Autres documents liésRapport d'information
| Doc. 12612
| 10 mai 2011
Programme nucléaire de l'Iran: nécessité d’une réaction internationale efficace
Commission des questions politiques et de la démocratie
Rapporteur : M. Tadeusz IWIŃSKI,
Pologne, SOC
Origine - Renvoi en commission: Doc. 11908, Renvoi
3572 du 29 mai 2009. Rapport d'information approuvé par la commission le
11 avril 2011. 2011 - Commission permanente de mai
Résumé
L’Iran élabore un programme nucléaire dont la véritable finalité
préoccupe gravement la communauté internationale. Nombreux sont
ceux qui estiment que l’Iran a pour objectif réel d’acquérir la
capacité de fabriquer des armes nucléaires. Un Iran disposant de
l’arme nucléaire serait un cauchemar pour toute la communauté internationale.
L’Assemblée parlementaire a précédemment adopté deux résolutions
concernant le programme nucléaire iranien, la Résolution 1436 (2005) et la Résolution 1567 (2007).
Les principaux éléments figurant dans ces résolutions restent toujours
valables. Ce rapport d’information apporte un éclairage sur les
faits marquants les plus récents liés à cette question tout en analysant
les solutions politiques disponibles et en indiquant ce qui pourrait
être entrepris au niveau parlementaire pour engager un dialogue
sur ce sujet, ainsi que sur d’autres sujets, sur la base de la Résolution 1567 (2007).
Jusqu’ici, les efforts conjoints de la communauté internationale
pour contraindre l’Iran, par des moyens politiques et diplomatiques,
à appliquer les dispositions des résolutions du Conseil de sécurité
des Nations Unies n’ont pas débouché sur des résultats. La stratégie
poursuivie jusqu’à maintenant, qui donne la priorité à l’action
coercitive, devrait éventuellement être repensée et mettre davantage
l’accent sur l’instauration d’un climat de confiance. L’une des
tâches les plus importantes et les plus urgentes pour la communauté internationale
est de veiller à ce que la coopération de l’Iran avec l’Agence internationale
de l’énergie atomique soit complètement rétablie et que cette dernière
puisse mener pleinement ses activités dans ce pays.
1. Introduction
1. En mai 2009, une proposition de résolution
intitulée
«Programme nucléaire de l’Iran: nécessité d’une réaction internationale»
a été présentée à l’Assemblée parlementaire par notre ancien collègue
et président de la commission des questions politiques, M. Göran
Lindblad. La proposition suggérait notamment que «[l]’Assemblée
devrait réunir des informations précises sur les nouveaux développements
en Iran et sur la menace qui en découle, en tenant compte du facteur
temps et de l’urgence accrue du problème. L’Assemblée devrait prévoir
d’adopter de nouvelles mesures efficaces pour répondre à cette menace».
2. J’ai été nommé rapporteur en juin 2009. En octobre 2009, la
commission m’a autorisé à effectuer des visites d’information à
Vienne (siège de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA))
et à Moscou, et a approuvé ma demande pour des visites d’information
en Iran et en Israël, sous réserve de l’autorisation du Bureau.
Le Bureau, cependant, n’a pas autorisé les visites en Iran et en
Israël.
3. A la suite des contacts que j’ai établis à Vienne et à Moscou
en juin 2010, j’ai informé la commission de la situation du dossier
nucléaire iranien et j’ai de nouveau demandé à être autorisé à me
rendre en Iran et en Israël. Cette nouvelle demande a également
été refusée par le Bureau. Je prévois, néanmoins, de me rendre à
Téhéran mi-avril avec une délégation du Parlement polonais.
4. Il convient de rappeler que l’Assemblée a précédemment adopté
deux résolutions concernant le programme nucléaire iranien, toutes
deux préparées par les anciens présidents de la commission des questions
politiques, à savoir M. Ateş en avril 2005 (
Résolution 1436 (2005)), et M. Lindblad
en juin 2007 (
Résolution
1567 (2007))
.
Les principales propositions figurant dans ces résolutions restent
toujours valables.
5. Les deux rapports contenant des informations de base sur la
question nucléaire iranienne, je considère qu’il est inutile de
reproduire ici les informations rassemblées et les analyses faites
par mes prédécesseurs. Je fournirai donc des informations sur les
faits marquants les plus récents liés à cette question (c’est-à-dire
depuis juin 2007 jusqu’à aujourd’hui), tout en analysant les solutions
politiques disponibles et en donnant mon point de vue sur ce qui
pourrait être entrepris à notre niveau.
6. Je tiens tout d’abord à souligner, comme l’ont fait mes prédécesseurs,
que le rôle de l’Assemblée n’est pas, selon moi, d’évaluer si le
programme nucléaire iranien a ou non une dimension militaire. Cette
tâche est, et doit rester, celle de l'AIEA, qui est chargée de veiller
à ce que les Etats parties respectent les obligations qu’ils ont
contractées au titre du Traité sur la non-prolifération des armes
nucléaires (TNP).
7. En outre, compte tenu de la complexité de la question nucléaire
iranienne, je dois admettre que l’Assemblée et le Conseil de l’Europe
en général n’ont ni l’expertise et les compétences nécessaires pour traiter
les aspects juridiques ou techniques du problème d’une manière crédible,
ni l’intention de remplacer les organes chargés de cette question.
8. Parallèlement, comme le dossier nucléaire iranien continue
d’être une priorité pour la communauté internationale et une source
de préoccupations pour l’opinion publique européenne, l’Assemblée,
en tant que forum parlementaire paneuropéen, reste
totalement dans son champ de compétence dès lors qu’il s’agit de suivre
les événements et d’envisager une action politique, en particulier
au niveau parlementaire, pouvant contribuer à résoudre le problème
nucléaire iranien.
