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Rapport | Doc. 15939 | 16 mars 2024

Sanctions contre les personnes de la «liste Kara-Mourza»

Commission des questions juridiques et des droits de l'homme

Rapporteur : M. Eerik-Niiles KROSS, Estonie, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15632, Renvoi 4696 du 25 novembre 2022. 2024 - Deuxième partie de session

Résumé

La commission des questions juridiques et des droits de l'homme rend hommage au prisonnier politique russe Vladimir Kara-Mourza, homme politique de l'opposition, journaliste, cinéaste documentariste, historien et écrivain.

En avril 2023, M. Kara-Mourza a été condamné à 25 ans de prison pour avoir critiqué la guerre d'agression russe contre l'Ukraine. Il est soumis à des conditions de détention particulièrement éprouvantes, qui mettent gravement en danger sa vie et sa santé, compte tenu notamment des effets à long terme de deux empoisonnements antérieurs qui ont failli le tuer.

Vladimir Kara-Mourza a été condamné à une peine de prison particulièrement sévère, également en représailles à son soutien actif de longue date aux “lois Magnitski”, qui prévoient des sanctions ciblées contre les auteurs de violations des droits humains.

Les "lois Magnitski", adoptées par de nombreux Etats et l'Union européenne, permettent d'imposer des sanctions ciblées aux auteurs de graves violations des droits humains qui jouissent de l'impunité dans leur propre pays.

Les personnes responsables des persécutions infligées à Vladimir Kara-Mourza sont bien connues. Un lien vers une liste détaillée figure dans le rapport. Elle comprend des membres du personnel pénitentiaire, des fonctionnaires de police, des procureurs et des juges impliqués dans le détournement flagrant du système judiciaire russe dans le but de réduire M. Kara-Mourza au silence. La commission demande qu'ils soient tous soumis à des sanctions personnelles.

La mort tragique en prison, en février 2024, d'Alexeï Navalny souligne l'urgence d’obtenir la libération de Vladimir Kara-Mourza.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 4 mars 2024.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire rend hommage au prisonnier politique russe Vladimir Kara-Mourza, homme politique de l’opposition, journaliste, cinéaste documentariste, historien et écrivain.
2. En avril 2023, M. Kara-Mourza a été condamné à 25 ans d’emprisonnement pour avoir critiqué la guerre la guerre d’agression russe contre l’Ukraine. Il est soumis à des conditions de détention particulièrement dures, qui mettent gravement en danger sa vie et sa santé, compte tenu notamment des effets à long terme de deux empoisonnements antérieurs qui ont failli le tuer.
3. Vladimir Kara-Mourza a été condamné à une peine de prison singulièrement longue, comparée à celles infligées à d’autres détracteurs de la guerre d’agression russe, dont la plupart ont été condamnés à des peines allant de 5 à 10 ans d’emprisonnement. Les partisans de M. Kara-Mourza considèrent que cette peine particulièrement lourde est une mesure de représailles pour le soutien actif qu’il apporte depuis longtemps aux «lois Magnitski», qui prévoient des sanctions ciblées contre les auteurs de violations des droits humains.
4. Les «lois Magnitski», telles que celles qui ont été adoptées par les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, de nombreux pays d’Europe centrale et orientale, sans oublier l’Union européenne, permettent d’infliger des sanctions ciblées aux auteurs de graves violations des droits humains qui bénéficient de l’impunité dans leur propre pays, y compris les fonctionnaires de police et de la sécurité d’État. Vladimir Poutine a fait de l’élimination des «sanctions Magnitski» prises à l’encontre de ses partisans une priorité de sa politique étrangère.
5. Les personnes directement responsables des persécutions et des mauvais traitements infligés à Vladimir Kara-Mourza, et qui y ont participé, sont bien connues. Une liste détaillée est consultable sur ce lien: «liste Kara-Mourza». Il s’agit notamment de membres du personnel pénitentiaire, de fonctionnaires de police, de procureurs et de juges impliqués chacun à leur niveau dans le détournement flagrant du système judiciaire russe dans le but de réduire M. Kara-Mourza au silence.
6. Ces personnes devraient figurer sur les listes de sanctions individuelles établies en vertu des lois en vigueur et futures sur les sanctions de type Magnitski.
7. La vie de Vladimir Kara-Mourza est menacée par les conditions de détention en isolation auxquelles il est arbitrairement soumis, malgré son état de santé affaibli à la suite des deux empoisonnements auxquels il a survécu de justesse.
8. La mort tragique et soudaine en prison, en février 2024, d’Alexeï Navalny, adversaire déclaré du Kremlin et militant anticorruption, qui avait lui aussi survécu de justesse à un empoisonnement par un agent neurotoxique, souligne à quel point il est urgent d’obtenir la libération de Vladimir Kara-Mourza et de demander des comptes personnellement et individuellement à toutes les personnes impliquées dans sa persécution.
9. En sa qualité de citoyen russo-britannique, M. Kara-Mourza pourrait être inclus dans un échange d’espions russes détenus par des États occidentaux contre des prisonniers politiques et d’autres personnes, dont des ressortissants étrangers retenus en otage par la Fédération de Russie.
10. En conséquence, l’Assemblée:
10.1. invite tous les États qui n’ont pas encore adopté de loi sur les sanctions ciblées de type Magnitski à le faire sans plus tarder;
10.2. invite l’Union européenne et tous les États dotés de lois sur les sanctions ciblées à inscrire sur leurs listes de sanctions les personnes directement responsables des persécutions et des mauvais traitements infligés à Vladimir Kara-Mourza ainsi que des persécutions, des mauvais traitements et du décès d’Alexeï Navalny, et qui y ont participé;
10.3. demande instamment à tous les États qui négocient des échanges de prisonniers avec la Fédération de Russie d’inclure Vladimir Kara-Mourza dans leurs négociations;
10.4. appelle les autorités de la Fédération de Russie à libérer Vladimir Kara-Mourza sans délai et, d’ici là, à améliorer immédiatement ses conditions de détention actuelles de manière à ne pas compromettre davantage sa santé et à ne pas menacer sa vie.

