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Rapport | Doc. 15946 | 21 mars 2024

Rapports entre la majorité parlementaire et l’opposition dans une démocratie

Commission des questions politiques et de la démocratie

Rapporteure : Mme Elvira KOVÁCS, Serbie, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15047, Renvoi 4499 du 6 mars 2020. 2024 - Deuxième partie de session

Résumé

La promotion et la consolidation de la démocratie pluraliste figurent parmi les buts principaux du Conseil de l’Europe et de son Assemblée parlementaire. Dans tous les parlements nationaux, il existe des dispositions reconnaissant le rôle de l’opposition ou de la minorité parlementaire en tant que groupes politiques ou parlementaires individuels ne soutenant pas le gouvernement.

En juin 2019, la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) a adopté les Paramètres des rapports entre la majorité parlementaire et l’opposition dans une démocratie: une liste des critères. La liste de critères porte sur des questions telles que la formation des groupes majoritaires et d’opposition au parlement, les nominations au sein du parlement, certains processus législatifs et l’immunité des parlementaires.

L’Assemblée devrait se féliciter de l’élaboration de la liste des critères et la recommander aux parlements des États membres et observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi qu’aux parlements qui bénéficient du statut d’observateur ou de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 5 mars 2024.

(open)
1. La promotion et la consolidation de la démocratie pluraliste figurent parmi les buts principaux du Conseil de l’Europe et de son Assemblée parlementaire. Les États membres du Conseil de l’Europe doivent s’attacher à développer des normes et des pratiques communes visant à garantir une démocratie parlementaire libre et pluraliste, ainsi que les moyens de leur mise en œuvre dans les parlements nationaux.
2. Dans tous les parlements nationaux, il existe des dispositions reconnaissant le rôle de l’opposition ou de la minorité parlementaire en tant que groupes politiques ou parlementaires individuels ne soutenant pas le gouvernement.
3. Le meilleur moyen de faire en sorte que l’opposition soit à la hauteur de ses responsabilités consiste à étendre ses droits et à les définir précisément. Pourtant, seuls quelques-uns des États membres du Conseil de l’Europe disposent d’une législation ou d’une Constitution faisant explicitement référence au rôle de l’opposition. Certaines Constitutions ne reconnaissent l’opposition que dans les grandes lignes, laissant une grande partie des détails être déterminés par la législation ordinaire, les textes statutaires, le règlement intérieur parlementaire, ou par les conventions, coutumes et traditions.
4. S’il existe des différences considérables dans les cultures et les composantes politiques et institutionnelles des États européens, il est cependant possible d’identifier certains principes généraux qui régissent les relations entre la majorité parlementaire et son opposition et qui reflètent l’héritage constitutionnel européen commun.
5. L’un des principaux objectifs des démocraties parlementaires est de créer une situation dans laquelle la majorité et la minorité partagent le même engagement envers les principes essentiels de la démocratie et le même désir de faire fonctionner correctement «leur» parlement dans l’intérêt public. Il reste encore un long chemin à parcourir avant que cet objectif soit atteint dans l’ensemble de l’Europe. Le renforcement de la position de l’opposition au sein des parlements serait bénéfique pour le système de freins et contrepoids dans les démocraties.
6. Plus que tout autre forum, le parlement est le lieu où se manifeste la démocratie et, dans nos sociétés, il n’y a guère de débat qui remette radicalement en cause le principe même de la démocratie représentative. Le parlement est l’institution qui incarne la société dans la diversité de ses composantes et de ses opinions et qui relaie et canalise cette diversité dans le processus politique. Il a pour vocation de désamorcer les tensions et de maintenir l’équilibre entre les aspirations concurrentes que constituent diversité et uniformité, individualité et collectivité, dans le but de renforcer la cohésion et la solidarité sociales.
7. Un système parlementaire démocratique suppose que la majorité fasse preuve de retenue et respecte les droits et les intérêts de la minorité. Il importe qu’elle ne tire pas parti de tous les avantages que lui octroie sa position, ce qu’elle ne fait d’ailleurs pas dans les systèmes parlementaires parvenus à une certaine maturité. Les garanties juridiques accordées à l’opposition et à la minorité s’avèrent moins indispensables dans les parlements imprégnés d’une telle culture politique, bien souvent sujets à des conventions parlementaires non-écrites. Dans les nouvelles démocraties dépourvues de ces traditions démocratiques, il arrive que la nécessité de règles formelles qui protègent l’opposition se fasse davantage sentir.
8. Les droits de l’opposition sont considérés comme un pouvoir institutionnalisé détenu par l’opposition au sein du parlement qui englobe et dépasse les droits individuels des parlementaires de s’exprimer et de voter contre les projets de loi du gouvernement. Inscrire et définir clairement les droits et les garanties dans la loi constitue un outil efficace pour le fonctionnement de l’opposition parlementaire. Les procédures institutionnelles concernant l’opposition parlementaire ainsi que sa reconnaissance, sa légitimation et son institutionnalisation sont au cœur de l’idée même de démocratie constitutionnelle et font partie intégrante de la culture politique.
9. D’une part, la légitimation de l’opposition parlementaire dans la Constitution, la législation et les règlements intérieurs fournit des garanties juridiques dans les relations entre le gouvernement et l’opposition afin de limiter l’influence politique de la majorité parlementaire sur la minorité. D’autre part, en plaçant l’opposition sur un pied d’égalité avec la majorité, elle leur impose d’être conjointement et juridiquement responsables de l’exercice du pouvoir.
10. Une opposition efficace peut aider le gouvernement à éviter les erreurs – ou à les corriger rapidement – améliorant ainsi les résultats de gouvernance. L’existence d’une opposition parlementaire efficace capable d’examiner attentivement la politique menée par la majorité au pouvoir est dès lors un symbole visible du salut de l’ordre politique de l’État et du parlement lui-même.
11. Les Paramètres des rapports entre la majorité parlementaire et l’opposition dans une démocratie: une liste des critères («Liste des critères») est l’aboutissement de travaux approfondis et de longue haleine menés par la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), qui ont pour origine la Résolution 1601 (2008) «Lignes directrices procédurales sur les droits et devoirs de l’opposition dans un parlement démocratique» de l’Assemblée. Selon les conclusions de la Commission de Venise, il est important d’examiner les voies et les moyens par lesquels le rôle de l’opposition parlementaire peut être formellement mieux réglementé et protégé, et il est louable de s’employer à introduire une réglementation souple dans un domaine qui est essentiel au bon fonctionnement de la démocratie parlementaire. L’utilisation de la Liste des critères devrait être largement promue auprès des parlements nationaux, et l’Assemblée devrait contribuer à cet effort, directement et par l’intermédiaire de ses groupes politiques.
12. Au vu de ces considérations, l’Assemblée:
12.1. se félicite de l’élaboration de la Liste des critères de la Commission de Venise concernant les paramètres des rapports entre la majorité parlementaire et l’opposition dans une démocratie et entérine la Liste des critères, telle qu’adoptée;
12.2. diffuse et recommande la Liste des critères aux parlements des États membres et observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi qu’aux parlements qui bénéficient du statut d’observateur et de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée;
12.3. encourage les États membres à veiller à ce que leurs mécanismes démocratiques bénéficient d’une légitimité politique grâce à l’intégrité, car la confiance dans les parlements façonne à la fois la stabilité et la qualité de la démocratie; ce n’est qu’ensemble que la majorité parlementaire et l’opposition peuvent créer des sociétés inclusives, prospères et durables;
12.4. invite les parlements des États membres du Conseil de l’Europe à promouvoir la Liste des critères et à en tenir compte lors de la révision des dispositions réglementaires nationales pertinentes ou de l’élaboration de bonnes pratiques;
12.5. encourage les parlements des États membres du Conseil de l’Europe à engager un dialogue sur la manière d’améliorer les dispositions réglementaires nationales existantes concernant les rapports entre majorité parlementaire et opposition dans une démocratie.
13. En ce qui concerne ses propres activités, l’Assemblée décide de prendre en compte la Liste des critères dans son travail de suivi. Elle décide également de jouer un rôle plus important dans la promotion de la Liste des critères:
13.1. en invitant ses groupes politiques à revoir leur statut et leur règlement intérieur et à y inclure des dispositions spécifiant la procédure, les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique et d’une suspension, exclusion ou démission de membres;
13.2. en encourageant ses groupes politiques à intensifier les échanges sur la façon d’améliorer les rapports entre majorité parlementaire et opposition dans une démocratie;
13.3. en tenant des débats sur la façon de développer l’environnement juridique, y compris non contraignant, ainsi que les bonnes pratiques déterminant les rapports entre majorité parlementaire et opposition dans une démocratie;
13.4. en intensifiant les activités de coopération interparlementaire destinées à améliorer les rapports entre majorité parlementaire et opposition dans une démocratie;
13.5. en poursuivant, en coopération avec la Commission de Venise, son examen de la Liste des critères et des questions qu’elle soulève afin de la développer davantage, si besoin est.