9. Je n’inclus pas volontairement dans mon rapport la question
de la situation de la démocratie et des droits de l’homme en Iran
même si l’on ne peut pas négliger le fait que la sensibilité de
la communauté internationale à la question nucléaire iranienne est
très liée à la nature du régime de Téhéran. Je rappelle à ce propos
que cet aspect a été pris en compte dans les précédentes résolutions
de l’Assemblée, notamment la
Résolution 1678
(2009) sur la situation en Iran
, adoptée
à la suite des événements qui se sont produits après l’élection présidentielle
de juin 2009 dans ce pays.
2. Principaux faits marquants depuis juin
2007
10. En février 2008, l’Iran a commencé à utiliser les
nouvelles centrifugeuses IR-2 fabriquées localement. Ces centrifugeuses
peuvent produire de l’uranium enrichi à un rythme deux fois plus
rapide que les anciennes machines P-1. Plusieurs mois plus tard,
il était annoncé que l’Iran avait augmenté considérablement le nombre de
centrifugeuses dans l’usine d’enrichissement de Natanz.
11. En mars 2008, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté
la Résolution 1803 qui élargissait les sanctions précédemment imposées
à d’autres personnes et entités iraniennes, imposait des restrictions
de voyage à des personnes sanctionnées et interdisait les exportations
vers l’Iran de biens à double usage liés aux missiles ou au nucléaire.
L’Iran a immédiatement rejeté la résolution et refusé de s’y conformer,
annonçant qu’il ne négocierait plus avec les «grandes puissances».
En septembre 2008, la Résolution 1835 a été adoptée afin de réaffirmer
les quatre précédentes.
12. En juillet 2008, une nouvelle tentative de renouer le dialogue
entre l’Iran et le «groupe 5+1» (cinq membres permanents du Conseil
de sécurité des Nations Unies et l’Allemagne) a eu lieu à Genève.
C’était la première fois que les responsables américains et iraniens
se retrouvaient face à face pour discuter du programme nucléaire
iranien. A cette occasion, la formule «gel contre gel» a été proposée
aux Iraniens. En clair, si l’Iran gelait son programme d’enrichissement
d’uranium, les sanctions prises contre lui ne seraient pas renforcées.
Quelques jours plus tard, le président iranien a refusé d’interrompre
le programme d’enrichissement d’uranium. L’Union européenne a donc
décidé d’introduire de nouvelles sanctions contre l’Iran.
13. En février 2009, l’AIEA a annoncé que l’Iran avait produit
près de 1 000 kilogrammes d’uranium faiblement enrichi (à 4 %),
quantité jugée suffisante pour produire une arme nucléaire si l’uranium
était enrichi à plus de 90 % (uranium hautement enrichi de qualité
militaire). L’AIEA a cependant reconnu que l’usine d’enrichissement
de Natanz ne disposait pas des technologies pour produire de l’uranium
hautement enrichi de qualité militaire.
14. Selon des informations rendues publiques au début de septembre
2009, les agences de renseignement américaines avaient conclu que
l’Iran avait produit suffisamment de combustible nucléaire pour
fabriquer rapidement une arme nucléaire, mais qu’il s’était résolu
à ne pas prendre les mesures décisives pour passer au stade de la
fabrication.
15. Le 21 septembre 2009, l’Iran a informé l’AIEA qu’il construisait
une deuxième installation d’enrichissement dans un emplacement souterrain
situé à Fordo, près de la ville de Qom. Le 25 septembre, les Etats-Unis,
le Royaume-Uni et la France ont reproché à l’Iran d’avoir de nouveau
dissimulé une installation nucléaire à l’AIEA. Les Etats-Unis ont
par ailleurs déclaré que l’installation, qui ne serait pas terminée
avant plusieurs mois, était trop petite pour être utile à un programme
civil mais qu’elle pouvait produire suffisamment d’uranium hautement
enrichi pour fabriquer une bombe par an. Les responsables américains
ont ensuite révélé qu’ils suivaient ce projet depuis des années
mais que le Président avait décidé de rendre publiques les informations
américaines sachant que le secret qui entourait le projet avait
été éventé.
16. Le 1er octobre 2009, de nouvelles discussions ont eu lieu
entre l’Iran et le «groupe 5+1» au cours desquelles l’Iran a accepté
d’exporter la plupart de son uranium faiblement enrichi pour qu’il
soit traité à l’étranger, en échange d’un uranium hautement enrichi
(à 20 %) nécessaire à l’exploitation du réacteur de recherche de
Téhéran. L’Iran a cependant refusé de mettre un terme à ses propres
activités d’enrichissement.
17. Compte tenu de ces signes assez contradictoires mais néanmoins
prometteurs, et dans un effort pour trouver un compromis entre les
besoins exprimés par l’Iran en matière de combustible pour son réacteur nucléaire
et les préoccupations internationales relatives au programme nucléaire
iranien, les Etats-Unis, la France et la Russie ont soumis à l’Iran
un projet d’accord rédigé par l’AIEA sur l’échange d’uranium. Dans
le cadre de cet accord, l’Iran exporterait vers la Russie près de
1 200 kilogrammes d’uranium faiblement enrichi (75 % de ses stocks
actuels) qui seraient transformés en uranium hautement enrichi.
Celui-ci serait envoyé ensuite en France pour être retraité sous
la forme de barres de combustible pouvant être utilisées à des fins médicales
dans le vieux réacteur de recherche de l’université de Téhéran,
construit par les Américains.
18. Selon les Iraniens, il existait un accord parallèle, joint
à l’accord principal, qui proposait un transfert direct de la technologie
nucléaire américaine à l’Iran, y compris des «équipements de sécurité,
d’instrumentation et de contrôle» pour le réacteur de recherche
de l’université de Téhéran.
19. Cependant, peu après l’annonce de l’accord, l’Iran a commencé
à émettre des objections et à faire machine arrière. Le 11 novembre
2009, les Iraniens ont repoussé le projet d’accord au motif «qu’ils
ne pouvaient pas faire confiance à l’Occident».