B. Exposé des motifs par M. Eerik-Niiles Kross, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Vladimir Kara-Mourza, homme politique de l’opposition, journaliste, cinéaste documentariste, historien et écrivain russe, allié politique de Boris Nemtsov, l’opposant de premier plan de Vladimir Poutine abattu sous les murs du Kremlin en février 2015 
			(2) 
			Voir
«Faire la lumière sur
le meurtre de Boris Nemtsov» (rapporteur: Emanuelis Zingeris, Lituanie, PPE/DC), Doc. 14902 et Résolution
2297 (2019)., a été victime de deux empoisonnements antérieurs qui ont failli le tuer, apparemment par le même agent neurotoxique chimique interdit, qui est fortement soupçonné d’avoir été utilisé pour empoisonner Alexeï Navalny 
			(3) 
			Voir «Empoisonnement
d’Alexeï Navalny» et «La détention et l’arrestation d’Alexeï Navalny
en janvier 2021» (rapporteur: Jacques Maire, France, ADLE), Doc. 15434 et Résolution
2423 (2022) et Doc. 15270 et Résolution
2375 (2022)... Peu après son témoignage sur la question des prisonniers politiques en Fédération de Russie devant la commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire le 4 avril 2022 à Paris, M. Kara-Mourza a été illégalement arrêté et détenu à Moscou par les autorités de la Fédération de Russie. Il a d’abord été accusé de «diffusion de fausses informations sur l’armée russe», avant d’être à nouveau accusé, en juillet 2022, de «coopération avec une ONG étrangère indésirable». En octobre 2022, le chef d’accusation de «trahison» a été ajouté aux précédents. Le 10 octobre 2022, l’Assemblée a décerné à Vladimir Kara-Mourza le Prix Václav Havel des droits de l’homme 2022, précisément pour les activités pour lesquelles il a été emprisonné. Le 17 avril 2023, à l’issue d’un procès à huis clos, il a été condamné à 25 ans d’emprisonnement.
2. Les persécutions infligées à Vladimir Kara-Mourza et de nombreux autres manifestants anti-guerre plus ou moins connus en Fédération de Russie font l’objet d’un autre rapport en cours d’élaboration par Thórhildur Sunna Ævarsdóttir 
			(4) 
			«La détention arbitraire
de Vladimir Kara-Mourza et la persécution systématique des manifestants
anti-guerre en Fédération de Russie» (rapporteure: Thórhildur Sunna
Ævarsdóttir, Islande, SOC). Le mandat de Mme Ævarsdóttir
est basé sur les propositions de résolutions intitulées «Arrestation
arbitraire de Vladimir Kara-Mourza, défenseur russe des droits de
l’homme et combattant pour la liberté» (Doc. 15514) et «Persécutions systématiques et massives contre les manifestants
anti-guerres en Fédération de Russie» (Doc. 15578), que la commission a décidé de fusionner lors de sa réunion
du 13 octobre 2022.. La commission des questions juridiques et des droits de l’homme a tenu une audition à ce sujet lors de sa réunion à Larnaca (Chypre), le 22 mai 2023. Parmi les experts invités figurait Evgenia Kara-Mourza, épouse de Vladimir Kara-Mourza, qui travaille sans relâche sur la scène internationale pour que son mari ne soit pas oublié. L’oubli est le sort que les prisonniers politiques redoutent le plus, comme l’a souligné Vladimir Kara-Mourza dans son dernier témoignage devant notre commission, en avril 2022 à Paris, juste avant sa propre arrestation.
3. La détention arbitraire de Vladimir Kara-Mourza et les persécutions qui lui sont infligées seront traitées en détail dans le rapport 
			(5) 
			Voir <a href='https://rm.coe.int/la-detention-arbitraire-de-vladimir-kara-murza-et-la-persecution-syste/1680ab88a4'>AS/Jur(2023)13</a>. de Mme Ævarsdóttir. Le présent rapport se concentrera donc entièrement sur la question des sanctions ciblées («sanctions Magnitski») visant les personnes responsables des nombreuses violations des droits humains infligées à M. Kara-Mourza.

