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Recommandation 1428 (1999)

Avenir des seniors: protection, participation, promotion

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 23 septembre 1999 (31e séance) (voir Doc. 8461, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille, rapporteur: M. Hancock). Texte adopté par l’Assemblée le 23 septembre 1999 (31e séance).

1. En déclarant l’année 1999 «Année internationale des personnes âgées», l’Organisation des Nations Unies a engagé une réflexion autour du thème «Vers une société pour tous les âges». La «promotion de l’application des principes des Nations Unies pour les personnes âgées» en est l’objectif principal. Les moyens retenus consistent à «sensibiliser l’opinion au thème de la société pour tous les âges», à «encourager une démarche prospective allant au-delà de 1999», à «atteindre les acteurs non traditionnels» et à «améliorer les réseaux pour la recherche et développer l’échange d’informations».
2. Les initiatives prises ces dernières années dans le cadre du Conseil de l’Europe démontrent qu’il partage ces préoccupations concernant les personnes âgées. L’Assemblée se félicite de ce que la déclaration du 2e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du Conseil de l’Europe ait placé les politiques sociales au centre des priorités; elle salue également la mise en place du Groupe de spécialistes sur l’amélioration de la qualité de vie des personnes âgées dépendantes (CS-CV) et du Groupe d’étude 1998-1999 «Les personnes âgées au sein de leur famille - responsabilités juridiques et sociales». Les ministres européens de la Santé ont dernièrement consacré leur 6e Conférence, qui s’est déroulée à Athènes les 22 et 23 avril 1999, à la question du vieillissement au xxie siècle: nécessité d’une approche équilibrée pour un vieillissement en bonne santé.
3. Le vieillissement de la population en Europe constitue un défi majeur pour les années à venir; il convient d’en tenir compte dès aujourd’hui. Les pays en transition, ainsi que d’autres pays européens, connaissent ou connaîtront des réformes importantes des systèmes de financement de la retraite, avec des conséquences douloureuses pour une fraction importante de la population âgée, conséquences qui justifient un rappel de l’importance des acquis en termes de protection. Le thème des défis de la politique sociale dans nos sociétés vieillissantes fera cependant l’objet d’un rapport distinct.
4. La situation des seniors en milieu rural mérite une réflexion spécifique au vu des particularités du monde rural et agricole, et des grandes disparités entre les seniors ruraux. Pour réduire ces disparités, l’Assemblée encourage les actions de coopération interrégionale, notamment par le biais des associations et des ONG, en particulier en ce qui concerne l’isolement des seniors - beaucoup plus aigu dans les campagnes. L’Assemblée souhaite promouvoir la revitalisation de l’espace rural et de son patrimoine pour permettre tant aux seniors qu’aux jeunes générations de vivre dignement.
5. L’importance sociale des personnes âgées dans la vie familiale ne doit pas être sous-estimée. La famille est la structure de base dans laquelle l’individu apprend traditionnellement son rôle social et où est transmis le patrimoine humain de ses aînés. Bien consciente de l’évolution des mentalités et des cultures, ainsi que des impératifs socio-économiques en Europe, l’Assemblée tient à réaffirmer l’importance de la famille dans l’établissement du lien social entre les générations et plaide en faveur de sa réhabilitation. Il est fondamental à cet égard de prodiguer respect et soin aux personnes âgées.
6. Autre signe des temps, une fraction grandissante de la population qui a cessé d’être professionnellement active cherche aujourd’hui à rester socialement engagée grâce à des activités de charité, de bénévolat et d’échange. Ces hommes et ces femmes refusent d’être considérés comme incapables de jouer un rôle utile pour la communauté après la retraite; leur participation doit donc être encouragée et développée. Certains souffrent de surcroît de l’image que la société moderne renvoie d’eux. Il convient de promouvoir cette nouvelle vague d’engagement social, d’une part pour les avantages qu’elle procure à la société et aux personnes âgées elles-mêmes, d’autre part, parce qu’elle peut contribuer à changer l’image fréquemment négative des retraités et des personnes âgées.