20. Le 2 février 2010, le Président de l’Iran a de nouveau accepté
la possibilité d’envoyer de l’uranium faiblement enrichi iranien
à l’étranger afin d’être retraité. Presque simultanément, le 9 février
2010, les Iraniens ont annoncé que l’installation nucléaire de Natanz
avait commencé à traiter de l’uranium à un niveau de pureté de 20 %
pour fournir du combustible au réacteur de recherche de Téhéran
qui produisait des isotopes médicaux.
21. En mai 2010, l’AIEA a publié un rapport indiquant que l’Iran
avait déclaré une production de plus de 2,5 tonnes d’uranium faiblement
enrichi – une quantité suffisante, si elle était enrichie, pour
fabriquer deux armes nucléaires – et qu’il avait refusé de répondre
aux questions des inspecteurs sur diverses activités, notamment sur
ce que l’agence appelait «les dimensions militaires possibles» du
programme nucléaire iranien.
22. Le 17 mai 2010, l’Iran, le Brésil et la Turquie ont publié
une déclaration commune «dans laquelle l’Iran convenait d’envoyer
de l’uranium faiblement enrichi en Turquie en échange de combustible
enrichi pour alimenter un réacteur de recherche». L’Iran a communiqué
la déclaration conjointe à l’AIEA le 24 mai 2010, lui demandant
d’informer le «groupe de Vienne» (les Etats-Unis, la Russie, la
France et l’AEIA), afin de conclure un accord écrit et d’établir
des arrangements conditionnels entre l’Iran et le groupe de Vienne.
23. Cependant, après avoir étudié soigneusement la proposition
d’accord, le groupe de Vienne a conclu que la nouvelle proposition
ne répondait pas du tout aux préoccupations principales et ne prévoyait
pas en particulier que l’Iran cesserait ses propres activités d’enrichissement.
En outre, le groupe a estimé que la proposition était une tentative
des Iraniens d’éviter les nouvelles sanctions en cours d’examen
au Conseil de sécurité des Nations Unies.
24. Le 9 juin 2010, le Conseil de sécurité des Nations Unies a
adopté la Résolution 1929 avec 12 voix pour, deux voix contre (Turquie
et Brésil) et une abstention (Liban). Il s’agissait de la quatrième
résolution imposant des sanctions. Elle réaffirmait que l’Iran ne
répondait pas aux exigences du Conseil des gouverneurs de l’AIEA et
aux dispositions des résolutions du Conseil de sécurité concernant
son programme nucléaire. La résolution élargissait par ailleurs
les sanctions contre les entités et les personnes physiques iraniennes
participant au programme d’enrichissement de l’uranium et de développement
des technologies de missiles. Enfin, cette résolution interdisait
dorénavant toute exportation vers l’Iran de sept catégories d’armes
conventionnelles.
25. Cela étant, la résolution contient, en son annexe IV, des
propositions de coopération avec l’Iran dans un certain nombre de
domaines, y compris l’énergie nucléaire et d’autres domaines de
haute technologie, qui seraient mis en œuvre si l’Iran s’acquittait
de ses obligations et répondait aux exigences du Conseil de sécurité des
Nations Unies.
26. Comme précédemment, l’Iran a catégoriquement rejeté la résolution,
mais les autorités iraniennes ont envoyé par la suite des signaux
contradictoires indiquant qu’ils étaient prêts à poursuivre le dialogue
sous certaines conditions, tout en dégradant parallèlement les conditions
de la coopération iranienne avec l’AIEA.
27. En juillet 2010, l’Iran a interdit à deux inspecteurs de l’AIEA
de pénétrer sur son territoire. L’AIEA a rejeté les motifs de l’interdiction
et a déclaré apporter un soutien sans faille aux inspecteurs, que
l’Iran avait accusés d’avoir annoncé, à tort, que certains équipements
nucléaires avaient disparu.
28. Pendant l’été de 2010, l’Union européenne et les Etats-Unis
ont adopté des sanctions plus dures contre l’Iran. Ces sanctions
allaient plus loin que celles qui avaient été adoptées dans la résolution
du Conseil de sécurité des Nations Unies, mais elles n’étaient contraignantes
que pour les membres de l’Union européenne et les Etats-Unis.
29. La secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a récemment
déclaré que les Etats-Unis envisageaient d’imposer à l’Iran des
sanctions unilatérales supplémentaires. Elle annonça également que
les sanctions avaient considérablement ralenti le programme nucléaire
iranien. Cependant, certains experts
estiment
que ces retards sont dus au virus informatique STUXNET qui a été
introduit dans les systèmes informatiques de l’usine d’enrichissement
de Natanz. Selon ces rapports, le virus a été créé et testé par
les Israéliens dans leur site nucléaire de Dimona, puis implanté
à Natanz.
30. Selon le rapport le plus récent de l’AIEA, l’Iran continue
de ne pas respecter les exigences contenues dans les résolutions
du Conseil de sécurité des Nations Unies. Il poursuit ses activités
d’enrichissement à Natanz et probablement à Qom. Il continue aussi
de construire le réacteur à eau lourde d’Arak.
31. Les contacts entre les Iraniens et les représentants de la
communauté internationale ont repris en décembre 2010, à Genève,
et en janvier 2011 à Istanbul, sans déboucher sur des résultats
concrets.
32. En janvier 2011, l’Iran a essayé de faire preuve d’ouverture
et a invité certains diplomates étrangers accrédités à l’AIEA de
Vienne à visiter ses installations nucléaires, notamment l’usine
d’enrichissement de Natanz et le réacteur à eau lourde d’Arak, en
construction. L’ambassadeur hongrois a été ainsi invité, parmi d’autres,
à représenter l’Union européenne; les ambassadeurs russe et chinois
ont aussi été invités, mais les envoyés des Etats-Unis, de la France,
de la Grande-Bretagne ou de l’Allemagne ne l’ont pas été.
33. L’Iran a expliqué qu’il s’agissait d’un geste de bonne volonté
et de transparence. La Chine, la Russie et l’Union européenne se
sont félicitées de cette initiative mais ont décliné l’invitation,
indiquant que l’Iran devait coopérer avec l’AIEA et permettre à
ses inspecteurs de contrôler toutes ses installations nucléaires.