2. «Lois Magnitski»: des sanctions «intelligentes» contre les auteurs de violations des droits humains jouissant de l’impunité

2.1. Justification

4. L’idée de cibler les personnes soupçonnées d’être les auteurs de violations graves des droits humains en leur infligeant des «sanctions intelligentes» (par exemple, interdiction de visa ou de voyage, gel des comptes, confiscation des avoirs) a été mise en pratique pour la première fois en Europe par l’Union européenne à l’encontre de hauts représentants des autorités du Bélarus en 2004, lorsque l’Union européenne a adopté ses premières mesures restrictives ciblées à l’encontre de plusieurs fonctionnaires bélarussiens qui seraient responsables des disparitions forcées de deux personnalités politiques importantes, un homme d’affaires et un journaliste en 1999-2000 
			(6) 
			Voir
Yuliya Miadzvetskaya, «Designing sanctions: lessons from EU restrictive
measures against Belarus», German Marshall Fund, 16 juin 2022: <a href='https://www.gmfus.org/news/designing-sanctions-lessons-eu-restrictive-measures-against-belarus'>www.gmfus.org/news/designing-sanctions-lessons-eu-restrictive-measures-against-belarus.</a>. Les sanctions qui visaient M. Sheyman, M. Sivakov et M. Pavlichenko étaient fondées sur le rapport de l’Assemblée relatif aux «Personnes disparues au Bélarus» de Christos Pourgourides (Chypre, PPE/DC). Les trois responsables ont été qualifiés de suspects dans la Résolution 1371 (2004), sur la base des éléments recueillis et analysés par le rapporteur.
5. À la suite du rapport d’Andreas Gross (Suisse, SOC) intitulé «Refuser l’impunité pour les meurtriers de Sergueï Magnitski», l’Assemblée a appelé à prendre des sanctions ciblées contre les personnes impliquées dans l’arrestation de Sergueï Magnitski, les mauvais traitements qu’il a subis et finalement son assassinat, ou dans sa dissimulation. L’Assemblée a appelé à ne prendre des sanctions ciblées qu’en dernier recours, après le constat d’échec de toutes les tentatives faites pour encourager les autorités russes à demander des comptes aux auteurs de ces actes 
			(7) 
			Voir Résolution 1966 (2014), paragraphe 18..
6. Comme l’indique la Résolution 2252 (2019) «Lutter contre l’impunité par la prise de sanctions ciblées dans l’affaire Sergueï Magnitski et les situations analogues» 
			(8) 
			Résolution 2252 (2019), paragraphe 11.1. Voir aussi Doc. 14661 (rapporteur: Lord Anderson, Royaume-Uni, SOC).:
«L’Assemblée considère que les sanctions ciblées (“intelligentes”) contre des personnes et des entreprises affiliées sont préférables aux sanctions économiques générales ou à d’autres sanctions qui visent des pays tout entiers:
- les sanctions ciblées envoient un message clair à tous les auteurs de graves violations des droits de l’homme pour leur dire qu’ils ne sont pas les bienvenus dans les pays ayant adopté les sanctions et que ces pays ne se rendront pas complices de leurs agissements répréhensibles en les autorisant à utiliser leurs institutions financières ou à jouir des produits de leur crime».
7. Dans la même résolution (paragraphe 13), l’Assemblée appelait tous les États membres du Conseil de l’Europe, l’Union européenne et les États ayant le statut d’observateur ou tout autre statut de coopération auprès du Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire:
«– à envisager d’adopter une loi ou un autre instrument juridique permettant à leur exécutif, sous la surveillance générale du parlement, d’imposer des sanctions ciblées comme l’interdiction de visa et le gel de comptes bancaires aux personnes dont il y a lieu de croire qu’elles sont personnellement responsables de graves violations des droits de l’homme pour lesquelles elles jouissent de l’impunité pour des motifs politiques ou en raison de pratiques de corruption;
– à faire en sorte que ces lois ou instruments juridiques fixent une procédure équitable et transparente pour imposer des sanctions ciblées, comme indiqué en matière d’infractions terroristes dans la Résolution 1597 (2008), en particulier en veillant:
- à ce que les personnes visées soient informées de l’imposition des sanctions et des raisons complètes et précises de cette décision, et à ce que leur soit offerte la possibilité de répondre dans un délai raisonnable aux accusations sous-tendant les sanctions;
- à ce que l’instance prenant la décision d’imposer des sanctions soit indépendante de celle qui rassemble les informations et propose d’inscrire une personne sur la liste des sanctions;
- à ce que la décision initiale d’imposer des sanctions puisse être contestée devant un tribunal ou une instance d’appel dotée d’une indépendance et d’un pouvoir de décision suffisants, y compris le pouvoir de retirer une personne visée de la liste et de lui accorder une indemnisation adéquate si les sanctions avaient été infligées par erreur;
– à coopérer les uns avec les autres pour identifier les personnes cibles appropriées, notamment en utilisant les mécanismes pertinents de l’Union européenne et en partageant les informations sur les personnes inscrites sur les listes de sanctions ainsi que les raisons pour lesquelles il y a lieu de croire qu’elles sont responsables de graves violations des droits de l’homme et bénéficient de l’impunité pour des motifs politiques ou en raison de pratiques de corruption.»

