guerre et l’après-guerre en Ukraine</a>»..
60. Pour garantir la sécurité, la résilience et l’exercice des responsabilités, la bonne gouvernance démocratique des institutions publiques à tous les niveaux doit être renforcée. La réforme de la décentralisation engagée par l’Ukraine il y a plus de dix ans, avec l’assistance du Conseil de l’Europe 
			(53) 
			<a href='http://www.slg-coe.org.ua/?lang=en'>Renforcer la bonne
gouvernance démocratique et la résilience en Ukraine</a>., a aidé les pouvoirs locaux à faire face aux difficultés exceptionnelles causées par l’invasion à grande échelle du pays. Même en temps de guerre, elle demeure l’une des réformes les plus populaires pour les citoyens ukrainiens 
			(54) 
			«<a href='https://www.coe.int/fr/web/good-governance/-/ukraine-en-temps-de-guerre-le-soutien-à-la-réforme-de-la-décentralisation-a-augmenté'>Ukraine:
en temps de guerre, le soutien à la réforme de la décentralisation
a augmenté</a>» – Bonne gouvernance (coe.int)., et cet élan ne doit pas se briser. La création du Congrès ukrainien, organe qui permettra au gouvernement de consulter les autorités locales et régionales, est une évolution très positive dans cette direction 
			(55) 
			«<a href='https://www.coe.int/fr/web/portal/-/congress-supports-ukraine-in-strengthening-dialogue-between-national-regional-and-local-authorities'>Le
Congrès soutient l’Ukraine dans le renforcement du dialogue entre
les autorités nationales, régionales et locales</a>» – Portail (coe.int)..
61. Les institutions démocratiques ne peuvent fonctionner correctement que dans un cadre fondé sur la protection des droits humains et l’État de droit. L’élaboration de mesures de justice de transition, destinées à traiter les multiples crimes et violations des droits humains causés par l’invasion à grande échelle par la Fédération de Russie, constituera un premier pas dans cette direction. Ces mesures devront comprendre l’obligation pour les auteurs de crimes de rendre des comptes ainsi que des mécanismes de réparation pour les victimes. La Commissaire aux droits de l’homme et la Commission de Venise peuvent fournir des orientations utiles en la matière.
62. Les ministres de la Justice des pays du G7 réunis à Tokyo le 7 juillet 2023 ont également affirmé leur détermination à soutenir l’Ukraine dans les efforts qu’elle déploie pour obliger les responsables à rendre des comptes, ouvrir des enquêtes et engager des poursuites pour les crimes commis pendant la guerre d’agression et entreprendre des réformes de son système judiciaire, en mettant l’accent sur les mesures de lutte contre la corruption 
			(56) 
			G7 Japon 2023, <a href='https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwje8Yjq6d-BAxUb9bsIHbMwBGIQFnoECA8QAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.moj.go.jp%2Fcontent%2F001400069.pdf&usg=AOvVaw0SdCkLElBZsZ3UEhpe4mQj&opi=89978449'>Communiqué
des ministres de la Justice (Déclaration de Tokyo)</a>, 7 juillet 2023..
63. Tous ces aspects seront encore plus importants dans le contexte de la reconstruction de l’Ukraine après la guerre, avec l’application à tous les domaines du principe «Reconstruire en mieux». Les États membres du Conseil de l’Europe devraient veiller à ce que des fonds soient disponibles pour couvrir toutes les initiatives prévues dans le Plan d’action 2023-2026, comme le recommande déjà l’Assemblée dans sa Résolution 2506 (2023).

5.3. Soutenir la poursuite de l’intégration européenne et euro-atlantique de l’Ukraine

64. Immédiatement après le début de l’invasion à grande échelle, l’Ukraine a envoyé sa demande officielle d’adhésion à l’Union européenne. Le 23 juin 2022, par un accord unanime entre les dirigeant·e·s des 27 États membres de l’Union européenne, l’Ukraine a obtenu le statut de candidat.
65. Lors de la réunion hautement symbolique des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne à Kyiv, en octobre 2023, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, a déclaré qu’il espérait pouvoir «entamer les négociations d’adhésion avant la fin de l’année». Le Haut Représentant Josep Borrell a également souligné que le Conseil européen recevra, d’ici la fin de l’année, le rapport de la Commission européenne sur le paquet «élargissement», qui sera présenté par M. Borrell lui-même et par le Commissaire au voisinage et à l’élargissement, Olivér Várhelyi.
