Doc. 7968

16 décembre 1997

Deuxième Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe (Strasbourg, 10-11 octobre 1997)

Rapport

Commission des questions politiques

Rapporteur: M. Miguel Ángel Martínez, Espagne, Groupe socialiste

Résumé

      L'Assemblée se félicite des résultats du sommet. Toutefois, son succès définitif dépendra de la mise en oeuvre des décisions prises. Un financement approprié sera indispensable. D'autres propositions importantes présentées lors du sommet devraient être examinées dans le contexte du suivi. Les parlements nationaux devraient débattre des suites à donner au sommet.

I.       Projet de recommandation

1.       Le Deuxième Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe, qui a eu lieu à Strasbourg les 10 et 11 octobre 1997, a permis de rassembler les plus hauts représentants politiques des 40 Etats membres du Conseil et de quatre Etats candidats à l'adhésion.

2.       Le sommet a pour origine une initiative prise par la Présidente de l'Assemblée parlementaire en mars 1996 et a été rendu possible par la volonté du Président français d'accueillir cette réunion.

3.       L'Assemblée se félicite des résultats du sommet. La Déclaration finale et le Plan d'action, qui reprennent la plupart des propositions qu'elle avait formulées, réaffirment les valeurs fondamentales et le rôle spécifique du Conseil de l'Europe, montrent à nouveau que les Etats membres sont déterminés à respecter leurs engagements et leurs obligations et définissent des priorités et des tâches nouvelles.

4.       L'Assemblée considère que la Déclaration finale, comme le Plan d'action, constitue une série d'engagements formels, qui exigent un suivi.

5.       Certaines décisions prises au sommet appellent une action au niveau national, d'autres doivent être mises en oeuvre par l'Organisation proprement dite alors que certaines doivent l'être en partenariat avec d'autres organisations internationales et des organisations non gouvernementales. Le succès définitif du sommet dépendra de la mise en oeuvre des décisions prises. Un financement approprié sera indispensable.

6.       L'Assemblée juge encourageant que le sommet ait déjà débouché sur certaines mesures concrètes. Le 6 novembre 1997, le Comité des Ministres a adopté un protocole additionnel à la Convention d'Oviedo sur les droits de l'homme et la biomédecine, qui interdit le clonage d'êtres humains, ainsi que vingt principes directeurs destinés à être appliqués dans les législations nationales relatives à la lutte contre la corruption.

7.       L'Assemblée se félicite de la décision, prise par le Comité des Ministres, de créer un “comité de suivi du deuxième sommet” et un “comité des sages” chargé d'élaborer des propositions de réforme structurelle. Elle relève qu'un groupe de travail ad hoc (GT-SUIVI) chargé de veiller aux suites à donner à la Déclaration finale et à la mise en oeuvre du Plan d'action a ensuite été mis en place. Elle considère le fait de lui permettre de participer à ce groupe de travail comme une mesure positive.

8.       D'autres propositions importantes, qui ne figurent pas dans les textes finals, ont été présentées lors du sommet. Elles concernent plusieurs questions d'ores et déjà soulevées par l'Assemblée, particulièrement l'invitation à élaborer de nouveaux instruments juridiques, tels qu'une convention européenne sur les réfugiés et les demandeurs d'asile, et l'appel en faveur d'une analyse plus poussée des rôles respectifs du Conseil de l'Europe et de l'OSCE. Ces propositions devraient elles aussi être examinées dans le contexte du suivi à effectuer.

9.       L'Assemblée considère que les parlements nationaux devraient recevoir des informations précises, examiner les décisions prises au sommet et contribuer activement à leur mise en oeuvre. En conséquence, elle prie toutes les délégations nationales de prendre au sein de leur propre parlement, l'initiative d'un débat sur les suites à donner au sommet.