2.2. Les sanctions à l’encontre des juges ne portent pas atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire

8. L’Assemblée a toujours défendu avec force l’indépendance du pouvoir judiciaire comme condition de l’État de droit. Les juges doivent apprécier les faits et appliquer la loi sans subir d’influence indue, sans quoi la justice devient arbitraire et se transforme en un autre instrument de répression. Le principe d’indépendance des juges n’a pas pour but de leur accorder des privilèges ou des avantages personnels; sa raison d’être est de protéger les individus contre les abus de pouvoir. Les juges, ainsi que les avocats et les procureurs, jouent un rôle essentiel dans l’exercice du droit à un procès équitable 
			(9) 
			Voir Commission Internationale
de Juristes, <a href='https://www.icj.org/no-1-international-principles-on-the-independence-and-accountability-of-judges-lawyers-and-prosecutors/'>«International
Principles on the Independence and Accountability of Judges, Lawyers
and Prosecutors»</a> [en anglais]; voir également la «<a href='https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/declaration-basic-principles-justice-victims-crime-and-abuse'>Déclaration
des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la
criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir</a>» (Résolution 40/34 de l’Assemblée générale des Nations
Unies du 29 novembre 1985, en particulier le paragraphe A.4: «Les
victimes doivent être traitées avec compassion et dans le respect
de leur dignité. Elles ont droit à l’accès aux instances judiciaires
et à une réparation rapide du préjudice qu’elles ont subi, comme
prévu par la législation nationale.».
9. Plusieurs juges russes et bélarussiens ont déjà été inscrits sur diverses listes de sanctions 
			(10) 
			Par exemple, «<a href='https://www.theguardian.com/world/2023/apr/12/us-puts-sanctions-on-four-georgian-judges-over-significant-corruption'>US
puts sanctions on four Georgian judges over ‘significant corruption’</a>», The Guardian,
12 avril 2023; <a href='https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1677490762742&uri=CELEX%3A32023D0421'>Décision
(PESC) 2023/421 du Conseil du 24 février 2023 modifiant la décision
2012/642/PESC concernant des mesures restrictives en raison de la
situation en Biélorussie et de l’implication de la Biélorussie dans
l’agression russe contre l’Ukraine</a> (affaires no 89 et 104).. L’objectif des sanctions ciblées est de dissuader certains types de comportement. Dans le cas des juges, il a donc été avancé que les sanctions ont pour finalité d’influencer l’exercice de leurs fonctions judiciaires, ce qui peut compromettre leur indépendance. Cependant, les principes universellement admis mentionnés ci-dessus montrent que l’exercice légitime des fonctions judiciaires, qui doit être protégé de toute influence indue, n’inclut manifestement pas les abus que les juges peuvent commettre en exerçant les pouvoirs qui leur ont été conférés de manière à priver intentionnellement des personnes innocentes de leur liberté. Les juges et les procureurs qui violent eux-mêmes les droits humains ont une responsabilité plus grande, et non moindre, que celle d’autres personnes qui n’ont pas les mêmes attributions 
			(11) 
			Voir
note 11.. Le détournement intentionnel de la loi (également appelé déni de justice ou détournement du cours de la justice) commis par des juges constitue un crime grave dans plusieurs États membres tels que l’Espagne, la République de Moldova et l’Allemagne 
			(12) 
			Voir <a href='https://rm.coe.int/comparative-study-on-criminal-responsibility-of-judges-for-unjust-deci/1680a083b5'>https://rm.coe.int/comparative-study-on-criminal-responsibility-of-judges-for-unjust-deci/1680a083b5</a> [en anglais].. En Allemagne, l’article 339 du Code pénal (Rechtsbeugung) a donné lieu à un certain nombre de poursuites (par exemple, après la chute des régimes nazi et communiste 
			(13) 
			Voir <a href='https://www.servat.unibe.ch/dfr/bs041247.html'>Zur Rechtsbeugung
von Richtern und Staatsanwälten der DDR bei Anwendung «politischen
Strafrechts» (im Anschluß an BGHSt 40, 30; 40, 169; 40, 272; BGH,
Urteil vom 5. Juli 1995 – 3 StR 605/94 -)</a>.). D’autres États autorisent les poursuites contre les juges pour privation illégale de liberté lorsqu’ils condamnent intentionnellement des innocents ou prononcent des peines excessives.
10. Il est intéressant de constater que le Code pénal russe comprend également une série de dispositions qui incriminent les actes commis par les personnes figurant sur la «liste Kara-Mourza», notamment des juges, des procureurs et des policiers. L’article 305 sanctionne les juges «qui rendent sciemment un jugement, une décision ou toute autre sentence judiciaire injuste». La sanction de base, à savoir une amende ou une peine d’emprisonnement de quatre ans maximum, est portée à une peine d’emprisonnement de trois à dix ans lorsque la condamnation injuste implique une privation de liberté ou entraîne d’autres conséquences graves. L’article 299 sanctionne le fait de «mettre sciemment en cause la responsabilité pénale d’une personne innocente», l’article 301 réprime «la détention, le placement ou le maintien en garde à vue illégaux», l’article 303 la «falsification de preuves» et l’article 306 la «dénonciation sciemment mensongère». Ces dispositions couvrent sans difficulté les actes commis par toutes les personnes énumérées pour leurs contributions aux persécutions infligées à Vladimir Kara-Mourza, dont les juges impliqués dans les différentes étapes du simulacre de procès dont il a fait l’objet.
11. Ces précédents montrent que de telles poursuites ne sont pas considérées comme une ingérence dans l’indépendance des tribunaux. Dans de telles affaires, la principale difficulté pour l’accusation est l’obligation d’établir l’intention (mens rea) du juge accusé de détourner la loi, étant entendu que de simples erreurs, même graves, ne donnent pas lieu, à juste titre, à l’engagement d’une responsabilité pénale. Mais l’intentionnalité peut être présumée lorsque la loi est objectivement mal appliquée d’une manière si évidente et flagrante qu’une erreur de bonne foi peut être exclue au-delà de tout doute raisonnable. À mon avis, ces considérations s’appliquent, mutatis mutandis, aux sanctions ciblées. Si les juges qui violent intentionnellement les droits humains peuvent même faire l’objet de poursuites pénales, ils peuvent à plus forte raison être soumis aux «sanctions Magnitski», qui ne sont pas de nature pénale.