B. Exposé des motifs par Mme Elvira Kovács, rapporteure

(open)

1. Origine et objet du rapport

1. En juin 2019, la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) a adopté les Paramètres des rapports entre la majorité parlementaire et l’opposition dans une démocratie: une liste des critères 
			(2) 
			<a href='www.venice.coe.int/webforms/documents/?pdf=CDL-AD(2019)015-f'>CDL-AD(2019)015</a>, «Paramètres des rapports entre la majorité parlementaire
et l’opposition dans une démocratie: une liste des critères», Strasbourg,
24 juin 2019. (ci-après «Liste des critères»).
2. La Liste des critères est l’aboutissement de travaux approfondis et de longue haleine menés par la Commission de Venise, qui ont pour origine la Résolution 1601 (2008) de l’Assemblée parlementaire «Lignes directrices procédurales sur les droits et devoirs de l’opposition dans un parlement démocratique». Selon les conclusions de la Commission de Venise, il est important d’examiner les voies et les moyens par lesquels le rôle de l’opposition parlementaire peut être formellement mieux réglementé et protégé, et il est louable de s’employer à introduire une réglementation souple dans un domaine qui est essentiel au bon fonctionnement de la démocratie parlementaire.
3. La proposition de résolution qui sous-tend le présent rapport recommandait à l’Assemblée:
- de se féliciter de l’élaboration de la Liste des critères,
- de la diffuser et la recommander aux parlements des États membres et observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi qu’aux parlements bénéficiant du statut d’observateur ou de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée.
4. La proposition recommandait aussi que, conformément à la pratique en vigueur pour ce qui est d’un certain nombre de documents émanant de la Commission de Venise, et notamment les Codes de bonne conduite en matière électorale et en matière référendaire, et plus récemment la Liste des critères de l’État de droit, l’Assemblée donne également formellement son aval à la Liste des critères et poursuivre, en coopération avec la Commission de Venise, son examen des questions soulevées dans cette liste, afin de la développer si besoin est.
5. J’adhère pleinement aux suggestions formulées dans la proposition de résolution. L’Assemblée devrait également inviter les groupes politiques de l’Assemblée à compléter leur statut ou règlement intérieur et à y inclure des dispositions spécifiant la procédure, les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique, et d’une suspension, exclusion ou démission d’un membre
6. Je m’attacherai, dans le présent document, à décrire le processus qui a abouti à l’adoption de la Liste des critères et son contenu.

2. Pluralisme et rôle de l’opposition parlementaire

7. La promotion et la consolidation de la démocratie pluraliste figurent parmi les buts principaux du Conseil de l’Europe et de son Assemblée. Les États membres de l’Organisation doivent s’attacher à développer des normes et pratiques communes visant à garantir une démocratie parlementaire libre et pluraliste, et les moyens de leur mise en œuvre dans les parlements nationaux.
8. Le terme de démocratie recouvre une multitude de significations. Lorsque l’on aborde la question de la démocratie, par conséquent, il est question d’une pluralité de concepts. Les politologues n’identifient pas moins de 11 types de démocratie et 56 adjectifs liés à cette notion. Le terme est pour la toute première fois entré dans le champ du langage politique mondial et nombreux sont ceux qui en ont conclu que la démocratie et la culture démocratique étaient devenues, dans les faits, la forme universelle de la légitimité politique 
			(3) 
			Pour en savoir plus:
Podunavac, Milan. 2011. «State and Democracy», in: State and Democracy, dir. Milan Podunavac,
Belgrade: Journal officiel: Faculté de Sciences politiques, Université
de Belgrade..
9. La confiance dans les institutions politiques représente un élément central des systèmes démocratiques. Il est donc important de prendre en compte le rôle, les pouvoirs et les responsabilités de l’opposition dans les politiques démocratiques. Cette reconnaissance reflète le principe du pluralisme politique (le pouvoir ne doit pas être détenu en permanence par un seul parti) et témoigne d’un engagement en faveur du dialogue démocratique – entendre l’autre partie – dans la prise de décision.
10. La démocratie moderne ne se résume pas à un simple règne de la majorité. C’est un système politique dans lequel la majorité parlementaire et l’opposition partagent une responsabilité commune pour consolider la confiance des citoyens dans le système politique et les institutions démocratiques, assurer leur bon fonctionnement et offrir au public un choix éclairé 
			(4) 
			Recommandations formulées
par la Conférence européenne des Présidentes et Présidents de Parlement
(Limassol, Chypre, 10-12 juin 2010)..
11. La culture politique et constitutionnelle 
			(5) 
			Citons Cicéron pour
évoquer ce qui fait une culture politique démocratique: «Nulle autre
société que celle où le peuple exerce la puissance souveraine n’est
véritablement le séjour de la liberté, de cette liberté, le plus
doux des biens, et qui, si elle n’est pas égale pour tous, n’est
plus la liberté», De la République,
Trad. Villemain, 1878, Paris., les principes du pluralisme politique ainsi que la dynamique du pouvoir entre la majorité parlementaire et l’opposition ont une incidence sur la qualité du dialogue démocratique, l’inclusivité, la confiance institutionnelle et la recherche du consensus.
12. La présence d’une opposition dotée de capacités et de pouvoirs favorise le dialogue démocratique, à savoir un échange d’arguments et de contre-arguments, où la majorité gouvernementale dispose du pouvoir de décision finale, mais où la présence de l’opposition rend nécessaire d’entendre l’autre partie, de s’engager dans un processus public d’argumentation et de justifier les décisions prises. La prise en compte de l’opposition contribue à renforcer la légitimité et la résilience du système politique dans son ensemble, à la fois en donnant un caractère normal au transfert démocratique du pouvoir et en offrant un «prix de consolation» aux perdants.
13. La culture politique et constitutionnelle donne une indication sur la mesure dans laquelle la relation entre la majorité et l’opposition optimise la liberté de pensée et la liberté d’expression, notamment la possibilité pour l’opposition de faire connaître son point de vue aux citoyens et aux décideurs politiques; les possibilités qu’ont les citoyens de participer à la vie politique ainsi que la rationalité du débat et de la prise de décision politiques, dans le sens d’une meilleure compréhension par les citoyens et les dirigeants des objectifs en jeu et des moyens nécessaires 
			(6) 
			Pour en savoir plus:
Dahl, A. Robert. 1966. Political Oppositions
in Western Democracies. New Haven: Yale University Press..
14. La qualité démocratique d’un parlement se mesure aux moyens mis à la disposition de l’opposition ou de la minorité parlementaire dans l’accomplissement de leurs tâches. Instaurer un cadre juridique et procédural équitable, et des conditions matérielles permettant à la minorité parlementaire de remplir ses fonctions est une condition au bon fonctionnement de la démocratie représentative.

3. Travaux antérieurs de l’Assemblée

15. En l’absence de toute mention explicite des droits et responsabilités de l’opposition dans les principaux textes officiels du Conseil de l’Europe 
			(7) 
			Il convient de mentionner
que les représentants des parlements africains réunis à Libreville
(Gabon) du 17 au 19 mai 1999, dans le cadre du Séminaire parlementaire
sur les relations entre partis majoritaires et minoritaires dans
les parlements africains, organisé par l’Union interparlementaire
en coopération avec le Programme des Nations Unies pour le développement
et à l’invitation du parlement gabonais, ont élaboré un Statut-type
de l’opposition au parlement. Les participants ont demandé que ce
document soit porté à l’attention du Conseil de l’Union interparlementaire
à l’occasion des réunions interparlementaires de Berlin, 10-16 octobre
1999., les rapports entre la majorité parlementaire et l’opposition ont été principalement examinés, par le passé, au niveau de l’Assemblée, à l’occasion de débats sur les institutions démocratiques. Le premier débat annuel sur la situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe, tenu par l’Assemblée en 2007, a également été l’occasion d’évoquer les droits de l’opposition 
			(8) 
			Voir le débat sur le
rapport annuel sur la situation des droits de l’homme et de la démocratie
en Europe (2007) et la Recommandation
1791 (2007)..
16. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles de l’Assemblée a organisé une audition sur le rôle de l’opposition dans un parlement démocratique. Les conclusions de cette audition ont donné lieu à l’élaboration d’un rapport qui a été débattu à l’Assemblée, suivi par l’adoption, le 23 janvier 2008, de la Résolution 1601 (2008) «Lignes directrices procédurales sur les droits et devoirs de l’opposition dans un parlement démocratique». Plusieurs administrations parlementaires nationales ont donné suite à ces travaux dans le cadre du Centre européen de recherche et de documentation parlementaires (CERDP), géré conjointement par les secrétariats du Parlement européen et de l’Assemblée.
17. La Commission de Venise a dans l’ensemble souscrit à la Résolution 1601 (2008), en tant qu’un instrument non contraignant et innovant consacré à un sujet d’une grande importance pour l’élaboration de procédures parlementaires démocratiques et a préparé un «Rapport sur le rôle de l’opposition au sein d’un parlement démocratique (ci-après «le Rapport de 2010») 
			(9) 
			CDL-AD(2010)025,
paragraphe 10.. Si la Commission de Venise n’avait jusque là pas rendu d’avis général sur le rôle de l’opposition 
			(10) 
			Ibid., paragraphe 18., elle avait cependant traité de cette question dans un rapport de 2007 consacré à un pays précis, en l’occurrence «sur le projet de loi relatif à l’opposition parlementaire en Ukraine» 
			(11) 
			Voir CDL-AD(2007)019
ainsi que l’Avis préliminaire antérieur de mars 2007, CDL-AD(2007)015.
En 2007, le membre suppléant espagnol, M. Sanchez Navarro, a également
remis à la Commission de Venise un rapport consacré au rôle et à la
protection juridique de l’opposition («On the role and legal protection
of the opposition»), voir CDL-DEM(2007)002rev..
18. Grâce à son mécanisme de suivi des obligations et engagements contractés par les États membres du Conseil de l’Europe, l’Assemblée veille depuis des décennies au bon fonctionnement du dialogue politique entre la majorité et l’opposition, à la reconnaissance du rôle institutionnel de l’opposition et au respect des droits de l’opposition parlementaire. Elle assiste les parlements qui font face à de graves difficultés en recherchant les moyens de sortir d’une crise politique.
19. En juin 2010, la Conférence européenne des Présidentes et Présidents de Parlement a consacré l’une de ses deux sessions de travail aux droits et responsabilités de l’opposition au sein d’un Parlement 
			(12) 
			<a href='www.assembly.coe.int/nw/Page-FR.asp?LID=2010ConfPres'>Conclusions
de la Conférence</a>, Limassol, Chypre, 10-12 juin 2010.. Par ailleurs, en septembre 2014, sa troisième session était axée sur la question de savoir comment trouver un équilibre entre majorité et opposition en démocratie 
			(13) 
			<a href='www.assembly.coe.int/nw/Page-FR.asp?LID=2014ConfPres'>Conclusions
de la Conférence</a>, Oslo, Norvège, 11-12 septembre 2014..