10.       L'Assemblée recommande au Comité des Ministres :

i.       de lui permettre de participer pleinement aux travaux du groupe de travail ad hoc sur le suivi du sommet (GT-SUIVI) ;

ii.       de faire en sorte que le comité des sages sur la réforme structurelle tienne dûment compte des propositions de l'Assemblé dans ce domaine ;

iii.       de prendre en compte les propositions additionnelles faites par les chefs d'Etat et de gouvernement dans le cadre des suites à donner au sommet;

iv.       de mettre à disposition les fonds nécessaires à la mise en oeuvre par le Conseil de l'Europe de façon responsable, des tâches et priorités définies par le sommet.

II.        Exposé des motifs par le rapporteur

1.       L'objet du présent rapport est de communiquer à l'Assemblée une évaluation politique du Deuxième Sommet.

2.       Le Deuxième Sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe, qui a eu lieu à Strasbourg les 10 et 11 octobre 1997, a été un événement extrêmement important. Il a en effet rassemblé, pour la première fois au siège du Conseil de l'Europe, les plus hauts représentants politiques des 40 Etats membres du Conseil et de quatre Etats candidats à l'adhésion, soit pratiquement l'Europe tout entière.

3.       Le Sommet a débouché sur une Déclaration finale et un Plan d'action (diffusés séparément), qui ont réaffirmé les valeurs fondamentales et le rôle spécifique du Conseil de l'Europe, montré à nouveau la détermination des Etats membres à respecter leurs engagements et leurs obligations et définir des priorités et tâches nouvelles.

4.       Le Sommet a également créé l'élan nécessaire à certaines ratifications, qui ont permis l'entrée en vigueur d'instruments juridiques de premier plan, tels le Protocole n° 11 à la Convention européenne des Droits de l'Homme (qui institue la Cour unique) ou la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales.

5.       Les nombreuses réunions bilatérales ont contribué à l'impact du Sommet. Les quelque 1300 journalistes accrédités ont largement traité du Conseil de l'Europe dans les médias européens.

6.       Le Sommet était le résultat direct d'une initiative prise en mars 1996 par Leni Fischer, présidente de l'Assemblée parlementaire. En septembre 1996, l'Assemblée avait adopté la Recommandation 1303 proposant qu'un second sommet du Conseil de l'Europe ait lieu à Strasbourg; puis, en novembre 1996 - le président Chirac s'étant déclaré disposé à accueillir cette réunion en France -, le Comité des Ministres avait approuvé la tenue d'un tel sommet.

7.       L'Assemblée a par la suite adopté deux autres Recommandations (Rec. 1324 en avril 1997 et Rec. 1342 en septembre 1997) contenant nombre de propositions spécifiques. La plupart d'entre elles ont été intégrées à la Déclaration finale et au Plan d'action, grâce notamment à une coopération remarquable entre l'Assemblée et le Groupe de travail ad hoc des Délégués des Ministres, présidé par M. Warin, ambassadeur de France.

8.       Dans son discours d'ouverture, le président Chirac a rendu hommage à l'Assemblée pour le rôle important qu'elle a joué dans la préparation du Sommet.

9.       Enfin, l'excellente organisation de la réunion par les autorités françaises et le Secrétariat du Conseil de l'Europe a largement contribué à son succès.

A.       Participation

10.       L'importance de l'événement est attestée par le fait que tous les Etats membres et quatre Etats candidats à l'adhésion y ont participé au niveau du chef d'Etat (24 Etats) ou de gouvernement (19 Etats), voire des deux (France).

11.       Seuls deux pays européens n'étaient pas représentés : le Bélarus, à la suite de la suspension du statut d'invité spécial dont bénéficiait son Parlement auprès de l'Assemblée parlementaire, et la République fédérale de Yougoslavie.

12.       Les Etats dotés du statut d'observateur (Canada, Japon et Etats-Unis d'Amérique) étaient également représentés - et ont transmis des messages écrits de leur gouvernement ou de leur président, selon le cas - de même que le Saint-Siège. Quant à la Commission européenne et à l'OSCE, elles étaient représentées au plus haut niveau.