2.3. Exemples de «lois Magnitski» et leur application

12. Des «lois Magnitski», qui permettent d’infliger des sanctions ciblées contre les auteurs présumés de violations graves des droits humains jouissant de l’impunité dans leur propre pays ont été promulguées par de nombreux États et par l’Union européenne elle-même comme le montre le tableau chronologique ci-joint (voir annexe 1). Parmi les personnes sanctionnées à ce jour figurent des policiers, des responsables d’établissements pénitentiaires, des procureurs et des juges directement impliqués dans l’arrestation illégale et finalement le décès de Sergueï Magnitski, mais aussi un certain nombre de personnes originaires de pays autres que la Fédération de Russie qui sont fortement soupçonnées de crimes contre les droits humains tout en bénéficiant de l’impunité dans leurs pays, notamment des généraux du Myanmar et du Venezuela, ainsi que des responsables bélarussiens impliqués dans la répression persistante exercée contre les manifestants depuis l’élection présidentielle volée d’août 2020.

3. Application de «sanctions Magnitski» aux responsables des persécutions infligées à Vladimir Kara-Mourza: personnes concernées

13. Les signataires de la proposition de résolution qui fonde mon mandat souhaitent clairement que tous les agents publics russes qui sont responsables des persécutions, pour des “motifs politiques”, infligées à Vladimir Kara-Mourza et qui y ont participé de différents manières fassent l’objet de sanctions ciblées au titre des «lois Magnitski» en vigueur dans un certain nombre de pays et au niveau de l’Union européenne. En ma qualité de rapporteur, j’ai été chargé d’établir une liste de ces personnes, en recueillant des informations pertinentes sur le rôle joué par différents agents publics (officiers de police, procureurs, juges, gardiens de prison, services spéciaux) dans les violations des droits fondamentaux de M. Kara-Mourza.
14. Mon attention a été attirée sur la «liste Kara-Mourza» élaborée en détail et publiée par le philanthrope britannique William Browder, qui a mené une campagne mondiale en faveur de l’adoption des «lois Magnitski» après la mort en prison de son conseiller juridique et fiscal russe Sergueï Magnitski. M. Browder m’a fait savoir que M. Kara-Mourza avait été condamné à une peine de prison beaucoup plus lourde (25 ans) que d’autres personnes reconnues coupables de «crimes» similaires, notamment le fait de critiquer l’agression russe contre l’Ukraine et de défendre les prisonniers politiques en Fédération de Russie. M. Browder est convaincu qu’en réalité, le traitement particulièrement sévère réservé à M. Kara-Mourza tient aux représailles pour l’avoir aidé à faire campagne pour les «lois Magnitski» dans le monde entier. M. Browder a fait valoir que M. Kara-Mourza avait participé à plus de 40 événements très médiatisés en faveur des sanctions Magnitski 
			(14) 
			Une
liste des événements au cours desquels M. Browder et M. Kara-Mourza
ont conjointement plaidé en faveur des «lois Magnitski» est jointe
en annexe 2.. Dès mai 2018, le député à la Douma Andreï Isaïev, l’un des initiateurs de la législation russe considérée comme une réponse aux sanctions occidentales contre les responsables russes, a nommément désigné Vladimir Kara-Mourza comme une cible potentielle de cette législation 
			(15) 
			Voir <a href='https://www.rferl.org/a/kremlin-critics-could-face-prosecution-for-enabling-western-sanctions/29230441.html'>www.rferl.org/a/kremlin-critics-could-face-prosecution-for-enabling-western-sanctions/29230441.html</a> [en anglais].
15. Avec l’aide du secrétariat, j’ai recoupé les informations fournies dans la «liste Kara-Mourza» avec des informations disponibles dans le domaine public, issues de sources en accès libre, en particulier certaines décisions de justice qui sont toujours accessibles au grand public. Tous les documents numérisés référencés dans la «liste Kara-Mourza» ont été fournis par M. Vadim Prokhorov, avocat de M. Kara-Mourza. Je n’ai trouvé aucune contradiction ni aucune autre raison de douter de la véracité des informations présentées succinctement dans cette liste. Je suis donc convaincu que 41 des 45 personnes nommées dans la liste ont été directement impliquées dans l’arrestation, la mise en accusation et la condamnation illégales de Vladimir Kara-Mourza après son témoignage devant la commission des questions juridiques et des droits de l'homme en avril 2022.
16. Les treize premières personnes de la liste sont des juges qui ont permis l’arrestation de M. Kara-Mourza, sa détention provisoire et ses prolongations, ainsi que d’autres requêtes procédurales, des recours et le verdict final de 25 ans d’emprisonnement. Les huit personnes énumérées ensuite sont membres du Bureau du Procureur de la Fédération de Russie, suivies de dix membres de la Commission d’enquête de la Fédération de Russie et de dix représentants du ministère de l’Intérieur.
17. Il a été établi que deux autres personnes figurant sur la «liste Kara-Mourza», les agents du FSB Alexander Samofal et Konstantin Kudryatsev, ont pris en filature M. Kara-Mourza dans les semaines précédant les deux empoisonnements qui ont failli le tuer et ont affaibli sa santé de manière permanente, la première fois en 2015, peu après l’assassinat de son ami et allié politique Boris Nemtsov, et la seconde fois en 2017 
			(16) 
			Voir
le rapport Bellingcat du 11 février 2021 «<a href='https://www.bellingcat.com/news/uk-and-europe/2021/02/11/vladimir-kara-murza-tailed-by-members-of-fsb-squad-prior-to-suspected-poisonings/'>Vladimir
Kara-Mourza Tailed by Members of FSB Squad Prior to Suspected Poisonings</a>» [en anglais].. Il est intéressant de noter que ce sont les mêmes agents qui auraient suivi Alexeï Navalny avant qu’il ne soit empoisonné. M. Kudryatsev, un spécialiste connu des armes chimiques, aurait été piégé 
			(17) 
			«Russian agent ‘tricked
into detailing Navalny assassination bid’», BBC
News. par M. Navalny, qui s’est fait passer pour un officier supérieur, en avouant son implication dans l’empoisonnement. Selon une autre enquête de Bellingcat 
			(18) 
			<a href='https://www.bellingcat.com/news/uk-and-europe/2021/01/27/navalny-poison-squad-implicated-in-murders-of-three-russian-activists/'>«Navalny
Poison Squad Implicated in Murders of Three Russian Activists»,
Bellingcat.</a>, M. Kudryatsev a également été impliqué dans l’empoisonnement de trois autres journalistes et militants russes. La grande qualité, reconnue, des enquêtes que Bellingcat a également menées dans d’autres affaires, notamment la destruction du vol MH17 en 2014 au-dessus de la région du Donbass, qui a fait l’objet d’un rapport de notre collègue Titus Corlăţean 