66. Le Conseil de l’Europe, avec ses organes de suivi et de coopération, sera un proche partenaire de l’Ukraine dans son processus de mise en conformité avec l’acquis communautaire, qui est une étape déterminante sur la voie de l’adhésion. L’Assemblée peut prendre une part active à ce processus, en veillant à ce que cet effort soit soutenu par toutes les parties.
67. En réponse aux aspirations de l’Ukraine à adhérer à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), les États membres de l’Alliance sont convenus, dès le sommet de Bucarest en 2008, que l’Ukraine deviendrait membre de l’OTAN. De 2010 à 2014, l’Ukraine a mené une politique de non-alignement, qu’elle a abandonnée en réaction à l’agression de la Russie. En juin 2017, le Parlement ukrainien a adopté une loi en vertu de laquelle l’adhésion à l’OTAN est redevenue un objectif stratégique de la politique étrangère et de sécurité du pays. L’amendement qui inscrit cet objectif dans la Constitution ukrainienne est entré en vigueur en 2019. En septembre 2022, après la tentative de la Russie d’annexer, en toute illégalité, une partie des territoires des régions ukrainiennes de Donetsk, Kherson, Louhansk and Zaporijjia, l’Ukraine a de nouveau demandé à devenir membre de l’OTAN 
			(57) 
			<a href='https://www.nato.int/cps/en/natohq/topics_37750.htm'>www.nato.int/cps/en/natohq/topics_37750.htm</a>.. Au sommet de Vilnius, le 11 juillet 2023, les États membres ont réaffirmé que, conformément à leur engagement, l’Ukraine deviendrait membre de l’OTAN, reconnaissant que le pays avait accru son niveau d’interopérabilité avec l’Alliance et considérablement progressé dans ses réformes. La déclaration finale indique que les États membres de l’OTAN continueront de soutenir l’Ukraine à progresser vers l’interopérabilité ainsi que dans les réformes supplémentaires dans les domaines de la démocratie et de la sécurité, et qu’ils continueront de suivre l’avancement de ces travaux. L’OTAN sera en mesure d’adresser à l’Ukraine une invitation à rejoindre l’Alliance lorsque les Alliés l’auront décidé et que les conditions seront réunies.
68. En marge du sommet de l’OTAN à Vilnius, les dirigeant·e·s du G7 ont déclaré qu’ils lanceraient des négociations bilatérales avec l’Ukraine pour formaliser des engagements à long terme en matière de sécurité. En outre, plusieurs résolutions de parlements nationaux appellent à l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN. En mai 2023, par exemple, le Riigikogu (Parlement estonien) a adopté une déclaration de soutien à l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, seul moyen de garantir un ordre mondial fondé sur des règles, une paix durable et la sécurité des pays démocratiques d’Europe 
			(58) 
			<a href='https://www.riigikogu.ee/en/news-from-committees/foreign-affairs-committee/the-riigikogu-issued-a-statement-in-support-of-ukraines-nato-membership/'>www.riigikogu.ee/en/news-from-committees/foreign-affairs-committee/the-riigikogu-issued-a-statement-in-support-of-ukraines-nato-membership/</a>.. La Saeima (Parlement letton) a publié une déclaration, avant le sommet de l’OTAN à Vilnius, soulignant que l’Ukraine a définitivement pris le chemin de l’intégration euro-atlantique et qu’elle soutient l’inclusion à part entière de l’Ukraine dans l’Alliance de l’Atlantique Nord dès que les conditions le permettront 
			(59) 
			<a href='https://eng.lsm.lv/article/politics/saeima/01.06.2023-latvian-saeima-ukraine-must-be-accepted-into-nato.a511011/'>https://eng.lsm.lv/article/politics/saeima/01.06.2023-latvian-saeima-ukraine-must-be-accepted-into-nato.a511011/</a>.. Plus récemment, le 19 septembre 2023, le Parlement lituanien a adopté une résolution exprimant son soutien à l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN et appelant les États membres à inviter l’Ukraine à rejoindre l’Alliance lors de son prochain sommet à Washington 
			(60) 
			<a href='https://www.lrt.lt/en/news-in-english/19/2080499/lithuanian-parliament-urges-allies-to-invite-ukraine-to-nato-at-washington-summit'>www.lrt.lt/en/news-in-english/19/2080499/lithuanian-parliament-urges-allies-to-invite-ukraine-to-nato-at-washington-summit</a>..