13.       Outre la présidente Leni Fischer, qui a prononcé le troisième discours inaugural (voir annexe), les autres membres de la Commission ad hoc de l'Assemblée sur le Second Sommet étaient présents. L'Assemblée a été constamment représentée à la tribune présidentielle.

B.       Déclaration finale et Plan d'action

14.       La plupart des propositions de l'Assemblée (contenues dans les Recommandations 1303, 1324 et 1342) ont été incorporées en tout ou en partie dans la Déclaration finale et le Plan d'action.

15.       Les propositions de l'Assemblée, reprises dans le Plan d'action, sont notamment les suivantes :

a)       Démocratie et droits de l'homme :

      - proclamation de la mise en place de la Cour européenne unique des Droits de        l'Homme (les ratifications nécessaires ayant été obtenues) ;

      - respect des engagements pris par les Etats membres : les chefs d'Etat et de        gouvernement ont reconnu explicitement que les procédures de suivi du Comité des        Ministres et de l'Assemblée parlementaire constituaient un processus unique ;

      - interdiction du clonage d'êtres humains ;

      - Commissaire aux Droits de l'Homme : étude des modalités de mise en place de cette        charge tout en respectant la compétence de la Cour unique.

b)       Cohésion sociale :

      - nouvelle stratégie : la création d'une unité spécialisée dans l'observation, la        comparaison et l'approche des problèmes liés à la cohésion sociale a été décidée ;

      - Charte sociale européenne: un appel à la ratification a été formulé.

c)       Sécurité des citoyens :

      - lutte contre le terrorisme : une référence spéciale est faite à la Conférence parlementaire qui sera organisée par l'Assemblée ;

      - lutte contre la corruption ;

      - protection des enfants : les législations nationales doivent être réexaminées et la        coopération dans le cadre du Conseil de l'Europe développée.

d)       Valeurs démocratiques et diversité culturelle :

      - une action pour l'éducation à la citoyenneté démocratique a été décidée ;

      - patrimoine européen : il a été convenu de lancer en 1999 une campagne sur le thème        "l'Europe, un patrimoine commun" ;

      - nouvelles technologies de l'information: une politique européenne doit être        développée.

e)       Structures et méthodes de travail :

      - réforme des structures : des réformes structurelles doivent être entreprises (Comité        des sages).

16.       L'Assemblée a beaucoup insisté pour que le Plan d'action soit conforme à la Déclaration finale. Il y a lieu de noter, toutefois, qu'un certain nombre de points figurent dans la Déclaration, mais pas dans le Plan d'action. Aucune mesure concrète et immédiate n'est donc envisagée sur les points suivants, évoqués uniquement dans la Déclaration :

a)       Droits de l'homme et démocratie :

      - abolition universelle de la peine de mort ;

      - prévenir et combattre la torture et les peines ou traitements inhumains ou        dégradants ;

      - l'égalité des chances entre les hommes et les femmes ;

      - le rôle fondamental des institutions de la démocratie locale ;

      - le soutien à l'évolution démocratique.

b)        Cohésion sociale :

      - une approche commune et équilibrée des questions relatives aux réfugiés et        demandeurs d'asile ;

      - la protection due aux victimes de conflits ;

      - la protection des droits des travailleurs migrants en situation régulière.

c)       Nouvelles menaces pesant sur la démocratie :

      - combattre la violence à l'égard des femmes ;

      - améliorer la qualité de la vie dans les zones défavorisées.

d)        Education et culture :

      - le rôle du sport comme moyen de favoriser l'intégration sociale ;

      - encourager la compréhension entre les citoyens du Nord et du Sud.

17.       De toute évidence, le Plan d'action est moins ambitieux que la Déclaration finale. De plus, aucun financement supplémentaire n'a été décidé. Or il est clair que sans accroissement des moyens, toutes les actions décidées ne pourront pas être menées à bien. Le succès définitif du Sommet dépendra bien évidemment des suites données à la Déclaration et à la mise en oeuvre du Plan d'action tant par les gouvernements que par l'intermédiaire des parlements nationaux.