			(19) 
			Voir Doc. 15543 «Faire rendre des comptes pour la destruction du vol
MH17» et Résolution 2452
(2022), rapporteur: Titus Corlăţean (Roumanie, SOC)., m’a convaincu qu’il fallait inscrire également M. Samofal et M. Kudryatsev sur la liste des «personnes concernées» qui devraient faire l’objet de sanctions Magnitski.
18. Les deux dernières personnes citées sont un «expert indépendant» des «produits du discours», dont l’avis a été repris par le tribunal pour estimer que les propos de M. Kara-Mourza «présentaient de fausses informations comme des faits» (sur les actes de l’armée russe en Ukraine); et le chef du centre de détention provisoire SIZO-5, qui aurait ordonné que M. Kara-Mourza soit envoyé au cachot pour être resté assis sur la couchette de sa cellule après l’appel du matin.
19. La brève description des rôles joués dans la violation des droits humains de M. Kara-Mourza par les personnes qui figurent sur la «liste Kara-Mourza» montre que leurs contributions aux persécutions infligées à l’opposant sont très différentes et ont été apportées à différents niveaux hiérarchiques. La question se pose donc de savoir si elles devraient toutes être traitées de la même manière, c’est-à-dire soumises aux mêmes sanctions. Un tel traitement est à mon avis justifié, car elles ont toutes «joué leur rôle» sans hésiter dans le système brutal de répression destiné à détruire toute personne osant opposer une résistance, chaque personne à la place qui lui a été assignée. Sans ces serviteurs obéissants qui répondent volontiers aux attentes de leurs supérieurs, la machine répressive s’arrêterait tout net. Comme ils ont tous choisi de faire ce que l’on attendait d’eux, en échange d’une belle carrière et d’une vie confortable offertes par le régime, ils devraient donc tous recevoir le même message, à savoir qu’ils ne sont pas les bienvenus dans nos pays et que nous ne les laisserons pas jouir des fruits des actes qu’ils ont commis en violant les droits fondamentaux de Vladimir Kara-Mourza. Enfin, les sanctions ciblées ne sont pas des peines pénales, qui elles devraient en effet être proportionnées à l’importance de la contribution de chaque participant. La question de la répartition et de la pondération précises des responsabilités se posera lorsque les auteurs de violations des droits humains ne jouiront plus de l’impunité et devront rendre des comptes devant les juridictions pénales d’une future Russie démocratique qui, nous l’espérons tous, apparaîtra un jour.
20. Lors de l’audition de la commission, en décembre 2023, Yevgenia Kara-Mourza et Bill Browder ont largement confirmé l’approche résumée ci-dessus.
21. Mme Kara-Mourza a déclaré que la Russie compte plusieurs centaines de prisonniers politiques, détenus dans des conditions épouvantables. Son mari, Vladimir Kara-Mourza, a été condamné à une peine d’emprisonnement de 25 ans qu’il purge actuellement dans une prison de haute sécurité, dans l’objectif de le réduire au silence. Sa cellule est pour l’instant la seule occupée de tout un quartier disciplinaire, car même en prison, il est considéré comme une menace. Vlamidir Kara-Mourza a réclamé la création d’un tribunal spécial et la prise d’autres mesures à l’encontre des dirigeants de la Fédération de Russie. Depuis des années, son mari insiste sur la nécessité de prendre des mesures pour demander des comptes aux auteurs de violations des droits humains. En 2010, avec Boris Nemtsov, il a rejoint la campagne en faveur de l’adoption des sanctions Magnitski, qui ont fourni au monde un outil puissant et révolutionnaire. Le Kremlin s’est senti menacé et a persécuté tous ceux qui défendaient les sanctions Magnitski. Son mari a été empoisonné à deux reprises. Une enquête de Bellingcat a permis d’identifier les personnes responsables. Ces empoisonnements ont laissé à son époux des lésions nerveuses permanentes, qui s’aggravent dans ses conditions de détention actuelles. Les poursuites judiciaires engagées à son encontre et son incarcération ont été gérées par des personnes qui figurent sur la liste de Magnitski. Pour Mme Kara-Mourza, le fait de sanctionner ceux-là mêmes qui ont persécuté son mari pour avoir défendu les sanctions Magnitski n’est qu’un juste retour des choses. Cette décision envoie par ailleurs un message clair, à savoir que le monde libre fait bien la différence entre le régime politique russe et le pays lui-même.
22. M. Browder a expliqué que sa rencontre avec Vladimir Kara-Mourza remontait à 2010, l’année du meurtre de Sergueï Magnitski. M. Kara-Mourza et M. Nemtsov ont dénoncé la nature extraordinaire du meurtre et estimé que la mise en place de sanctions pourrait dépasser cette seule affaire. Ils se sont engagés dans la campagne et se sont exprimés devant plusieurs parlements pour expliquer la valeur de telles sanctions. La campagne a clairement irrité Vladimir Poutine, qui a lancé des efforts concertés pour y mettre un terme avant de s’en prendre à ses artisans. M. Browder a rappelé que M. Nemtsov avait été assassiné, que M. Kara-Mourza avait subi deux empoisonnements et que lui-même faisait l’objet de mandats d’arrêt à caractère pénal. À son retour en Russie, M. Kara-Mourza a défendu la cause anti-guerre, ce qui lui a valu une condamnation à 25 ans d’emprisonnement pour trahison. M. Browder a fait valoir que le monde libre avait le devoir d’aider M. Kara-Mourza et les autres Russes qui s’opposent à la guerre. Comme Mme Kara-Mourza, il salue l’ironie du sort qui voit aujourd’hui des sanctions Magnitski infligées à ces mêmes personnes qui ont persécuté M. Kara-Mourza pour avoir défendu ces sanctions. Récemment, le Royaume-Uni, l’Union européenne, le Canada, les États-Unis et l’Estonie ont sanctionné certains des persécuteurs de Vladimir Kara-Mourza. M. Browder a plaidé pour qu’un plus grand nombre d’entre eux soient sanctionnés, ainsi que ceux qui persécutent d’autres opposants au régime. Il a souligné à quel point il importait de continuer à citer nommément les personnes persécutées et a précisé que les prisonniers politiques en Russie ne seraient libérés que si le gouvernement de Vladimir Poutine en tirait un avantage sous la forme d’un échange de prisonniers. On pourrait proposer un échange de prisonniers politiques contre des personnes pratiquant l’espionnage dans des conditions non officielles et le Royaume-Uni pourrait jouer un rôle de premier plan, puisque M. Kara-Mourza est également ressortissant britannique.