4. Processus ayant conduit à l’adoption de la Liste des critères

20. Dans sa Résolution 1601 (2008), l’Assemblée estimait qu’«une opposition parlementaire et extraparlementaire est un rouage indispensable au bon fonctionnement de la démocratie».
21. La Commission de Venise observe, depuis une dizaine d’années, dans un nombre croissant de pays, une inquiétante montée de la mainmise des vainqueurs politiques sur l’État. Cela se traduit par le démantèlement des dispositifs de freins et contrepoids restreignant les pouvoirs de la majorité parlementaire. Des lois sont plus fréquemment adoptées dans la précipitation, sans authentique débat politique. La majorité nomme et révoque à son gré des juges de juridictions supérieures ou des responsables d’organismes indépendants. «Dans ses avis en la matière, la Commission de Venise a mis en garde contre une conception de la démocratie réduite au seul principe de majorité. Il était encore affirmé avec optimisme dans le Rapport de 2010 que ‘la démocratie est aujourd’hui plus solidement établie en Europe qu’elle ne l’a jamais été auparavant’. Il se pourrait que ce ne soit plus vrai, comme le révèle le durcissement des relations entre majorité et opposition» 
			(14) 
			CDL-AD(2019)15,
paragraphe 2..
22. Selon l’enquête «Global State of Democracy 2022», les problèmes auxquels fait face la démocratie en Europe aujourd’hui sont, entre autres, le faible niveau de participation publique et le faible soutien à la représentation politique. Un grand nombre de citoyens n’ont pas confiance dans le gouvernement et les partis politiques, et dans près de la moitié des pays – 17 au total –, la démocratie a connu une érosion au cours des cinq dernières années, ces reculs touchant 46 % des démocraties européennes les plus performantes. Le recul de la démocratie dans le monde se caractérise notamment par un affaiblissement de la crédibilité des résultats des élections, la restriction des libertés et des droits en ligne, la perte de confiance des jeunes à l’égard des partis politiques et de dirigeants déconnectés de la réalité, la persistance de la corruption et la montée des partis d’extrême droite qui a polarisé de la vie politique 
			(15) 
			«<a href='www.idea.int/news-media/news/global-democracy-weakens-2022'>The
Global State of Democracy Report 2022 – Forging Social Contracts
in a Time of Discontent</a>». Institut international pour la démocratie et l’assistance
électorale (IDEA)<a href='https://www.idea.int/news-media/news/global-democracy-weakens-2022'></a>..
23. Les paysages politiques ont été profondément modifiés au cours de la dernière décennie: face aux changements intervenus dans les relations entre l’exécutif et le législatif (présidentialisation de la vie politique, évolution ou déclin du rôle du parlement) et dans le rôle des partis (chute du nombre d’adhérents, recul des fonctions traditionnelles des formations politiques), le moment est venu de repenser les notions de base que sont la majorité et l’opposition parlementaires.
24. La théorie, mais aussi les pratiques politiques montrent que les dispositions constitutionnelles sur la gouvernance servent également à protéger l’opposition politique, en établissant des procédures que la majorité ne peut aisément modifier, en garantissant la représentation et l’expression, et donc la possibilité pour l’opposition de concourir pour obtenir le pouvoir majoritaire aux futures élections 
			(16) 
			«Rapport sur l’amendement
constitutionnel», CDL-AD(2010)001, paragraphe 78..
25. Le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, dans son rapport annuel de 2016, a également fait état de ces tendances inquiétantes 
			(17) 
			<a href='https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=090000168064839'>https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=090000168064839</a> 7.. Il a demandé à la Commission de Venise de formuler des lignes directrices sur les rapports entre majorité et opposition. En réponse, la Commission de Venise a chargé un groupe de rapporteur·e·s 
			(18) 
			Formé
de B. Aurescu (membre suppléant, Roumanie), R. Kiener (membre, Suisse),
H. Suchocka (Présidente honoraire, ex-membre, Pologne), K. Tuori
(membre, Finlande) et B. Vermeulen (membre, Pays-Bas). d’actualiser le Rapport de 2010.
26. Les rapporteur·e·s ont constaté la nécessité d’actualiser le Rapport de 2010 à la lumière des observations de la Commission de Venise, et de lui ajouter une nouvelle partie: la Liste des critères. Cette liste, qu’a examinée par deux fois la sous-commission sur les institutions démocratiques 
			(19) 
			Les 14 mars et 20 juin
2019., a été adoptée par la Commission de Venise lors de sa 119e session plénière à Venise, le 21 juin 2019.

5. Liste des critères

27. Comme le faisait observer le Rapport de 2010, il n’existe pas de modèle commun des rôles respectifs de l’opposition et de la majorité parlementaires. On ne saurait codifier un ensemble complet de normes précises en la matière, applicables à tous les régimes démocratiques.
28. La Liste des critères ne s’adresse pas principalement aux régimes autocratiques, mais plutôt aux «démocraties vulnérables», où le pluralisme politique existe, mais demeure fragile. Par conséquent, elle devrait aider leurs législateurs à formuler des règles juridiques et à mettre en place des «conventions constitutionnelles» et de bonnes pratiques non écrites afin de préserver le rôle de contre-pouvoir de l’opposition parlementaire et de relève potentielle du gouvernement en place.
29. La Liste des critères comprend 10 rubriques, qui portent sur des questions telles que la formation des groupes majoritaires et d’opposition au parlement, les nominations au sein du parlement, certains processus législatifs et l’immunité des parlementaires. La structure de la liste permettra aussi de la compléter et de l’ajuster à l’avenir, au vu du développement politique et juridique des démocraties européennes et non européennes. Ce doit être un instrument vivant.
30. Le Rapport de 2010 traitait du rôle de l’opposition au parlement. Il n’abordait pas l’opposition politique dans l’ensemble de la société, ni le degré de reconnaissance des droits humains et des libertés fondamentales, ou encore les grands choix constitutionnels. La Liste des critères conserve en majeure partie la même perspective: elle se penche sur les règles et principes régissant le fonctionnement de l’opposition parlementaire et les interactions de cette dernière avec la majorité et d’autres institutions de l’État.