7. L’Assemblée constate l’importance de la prise en considération des différences de situation des personnes âgées entre le nord et le sud, et entre l’est et l’ouest de l’Europe, ainsi qu’entre le milieu urbain et le milieu rural, et reste convaincue de la nécessité de développer la collaboration avec les Nations Unies et avec des représentants du secteur associatif et des organisations non gouvernementales, susceptibles d’aider à la compréhension et à la surveillance des situations nationales.
8. Dans le même esprit, les activités d’observation des situations nationales sur des périodes prolongées semblent produire les meilleurs effets: elles permettent notamment de prendre en compte l’évolution des situations et constituent une source d’information précieuse et d’exemples de bonnes pratiques, par exemple en matière de logement, de services et de soins adaptés aux personnes âgées. Compte tenu du phénomène de vieillissement et des nombreux aspects concernés, qui vont au-delà du cadre de la dépendance et des relations avec la famille - il s’agit de la dignité humaine et des droits des personnes âgées - le Comité des Ministres et les Etats membres devraient envisager, au niveau européen et au niveau national, la mise en place de tels systèmes d’observation de la vie des retraités et des personnes âgées.
9. De même, la recherche sur la population retraitée et âgée devrait être soutenue et encouragée au niveau national, en tenant compte des catégories socioprofessionnelles, eu égard notamment aux spécificités du milieu rural.
10. Au niveau du Comité des Ministres et des Etats membres, les efforts engagés en faveur des personnes âgées méritent d’être poursuivis, en gardant présent à l’esprit dans la conception et la mise en œuvre des futures politiques nationales du Conseil de l’Europe les lignes directrices élaborées par le Comité des Ministres, entre autres dans sa Recommandation no R (94) 9 concernant les personnes âgées, et par l’Assemblée dans la Recommandation 1254 (1994) relative à l’éthique et à la politique des droits des personnes âgées dans le domaine médical et social.
11. L’Assemblée demande au Comité des Ministres d’inviter le Comité européen pour la cohésion sociale (CDCS), récemment créé, à examiner les possibilités d’inclure dans son programme de travail une activité concernant les aspects présentant un caractère urgent parmi les préoccupations exprimées dans la présente recommandation.
12. Dans certaines régions d’Europe très touchées par la transition ou par les conflits, la situation, surtout financière, des personnes âgées est particulièrement préoccupante et relève parfois de l’urgence humanitaire. L’Assemblée invite le Comité des Ministres à demander aux Etats membres d’apporter toute l’aide nécessaire aux Etats concernés ainsi qu’aux organisations engagées sur le terrain. A. En ce qui concerne la protection des retraités et des personnes âgées:
13. A l’occasion de l’Année internationale des personnes âgées, l’Assemblée demande au Comité des Ministres d’inviter les Etats membres à adhérer aux instruments internationaux profitant particulièrement aux personnes âgées et lance un appel solennel en faveur de la Charte sociale (et de la Charte révisée) européenne et de son protocole de 1988, dont l’article 4 est spécifiquement consacré aux personnes âgées.
14. Les menaces qui pèsent particulièrement sur les personnes âgées (délinquance, mauvais traitements physiques et psychologiques, abus de confiance, etc.) sont préoccupantes et il conviendrait que les Etats et les collectivités préparent des réponses adaptées à ces menaces et leur réalisation, par exemple:
14.1. des mesures originales peu onéreuses et sûres visant à favoriser les déplacements des personnes âgées, en particulier le soir;
14.1. des mesures juridiques en matière civile, pénale et de consommation;
14.2. une sensibilisation et une formation du personnel social et médical afin qu’il puisse déceler tout mauvais traitement dans l’environnement - quel qu’il soit - où vivent les personnes âgées (famille, en milieu institutionnel, etc.);
14.3. des systèmes d’information au bénéfice des personnes âgées, visant à prévenir et sanctionner de tels mauvais traitements, avec une attention particulière portée à l’abus des drogues dans les institutions.