C.       Propositions complémentaires

18.       En plus de la Déclaration finale et du Plan d'action, les participants, lors de leurs interventions, ont formulé certaines propositions concrètes. Mentionnons en particulier :

      - un appel en faveur de l'élaboration de nouveaux instruments juridiques, tels qu'une convention européenne sur les réfugiés et demandeurs d'asile, une convention-cadre sur le racisme, une convention-cadre sur l'immunité des députés et des fonctionnaires, et un code de déontologie pour les fonctionnaires ;

      - une proposition tendant à tenir compte, dans la procédure de suivi, des ratifications (des Conventions du Conseil de l'Europe) à mettre à l'actif de chaque Etat membre ;

      - le renforcement du rôle du Secrétaire Général dans la procédure de suivi.

19.       S'agissant du rôle futur du Conseil de l'Europe, des propositions ont été formulées sur l'élaboration d'une charte de la sécurité européenne, qui exposerait les tâches des institutions européennes. Une analyse plus poussée des rôles spécifiques du Conseil de l'Europe et de l'OSCE a également été demandée. De plus, on a souligné le rôle du Conseil de l'Europe dans le soutien à l'intégration sub-régionale, notamment autour de la mer Méditerranée, de la mer Noire et de la mer Caspienne. Par ailleurs, il a été proposé de créer au sein du Conseil de l'Europe un dispositif pour la diplomatie humanitaire préventive.

20.       Enfin, divers orateurs ont constaté que les moyens actuellement disponibles n'étaient pas à la hauteur des objectifs et des engagements du Conseil de l'Europe, et ont rappelé que les paroles devaient se concrétiser par des actes.

21.       Ces propositions devraient être prises en compte dans le cadre des suites à donner au Sommet.

D.       Réunions bilatérales

22.       Le Sommet a également permis la tenue de réunions bilatérales, au nombre d'au moins 120.       Ainsi       :

- la France, l'Allemagne et la Russie ont annoncé qu'elles tiendraient des sommets annuels en vue de coordonner leurs politiques respectives ;

- le prix Nobel de la paix 1997 ayant été décerné à la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL), la Russie a fait savoir qu'elle était prête à prononcer l'interdiction de ces armes ;

- l'Arménie et l'Azerbaïdjan ont décidé de continuer à rechercher une solution pacifique au conflit du Haut-Karabakh ;

- l'Azerbaïdjan, la Géorgie, la Moldova et l'Ukraine ont publié une déclaration commune sur une coopération accrue ;

- l'Espagne et le Royaume-Uni ont annoncé de nouvelles négociations sur la question de Gibraltar.

E.       Suivi

23.       A sa réunion du 6 novembre 1997, le Comité des Ministres a décidé de mettre en place un Comité de suivi du Deuxième Sommet ainsi qu'un Comité des sages chargés d'élaborer des propositions de réformes structurelles. Il faudrait prier ce Comité des Sages d'accorder l'attention voulue aux propositions pertinentes de l'Assemblée. Ensuite, les Délégués des Ministres ont créé un groupe de travail ad hoc (GT-SUIVI) chargé de veiller aux suites à donner à la Déclaration finale et à la mise en oeuvre du Plan d'action. Le fait que les Délégués aient décidé que l'Assemblée parlementaire et le CPLRE pourraient participer aux travaux de ce groupe, qui doit être présidé par le Représentant permanent de la France, selon des modalités à déterminer, est un signe encourageant (voir l'annexe 2).

24       L'Assemblée devrait veiller à être très impliquée dans les suites à donner à la Déclaration finale et dans la mise en oeuvre du Plan d'action, tout comme elle l'a été dans la préparation du Sommet.