34. Selon certains rapports communiqués en janvier 2011, l’Iran
est désormais capable de produire ses propres barres et plaques
de combustible nucléaire, ce qui signifie qu’il maîtrisera le cycle
complet du combustible nucléaire.
35. Les Iraniens indiquent qu’ils ont produit près de 40 kilogrammes
d’uranium enrichi à 20 % et espèrent injecter le premier lot d’uranium
produit localement dans le réacteur de recherche de Téhéran «vers
le milieu de l’année prochaine» (l’année iranienne commence le 22
mars).
3. Quelles options politiques?
36. Il est indéniable qu’il existe un large consensus
international sur le fait que l’Iran ne doit pas être autorisé à
acquérir d’armes nucléaires. Pour les puissances mondiales et les
acteurs régionaux, l’éventualité d’un Iran disposant de bombes ou
de têtes nucléaires dans son arsenal est un cauchemar.
37. Par ailleurs, et même s’il n’existe pas de consensus général
sur la question de savoir si l’Iran essaie effectivement de fabriquer
des armes nucléaires, la plupart des pays conviennent qu’il est
en voie d’obtenir le savoir-faire technique et les ingrédients nécessaires
pour les fabriquer et qu’il devrait être contraint de suspendre
les activités liées à l’enrichissement tant que les préoccupations
légitimes sur la nature de son programme nucléaire ne sont pas dissipées.
38. Bien que les avis divergent parmi les acteurs internationaux
sur la nécessité d’une suspension temporaire de l’enrichissement
d’uranium en Iran ou d’une interdiction permanente, la plupart conviennent
que la suspension doit être la première mesure nécessaire. Cette
exigence est la pierre angulaire des six résolutions du Conseil
de sécurité des Nations Unies relatives à la question nucléaire
iranienne. Quatre de ces résolutions introduisent des sanctions
internationales contre l’Iran.
39. En outre, les Etats-Unis, l’Union européenne et certains autres
pays ont décidé d’imposer des sanctions «unilatérales» encore plus
strictes contre l’Iran.
40. Il faut reconnaître qu’à ce jour tous les efforts déployés
par la communauté internationale visant à contraindre l’Iran à suspendre
ses activités d’enrichissement de l’uranium, y compris les résolutions juridiquement
contraignantes du Conseil de sécurité des Nations Unies et les sanctions
économiques, n’ont pas débouché sur les résultats souhaités. L’Iran
continue d’enrichir l’uranium et de développer ses technologies
nucléaires.
41. Compte tenu du refus de l’Iran de répondre aux demandes d’interruption
de ses activités nucléaires, les options politiques qui s’offrent
à la communauté internationale sont assez limitées. Si l’on exclut
une menace militaire directe, la seule alternative restante est
la diplomatie, qui allie l’action coercitive (les sanctions) et l’engagement
positif (les incitations). Pour des raisons évidentes, je ne ferai
pas référence à d’autres options qui dépassent les limites de la
politique publique. Puisque la stratégie précédente, qui est un
mélange des deux éléments, a échoué, le choix réside entre davantage
de sanctions ou davantage d’incitations.
42. L’efficacité des sanctions appliquées à l’Iran est difficile
à évaluer. Certains responsables américains, dont la secrétaire
d’Etat Hillary Clinton, ont récemment déclaré que «les Iraniens
commençaient à souffrir» et que leur programme nucléaire avait ralenti.
Ils estiment que les sanctions «commencent à produire leurs effets»
car elles empêchent l’Iran d’accéder aux capitaux étrangers, interrompent
les investissements dans son secteur énergétique et réduisent les
mouvements de ses navires dans certains ports étrangers.
43. De nombreux experts, en revanche, considèrent que les sanctions
sont parfois les plus efficaces lorsqu’elles ne sont pas encore
entrées en vigueur, parce que la cible des mesures adoptées redoute
le plus leur impact. Dans le cas de l’Iran, certains analystes estiment
que l’imposition d’autres sanctions ne fera qu’accroître le secret
en Iran et accélérer l’orientation militaire de son programme nucléaire.
Il semblerait que, jusqu’à présent, le programme nucléaire iranien
se soit avéré assez peu sensible aux sanctions, mais il n'y échappe
pas totalement.
44. En outre, l’une des premières conséquences des sanctions est
de réduire la capacité de l’AIEA de travailler en Iran et d’être
dûment informée de ses activités nucléaires. En ce sens, les sanctions
vont à l’encontre de l’objectif déclaré de l’agence, qui est de
vérifier que le programme nucléaire iranien ne présente pas d’aspects
liés à l’application militaire des matériaux nucléaires.
45. Cependant, la tendance politique dominante est de privilégier
le renforcement des sanctions et non d’accroître les incitations.
46. Cette tendance peut se comprendre: comme l’Iran continue de
rejeter les demandes de la communauté internationale, tout assouplissement
des sanctions équivaudrait à récompenser son attitude négative.
En outre, les sanctions sont considérées comme une alternative à
une option militaire, même si, pour les partisans de celles-ci,
elles sont un «obstacle nécessaire» à franchir avant de lancer une
attaque.
47. Cela étant, il est de plus en plus douteux qu’une politique
fondée exclusivement sur le durcissement des sanctions puisse déboucher
sur des résultats. Certes, les sanctions ont des conséquences sur
la situation économique globale de l’Iran et ont probablement ralenti
le programme nucléaire, mais elles ne seront pas suffisantes pour
l’arrêter et n’obligeront pas les dirigeants iraniens à l’abandonner.
48. Selon les experts, il n’existe pas de preuves directes que
l’Iran ait commencé l’application militaire du nucléaire. Il existe
cependant des indications que les dirigeants iraniens ont l’intention
de développer des technologies qui permettraient d’acquérir des
capacités militaires nucléaires s’ils le décidaient. Dans ces circonstances,
le durcissement des sanctions, sans parler de la menace, voire de
l’usage, de la force pourrait contraindre l’Iran à se retirer du
Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et à fabriquer
rapidement une arme nucléaire.