15. Les exclus âgés constituent un groupe de personnes qui nécessitent des réponses adaptées et souples de la part de la collectivité, surtout dans le domaine de la santé: les Etats doivent s’assurer de ce que les intervenants humanitaires, les travailleurs sociaux et le personnel médical soient formés à la prise en charge de ces personnes. B. En ce qui concerne la participation des retraités et des personnes âgées:
16. En vue de contribuer à la cohésion sociale et au «vieillissement actif» des personnes âgées, l’Assemblée demande au Comité des Ministres d’inviter les Etats membres à tenir compte des propositions suivantes:
16.1. une législation plus souple en matière d’âge de départ à la retraite ou d’entrée en fonctions permettrait à ceux qui ont les facultés nécessaires à l’emploi et qui en ont le souhait de rester en activité;
16.2. l’accès à l’éducation et à la formation aux nouvelles technologies, par exemple Internet, devrait être garanti sans considération d’âge;
16.3. utiliser des modes de passage «en douceur» à la retraite, comme la baisse progressive du temps de travail;
16.4. les personnes retraitées, ou en voie de le devenir, et les personnes âgées ont besoin d’informations spécifiques, tant en ce qui concerne leur statut que pour les facilités et les services mis à leur disposition. Des services fournissant ce genre d’informations jouent un rôle important dans la prévention de l’exclusion sociale;
16.5. les acteurs concernés, notamment les intermédiaires sociaux, doivent être sensibilisés à l’existence d’une offre croissante de bénévolat et doivent contribuer à ce que ce nouveau secteur fasse le lien avec les possibilités de bénévolat, en facilitant les échanges d’informations entre ceux qui désirent offrir leurs services ou leur savoir et les bénéficiaires potentiels;
16.6. poursuivre les efforts en faveur du développement du tissu associatif des retraités et des personnes âgées et donner aux collectivités locales les moyens de soutenir ce développement par des mesures juridiques, financières et structurelles;
16.7. inciter les collectivités locales à développer les expériences visant à associer les personnes âgées aux prises de décisions et associer au niveau national des représentants du monde associatif des retraités et personnes âgées;
16.8. identifier les espaces de rencontre et trouver des solutions originales pour favoriser les échanges d’expériences intergénérations, afin d’assurer la transmission du savoir et du savoir-faire des seniors, par exemple dans les secteurs de l’éducation, de l’art, de la recherche, des entreprises, de l’histoire, des traditions, de l’artisanat, des activités rurales et agricoles, et promouvoir les initiatives visant à faire connaître ces activités et les possibilités offertes par ces secteurs auprès des différents organismes de formation des jeunes et services de l’emploi;
16.9. envisager des initiatives familiarisant les personnes retraitées et âgées avec les nouvelles technologies de communication;
16.10. sensibiliser le public au thème des responsabilités des personnes âgées envers elles-mêmes et la société, en particulier par la préparation à la vieillesse et au maintien de l’activité. C. En ce qui concerne la promotion de l’image des retraités et des personnes âgées:
17. Compte tenu du respect de la dignité des individus, du renforcement des liens entre les générations, et de la nécessité générale de promouvoir une autre image des retraités et des personnes âgées, l’Assemblée demande au Comité des Ministres de mandater ses comités d’experts compétents afin d’examiner les possibilités:
17.1. de sensibiliser les acteurs du monde des médias, de la publicité, ainsi que les intellectuels et tous autres faiseurs d’opinion à la nécessité d’offrir une image des retraités et des personnes âgées davantage conforme à la réalité, et plus positive;
17.2. d’initier des actions de communication véhiculant une image positive et respectueuse des retraités et des personnes âgées;
17.3. d’encourager le recours, notamment au niveau des services publics, à un vocabulaire et à des notions qui ne véhiculent pas une image négative auprès des retraités; cela vaut en particulier pour les termes utilisés dans la désignation de cette partie de la population;
18. Poursuivant le même objectif, une campagne en faveur des retraités et des personnes âgées «Seniors 2000» pourrait être lancée sous l’égide du Conseil de l’Europe. Une telle initiative serait destinée à poursuivre les effets produits au plan interne dans les Etats membres par l’Année internationale des personnes âgées et à les soutenir dans leurs politiques en faveur d’une image positive du troisième âge.