6. Opposition – terme, droits et obligations

31. On ne saurait définir l’opposition en quelques mots. Sa position et son fonctionnement diffèrent d’un système politique à l’autre, notamment selon que l’on a affaire à un régime parlementaire multipartite ou à un régime (semi) présidentiel. La question des droits de l’opposition parlementaire est, par conséquent, avant tout celle des droits de la minorité politique. Ceux-ci englobent en général les droits procéduraux d’information, de représentation et de participation, le droit d’expression et le droit de vote, le droit de déposer des propositions de loi et d’autres propositions, le droit de contrôler l’exécutif et d’avoir un droit de regard sur ses activités, ainsi qu’une protection contre les éventuels abus de la part de la majorité 
			(20) 
			Rapport
de 2010, paragraphe 11..
32. Une réflexion globale devrait porter sur l’ensemble des fonctions de l’opposition et prendre en considération un plus grand nombre d’acteurs et de types de relations. Partant de ces principes, on peut envisager de travailler en retenant la définition suivante de l’opposition politique: un acteur organisé qui exprime sa position dans la sphère publique et qui observe, explique et critique, de manière permanente ou ponctuelle, la situation existante, par le biais de divers moyens non violents (processus législatifs, questions parlementaires, communiqués de presse, sollicitation des médias...), les cibles de ses critiques étant le gouvernement et ses politiques, ou le régime politique dans son ensemble 
			(21) 
			Pour en savoir plus:
Nathalie, Brack, & Sharon, Weinblum. 2009. «<a href='www.semanticscholar.org/paper/What-do-we-mean-by-political-opposition-a-Brack-Weinblum/e20a33f2eee08357bbaeefc9f4f795861c77252f?sort=is-influential#citing-papers'>What
do we mean by «political opposition»: a theoretical perspective</a>»..
33. Il est impossible de dissocier les droits de l’opposition de ses responsabilités. Assurer la surveillance du gouvernement et étudier minutieusement le travail d’autres instances de premier plan, amorcer le processus législatif et y prendre part, mais aussi participer au fonctionnement du parlement, sont des droits qu’il importe de protéger. Cependant ce sont aussi des devoirs qu’il faut accomplir de manière à ce que l’intérêt public prime sur les intérêts des partis à court terme et sur les divergences politiques.
34. On peut recenser deux formes principales au moins d’exercice abusif ou de dysfonctionnement du rôle de l’opposition. Soit l’opposition entrave totalement l’action effective du gouvernement et/ou du parlement, soit elle ne propose aucune alternative à la politique menée par le gouvernement et/ou aux propositions de la majorité parlementaire et n’apparaît alors pas dans le débat politique 
			(22) 
			Rapport de 2010, paragraphe
149..
35. La fonction d’opposition implique des contrôles scrupuleux, des observations et vérifications des agissements et actions des autorités et agents publics 
			(23) 
			Selon
Drago Zajc, dans les pays post-socialistes, les fonctions traditionnelles
de l’opposition parlementaire – proposer, s’opposer, exposer – sont
bien souvent très politisées et utilisées pour bloquer les propositions
du gouvernement et ôter toute légitimité à un gouvernement de coalition.
Pour en savoir plus: Zajc, Drago. 2016. «Role of opposition in contemporary
parliamentary democracies – the case of Slovenia», Journal of Comparative Politics,
vol. 9 no 1: pages 19 à 35.. Cependant, le principe de la bonne gouvernance suggère que les partis de l’opposition (ainsi que les partis au pouvoir) devraient s’abstenir de toute action qui puisse éroder le débat démocratique et qui puisse par conséquent compromettre la confiance des citoyens envers les responsables politiques et les partis 
			(24) 
			Commission de Venise,
2009, «Code de bonne conduite en matière de partis politiques»,
CDL-AD(2009)021..
36. Dans presque tous les parlements nationaux, il existe des dispositions reconnaissant le rôle de l’opposition ou de la minorité parlementaire en tant que groupes politiques ou parlementaires individuels ne soutenant pas le gouvernement. Tandis qu’en droit parlementaire, la notion de droits de la minorité est généralement employée plus souvent que celle de droits de l’opposition, la société, et notamment les milieux politiques, les médias ou le public intéressé, ont l’habitude de parler de l’opposition.
37. Le meilleur moyen de faire en sorte que l’opposition soit à la hauteur de ses responsabilités consiste à étendre ses droits et à les définir précisément. Pourtant, seuls quelques-uns des États membres du Conseil de l’Europe disposent de textes juridiques ou constitutionnels faisant explicitement référence au rôle de l’opposition. Certaines Constitutions ne reconnaissent l’opposition que dans les grandes lignes, laissant une grande partie des détails être déterminés par la législation ordinaire, les textes statutaires, le règlement intérieur parlementaire, ou par les conventions, coutumes et traditions.
38. Des théoriciens qui ont analysé les différents dispositifs en matière de droits de l’opposition distinguent trois éléments: premièrement ces dispositifs favorisent la création d’un regroupement d’opposition au moyen de dispositions qui encouragent l’action collective et coordonnée; deuxièmement ils prévoient des droits qui renforcent l’une et/ou l’autre des deux fonctions essentielles des partis d’opposition: a) surveiller les actions de l’exécutif et amener celui-ci à rendre des comptes au moyen de pouvoirs de contrôle; et b) agir comme un gouvernement en puissance en faisant usage de droits en matière de fixation d’ordre du jour; troisièmement, ces dispositifs comprennent un mécanisme d’application (saisine de la juridiction constitutionnelle et/ou présidence de parlement) 
			(25) 
			Choudhry,
Sujit. 2020. «<a href='www.law.nyu.edu/sites/default/files/Opposition%20Rights%20in%20Parliamentary%20Democracies%20Sept%202020%20draft_0.pdf'>Opposition
Rights in Parliamentary Democracies</a>». The Global Constitution Programme of the International
Institute for Democracy and Electoral Assistance. WZB Berlin: Social
Science Center..
39. La Commission de Venise a déconseillé l’adoption d’une loi spécifique sur l’opposition, estimant qu’il pourrait être très difficile et, dans certains cas, délicat d’un point de vue de l’interdiction de la discrimination, d’introduire des règles rigides, en particulier lorsque ces dernières tendent à accorder des compétences particulières à certains acteurs politiques au détriment d’autres qui sont tout autant en droit d’intervenir en qualité de représentants des citoyens 
			(26) 
			Dans son avis de 2007
sur le projet de loi relatif à l’opposition parlementaire en Ukraine,
la Commission de Venise, a fait valoir qu’un tel dispositif n’était
pas adapté au contexte constitutionnel et politique du parlement
ukrainien..
40. Dans la grande majorité des pays, les droits et responsabilités de l’opposition découlent de procédures parlementaires ou de la pratique parlementaire et, dans certains cas, d’accords entre les groupes politiques représentés au parlement. Il est donc souhaitable de renforcer la cohérence et l’équité de ce système et de faire en sorte qu’il ne soit plus tributaire de négociations politiques, afin d’en faire un ensemble de règles juridiques claires.
41. Les dispositions infra-constitutionnelles peuvent donc être adaptées, lorsque gouvernement et opposition se respectent mutuellement et respectent loyalement les règles. Si les conditions favorables n’existent pas, en revanche, il peut s’avérer aisé pour le gouvernement de contourner des règles qui ne sont pas inscrites dans la Constitution pour affaiblir l’opposition et empêcher tout contrôle effectif.

7. Degré d’institutionnalisation des droits et devoirs de l’opposition dans un parlement démocratique: une perspective comparative

42. L’état de démocratie garantit que les processus d’accession au pouvoir et d’exercice et d’alternance du pouvoir permettent une libre concurrence politique et émanent d’une participation populaire ouverte, libre et non discriminatoire, exercée en accord avec la règle de droit, tant dans son esprit que dans sa lettre. L’élément clé de l’exercice de la démocratie est la tenue, à intervalles réguliers, d’élections libres et équitables permettant l’expression de la volonté populaire 
			(27) 
			Articles 5 et 12 de
la Déclaration universelle sur la démocratie adoptée par le Conseil
interparlementaire à sa 161e session,
Le Caire, 16 septembre 1997.. Par conséquent, la démocratie implique la possibilité non seulement de remporter les élections, mais aussi de les perdre.
43. La Constitution établit un cadre dans lequel les formations politiques reflétant les principaux clivages économiques et sociaux d’une communauté politique donnée peuvent porter une contestation partisane et pluraliste au moyen d’élections ordinaires tenues de manière périodique. La légitimité des procédures dans lesquelles s’inscrit un régime des droits de l’opposition permet de canaliser les désaccords politiques et de parvenir à un règlement institutionnel 
			(28) 
			Choudhry, Sujit. 2018.
«Resisting democratic backsliding: An essay on Weimar, self-enforcing
constitutions, and the Frankfurt School». Global
Constitutionalism Volume 7, Issue 1: pages 54 à 74. <a href='https://doi.org/10.1017/S2045381718000011'>https://doi.org/10.1017/S2045381718000011</a>.. En somme, «tous les pays ont un gouvernement; seules les démocraties ont une opposition» 
			(29) 
			Rapport de l’Assemblée
intitulé «Lignes directrices procédurales sur les droits et devoirs
de l’opposition dans un parlement démocratique» (Doc. 11465), rapporteur: M. Karim Van Overmeire (Belgique, NI)..
44. La place accordée à l’opposition est tout aussi essentielle à l’existence d’une démocratie que le rôle dévolu au gouvernement. Dans les systèmes constitutionnels pluralistes, le cadre juridique de l’opposition en général est défini (statut des partis, droits des parlementaires, liberté d’expression, liberté d’association, etc.) et l’opposition parlementaire en particulier bénéficie de droits législatifs, réglementaires ou transmis par la coutume et la pratique, voire d’une reconnaissance constitutionnelle, qui lui permettent d’exprimer librement ses opinions et d’agir efficacement comme contrepoids à la majorité au sein d’un environnement institutionnel. Il est clair que la nature et la force de l’opposition dépendent principalement du système électoral et du mode de scrutin utilisés. Des différences existent entre les parlements des États membres du Conseil de l’Europe quant au degré d’institutionnalisation de l’opposition, depuis une reconnaissance informelle dans leur règlement, lorsque celui-ci accorde des droits à la minorité parlementaire, jusqu’à une reconnaissance formelle de l’opposition dans la Constitution de l’État.
45. L’opposition n’est donc pas simplement un trait caractéristique de la gouvernance démocratique, mais aussi de la politique en général. Au-delà de la diversité des systèmes parlementaires en Europe, tous les parlements des États membres octroient des droits à la minorité parlementaire, que cette opposition soit organisée au sein de groupes politiques ou non. La garantie d’un équilibre démocratique est donc une pierre angulaire de la stabilité politique. Or le fonctionnement démocratique et la légitimité du système peuvent être affaiblis ou détruits si les droits fondamentaux de l’opposition ne sont pas suffisamment garantis. En revanche, la capacité de la majorité et du gouvernement à gérer efficacement le pays peut à son tour être affaiblie ou détruite si l’opposition se voit accorder des droits et des pouvoirs étendus.
46. Ce qui fait la différence fondamentale entre un régime et un autre tient à l’espace que la sphère électorale et la sphère parlementaire donnent aux détenteurs de droits pour qu’ils puissent exprimer leur opposition 
			(30) 
			Helms,
Ludger. 2021. «<a href='https://doi.org/10.1057/s41304-021-00323-z'>Introduction:
The nature of political opposition in contemporary electoral democracies and autocracies</a>». European Political Science 20:
pages 569 à 579.. Mais il ne fait aucun doute que majorité et opposition parlementaires composent ensemble un ordre politique et constitutionnel, et plus précisément que l’opposition est un concept «dépendant»: le caractère de l’opposition est lié au caractère du gouvernement 
			(31) 
			Blondel,
Jean. 1997. «<a href='https://doi.org/10.1111/j.1477-7053.1997.tb00441.x'>Political
opposition in the contemporary world</a>», Government and Opposition,
32 (4): pages 462 à 486..
47. L’opposition a la possibilité intrinsèque de devenir la majorité de demain. Elle est donc censée, si les conditions sont idéales, être conjointement responsable de la bonne gouvernance de l’État, de la continuité institutionnelle et de la transparence du processus législatif, dans la poursuite de l’intérêt public. Cela signifie, en résumé, que l’opposition doit être constructive, responsable et faire preuve de maturité et qu’elle ne doit pas chercher systématiquement à entraver le travail de la majorité ou, inversement, à adopter une position passive, voire se contenter de «faire de la figuration». On peut également s’attendre à ce qu’une opposition dotée de droits procéduraux appropriés ait moins recours au blocage du processus parlementaire.
48. Plusieurs États membres du Conseil de l’Europe ont cherché, à des degrés divers, à promouvoir le rôle institutionnel de l’opposition politique en établissant un certain nombre de droits spécifiques sur une base constitutionnelle ou législative ou en introduisant des bonnes pratiques 
			(32) 
			Un
séminaire a été organisé par le Parlement norvégien, les 20 et 21
mai 2010, sur les droits et responsabilités de l’opposition au sein
du parlement, ce qui a permis de revoir la question sur la base
des 39 réponses au questionnaire envoyé aux correspondants nationaux
du CERDP (Requête n° 1394 du 24 février 2010).. Ces droits se traduisent dans des dispositifs et des normes juridiques plus spécifiques qui sont examinés dans la Liste des critères.