49. Sur ce point, je suis plutôt de l’avis de M. Mohamed El Baradei,
ancien directeur général de l’AIEA, qui estime que «(…) la seule
façon de résoudre le problème iranien est d’établir la confiance.
(…) Il est désormais temps de comprendre que le problème iranien
ne sera résolu que si nous discutons avec les Iraniens en vue de
trouver une solution juste et équitable»
.
50. Par conséquent, dans les politiques adoptées vis-à-vis de
l’Iran, qui combinent des incitations et des pressions, il est temps
de penser à renforcer le volet «incitations» et de mettre sur la
table des négociations des propositions de coopération plus crédibles
et plus ambitieuses, qui deviendraient effectives si l'Iran reconsidérait
son attitude de non-respect.
51. L’accident survenu dans la centrale nucléaire japonaise de
Fukushima, à la suite du tremblement de terre et du tsunami en mars
2011, a placé la question de la sécurité nucléaire sur le devant
de la scène internationale et a montré à quel point les installations
nucléaires peuvent être fragiles en cas de catastrophe naturelle.
Tous les pays qui développent un programme nucléaire civil devraient
coopérer afin de renforcer la sécurité de leurs installations. Il
faudrait offrir à l’Iran la possibilité de prendre pleinement part
à une telle coopération.
52. Dans le même temps, une offre de coopération élargie avec
la communauté internationale devrait aller de pair avec la stricte
mise en œuvre du régime de sanctions imposé à l’Iran par les résolutions
du Conseil de sécurité des Nations Unies. Ces derniers mois, des
informations ont fait état de plusieurs tentatives de l’Iran visant
à contourner les sanctions et à importer des pièces soumises à des
restrictions internationales. Par ailleurs, un avion-cargo iranien
transportant des armes vers la Syrie a été récemment intercepté
par les autorités turques, et son chargement saisi. Ces cas montrent
qu’au lieu d’adopter de nouvelles sanctions, la communauté internationale
devrait surtout faire en sorte que les sanctions en vigueur soient
pleinement et strictement appliquées.
53. A mon avis, l’une des tâches les plus importantes et les plus
urgentes pour la communauté internationale aujourd’hui est de veiller
à ce que la coopération de l’Iran avec l’Agence internationale de l’énergie
atomique soit complètement rétablie et que cette dernière puisse
mener pleinement ses activités dans ce pays. Forte de sa longue
expérience de travail avec l’Iran ainsi que de son expertise technique indispensable,
l’AIEA est le meilleur outil dont dispose la communauté internationale
pour contrôler la nature du programme nucléaire iranien. Pour restaurer
la confiance, il faut d’abord replacer toutes les activités iraniennes
liées au nucléaire sous le strict contrôle de l’AIEA.
54. Il est aussi essentiel de renforcer, et non d’affaiblir, la
cohésion de la communauté internationale sur le dossier nucléaire
iranien. D’autres sanctions unilatérales viendraient à l’encontre
de cet objectif.
4. Y a-t-il une place pour une action spécifique
du Conseil de l’Europe?
55. Comme susmentionné, le Conseil de l’Europe n’a pas
compétence pour traiter directement le problème nucléaire iranien,
mais rien ne l’empêche de contribuer à créer des conditions pour
que le dialogue avec les autorités iraniennes se poursuive dans
un meilleur climat de confiance.
56. Dans leurs rapports respectifs, mes prédécesseurs, MM. Ateş
et Lindblad, ont soumis un certain nombre de suggestions sur la
manière dont le Conseil de l’Europe, et surtout l’Assemblée, pourrait
contribuer à restaurer la confiance et à promouvoir le dialogue
avec divers acteurs de la société iranienne. La plupart de ces suggestions
restent valables aujourd’hui. Je renvoie simplement mes collègues
à ces propositions (
Doc. 10496 et
Doc. 11294).
57. En particulier, par la
Résolution
1567 (2007), l’Assemblée à décidé, au paragraphe 17.2: «de rechercher,
à l’échelon de ses commissions, l’instauration d’un dialogue avec
le Parlement iranien sur les questions relatives aux valeurs fondamentales
du Conseil de l’Europe, ainsi que sur les autres sujets de préoccupation
commune (…)».
58. Selon mes informations, l’ancien président de la commission
des questions politiques, M. Lindblad, a essayé au moins deux fois
d’inviter des représentants du Parlement iranien à participer à
des réunions de la commission, mais sans succès. Je pense néanmoins
qu’il serait utile d’inviter une nouvelle fois le parlement iranien
à engager le dialogue avec nous sur un certain nombre de questions,
y compris, mais non exclusivement, la question nucléaire. La
Résolution 1567 (2007) constitue
une base de travail à cet égard et aucune nouvelle résolution n’est
donc nécessaire.
59. Plus généralement, je ne pense pas qu'il soit utile que l'Assemblée
adopte une résolution de plus sur la question du nucléaire iranien.
Tous les éléments clés des deux résolutions précédemment adoptées
restent valables et il serait très difficile d’engager une nouvelle
action au niveau de l'Assemblée. En particulier, je ne vois pas
de «nouvelles mesures efficaces pour répondre à cette menace» (voir
la proposition de résolution) dont disposerait l'Assemblée. Au lieu
d’élaborer une résolution redondante à l’impact incertain, nous
devrions réfléchir sérieusement aux moyens d'appliquer celles qui
existent déjà. C'est pourquoi j'ai décidé de soumettre un rapport
d'information, sans proposer une nouvelle résolution.
5. Conclusions
60. L’Iran élabore un programme nucléaire dont la véritable
finalité préoccupe gravement la communauté internationale. Nombreux
sont ceux qui estiment que l’Iran, qui déclare que ce programme
est de nature pacifique, a pour objectif réel d’acquérir la capacité
de fabriquer des armes nucléaires. Un Iran disposant de l’arme nucléaire
serait un cauchemar pour toute la communauté internationale, y compris
pour ses voisins
.