4. Mort d’Alexeï Navalny en prison – la protection de Vladimir Kara-Mourza apparaît encore plus urgente

23. La mort d’Alexeï Navalny en prison le 15 février 2024 – prétendument causée par une insuffisance cardiaque soudaine, mais entachée d’informations inquiétantes transmises par ses codétenus, peu de temps après que ses proches l’ont trouvé en relativement bonne santé et de bonne humeur – est un scandale qui ne saurait rester sans conséquence. La mort de M. Navalny exige à l’évidence une analyse approfondie de toutes les informations qui commencent à émerger dans le but d’établir des faits réels.
24. J'ai préparé un projet de proposition de résolution concernant la mort de M. Navalny: il est clair que nous devons demander des comptes à toutes les personnes impliquées dans son empoisonnement en 2021, dans son procès et son emprisonnement ultérieurs, sur la base d'accusations manifestement forgées de toutes pièces, ainsi que dans les mauvais traitements qu’il a subis en prison et sa mort encore inexpliquée en prison. Selon moi, la chaîne des responsabilités s’étend jusqu’à Vladimir Poutine. La mort soudaine de M. Navalny souligne encore davantage l’urgence de protéger M. Kara-Mourza et d’assurer sa libération rapide, si nécessaire dans le cadre d’un échange de prisonniers.