7.1. Représentation proportionnelle

49. Dans sa Liste des critères, la Commission de Venise prône la représentation proportionnelle aux postes à responsabilité, qu’elle considère comme une importante garantie des droits de l’opposition. Pour éviter que l’opposition soit complètement évincée des organes de gouvernance du parlement, elle recommande de formuler une règle garantissant à l’opposition un accès équitable aux fonctions à responsabilité au sein du parlement, de même qu’une représentation proportionnelle dans la composition des délégations parlementaires nationales auprès des associations parlementaires internationales et autres organismes similaires 
			(33) 
			Paragraphes 83 à 86
de la Liste des critères..
50. La reconnaissance officielle du principe de représentation proportionnelle varie considérablement d’un pays à l’autre. Dans quelques pays, elle est expressément prévue dans la Constitution. Par exemple, selon l’article 52 de la Constitution danoise 
			(34) 
			www.ft.dk/-/media/sites/ft/pdf/publikationer/engelske-publikationer-pdf/grundloven_samlet_2018_uk_web.ashx, 5 juin
1953. et l’article 95.2 de la Constitution turque 
			(35) 
			www.constituteproject.org/constitution/Turkey_2017.pdf?lang=en., les dispositions du règlement doivent être libellées de manière à garantir la participation de chaque groupe de partis politiques à l’ensemble des activités de la [Grande Assemblée nationale], à proportion du nombre de ses membres. Selon l’article 178.2 de la Constitution portugaise, «la composition des commissions parlementaires est proportionnelle à la représentativité des groupes parlementaires».

7.2. Le chef de l’opposition

51. Certains pays ont institutionnalisé la fonction de chef de l’opposition parlementaire, à savoir de chef de la plus grande formation de l’opposition ou de la plus grande coalition de formations de l’opposition. L’opposition y est par conséquent une institution à part entière dont le rôle essentiel est d’assurer l’exercice quotidien de la démocratie parlementaire. Par exemple, le chef de l’opposition a une fonction officielle au Royaume-Uni («Leader of His Majesty’s Most Loyal Opposition», «Chef de la loyale opposition de sa Majesté») 
			(36) 
			Utilisée
pour la première fois en 1926 lors d’un débat en Grande-Bretagne,
l’expression «His Majesty’s Opposition» est restée depuis. Pour
plus d’informations: Gerald Schmitz.1988. The
opposition in a parliamentary system: Political and Social
Affairs Division. https://publications.gc.ca/Collection-R/LoPBdP/BP/bp47-e.htm.. Il s’agit d’une fonction qui a parfois un véritable statut constitutionnel ou législatif. Dans les démocraties parlementaires concernées, les règles régissant la désignation concrète du chef de l’opposition sont variables.

7.3. Étapes du processus d’élaboration des politiques

52. Trois étapes du processus d’élaboration des politiques sont examinées: l’initiative, le débat et le contrôle parlementaire. L’étape de l’initiative concerne le dépôt de propositions de loi et la fixation de l’ordre du jour. Pour le débat, il s’agit du dépôt d’amendements, de la composition des commissions et des procédures en vigueur au sein de celles-ci. Enfin, les composantes du contrôle parlementaire de l’action du gouvernement (droits accordés à une minorité qualifiée, interpellation, motion de censure/vote de défiance) permettent de mesurer l’étendue du pouvoir de veto des acteurs de l’opposition 
			(37) 
			Yamamoto
donne du contrôle parlementaire la définition pratique suivante:
«L’analyse, le suivi et le contrôle de l’action du gouvernement
et des organismes publics, y compris la mise en œuvre des politiques
et de la législation». Hironori, Yamamoto. «Les outils du contrôle
parlementaire. Étude comparative portant sur 88 parlements nationaux». Union
interparlementaire, 2007..
53. Le pouvoir d’opposition accordé par le parlement est faible si seuls l’exécutif et les parlementaires peuvent déposer des projets ou propositions de loi alors que les parlementaires sont soumis à des restrictions spécifiques et peuvent voir leur initiative bloquée. Il est plus important dans les parlements où un autre acteur au moins (commissions, partis, entités infranationales ou citoyens) peut déposer une proposition de loi – tout en restant soumis à des limitations et/ou à la possibilité d’un veto. Les acteurs de l’opposition bénéficient d’un fort pouvoir d’opposition si les parlementaires ne sont soumis à aucune restriction ou éventualité de veto. Les parlements dans lesquels au moins un acteur autre que l’exécutif ou les parlementaires peut présenter des propositions de loi sans restriction ni éventualité de veto sont ceux où le pouvoir d’opposition est le plus fort. Il existe cependant un obstacle supplémentaire à surmonter: celui des acteurs qui décident de l’ordre du jour des séances plénières, au sein desquels le gouvernement peut exercer une position dominante.

7.3.1. Commissions

54. Une grande partie du travail parlementaire – en particulier les travaux liés à l’élaboration concrète de la loi et ceux de contrôle des politiques – se fait en commission. En règle générale, les commissions parlementaires reflètent globalement la composition partisane de la chambre concernée (une majorité de membres issus de la majorité gouvernementale, le reste des sièges étant répartis entre les partis d’opposition en fonction de leur poids). Si la composition des commissions est souvent régie au niveau infra-constitutionnel, par une loi ordinaire ou par le règlement de l’assemblée, certaines Constitutions établissent des règles générales qui garantissent l’équilibre entre le gouvernement et l’opposition.
55. Dans sa Résolution 1601 (2008), l’Assemblée recommandait que l’opposition préside l’ensemble des «commissions responsables du contrôle de l’action gouvernementale, telles que les commissions en charge du budget et des finances, du contrôle des comptes ou de la surveillance des services secrets et de sécurité». La résolution va ici assez loin, par rapport à la situation habituelle dans les parlements nationaux. Dans bien des pays, les commissions parlementaires chargées du budget et des finances ne sont en effet pas considérées comme de simples commissions de «contrôle».

7.3.2. Fixation de l’ordre du jour

56. L’opposition devrait avoir la possibilité raisonnable, à intervalles réguliers, d’influer sur l’ordre du jour, en ce qui concerne non seulement des propositions législatives, mais aussi d’autres questions liées au contrôle des actions gouvernementales et à l’évaluation des politiques et des dépenses publiques, par exemple en proposant des points à inscrire à l’ordre du jour à la demande d’une minorité qualifiée 
			(38) 
			Paragraphe 97 de la
Liste des critères..
57. Il est essentiel de donner à l’opposition la possibilité de proposer un ordre du jour. La maîtrise du calendrier de la plénière renvoie à la maîtrise des choix des points qui vont faire l’objet de discussions et de décisions. Le fait de pouvoir établir ce calendrier et de fixer l’ordre du jour représente donc un pouvoir considérable 
			(39) 
			Laver, Michael et Shepsle,
Kenneth A. 1994. «Cabinet ministers and government formation in
parliamentary democracies.» In: M. Laver et K. A. Shepsle (dir.), Cabinet Ministers and Parliamentary Government,
Cambridge University Press..
58. Certains parlements prévoient des jours de séance spécifiques où l’opposition peut fixer l’ordre du jour. Ces «journées de l’opposition» existent traditionnellement dans un certain nombre de parlements organisés sur le modèle du parlement du Royaume-Uni 
			(40) 
			Au Royaume-Uni, une
vingtaine de journées de l’opposition sont prévues à chaque session
annuelle.. La plupart de ces journées sont attribuées à l’opposition officielle (à savoir au parti d’opposition ayant le plus de poids), les autres étant réparties entre le reste des formations de l’opposition.