61. Tout aussi dangereux serait d’essayer de détruire par la force
les installations nucléaires iraniennes. Une telle intervention
retarderait probablement, sans l’arrêter, son programme nucléaire,
et aurait un effet déstabilisateur considérable sur la situation
au Moyen-Orient et dans le monde.
62. Jusqu’ici, les efforts conjoints de la communauté internationale
pour contraindre l’Iran, par des moyens politiques et diplomatiques,
à appliquer les dispositions des résolutions du Conseil de sécurité
des Nations Unies n’ont pas débouché sur des résultats. La stratégie
poursuivie jusqu’à maintenant, qui donne la priorité à l’action
coercitive, devrait éventuellement être repensée et mettre davantage
l’accent sur l’instauration d’un climat de confiance. Comme je l’ai
dit plus haut, à mon avis, l’une des tâches les plus importantes
et les plus urgentes pour la communauté internationale est de veiller
à ce que la coopération de l’Iran avec l’Agence internationale de
l’énergie atomique soit complètement rétablie et que cette dernière
puisse mener pleinement ses activités dans ce pays.
63. Le Conseil de l’Europe, qui n’est pas, en tant que tel, un
acteur engagé dans les efforts déployés pour résoudre le problème
nucléaire iranien, pourrait néanmoins contribuer, surtout au niveau
parlementaire, à instaurer un climat de confiance entre l’Europe
et l’Iran.
(open)
Programme nucléaire de l’Iran: nécessité
d’une réaction internationale
1. L’Assemblée parlementaire est préoccupée par diverses
informations selon lesquelles les autorités iraniennes mettraient
au point des technologies nucléaires susceptibles d’être utilisées
pour produire des armes nucléaires, alors que le développement de
missiles dont la portée atteindrait des Etats membres du Conseil
de l’Europe est avéré.
2. L’Iran a reconnu avoir mis en œuvre depuis près de vingt ans,
sans en informer l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA),
un programme nucléaire secret portant notamment sur l’enrichissement
de l’uranium. Ce faisant, l’Iran a manqué aux engagements qu’il
avait contractés en vertu du Traité sur la non-prolifération des
armes nucléaires (TNP) et a fait naître le soupçon selon lequel
son programme nucléaire pourrait avoir des fins militaires.
3. Si l’Iran venait s’ajouter au nombre des Etats dotés d’armes
nucléaires, le risque de déstabilisation de la région du Moyen-Orient
et du golfe Persique serait sensiblement accru, et ce pays deviendrait
une menace sérieuse pour l’ensemble de la communauté internationale.
4. L’Iran doit savoir que la communauté internationale ne tolérera
pas ses tentatives visant à mettre au point des armes nucléaires
et qu’elle est prête à adopter une réponse commune dont les conséquences
pour l’Iran seraient largement supérieures aux avantages supposés
de l’acquisition d’une capacité nucléaire.
5. D’autre part, il faut convaincre l’Iran que ses préoccupations
légitimes en matière de sécurité sont prises en compte, mais celui-ci
doit aussi accepter de reconnaître les préoccupations de tous les
Etats de la région en matière de sécurité et, en particulier, l’existence
de l’Etat d’Israël et son droit à la sécurité. De plus, il faut garantir
à l’Iran que, en acceptant de répondre aux préoccupations de la
communauté internationale concernant son programme nucléaire, il
ouvrirait de nouvelles possibilités de coopération internationale,
dans l’intérêt du peuple iranien.
6. Dans ce contexte, l’Assemblée se félicite des initiatives
diplomatiques prises par la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni
(E3/UE) pour obtenir, par voie de négociations, que l’Iran apporte
la preuve du respect de ses obligations découlant du TNP et dissipe
ainsi les craintes de la communauté internationale relatives à son programme
nucléaire visant à produire des armes nucléaires.
7. L’Assemblée note avec satisfaction que les Etats-Unis ont
récemment annoncé qu’ils étaient disposés à soutenir les initiatives
diplomatiques européennes.
8. L’Assemblée invite les autorités de la République islamique
d’Iran:
i. à coopérer pleinement
avec l’AIEA;
ii. à respecter rigoureusement le TNP et l’accord de garanties
associé;
iii. à ratifier le Protocole additionnel au TNP qui prévoit
un dispositif de vérification plus efficace et à continuer d’appliquer
ses dispositions en attendant sa ratification;
iv. à prendre des mesures complémentaires pour répondre aux
préoccupations de la communauté internationale concernant le programme
nucléaire de l’Iran et à rétablir une confiance durable dans son caractère
pacifique et, en particulier:
a. à
fournir à l’AIEA des informations complètes et exactes sur le programme
nucléaire passé et actuel de l’Iran;
b. b. à autoriser un
accès libre et sans restriction aux sites et centres de recherche
nucléaires de l’Iran ainsi que, le cas échéant, à d’autres sites,
qu’ils soient ou non soumis au régime du TNP;
c. c. à aller volontairement
au-delà des obligations du TNP, notamment en suspendant durablement les
activités d’enrichissement et de retraitement, puis en y mettant
fin.