69. Le Secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, s’est rendu à Kyiv le 28 septembre 2023 – pour la seconde fois depuis le début de l’invasion à grande échelle – afin de s’entretenir avec le Président Volodymyr Zelensky et les membres de son gouvernement et témoigner du puissant soutien que l’OTAN apporte à l’Ukraine. Il a souligné que les Alliés de l’OTAN continuent de fournir à l’Ukraine des capacités de pointe pour aider le pays à repousser l’envahisseur, notamment des chars modernes, des systèmes de missiles évolués et des moyens de défense aérienne, ainsi qu’une formation pour les pilotes de F-16 
			(61) 
			<a href='https://www.nato.int/cps/en/natohq/news_218847.htm'>www.nato.int/cps/en/natohq/news_218847.htm</a>..

6. Une paix juste

70. Les horreurs de la guerre d’agression russe contre l’Ukraine exigent que la Fédération de Russie et, en particulier, ses dirigeants politiques et militaires rendent pleinement compte de leurs actes. Il s’agit non seulement de rendre justice à l’Ukraine et à son peuple, mais aussi de faire respecter l’ordre international fondé sur des règles, qui repose sur l’interdiction du recours à la force énoncée à l’article 2, paragraphe 4, de la Charte des Nations Unies. La communauté internationale ne saurait accepter cette violation flagrante du droit international, faute de quoi le monde sera à nouveau dominé par des États puissants déclenchant des guerres et modifiant les frontières à leur guise.
71. Comme le souligne la déclaration de Reykjavík, il ne peut y avoir de paix sans obligation de rendre des comptes. L’Assemblée a donc salué la création de l’Accord partiel élargi sur le Registre des dommages causés par l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine (Registre des dommages). En tant qu’accord partiel élargi, le Registre des dommages est ouvert à tous les pays du monde, ce qui accroît encore sa pertinence politique. Il compte désormais 44 membres issus de trois continents (Europe, Amérique du Nord et Asie). Il est souhaitable de continuer d’encourager la participation du plus grand nombre possible d’États et d’autres organisations internationales, afin d’améliorer le fonctionnement du Registre des dommages et d’envoyer un message fort de solidarité et de soutien à l’Ukraine et à la justice internationale.
72. Depuis la création du Registre des dommages, la Conférence des Participants s’est réunie deux fois. En juin 2023, un accord avec l’État hôte entre le Conseil de l’Europe et les Pays-Bas établissant La Haye comme siège du Registre des dommages a été signé et est entré en vigueur. La deuxième réunion de la Conférence des Participants a porté sur les questions financières et la procédure de nomination du Conseil. La Directrice exécutive du Registre des dommages, Markiyan Kliuchkovskyi, a fixé comme objectif que le Registre des dommages soit pleinement opérationnel et prêt à recevoir des demandes d’indemnisation au premier trimestre 2024.
73. Lors de leur conférence informelle tenue à Riga le 11 septembre 2023, les ministres de la Justice du Conseil de l’Europe ont adopté une déclaration qui énonce les principes (Principes de Riga) que les États membres du Registre des dommages doivent prendre en considération afin d’assurer une complète redevabilité pour l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine 
			(62) 
			<a href='https://rm.coe.int/declarationrigaen/1680ac872f'>Déclaration
de la Conférence informelle des ministres de la Justice du Conseil
de l’Europe</a>, Riga, 11 septembre 2023.. Ces principes sont les suivants:
  • approche centrée sur les victimes;
  • base juridique solide;
  • autorité et légitimité;
  • soutien aux autorités nationales ukrainiennes;
  • cohérence, complémentarité et interopérabilité;
  • engagement de la société civile;
  • œuvrer en faveur d’une réparation effective.
74. Dans la Résolution établissant l’Accord partiel élargi sur le Registre des dommages, les participant·e·s conviennent de continuer à travailler, en coopération avec l’Ukraine et les organisations et organismes internationaux compétents, à la mise en place, par un instrument international séparé, d’un futur mécanisme international d’indemnisation. Le Registre des dommages, y compris sa plateforme numérique avec toutes les informations sur les demandes d’indemnisation et les éléments de preuve qu’elle contient, est une première étape, à part entière, vers la réalisation de cet objectif.