7.3.3. Répartition du temps de parole

59. La Commission de Venise souligne, dans la Liste des critères, qu’il est possible d’allouer plus de temps de parole à l’opposition, surtout lorsqu’il s’agit de projets émanant du gouvernement ou de propositions soumises par des parlementaires de la majorité, et que les membres de l’opposition devraient bénéficier d’un temps de parole égal à celui de la majorité, indépendamment de leur force respective, dans certaines circonstances 
			(41) 
			Paragraphe 102 de la
Liste des critères..
60. La Commission de Venise recommande l’adoption de règles plus transparentes s’agissant de la répartition égale du temps de parole entre majorité parlementaire et opposition lors des débats. Cette question est en partie encadrée par le Règlement du Parlement lituanien, qui prévoit en son article 105.2 que le président du Seimas peut modifier l’ordre des interventions afin de garantir une représentation plus proportionnelle des formations, commissions et argumentaires au sein des débats 
			(42) 
			Kovalchuk,
Vitalii et Sofinska, Iryna. 2022. «<a href='http://dx.doi.org/10.17951/sil.2022.31.5.219-231'>Parliamentary
Opposition and Democratic Transformation Issues – Central and Eastern
Europe in Focus</a>». Studia Iuridica Lublinensia,
vol. 31, no 5: pp.219-231..
61. Certains proposent d’inscrire dans la Constitution le principe selon lequel les partis de l’opposition doivent bénéficier d’une part suffisante du temps parlementaire 
			(43) 
			Bulmer, Elliot. 2021.
«<a href='https://doi.org/10.31752/idea.2021.67'>Opposition
and Legislative Minorities: Constitutional Roles, Rights and Recognition</a>». p. 27. International IDEA Constitution-Building Primer
22..

7.3.4. Participation de l’opposition au contrôle parlementaire de l’exécutif

7.3.4.1. Minorités qualifiées

62. Les droits de la minorité qualifiée sont énoncés dans les dispositions générales de la procédure parlementaire ou dans des procédures spéciales prévues pour des questions précises et le plus souvent dans la procédure de contrôle et d’examen parlementaire de l’exécutif.
63. À la suite des recommandations énoncées dans la Résolution 1601 (2008) préconisant qu’une minorité qualifiée d’un quart des membres ait compétence juridique pour demander: la convocation d’une séance plénière (2.2.5); la tenue d’un débat sur une question spécifique (2.2.7); la constitution d’«une commission d’enquête ou d’une mission parlementaire d’information, et d’en être membres» (2.2.8); la convocation d’une session extraordinaire (2.3.2) et la tenue d’auditions parlementaires (2.5.4), la Commission de Venise – sur le principe, en fonction de la tradition et du contexte politique – souscrit à l’idée d’accorder à une minorité qualifiée de parlementaires des pouvoirs spécifiques d’enquête dans le cadre de la fonction de contrôle du parlement.
64. Certains systèmes politiques reconnaissent à l’opposition parlementaire, en général sous la forme d’une minorité qualifiée particulière, non seulement l’exercice de droits de participation à la procédure, mais également la compétence juridique d’adopter la décision d’ouvrir une enquête, de demander des informations ou de créer des commissions spéciales.
65. Deux mécanismes ont été conçus non pas pour empêcher la prise de décisions à la majorité, mais pour donner à la minorité la possibilité d’examiner des propositions, d’exprimer son opposition à celles-ci et de mobiliser l’opinion publique: les mécanismes de report à l’initiative de la minorité (où le veto se limite à reporter) et les mécanismes de référendum à l’initiative de la minorité (où le veto peut être annulé par un appel de la minorité parlementaire adressé à l’ensemble de la population).

7.3.4.2. Mécanismes de report à l’initiative de la minorité

66. Dans certains parlements, une minorité qualifiée peut avoir le droit de reporter les décisions prises par la majorité, par exemple en demandant la tenue de débats supplémentaires ou une période de réflexion. Certaines Constitutions accordent le droit à la minorité parlementaire de différer l’adoption d’une loi pour permettre un examen et un contrôle approfondis.

7.3.4.3. Questions, interpellations, motion de censure/vote de défiance et destitution

67. Dans sa Liste des critères, la Commission de Venise a confirmé les recommandations formulées dans la Résolution 1601 (2008), selon lesquelles l’opposition devrait avoir le droit d’ouvrir la séance de questions au gouvernement et de poser un plus grand nombre de questions que les membres appartenant à la majorité.
68. Selon une fréquence définie, qui doit être régulière (dans certains systèmes, plusieurs fois par semaine), l’opposition peut poser des questions au gouvernement, par écrit ou à l’oral. Ces dispositions peuvent être intégrées à la Constitution au titre des droits de l’opposition, mais, dans la plupart des pays, cette question est régie par le règlement des chambres.
69. Comme la Commission de Venise l’a indiqué dans sa Liste des critères, le droit d’interpellation (avec débat) est l’instrument le plus efficace dont disposent les membres de l’opposition; il est souvent couplé au droit de déposer une motion de censure.
70. Sur le plan théorique, les conséquences de l’interpellation ne sont pas nécessairement identiques ni mêmes similaires en fonction des pays qui appliquent ce dispositif. Dans certains pays, l’interpellation s’apparente à l’un des moyens de contrôle les plus importants – une proposition de vote de défiance –, tandis que dans d’autres, il est difficile de faire clairement la distinction entre l’interpellation et la question parlementaire «ordinaire» formulée par écrit; en ce sens, l’interpellation est souvent définie comme une question parlementaire qualifiée.
71. La Commission de Venise a recommandé de distinguer la procédure d’interpellation (qui peut déboucher sur le dépôt d’une motion de censure) d’une simple question, pour prévenir le danger d’escalade artificielle des conflits 
			(44) 
			Paragraphe 127
de la Liste des critères.. En outre, pour limiter le risque que les parlementaires minoritaires abusent du droit d’interpellation, il est possible de prévoir un seuil pour l’adoption de ces motions et, naturellement, ce seuil varie d’un pays à l’autre: en vertu de l’article 61 de la Constitution lituanienne, par exemple, il est nécessaire de réunir un cinquième des membres du Seimas pour pouvoir interpeller les ministres (soit 29 députés sur 141). En Finlande, les parlementaires doivent être au nombre de 20 pour adresser une interpellation au gouvernement, qui doit y répondre en séance plénière dans un délai de 15 jours; en Macédoine du Nord, en application de l’article 72 de la Constitution, l’interpellation d’un membre du gouvernement est possible si une motion est déposée par au moins cinq parlementaires, sur un total de 120 
			(45) 
			<a href='https://www.sobranie.mk/the-constitution-of-the-republic-of-macedonia-ns_article-constitution-of-the-republic-of-north-macedonia.nspx'>www.sobranie.mk/the-constitution-of-the-republic-of-macedonia-ns_article-constitution-of-the-republic-of-north-macedonia.nspx</a>; aux Pays-Bas, ce seuil est de 30 députés sur 150 
			(46) 
			Le Bundestag
allemand prévoit un système d’interpellations majeures et mineures,
selon lequel seuls un groupe officiel de l’opposition ou un minimum
de 5 % des parlementaires peuvent déposer des interpellations majeures.
À la Chambre des représentants de Belgique, le dépôt d’une interpellation
par des parlementaires à titre individuel nécessite l’approbation
des groupes parlementaires politiques auxquels ils sont affiliés.
Hironori, Yamamoto. 2007. «Les outils du contrôle parlementaire:
Étude comparative portant sur 88 parlements nationaux», op.cit..
72. Comme l’indique la Commission de Venise dans la Liste des critères 
			(47) 
			Paragraphe 128., en régime parlementaire, il est essentiel que l’opposition puisse exprimer son absence de confiance dans le gouvernement dans son ensemble; toutefois, il convient de prendre en compte le contexte politique, car ce mécanisme peut être utilisé abusivement et fragiliser encore davantage le gouvernement 
			(48) 
			La
Commission de Venise a déconseillé, dans le contexte politique ukrainien,
qu’il soit possible au parlement de retirer sa confiance à un ministre
(CDL-AD(2009)024, paragraphe 59).. Par ailleurs, selon la Commission de Venise, une motion de censure devrait être collective, et non pas émaner de députés isolés, et être déposée par 10 ou 20 parlementaires 
			(49) 
			Paragraphe 129
de la Liste des critères.. Dans la pratique, la Constitution de plusieurs États membres du Conseil de l’Europe permet au parlement de révoquer des ministres individuellement en votant une motion de censure.