9. L’Assemblée appelle les Etats membres et observateurs du Conseil
de l’Europe:
i. à soutenir sans réserve
les initiatives diplomatiques menées par l’E3/UE auprès de l’Iran;
ii. à encourager, par des contacts bilatéraux, les autorités
iraniennes à faire preuve de bonne volonté et à rétablir la confiance
de la communauté internationale en autorisant l’examen par celle-ci
des programmes nucléaires de l’Iran et, en particulier, de ceux
qui éveillent le soupçon;
iii. à envisager des mesures d’incitation économiques qui dédommageraient
l’Iran s’il acceptait d’aller au-delà de ses engagements aux termes
du TNP;
iv. à prendre dûment en considération les préoccupations de
l’Iran en matière de sécurité et de réfléchir aux moyens d’assurer
la paix, de renforcer la stabilité et de promouvoir la coopération
dans la région du Moyen-Orient et du golfe Persique, y compris la
promotion de la zone exempte d’armes nucléaires, comme recommandé
par l’Assemblée générale des Nations Unies;
v. à entamer un dialogue à différents niveaux avec l’Iran
afin de promouvoir la démocratie pluraliste, le respect des droits
de l’homme, la prééminence du droit et l’ouverture de la société;
vi. à soutenir pleinement et efficacement les activités de
l’AIEA concernant l’Iran, et à veiller à faire circuler l’information
de manière rapide et complète;
vii. à profiter de la prochaine conférence d’examen du TNP
(mai 2005) pour renforcer le régime de non-prolifération, et notamment:
a. renforcer les capacités d’inspection
et de vérification de l’AIEA;
b. b. renforcer les
politiques et les pratiques de contrôle des exportations de technologies
à double usage;
c. c. veiller à ce
que tout détournement de programmes civils à des fins militaires
soit exclu;
d. d. prendre dûment
en considération l’initiative de l’AIEA visant à limiter la diffusion
des technologies d’enrichissement nucléaire et à soumettre toutes
les activités d’enrichissement à un contrôle international tout
en veillant à ce que les pays qui ne disposent pas de capacités d’enrichissement
aient accès au combustible nucléaire;
e. e. offrir de meilleures
garanties de sécurité aux Etats qui ne sont pas dotés d’armes nucléaires;
viii. encourager la coopération avec l’AIEA et l’adhésion au
TNP des Etats qui n’y sont pas encore parties.
10. L’Assemblée appelle l’Union européenne:
i. à reprendre les négociations avec l’Iran sur un accord
de commerce et de coopération en tenant dûment compte de l’avancement
des négociations relatives aux questions nucléaires et du respect
effectif de la démocratie et des droits de l’homme;
ii. à envisager d’autres mesures d’incitation, notamment dans
le domaine de l’énergie nucléaire et d’autres hautes technologies,
susceptibles d’être proposées à l’Iran en cas de progrès substantiels
dans les négociations conduites par l’E3/UE.
11. L’Assemblée décide de rester saisie de la question du programme
nucléaire iranien et de charger sa commission des questions politiques
de continuer à suivre de près la situation.
12. L’Assemblée décide d’étudier les mesures qu’elle pourrait
prendre pour promouvoir les valeurs démocratiques, le plein respect
des droits de l’homme et des libertés fondamentaux, et l’ouverture
de la société en Iran par la voie du dialogue parlementaire.
(open)
Programme nucléaire de l’Iran: nécessité
d’une réaction internationale
1. L’Assemblée parlementaire rappelle la
Résolution 1436 (2005) relative
au programme nucléaire de l’Iran: nécessité d’une réaction internationale,
par laquelle elle avait décidé de rester saisie de la question du programme
nucléaire iranien. Elle prend acte des principales évolutions du
dossier nucléaire iranien depuis avril 2005 et déplore la dégradation
considérable de la situation.
2. L’Assemblée s’inquiète de l’absence constante de prise en
compte, par l’Iran, des préoccupations sérieuses et bien fondées
de la communauté internationale, que suscite la nature de son programme
nucléaire passé et présent; elle s’inquiète par ailleurs de l’intention
affichée par les autorités iraniennes d’accélérer et d’étendre les
travaux effectués dans le domaine nucléaire, y compris l’enrichissement
de l’uranium à l’échelle industrielle.
3. Elle prend acte de l’adoption le 24 septembre 2005, par l’Agence
internationale de l’énergie atomique (AIEA), d’une résolution spécifiant
le non-respect par l’Iran de ses obligations nées de l’accord de
garanties sur le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires
(TNP).
4. Elle déplore en particulier que l’Iran n’ait pas, à ce jour,
ratifié le protocole additionnel à son accord de garanties, qu’il
ait abandonné la mise en œuvre volontaire de ce dernier à titre
provisoire et qu’il ait considérablement restreint sa coopération
avec l’AIEA.
5. Elle regrette par ailleurs le rejet par l’Iran du règlement
global de la question du nucléaire présenté par M. Javier Solana
au nom du groupe des six pays (Chine, France, Allemagne, Fédération
de Russie, Royaume-Uni et Etats-Unis) en juin 2006.
6. Elle s’inquiète particulièrement du refus de l’Iran de se
conformer aux Résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies
1696 (2006), 1737 (2006) et 1747 (2007), qui lui font pourtant obligation
de suspendre l’ensemble de ses activités d’enrichissement de l’uranium.
Pareille attitude équivaut à lancer ouvertement un défi à la communauté
internationale et appelle une réaction commune.
7. L’Assemblée souligne, à ce propos, que le groupe des six pays
s’accorde à juger inacceptable la menace que ferait peser un Iran
doté de l’arme nucléaire sur la situation déjà délicate du Moyen-Orient,
ainsi que sur la paix et la sécurité du monde en général. Elle se
félicite de l’unité affichée par les membres du Conseil de sécurité
des Nations Unies à l’égard de l’Iran, en adoptant à l’unanimité
les Résolutions 1737 et 1747, ainsi que du soutien international
croissant dont bénéficie cette position commune.
8. L’Assemblée estime que l’Iran a le potentiel pour devenir
un acteur respecté de la scène régionale et mondiale, et assumer
le rôle de pilier de la stabilité de la région auquel il aspire.
Elle reconnaît que les droits légitimes de l’Iran doivent être respectés
et que ses inquiétudes en matière de sécurité doivent être apaisées. Cependant,
pour ce faire, il est indispensable que l’Iran se conduise de manière
responsable et dans le respect de ses obligations internationales.
L’Iran doit également respecter totalement les droits de l’homme
universels et individuels. L’Assemblée estime aussi qu’il est extrêmement
important que l’Iran établisse la démocratie et l’Etat de droit.
9. Malheureusement, certains agissements des dirigeants iraniens
– comme leurs déclarations provocatrices à l’égard d’Israël, leur
refus de reconnaître Israël et son droit à la sécurité, la négation
de l’Holocauste, ainsi que son soutien accordé aux groupes terroristes
du Hamas et du Hezbollah – sont à l’évidence contraires aux principes
généralement admis des relations internationales.