75. Il reste nécessaire de travailler rapidement sur les étapes futures, à savoir la création d’une commission internationale chargée de statuer sur les demandes d’indemnisation des dommages consignés par le Registre des dommages, ainsi que la création d’un mécanisme d’indemnisation chargé de verser les indemnités pour les demandes sur lesquelles la commission aura statué favorablement. L’Assemblée a déjà dit que ce mécanisme d’indemnisation devrait utiliser les avoirs confisqués pour payer, sans délai, les dommages de guerre causés à l’Ukraine 
			(63) 
			Résolution 2434 (2022) «Comment faire bon usage des avoirs confisqués d’origine
criminelle?»..
76. Outre un mécanisme d’indemnisation opérationnel, d’autres mesures devraient également être prises pour répondre à la gravité des crimes commis par la Fédération de Russie et faire en sorte que l’agresseur rende pleinement compte de ses actes. C’est pourquoi l’Assemblée appelle invariablement à la création d’un tribunal international spécial pour le crime d’agression, afin que les dirigeants politiques et militaires de la Fédération de Russie soient poursuivis, comme elle l’a demandé encore très récemment dans la Résolution 2482 (2023), «Questions juridiques et violations des droits de l’homme liées à l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine».
77. Des progrès considérables ont été réalisés dans la création d’un tribunal international ad hoc pour le crime d’agression depuis que l’Assemblée a fait cette proposition pour la première fois, en avril 2022. Un «groupe restreint» de 37 États désireux de créer un tel tribunal a été constitué, et un Centre international chargé des poursuites pour le crime d’agression (ICPA) a été mis en place à La Haye, avec le soutien des Pays-Bas et de l’Union européenne. L’Assemblée souligne que la forme juridique retenue pour ce tribunal – un tribunal entièrement international ou un tribunal ukrainien (hybride) internationalisé – devrait assurer la plus grande légitimité internationale et les risques juridiques les plus faibles, s’agissant notamment de la possibilité que des suspects se prévalent d’une immunité personnelle ou fonctionnelle.
78. Dans le même temps, les procureurs et enquêteurs ukrainiens ont recensé plus de 100 000 crimes de guerre perpétrés par les troupes russes sur le sol ukrainien 
			(64) 
			Procureur
général de l’Ukraine, communiqué de presse, 14 septembre 2023, <a href='https://www.gp.gov.ua/ua/posts/u-kijevi-rozpocav-robotu-polyovii-ofis-miznarodnogo-kriminalnogo-sudu'>www.gp.gov.ua/ua/posts/u-kijevi-rozpocav-robotu-polyovii-ofis-miznarodnogo-kriminalnogo-sudu</a>.. Il reste primordial de continuer à soutenir les enquêtes et les actions de recueil de preuves menées par les autorités ukrainiennes, d’autres autorités nationales et le procureur de la Cour pénale internationale. Le début des opérations du bureau extérieur de la Cour pénale internationale à Kyiv, en septembre 2023, a constitué une nouvelle étape dans l’amélioration de l’efficacité et de l’efficience de la réponse apportée aux crimes que la Russie continue de commettre chaque jour contre l’Ukraine et les Ukrainiens.

7. Sécurité démocratique et multilatéralisme fondé sur des règles

79. La poursuite de la sécurité démocratique occupait une place centrale dans la déclaration de Vienne adoptée par les chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe lors de leur premier sommet, à Vienne, en 1993 
			(65) 
			Déclaration de Vienne, <a href='https://search.coe.int/cm/Pages/result_details.aspx?ObjectId=0900001680536c82'>Decl(09/10/93)</a>, octobre 1993.. Cette déclaration reconnaissait la chance historique d’affermir la paix et la stabilité, entérinée par un attachement à la démocratie pluraliste et parlementaire, à l’indivisibilité et à l’universalité des droits humains, à l’État de droit et à un patrimoine culturel commun, enrichi de ses diversités. Le respect par chaque État membre des normes du Conseil de l'Europe en matière de droits humains, de démocratie et d'État de droit serait également une garantie de sécurité pour les autres, car les démocraties n’entrent pas en guerre.