7.3.4.4. Commissions d’enquête parlementaires

73. En ce qui concerne la question du nombre de parlementaires requis pour créer une commission d’enquête, la Commission de Venise, dans sa Liste des critères, a accepté la Recommandation III.3 formulée dans les Lignes directrices de l’Union interparlementaire selon laquelle «chaque groupe parlementaire doit disposer d’un droit d’obtenir, selon une périodicité arrêtée après concertation, la constitution d’une commission d’enquête sur le sujet de son choix. Dans ce cas, l’opposition y est représentée» 
			(50) 
			http://archive.ipu.org/dem-f/opposition.pdf..
74. Dans son analyse de la question du seuil du point de vue du renforcement des partis d’opposition, la Commission de Venise a fait valoir d’une part que le seuil d’un quart des parlementaires serait considéré dans la plupart des systèmes politiques comme plutôt bas 
			(51) 
			CDL-AD(2010)025,
paragraphe 123., alors que d’autre part «la réduction du nombre de députés nécessaires à la création d’une commission parlementaire à un cinquième de leur effectif pourrait contribuer à renforcer le rôle des petits partis d’opposition, et est donc une bonne chose» 
			(52) 
			CDL-AD(2010)028,
paragraphe 25..
75. Certaines constitutions permettent à un nombre minimum de membres du corps législatif de créer une commission d’enquête. C’est un outil potentiellement puissant entre les mains de l’opposition, qui lui permet d’examiner de façon approfondie les décisions politiques.
76. Dans sa Liste des critères, la Commission de Venise fait la recommandation suivante: si la décision de la commission d’enquête doit être prise à la majorité des voix, il est important de réserver certains droits procéduraux à ses membres représentant l’opposition et de leur laisser la possibilité d’être co-rapporteurs ou de soumettre un rapport de minorité distinct 
			(53) 
			Paragraphe 138..

7.4. Contrôle de la constitutionnalité des lois

77. D’après la Liste des critères de la Commission de Venise, la possibilité de contrôler la constitutionnalité des lois et des projets de loi relève d’un choix politique; mais lorsqu’elle existe, il y a de bonnes raisons pour qu’un groupe minoritaire au parlement soit également habilité à en faire usage. Ainsi, la Cour constitutionnelle devrait pouvoir être saisie d’un projet de loi à la demande «d’un tiers ou d’un quart des députés», le seuil pouvant même être plus bas si le corps législatif est très fragmenté (un cinquième de l’ensemble des députés, par exemple) 
			(54) 
			Paragraphe 117..
78. Il existe un modèle largement répandu en Europe, qui permet à une minorité parlementaire de demander le contrôle de la constitutionnalité des lois, soit avant, soit après l’adoption du texte, en général en saisissant la Cour constitutionnelle. Cette compétence donne à l’opposition, dès lors qu’elle atteint une certaine importance numérique, la possibilité de renvoyer les textes de loi et les autres actes du parlement devant une instance judiciaire indépendante. Une telle compétence peut, en soi, conférer à la minorité un certain pouvoir de levier et ralentir l’adoption ou la promulgation d’une nouvelle loi par la majorité. Son éventuelle capacité de blocage du texte dépend du contenu de la loi, de la rigidité de la Constitution, ainsi que de la volonté, de la composition et des habitudes de la Cour constitutionnelle 
			(55) 
			Rapport
de 2010, paragraphe 132..

7.5. Fonctions de direction et administration du parlement

79. L’opposition peut bénéficier d’une garantie d’être représentée dans les structures de direction et d’administration interne du parlement et de participer à leurs travaux. Le contrôle non seulement de l’organisation des débats du corps législatif, mais aussi des biens matériels du parlement – ses bâtiments, ses bureaux, ses bibliothèques, ses archives et même ses places de parking – peut constituer un outil politique. Il est essentiel que l’opposition puisse s’exprimer sur ces questions pour garantir que le parlement travaille dans l’intérêt de l’ensemble de ses membres et qu’un bon équilibre institutionnel est maintenu entre le gouvernement et l’opposition.

8. Changements d’affiliation politique

80. La question des changements postélectoraux dans l’affiliation politique des parlementaires au cours de leur mandat mérite d’être examinée sérieusement. Ce phénomène est présent dans de nombreux parlements des États membres du Conseil de l’Europe et le passage de parlementaires d’un groupe politique à un autre ou leur retrait d’un parti pour siéger en tant que membres indépendants – que ce soit pour des considérations idéologiques, par opportunisme politique ou électoral ou pour la recherche d’avantages personnels – est susceptible d’avoir un impact sur l’équilibre entre la majorité et l’opposition au sein des parlements.
81. Pour les parlements, de tels faits peuvent compromettre l’exercice des droits de l’opposition. Il convient donc d’examiner les règles régissant les droits accordés aux groupes d’opposition politique: sont-ils accordés au début de chaque législature ou chaque année au début de la session ordinaire?
82. Dans un avis qu’elle a publié en 2009, la Commission de Venise a souligné qu’il était important que les parlementaires exercent un mandat libre et indépendant, et a indiqué que «la déchéance de la qualité de représentant pour cause de changement d’affiliation politique est contraire au principe d’un mandat libre et indépendant». Elle a ajouté que même si le but recherché par ce type de mesures (à savoir, empêcher les élus de «vendre» leur mandat au plus offrant) peut être considéré avec une certaine bienveillance, le principe constitutionnel fondamental qui interdit le mandat impératif, ou toute autre pratique visant à priver un représentant de son mandat, doit prévaloir en tant que clé de voûte du constitutionnalisme démocratique européen 
			(56) 
			«Rapport sur le mandat
impératif et les pratiques similaires», CDL-AD(2009)027, paragraphe
39..
83. Dans les États membres du Conseil de l’Europe, le mandat impératif étant prohibé, le parlementaire a la libre disposition de son mandat. Pour autant, le mandat constitue un contrat moral entre les électeurs et l’élu autour des principes, des valeurs et des opinions défendues dans son programme électoral. Le changement d’affiliation politique postélectoral soulève donc des interrogations et des critiques – notamment de nature déontologique et morale – quant à l’opportunisme politique, l’éventuelle perte de confiance des citoyens envers la classe politique et la discipline interne des partis. Outre ces critiques d’ordre général, le passage postélectoral de parlementaires d’un groupe politique à un autre ou leur retrait d’un groupe en vue de siéger en tant que membres indépendants entraînent des conséquences sur le fonctionnement de l’institution parlementaire. Lorsqu’il s’agit de membres de l’Assemblée, de tels faits sont susceptibles d’influer sur l’équilibre de la représentation politique au sein des délégations nationales à l’Assemblée.
84. Le rapport de l’Assemblée intitulé «Le changement d’affiliation politique postélectoral des membres et ses répercussions sur la composition des délégations nationales» 
			(57) 
			Doc. 13666., qui se fondait sur les réponses à un questionnaire envoyé aux correspondants nationaux du CERDP (Requête n° 2417 du 8 novembre 2013) indiquait que les groupes politiques qui connaissent des défections peuvent rencontrer diverses difficultés en fonction de l’étendue du phénomène. Parmi les répercussions principales, citons le risque de sous-représentation, voire de disparition, la réduction des contributions et aides financières et la perte d’influence politique dans les organes parlementaires. La sous-représentation a une incidence sur les groupes qui, en vertu du règlement intérieur, doivent compter un nombre minimal de membres pour exister. L’Assemblée a donc invité les parlements nationaux:
«- à lancer une réflexion approfondie sur le changement d’affiliation politique des parlementaires, afin de déterminer l’opportunité d’adopter ou non des mesures restreignant le changement de groupe politique, par l’interdiction de rejoindre un autre groupe parlementaire – pour le restant de la législature ou pour une certaine durée – et l’obligation de siéger comme non-inscrit·e·/indépendant·e·, ou la perte de certains droits de participation et de représentation;
- à réviser leur réglementation interne si celle-ci ne comporte pas déjà des dispositions spécifiant la possibilité ou l’interdiction de changement d’affiliation politique, les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique et d’une suspension, d’une exclusion ou d’une démission d’un membre de son groupe politique» 
			(58) 
			Voir Résolution 2037 (2015), paragraphe 8..
85. En outre, l’Assemblée a invité les groupes politiques de l’Assemblée à compléter leur statut ou règlement intérieur, le cas échéant, afin d’y rendre plus explicites les valeurs et principes qui fondent le groupe et les objectifs qu’il poursuit et d’y inclure des dispositions spécifiant la procédure, les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique, et d’une suspension, exclusion ou démission de membres 
			(59) 
			Ibid.,
paragraphe 9..

9. Immunités des parlementaires

86. Le but de l’immunité, tel que le soulignait l’Assemblée dans sa Résolution 1325 (2023) «Immunités des Membres de l’Assemblée parlementaire», est de préserver l’intégrité et l’indépendance des parlements en leur offrant une protection spécifique contre les mises en cause auxquelles les parlementaires sont plus exposés que les autres justiciables.
87. L’Assemblée a été la première institution parlementaire internationale en Europe à inscrire, dans son Règlement, des dispositions relatives à la levée de l’immunité de ses membres, concrétisant ainsi l’article 40 du Statut du Conseil de l’Europe (STE no 1) et l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe (STE no 2, 1949) ainsi que son Protocole additionnel (STE no 10, 1952).
88. Dans sa Liste des critères, la Commission de Venise souligne que l’immunité protège de manière générale tous les députés, mais particulièrement ceux de l’opposition, surtout dans les pays où les forces de l’ordre pourraient être acquises à la majorité. Il importe de définir l’étendue de ces immunités dans la loi, et de mettre en place des garanties procédurales rendant relativement difficiles leur levée et la possibilité de poursuites ultérieures 
			(60) 
			Paragraphe 147 de la
Liste des critères..
89. Comme l’a souligné la Commission de Venise, l’immunité parlementaire dont jouissent aujourd’hui les parlementaires varie d’un État membre du Conseil de l’Europe à l’autre; elle est en principe régie par les Constitutions elles-mêmes 
			(61) 
			Rapport
de 2010, paragraphe 139.. Ces dispositions assurent à la fois la protection collective du parlement en tant qu’institution (contre l’exécutif) et la protection individuelle de chaque parlementaire contre l’exécutif et la majorité parlementaire.
90. La Commission de Venise considère que deux catégories distinctes d’immunité sont apparues: l’irresponsabilité (qui signifie fondamentalement que la responsabilité d’un député ne peut pas être engagée par ses votes et avis émis dans l’exercice de son mandat) et l’inviolabilité (qui protège un député contre certaines mesures coercitives, comme l’arrestation, sans autorisation du parlement ou d’un organe de ce dernier) 
			(62) 
			Paragraphe 148
de la Liste des critères..
91. Des études ont montré que la crainte de perdre son immunité pouvait avoir les conséquences suivantes: elle rend les députés des partis d’opposition plus pacifiques; ils s’investissent avec moins d’ardeur dans les travaux parlementaires (ils rédigent moins de textes législatifs, lancent moins d’enquêtes, prononcent moins de discours et des discours plus courts) et sont moins virulents (ils interrompent moins souvent les autres députés) 
			(63) 
			Altindag, Duha T.,
Mocan, Naci & Jie Zhang. 2021. «<a href='https://docs.iza.org/dp14308.pdf'>Freedom of Speech,
Deterrence, and Compellence in the Parliament</a>». Bonn: IZA – Institute of Labor Economics.. Ils ont également moins tendance à émettre des votes dissidents contre le gouvernement. La réduction de l’intensité des activités de l’opposition entraîne une baisse de la confiance des citoyens dans le parlement.