25.       Une mesure bien précise a déjà fait suite au Sommet : le Protocole additionnel à la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine, qui interdit le clonage d'êtres humains, sera ouvert à la signature le 12 janvier 1998. De plus, les Ministres ont adopté, à leur réunion du 6 novembre 1997, vingt principes directeurs pour lutter contre la corruption.

26.       Ces exemples de mise en oeuvre rapide sont encourageants et mettent en évidence l'importance que les Etats membres attachent aux décisions prises à Strasbourg.

F.       Conclusions

27.       Comme en témoignent le niveau de participation, la Déclaration finale et le Plan d'action, mais aussi les résultats des réunions bilatérales et l'écho qu'a eu le Sommet, cette réunion a eu lieu au bon moment. Elle a de toute évidence donné un nouveau souffle politique au Conseil de l'Europe et défini des tâches concrètes, dont beaucoup devront être mises en oeuvre avant le 50e anniversaire de l'Organisation, en 1999.

28.       Le rôle de l'Assemblée, qu'il s'agisse de l'initiative prise ou de la contribution majeure apportée aux textes définitifs, a été reconnu publiquement dans leurs discours par de nombreux participants, et notamment par le président Chirac. Des hommages particuliers ont été rendus à plusieurs reprises à la présidente Fischer.

29.       La plupart des propositions formulées par l'Assemblée ont en fait été incorporées à la Déclaration finale et/ou au Plan d'action. Pour les quelques unes qui ne l'ont pas été, l'Assemblée doit poursuivre ses efforts afin d'obtenir des progrès. La portée du Plan d'action est sans nul doute plus limitée que celle de la Déclaration. Pourtant, cette dernière constitue une série d'engagements formels qui appellent un suivi. En dépit de cette évidence et bien que plusieurs participants aient reconnu l'insuffisance des moyens actuels, aucun engagement n'a été pris concernant des ressources financières supplémentaires.

30.       Il est indispensable que les parlements nationaux soient dûment informés, examinent les décisions prises au Sommet et contribuent activement à leur mise en oeuvre. En conséquence, les délégations nationales devraient engager un débat sur les suites à donner au Sommet au sein de leur propre parlement. Ces suites devraient être envisagées dans le contexte des débats sur les budgets, surtout celui du ministère des affaires étrangères auquel est imputé le financement de notre Organisation.

31.       L'Assemblée devrait faire en sorte de rester étroitement associée au suivi du Sommet tel qu'elle l'a été lors de sa préparation. La décision des Délégués des Ministres consistant à lui permettre de participer à leur groupe de travail ad hoc chargé du suivi du Sommet [GT-SUIVI] est une excellente initiative. L'Assemblée devrait utiliser pleinement cette possibilité

Annexe 1

Discours prononcé par Madame Leni Fischer, député, Présidente de l'Assemblée parlementaire, à l'occasion du Deuxième Sommet du Conseil de l'Europe (Strasbourg, les 10 et 11 octobre 1997)

Excellences,

Mesdames, messieurs,

      C'est évidemment un plaisir pour moi de vous souhaiter la bienvenue au nom de l'Assemblée parlementaire. Nous tenons à remercier le président Jacques Chirac et la ville de Strasbourg, qui sont nos hôtes. Mais mes remerciements s'adressent aussi à vous tous qui avez accepté notre invitation. Par votre présence, vous exprimez votre engagement personnel, votre attachement au Conseil de l'Europe.

      Notre objectif est d'assurer la paix et la sécurité dans une Europe unie. L'Europe est une grande maison qui a besoin de fondations solides, et ces fondations sont constituées par la démocratie et les droits de l'homme dans une société pluraliste, respectueuse de la légalité. Les principes mêmes qu'incarne et défend le Conseil de l'Europe.

      Nous tenons aujourd'hui une manière de "réunion de famille" européenne. Le Conseil de l'Europe est en effet une communauté de valeurs paneuropéenne qui rassemble actuellement quarante Etats. Quatre autres Etats, qui souhaitent entrer dans cette famille, sont représentés ici aujourd'hui. Ce n'est pas le cas du Bélarus, et nous savons pourquoi.