80. Les promesses de cette déclaration ont été tenues: les exemples qui le montrent sont pléthore. En octobre 2023 sera célébré le 30e anniversaire de l’adhésion de la Roumanie au Conseil de l’Europe. Cet exemple, parmi tant d’autres sur le continent, montre comment l’attachement aux valeurs communes que sont les droits humains, la démocratie et l’État de droit constitue le socle d’un processus d’intégration européenne réussi. La même voie a été suivie par de nombreux pays qui ont rejoint l’Organisation après la chute du mur de Berlin et qui ont construit ensemble non seulement un espace juridique partagé, mais également une communauté de valeurs.
81. La Fédération de Russie est un exemple manifeste du chemin inverse et du lien direct entre le rejet des valeurs et des normes du Conseil de l’Europe au niveau national et une position agressive au sein des relations internationales. En outre, il serait utile d'enrichir le débat politique avec une analyse historique de la trajectoire de l'impérialisme russe en Europe centrale et orientale au fil des ans, car la négation du statut de nation distincte de l'Ukraine est profondément enracinée dans le discours russe.
82. La guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine bafoue les principes de respect de l’intégrité territoriale et d’indépendance politique des États, tandis que son ingérence malveillante dans les élections et les processus politiques vise à affaiblir et à déstabiliser les démocraties. Ce type de comportement constitue une menace directe contre les fondamentaux de la gouvernance mondiale. Il est d’autant plus grave qu’il est le fait d’un État occupant un siège permanent au du Conseil de sécurité des Nations Unies, l’organe qui devrait être chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales.
83. S'il y a une leçon que les Européennes et Européens doivent tirer de l'histoire, c'est que la fermeté est indispensable pour dissuader un agresseur et qu'un investissement plus important est nécessaire pour renforcer la sécurité démocratique en Europe, par le biais de la mission du Conseil de l'Europe.

8. Conclusions

84. Le peuple ukrainien se bat pour son avenir. Il lutte également pour l’avenir de tous les Européens et les Européennes, et pour le respect des principes fondateurs de l’ordre international tel qu’il a été établi au lendemain de la seconde guerre mondiale, et inscrit dans la Charte des Nations Unies.
85. Un parallèle inquiétant peut être dressé entre la politique génocidaire actuelle de la Fédération de Russie en Ukraine et l’Holodomor, le génocide par famine perpétré par les autorités soviétiques contre les Ukrainiens dans les années 1930. La reconnaissance de l’Holodomor comme génocide par l’Assemblée et par les parlements qui ne l’ont pas encore fait constituerait un hommage légitime au peuple ukrainien et en particulier aux victimes.
86. Alors que la Fédération de Russie se prépare à un conflit prolongé, l’appel à maintenir un front uni en soutien à l’Ukraine pour gagner une paix globale, juste et durable devrait être plus puissant que jamais. L’Assemblée a déjà exprimé son soutien à la formule de paix du Président Zelensky, comme l’ont fait les présidentes et présidents des parlements des États membres du Conseil de l’Europe lors de leur récente conférence (Dublin, 28-29 septembre 2023). L’Assemblée devrait demander aux parlements nationaux d’exprimer leur approbation formelle.
87. La paix ne peut être juste que si un système complet d’établissement des responsabilités est instauré et mis en œuvre pour que les agresseurs et auteurs de crimes russes rendent des comptes. Le lancement du Registre des dommages constitue un pas en avant très important dans cette direction et témoigne de l’engagement profond de nombreux pays à travers le monde en faveur de la justice. Sur la base de cette dynamique, il convient de poursuivre les efforts en faveur de la mise en place d’un mécanisme international d’indemnisation des victimes et d’un tribunal international spécial chargé d’enquêter et de poursuivre le crime d’agression commis par les dirigeants politiques et militaires russes.
88. La paix ne peut être durable que si l’intégrité territoriale de l’Ukraine est pleinement rétablie, si ses infrastructures sont reconstruites, si son économie est aidée à se redresser et si sa démocratie est solide et résiliente. Enfin, la paix ne peut durer que si le système multilatéral est fortement ancré dans le droit international et dispose des moyens et de l’autorité nécessaires pour freiner les tentatives de déstabilisation malveillantes et empêcher que la guerre ne se reproduise à l’avenir.