5. Conclusions

25. Il est évident que Vladimir Kara-Mourza est victime d’une série de graves violations des droits humains orchestrées par le Kremlin pour des raisons politiques et commises par un grand nombre d’agents de l’État qui ont volontairement joué les rôles qui leur étaient assignés. Je suis également convaincu que M. Kara-Mourza a été traité de manière particulièrement sévère en représailles de son engagement dans la campagne mondiale en faveur de l’adoption des «lois Magnitski». Celles-ci permettent d’imposer des sanctions ciblées à des personnes qui sont fortement soupçonnées d’être impliquées dans de graves violations des droits humains et qui bénéficient de l’impunité dans leur propre pays. La lutte contre ces lois a été déclarée objectif clé de la politique étrangère de la Fédération de Russie par Vladimir Poutine lui-même 
			(20) 
			Voir par exemple Vladimir
Kara-Mourza, «<a href='https://www.washingtonpost.com/news/democracy-post/wp/2018/07/20/whats-really-behind-putins-obsession-with-the-magnitsky-act/'>What’s
really behind Putin’s obsession with the Magnitsky Act</a>», Washington Post,
20 juillet 2018; «<a href='https://www.voanews.com/a/magnitsky-act-vladimir-putin/3949310.html'>What’s
behind Putin’s hate against the Magnitsky Act</a>», VoA, 18 juillet
2017; «<a href='https://www.theguardian.com/world/2020/nov/27/eu-to-use-magnitsky-style-law-to-impose-sanctions-on-human-rights-abusers'>EU
uses Magnitsky-style law to impose sanctions on human rights abusers</a>», The Guardian,
27 novembre 2020 [en anglais]..
26. À mon avis, il est donc tout à fait justifié d’infliger à toutes les personnes figurant sur la «liste Kara-Mourza» les sanctions ciblées prévues dans les «lois Magnitski» en vigueur, en particulier les dispositions pertinentes adoptées par l’Union européenne. Comme nous l’avons indiqué plus haut, la «liste Kara-Mourza» comprend des juges, des procureurs, des enquêteurs, des policiers, des agents du FSB, un «expert» privé et un haut responsable d’établissement pénitentiaire. Nous avons également vu qu’il n’y avait pas de raison impérieuse d’établir de distinction entre eux en fonction de la nature et de l’importance de leurs contributions, même en qualité de juges, et selon leur position dans la hiérarchie du système d’oppression qu’ils servent.
27. Je tiens également à souligner que toutes les personnes impliquées de quelque manière que ce soit dans l’empoisonnement, la persécution, les accusations pénales forgées de toutes pièces et la condamnation d’Alexeï Navalny, les mauvais traitements qu’il a ensuite subis en prison et, enfin, sa mort en détention, devraient être identifiées et voir leur nom inscrit sans délai sur les listes de sanctions Magnitski. Dans l’intérêt de tous les opposants et des militants anti-guerre russes actuellement en prison, le message suivant doit être adressé haut et fort: quiconque abuse de sa position et de son pouvoir pour commettre des violations flagrantes des droits humains en subira des conséquences sévères à titre personnel.

Annexe 1 – Pays et institutions ayant adopté des sanctions Magnitski

(open)

No

Date

Pays ayant adopté des sanctions Magnitski

Législation adoptée

1.

14.12.2012

États-Unis d’Amérique

Sergei Magnitsky Rule of Law Accountability Act of 2012

2.

08.12.2016

Estonie

Amendments to The Law on Amending the Obligation to Leave and Prohibition on Entry Act 262 SE

3.

23.12.2016

États-Unis d’Amérique

The Global Magnitsky Human Rights Accountability Act of 2016

4.

21.02.2017

Royaume-Uni

“Magnitsky Amendment” to the Criminal Finances Act 2017

5.

19.10.2017

Canada

Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski)

6.

16.11.2017

Lituanie

Law Amending Article 133 of Law No IX-2206 on the Legal Status of Aliens

7.

08.02.2018

Lettonie

Parliamentary Resolution

8.

08.02.2018

Gibraltar

“Magnitsky Amendment” to the Proceeds of Crime Act 2015

9.

23.05.2018

Royaume-Uni

“Magnitsky Amendment” to the Sanctions and Anti-Money Laundering Act 2018

Global Human Rights Sanctions Regulations 2020

Global Anti-Corruption Regulations 2021

10.

06.12.2018

Jersey (dépendance de la Couronne britannique)

The Sanctions and Asset Freezing Law (Jersey) 2019

11.

07.12.2020

Union européenne

Régime mondial de sanctions de l’UE en matière de droits de l’homme

(Loi Magnitski de l’UE)

(Orientations)

12.

16.04.2021

Norvège

Act on the Implementation of International Sanctions (Sanctions Act)

13.

02.12.2021

Australie 

Autonomous Sanctions Amendment (Magnitsky-style and Other Thematic Sanctions) Act 2021

14.

07.12.2022

Tchéquie

Act of 1 December 2022 on restrictive measures against certain serious actions applied in international relations (Sanctions Act)

Annexe 2 – Exemples d’événements et de publications dans lesquels M. Vladimir Kara-Mourza a plaidé en faveur des «lois Magnitski» aux côtés de M. William Browder

(open)