      La République fédérale de Yougoslavie est également absente ; la situation dans cette région continue de susciter de vives inquiétudes.

      Le Sommet de Strasbourg est l'occasion d'imprimer, au plus haut niveau, une nouvelle dynamique au Conseil de l'Europe.

      Il s'inscrit ainsi dans le prolongement du Sommet de Vienne, où les chefs d'Etat et de gouvernement avaient donné mission au Conseil de l'Europe de constituer la structure politique d'une coopération entre des Etats européens égaux en droit, travaillant ensemble à la promotion de la sécurité démocratique. Mais nous avons besoin de directives nouvelles et précises pour l'avenir. C'est pourquoi l'Assemblée parlementaire a pris l'initiative d'organiser ce Sommet. Elle attend donc de lui des décisions concrètes.

      De quoi s'agit-il pour l'Assemblée ?

      Premièrement :

      Par son élargissement, le Conseil de l'Europe est le gardien des droits de l'homme et du citoyen dans toute l'Europe. Sa force réside dans cette autorité qui lui permet de créer le droit en matière de droits de l'homme et de démocratie. Il faut maintenir et renforcer ce rôle. L'instauration de la nouvelle cour permanente marquera une étape importante. Le Conseil a élaboré des conventions assurant une large protection des droits de l'homme et des minorités, des droits sociaux et de la dignité humaine.

      Il s'agit maintenant pour les Etats membres de respecter leurs engagements et de mettre en pratique les normes établies par le Conseil de l'Europe.

      Deuxièmement :

      Malheureusement, les principes de notre Organisation ne sont pas toujours respectés partout et par tous. Nous le savons. Nous sommes encore et toujours, dans nos Etats membres, amenés à reparler de violations des droits de l'homme, voire de tortures et d'exécutions. Il arrive aussi que la séparation des pouvoirs ne soit pas respectée, que la presse soit bâillonnée, que les minorités soient opprimées, que la liberté de religion soit entravée ou que l'opposition fasse l'objet d'attaques antidémocratiques. Nous n'avons pas le droit de fermer les yeux sur ces agissements sous prétexte de préserver la sacro-sainte "paix familiale". Dans une famille, on doit pouvoir se dire des vérités qui ne sont pas toujours agréables à entendre. Nous le faisons au sein de l'Assemblée parlementaire, et cela doit aussi être possible dans le cadre de ce Sommet.

      L'exercice de suivi, le "monitoring", qui concerne tous les Etats membres, doit contribuer à faire respecter les principes du Conseil de l'Europe et à préserver sa crédibilité et son autorité. Il est hors de question que le Conseil compte dans ses rangs des membres passifs : tous doivent progresser et respecter leurs engagements. C'est à cela que servent le monitoring et le dialogue à la fois critique et objectif qu'il permet.

      L'Assemblée a fait de grands progrès en matière de monitoring. Mais nous devons être encore plus efficaces et peut-être aussi, parfois, plus explicites. Le Conseil de l'Europe a "un seuil de tolérance" qu'aucun membre ne doit pouvoir franchir impunément. Pourtant, j'ai l'impression que sur cette question fondamentale, il reste un retard à combler au niveau intergouvernemental. Pour que le Sommet fasse progresser le monitoring, il faut que vous vous engagiez formellement à participer activement à cette action, tant au niveau du Comité des Ministres que dans le cadre de l'Assemblée parlementaire.

      Troisièmement :

      Dans le passé, le Conseil de l'Europe pouvait être qualifié de "club de la démocratie". Aujourd'hui, certains membres doivent encore édifier et consolider leurs institutions démocratiques. Le respect de nos principes ne devrait pas être assuré uniquement par la menace de sanctions mais aussi au moyen d'une aide concrète. A cet égard, il convient de renforcer dans ce sens les programmes de coopération avec l'Union européenne, plus particulièrement.