10. De telles attitudes ébranlent davantage la confiance de la
communauté internationale à l’égard de l’Iran, déjà compromise par
la politique de dissimulation de son programme nucléaire menée depuis
près de vingt ans. En outre, elles accroissent encore l’isolement
de l’Iran, ce qui est contraire aux intérêts de la population iranienne.
Le triste bilan de l’Iran dans le domaine des droits de l’homme
est une cause de défiance et d’inquiétude supplémentaires à son
égard.
11. L’Assemblée demeure convaincue que le règlement de la question
nucléaire iranienne doit passer par la négociation et la diplomatie.
Elle se félicite des efforts redoublés déployés par M. Solana au
nom du groupe des six pays en vue de convaincre l’Iran de se conformer
aux exigences du Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle accueille
par ailleurs avec satisfaction la volonté manifestée par les Etats-Unis
de prendre une part directe dans les négociations, sous réserve
de la suspension de l’enrichissement de l’uranium par l’Iran.
12. La confiance mutuelle est d’une importance capitale, à la
fois pour trouver une solution à la question nucléaire qui prenne
en compte les droits de l’Iran tout en apaisant les inquiétudes
des autres pays, et pour permettre aux Iraniens d’occuper la place
qu’ils méritent au sein de la communauté des nations. Rétablir cette confiance
exige que les dirigeants iraniens abandonnent leur attitude de défi
au profit de la coopération.
13. L’établissement de plus amples contacts avec diverses composantes
de la société iranienne, y compris de contacts individuels, contribuerait
utilement à créer un climat de confiance, alors qu’un isolement
accru de l’Iran y ferait obstacle.
14. L’Assemblée se tient prête à prendre part aux efforts visant
à instaurer la confiance, en engageant le dialogue avec le Parlement
iranien et en établissant des contacts avec la société civile du
pays. Il convient qu’un tel dialogue ne se limite pas à la question
du nucléaire, mais qu’il englobe les valeurs essentielles du Conseil
de l’Europe, à savoir la démocratie, l’Etat de droit et le respect
des droits de l’homme et des libertés fondamentales, auxquelles
pourraient s’ajouter d’autres sujets de préoccupation mutuelle.
A cet égard, elle rappelle ses
Résolutions 1520 (2006) et
1550 (2007), qui
invitent les parlements du Proche-Orient, y compris le Parlement
iranien, à contribuer à la stabilité de la région et à s’engager
dans un dialogue constructif en faveur de la paix.
15. L’Assemblée invite instamment l’Iran:
15.1. à mettre un terme à sa politique de défi et à coopérer
avec la communauté internationale, afin d’apaiser les inquiétudes
suscitées par son programme nucléaire, et, notamment:
15.1.1. à
se conformer sans tarder aux Résolutions 1696, 1737 et 1747 du Conseil
de sécurité des Nations Unies et à suspendre toutes les activités
menées dans le domaine nucléaire qui sont une source de préoccupation,
comme l’énoncent les résolutions précitées;
15.1.2. à coopérer à nouveau pleinement avec l’AIEA, à lui communiquer
des informations complètes et exactes sur son programme nucléaire
passé et présent, et à résoudre les questions non réglées qui ont
conduit l’agence à déclarer que l’Iran ne respectait pas ses obligations
nées de l’accord de garanties sur le TNP;
15.1.3. à ratifier sans tarder et à mettre effectivement en œuvre
le protocole additionnel à l’accord de garanties sur le TNP, ainsi
qu’à engager volontairement une action qui dépasse les exigences
du protocole additionnel;
15.2. à s’attaquer aux autres causes de la défiance de la communauté
internationale à son égard et, notamment:
15.2.1. à reconsidérer
de manière radicale son attitude à l’égard de l’Etat d’Israël, à
reconnaître son droit à la sécurité et à s’abstenir de faire des
déclarations anti-israéliennes et antisémites;
15.2.2. à cesser de soutenir les groupes terroristes, tels que
le Hamas et le Hezbollah;
15.2.3. à s’abstenir de mener toute action visant à déstabiliser
l’Irak, et à user de son influence pour promouvoir la paix, l’ordre
et la réconciliation dans ce pays;
15.2.4. à respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales
universellement admis.
16. L’Assemblée invite les Etats membres et les Etats observateurs
du Conseil de l’Europe:
16.1. à accorder
leur soutien total aux efforts déployés par le groupe des six pays
pour parvenir à un règlement négocié de la question nucléaire iranienne,
dans le sens des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité
des Nations Unies;
16.2. à contribuer au renforcement du soutien international
de la position adoptée par le Conseil de sécurité des Nations Unies
en faveur de sanctions contre l’Iran, notamment au sein des pays
qui appartiennent au Mouvement des non-alignés, et à les appliquer
intégralement et rapidement;
16.3. à intensifier les contacts et à multiplier les voies de
dialogue avec le Gouvernement et le Parlement iraniens, afin d’établir
la confiance et de faire connaître à l’Iran les inquiétudes de la communauté
internationale;
16.4. à développer la coopération avec l’Iran dans les domaines
d’intérêt réciproque et de préoccupations communes, qui ne tombent
pas sous le coup des sanctions décidées par le Conseil de sécurité
des Nations Unies, comme la lutte contre le trafic de drogue;
16.5. à faciliter les contacts personnels, les échanges scientifiques,
culturels et universitaires avec l’Iran, ce qui contribuera à son
ouverture au monde.
17. L’Assemblée décide:
17.1. de
rester saisie de la question du programme nucléaire iranien et charge
sa commission des questions politiques de continuer à suivre de
près ce dossier;
17.2. de rechercher, à l’échelon de ses commissions, l’instauration
d’un dialogue avec le Parlement iranien sur les questions relatives
aux valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe, ainsi que sur
les autres sujets de préoccupation commune. Elle invite une nouvelle
fois les parlements du Proche-Orient, y compris le Parlement iranien,
à contribuer à la stabilité de la région et à s’engager dans un
dialogue constructif en faveur de la paix.