10. Règlement des différends portant sur des droits de l’opposition

92. L’indépendance des parlementaires est importante non seulement vis-à-vis du pouvoir exécutif, mais aussi au sein du parlement en ce qui concerne leurs interactions avec les partis politiques et les autres parlementaires. Il est essentiel que les droits de l’opposition parlementaire – libertés d’association, d’expression et de réunion – soient garantis par la Constitution, par la législation du pays et par le règlement intérieur du parlement, et qu’ils ne soient pas remis en cause par le code de conduite des parlementaires. Les parlementaires de l’opposition ne devraient pas être incriminés, harcelés ou désavantagés de quelque manière que ce soit 
			(64) 
			«<a href='https://doi.org/10.31752/idea.2021.67'>Opposition and
Legislative Minorities: Constitutional Roles, Rights and Recognition</a>», op.cit..
93. Comme l’indique la Commission de Venise dans sa Liste des critères, outre la nécessité de maintenir l’ordre au sein du parlement et de régler les différends portant sur les droits et le comportement des députés et des groupes, il est important de tenir compte du fait que les organes internes compétents en matière disciplinaire et procédurale ne doivent pas devenir un outil de manipulation politique pour la majorité 
			(65) 
			Paragraphe 153
de la Liste des critères..
94. Selon la Commission de Venise, il appartient en premier lieu au parlement lui-même ou à ses organes désignés de décider des propos et comportements jugés inadmissibles au sein du parlement. Les codes de conduite ne pouvant régler clairement tous les problèmes, il importe de veiller au caractère prévisible des sanctions et de respecter les traditions et les précédents. Par exemple, dans un pays où l’obstruction par «filibustering» est traditionnellement admise comme une pratique légitime, il ne conviendrait pas de punir les députés de la minorité qui y recourent, simplement parce que la majorité prend ombrage de l’obstacle qu’elle suscite 
			(66) 
			Paragraphe 158
de la Liste des critères..
95. En outre, l’Union interparlementaire recommande que la procédure d’adoption des codes de conduite soit inclusive, transparente et concertée et que les membres de l’opposition soient donc associés au processus d’élaboration du code de conduite dès le début 
			(67) 
			Union interparlementaire 2022.
«<a href='https://www.parliamentaryindicators.org/accountable-parliament'>Indicators
for democratic parliaments – Sub-target 2: accountable parliament</a>».. Le caractère inclusif de la procédure vise à s’assurer que le code n’a pas été élaboré uniquement par quelques parlementaires ou par le parti majoritaire. Cette situation donnerait lieu à des préoccupations encore plus vives quant à la possibilité d’une instrumentalisation du code de conduite pour cibler les membres de la minorité parlementaire ou pour restreindre l’indépendance des membres du corps législatif 
			(68) 
			Guilherme France, 2022,
«<a href='https://knowledgehub.transparency.org/assets/uploads/kproducts/Code-of-Conduct-for-Parliamentarians-2022.pdf'>Codes
of conduct for parliamentarians.» Transparency International</a>»..
96. Il est recommandé, pour que les comités de déontologie parlementaire obtiennent et conservent une légitimité, que leur composition soit représentative du parlement pour ce qui est de l’équilibre entre les partis politiques et entre les sexes et les origines ethniques, et que leurs membres soient nommés de manière transparente et équitable. Ces comités sont souvent présidés par un membre de l’opposition, bien que cela puisse être controversé dans les sociétés où la culture politique est très conflictuelle ou l’élite politique divisée.

11. Principes généraux servant de base à la Liste des critères

97. La majorité parlementaire forme souvent, mais pas toujours, la majorité gouvernementale dans le sens où elle soutient le gouvernement. Le Rapport de 2010 portait principalement sur «les systèmes parlementaires nationaux et sur le modèle le plus répandu, dans lequel les partis de l’opposition sont minoritaires et ont par conséquent besoin d’un certain degré de protection pour pouvoir exercer les fonctions essentielles et légitimes de l’opposition, qui sont indispensables à l’existence d’une démocratie effective et durable». La Liste des critères conserve le même centrage.
98. ll convient cependant de respecter certains principes généraux, au-delà des règles constitutionnelles et législatives. Selon la Commission de Venise, les principes constitutionnels ci-après sont les plus importants pour la bonne marche de l’action parlementaire: liberté, pluralisme, freins et contrepoids, coopération loyale et respect des institutions, solidarité à l’égard de la société, possibilité d’alternance politique et efficacité de la prise des décisions.
  • Pluralisme: un État démocratique devrait respecter les valeurs de pluralisme et de liberté et, par conséquent, dans une société démocratique, la critique émanant de l’opposition ne saurait être considérée comme un élément destructeur ou une voix contre le pays, ni interprétée comme un rejet des résultats d’élections démocratiques.
  • Freins et contrepoids: un État démocratique ne peut exister sans les freins et contrepoids maintenant l’équilibre entre ses institutions. Les freins et contrepoids au sens large incluent également des acteurs non étatiques (tels que la société civile ou la presse libre), ce qui contribue à prévenir une concentration excessive du pouvoir dans une seule institution.
  • Coopération loyale et respect des institutions: les freins et les contrepoids nécessitent une coopération constructive pour réaliser l’intérêt public; ils exigent un respect mutuel entre les institutions de l’État appartenant à des pouvoirs différents, ainsi qu’un équilibre approprié et un contrôle mutuel entre elles.
  • Solidarité politique à l’égard de la société: le principe de solidarité politique exige une responsabilité partagée de la majorité et de l’opposition à l’égard de la société. La majorité, précisément parce qu’elle est majoritaire, doit exercer le pouvoir avec retenue et respect envers l’opposition, de manière inclusive et transparente. Dans le même temps, l’opposition ne doit pas non plus abuser de ses droits procéduraux; lorsqu’elle critique les politiques de la majorité, elle ne doit pas appeler à la violence ni s’associer à des violences, ou à l’obstruction physique du travail parlementaire.
  • Possibilité d’alternance du pouvoir: les mesures prises par la majorité ne devraient pas affecter l’État de droit ni viser à changer les règles du jeu démocratique, et en dernier ressort la possibilité d’alternance politique par des élections libres et équitables. La majorité ne devrait pas abuser de son pouvoir pour empêcher (ou entraver gravement) la possibilité pour la minorité de devenir majoritaire.
  • Efficacité de la prise des décisions: la majorité devrait être en mesure de déployer son programme politique et l’opposition ne doit pas, de son côté, faire délibérément obstacle aux travaux parlementaires. Les rapports entre majorité et opposition devraient toujours respecter l’impératif d’équilibre entre les intérêts légitimes de la majorité et de l’opposition, l’une et l’autre ayant un devoir politique de coopération constructive et loyale.
99. Le fonctionnement du parlement a une légitimité démocratique incontestable s’il respecte ces principes. La majorité et l’opposition doivent montrer, dans leur action, le même engagement conjoint et responsable au service de l’intérêt public de la population, source légitime du pouvoir démocratique. Cet engagement doit être primordial, car il dépasse les enjeux de la confrontation politique, même si cette dernière est à la fois normale est indispensable dans une démocratie.
100. La série de principes généraux figurant dans la Liste des critères est loin d’être exhaustive, et ces principes peuvent être formulés différemment, en fonction du régime politique, de la culture constitutionnelle et des traditions nationales. Ces principes sont étroitement liés. L’alternance politique régulière au pouvoir renforce la retenue au sein de la majorité et l’attitude constructive de l’opposition à l’égard de cette dernière. En revanche, en abusant de sa position dominante pour se maintenir au pouvoir, la majorité risquerait de provoquer une radicalisation générale au sein de l’opposition.
101. La Liste des critères est fondée sur des questions qui permettent de cerner les points faibles de la réglementation nationale. Nombre d’entre elles sont ouvertes, mais chaque fois un bref commentaire accompagnant une question explique les principes généraux, évoque de bonnes (ou mauvaises) pratiques, et suggère des solutions possibles. La structure de la liste permettra aussi de la compléter et de l’ajuster à l’avenir, au vu du développement politique et juridique des démocraties européennes et non européennes.