      Quatrièmement :

      Les organisations oeuvrant en Europe doivent être considérées comme des partenaires égaux en droits. Nul ne peut prétendre assurer seul la coordination. Les modalités concrètes de la coopération doivent être arrêtées par leurs organes directeurs respectifs à l'issue de consultations. Cette coopération, notamment avec l'Union européenne et l'OSCE, doit faire davantage appel à l'expérience et au potentiel du Conseil de l'Europe. Celui-ci mène depuis maintenant huit ans le travail préparatoire indispensable, en matière politique et juridique, aux futures adhésions à l'Union européenne. Ne serait-il donc pas raisonnable de mettre à profit, lors de l'élargissement de l'Union européenne, le savoir-faire du Conseil de l'Europe et les résultats du monitoring?

      Cinquièmement :

      Le Conseil de l'Europe doit donner des réponses aux questions qui se posent avec acuité dans nos sociétés modernes.

      Il s'agit en tout premier lieu de la protection et de la promotion des droits sociaux. Il faudrait utiliser bien davantage les possibilités offertes par le Fonds de développement social qui s'est révélé très efficace.

      La question de la sécurité des citoyens et la lutte contre la criminalité revêtent aussi une grande importance.

      Il nous faut prendre en compte les préoccupations de nos contemporains dans les domaines de la biomédecine et des technologies de l'information.

      Nous devons exprimer clairement notre rejet de la xénophobie, du racisme et de l'intolérance à l'égard de ceux qui pensent autrement.

      Il faut accorder plus d'attention à la protection de l'individu, surtout dans le cas des enfants et des adolescents qui sont les membres les plus vulnérables de nos sociétés.

      La question de la participation paritaire des hommes et des femmes à la vie politique, sociale et économique se pose également. Au prochain sommet peut-être y aura-t-il plus d'une femme parmi les orateurs.

      Dernier point :

      Les conditions actuelles et les défis auxquels le Conseil de l'Europe doit faire face requièrent des réformes structurelles d'une ampleur correspondante. C'est là une des décisions du sommet de Vienne qui n'a malheureusement pas été mise en oeuvre à ce jour. Il n'est pas possible, sans moyens supplémentaires et avec des charges fixes qui demeurent lourdes, de faire face à l'élargissement du Conseil de l'Europe et d'assumer un nombre toujours croissant de missions nouvelles.

      Il me semble plus qu'urgent d'accorder à l'Assemblée le droit le plus naturel pour des parlementaires, celui de décider de son propre budget. L'Assemblée parlementaire s'est révélée ces dernières années être de plus en plus le véritable moteur, la force d'initiative du Conseil de l'Europe. Elle demande à l'avenir à être consultée - non pas à titre facultatif, comme c'était le cas jusqu'à présent - mais systématiquement, sur les nouveaux projets de convention.

      Il est nécessaire que le Comité des Ministres, qui compte désormais 40 Etats membres, mène un dialogue politique permanent sur les questions d'actualité. Il faut accélérer les procédures de manière à ce que nous puissions agir également en situation de crise.

      J'appelle les chefs d'Etat et de gouvernement de nos Etats membres à rester durablement attachés au Conseil de l'Europe et à tracer la voie qu'il devra suivre à l'avenir. Nous vous invitons instamment, vous qui êtes nos plus hauts représentants élus démocratiquement, à mettre pleinement à profit les possibilités offertes par le Conseil de l'Europe car la grande Europe unie du droit et de la démocratie représente notre destinée commune. Quant à la collaboration des parlementaires, elle vous est acquise. Vous pouvez compter sur nous.

      Excellences, mesdames, messieurs, je vous remercie de votre attention.

Annexe 2

Comité des Ministres  Suites à donner à la 101e session (Strasbourg, 6 novembre 1997)

Décisions

Les Délégués :

1.       prennent note des informations communiquées par le Représentant Permanent de la France concernant l’ouverture à la signature, le 12 janvier 1998 à Paris, du Protocole additionnel à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine, portant interdiction du clonage d’êtres humains ;

2.       prennent note des informations du Secrétariat concernant les suites à donner à l’adoption par les Ministres des vingt principes directeurs relatifs à la lutte contre la corruption, et le chargent de les tenir régulièrement informés de l'état d'avancement des travaux du GMC et de ses groupes de travail;

3.       ayant à l'esprit la décision prise par les Ministres à leur 101e Session de mettre en place un « Comité de suivi du Deuxième Sommet », décident de créer un groupe de travail ad hoc (GT-SUIVI), ouvert à toutes les Délégations, aux experts des capitales et à la Commission européenne (suivant le modèle du GT-SOM2), chargé de superviser le suivi de la Déclaration finale et la mise en oeuvre du Plan d'Action adoptés lors du Sommet, en liaison avec les différents groupes de rapporteurs sectoriels et les autres organes concernés du Conseil de l'Europe, pour en faire rapport aux Délégués (en tant que de besoin) et en vue de chaque Session du Comité des Ministres jusqu'au 50e Anniversaire. Ce groupe de travail sera présidé par le Représentant Permanent de la France et ouvert à la participation, selon des modalités à préciser, de l'Assemblée Parlementaire et du CPLRE. Il tiendra sa première réunion le 25 novembre 1997, au cours de laquelle il examinera notamment le document du Secrétaire Général concernant les procédures de mise en oeuvre du Plan d'Action (document CM(97)163 rév.) et les modalités selon lesquelles l'Assemblée Parlementaire et le CPLRE seront associés à ses travaux;

4.       ayant à l'esprit la décision des Ministres de créer un Comité des Sages chargé de la mission spécifique d'élaborer des propositions pour la réforme des structures, à composition restreinte, représentative de l'équilibre géographique des pays membres, qui devrait être présidé par une personnalité politique éminente et faire rapport à la 103e Session du Comité des Ministres, chargent le GT-SUIVI d'élaborer, pour leur 609e bis réunion (26–27 novembre 1997, niveau A), un projet de mandat pour ce Comité des Sages ainsi que des propositions pour la procédure de désignation de ses membres.

Commission saisie du rapport : commission des questions politiques.

Implications budgétaires pour l'Assemblée : à déterminer.

Projet de recommandation adopté à l'unanimité par la commission le 4 décembre 1997.

Membres de la commission: M. Bársony (Président), M. van der Linden (Vice-Président), Mme Ojuland (Vice-Présidente), MM Antretter, Atkinson, Mme Belohorska, MM Belyaev, Bergqvist, Bernardini, Björck, Bloetzer, Chircop (suppléant: M. de Marco), Chornovil, Davis, Deasy (suppléant: M. Gregory), Diacov, Dokle, Domljan, Evangelisti, Galanos, Gjellerod, Hornhues, Irmer, Iwinski, Kalus, Mme Kautto, MM Kirilov, Kuzmickas, Mme Lentz-Cornette, MM Lopez Henares, Lupu (suppléant: M. Kelemen), van der Maelen, Maginas, Martínez, Medeiros Ferreira, Meier, Melescanu, Mota Amaral, Mühlemann, Musto, Mutman, Nallet, Oliynik (suppléant: M. Tsybenko), Pahor, Palmitjavilo Ribo, Popovski, Prusak, Mme Ragnarsdottir, MM Risari, Mme Roudy, MM. Schieder, Schwimmer, Séguin, Selva, Sinka, Mme G. Smith (suppléant: M. McNamara), Mme Stepova, Mme Suchocka, MM Tan, Thoresen, Toshev, Urbain, Vrettos, Woltjer, Ziuganov (suppléant: M. Zhebrovsky).

N.B. Les noms des membres qui ont pris part à la réunion sont imprimés en italique.

Secrétaires de la commission: M. Kleijssen, M. Gruden.