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Résolution 1214 (2000)
Rôle des parlements dans la lutte contre la corruption
1. Un parlement est une institution fondamentale
d’un pays, car il est l’expression essentielle de la volonté du peuple et a
donc comme responsabilité première de lutter contre la corruption sous toutes
ses formes, en particulier dans la vie publique, mais de plus en plus aussi
dans l’économie tout entière. Les parlements doivent s’atteler à cette tâche
dans l’intérêt de la moralité générale de la société, ainsi que de son progrès
économique durable, pour lequel l’honnêteté et la confiance sont vitales. Au
fur et à mesure que l’Europe - et le monde - se réunissent, cette lutte devient
à la fois de plus en plus complexe et urgente. Le Conseil de l’Europe, son
Assemblée parlementaire et les parlements nationaux doivent être en première
ligne pour promouvoir la bonne gestion des affaires publiques en Europe et dans
le monde, et pour sensibiliser davantage aux dangers de la corruption.
2. La lutte contre la corruption est rendue d’autant plus difficile que la
concurrence économique entre entreprises, pays et groupes de pays s’intensifie,
y compris dans le domaine de l’espionnage industriel; que les montants en jeu
augmentent en même temps que le volume des contrats; et du fait que la moralité
publique risque de se relâcher. Si les parlements, derniers bastions de
résistance contre la corruption, sont eux-mêmes touchés par cette dernière, la
bataille risque fort d’être perdue.
3. L’Assemblée, rappelant entre autres sa Résolution 1147 (1998), sur la menace que fait peser sur l’Europe la criminalité des affaires, ainsi que la conférence conjointe du Conseil de l’Europe et de la Banque mondiale sur le rôle des parlements dans la lutte contre la corruption, qu’elle a organisée à Riga en mars 1999, se félicite de ce que le Conseil de l’Europe intensifie ses efforts dans ce domaine. Elle se félicite notamment de la Convention pénale du Conseil de l’Europe sur la corruption (1999), de sa nouvelle Convention civile sur la corruption et des principes directeurs pour la lutte contre la corruption, élaborés en 1998 par le groupe multidisciplinaire du Conseil sur la corruption. Elle invite tous les États, membres ou non du Conseil de l’Europe, à ratifier rapidement ces conventions, qu’elle souhaite voir entrer en vigueur rapidement.
4. L’Assemblée encourage également le Conseil de l’Europe à renforcer sa
coopération, notamment avec l’OCDE, concernant sa Convention sur la lutte
contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions
commerciales internationales et avec l’Union européenne, concernant sa
Convention sur la corruption de fonctionnaires communautaires ou de
fonctionnaires des États membres de l’Union européenne, ainsi qu’au sein du
programme Octopus, auquel il participe conjointement avec l’Union
européenne.
5. L’Assemblée charge sa commission pour le respect des obligations et
engagements des États membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi)
d’évaluer également, au moins tous les deux ans, les progrès enregistrés dans
la lutte contre la corruption, étant donné que celle-ci empêche les pays de
respecter les normes du Conseil de l’Europe.
6. Pour lutter efficacement contre la corruption, en tant qu’autorité
politique suprême d’un pays et instance de contrôle, les parlements devraient,
en tant que de besoin:
a. veiller à ce que les institutions étatiques - y compris les parlements eux-mêmes - soient transparentes et responsables, de manière à pouvoir résister à la corruption ou à permettre de la dénoncer rapidement;
b. faire passer dans les rangs mêmes des parlements l’idée que les parlementaires ont le devoir non seulement de respecter la lettre de la loi, mais aussi de se poser en exemple d’incorruptibilité pour la société tout entière en mettant en place leur propre code de conduite et en le respectant;
c. introduire un système qui permette d’établir chaque année une déclaration par les parlementaires et leur famille directe de leurs intérêts financiers;
d. élaborer une législation claire et équitable, y compris en matière de supervision publique, concernant le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Il est particulièrement important que les sources de revenus et les conflits d’intérêts potentiels soient bien rendus publics;
e. préserver la puissance des libertés civiles, en particulier la liberté de la presse et la possibilité pour les citoyens de former des associations dans le but d’informer l’opinion, y compris par le biais de textes législatifs sur la liberté de l’information;
f. protéger l’indépendance du pouvoir judiciaire et des médias;
g. faire vérifier toutes les dépenses publiques, collectes d’argent et marchés publics, soit par un organe de contrôle indépendant, soit, lorsque cela se révèle nécessaire pour la sûreté de l’État ou pour d’autres raisons, par une instance parlementaire compétente. Il est également nécessaire de vérifier le système de contrôle anticipé des activités et de la crédibilité des ONG qui bénéficient de subsides publics;
h. prendre des mesures spécifiques pour protéger le poste et les perspectives de carrière de ceux qui démasquent et dénoncent les cas de corruption, et établir, lorsque tel n’est pas encore le cas, un code de conduite à l’usage des fonctionnaires et des personnes ayant des fonctions publiques;
i. adopter une législation prévoyant des sanctions adéquates et précises à l’encontre de quiconque se livre à la corruption;
j. dans toute la mesure du possible, simplifier les réglementations, les licences, les procédures administratives et autres, puisque celles-ci ouvrent des possibilités d’exiger ou d’accepter des pots-de-vin;
k. lutter avec détermination contre la criminalité organisée, étant donné son rôle essentiel comme vecteur de la corruption;
l. renforcer la concurrence dans la vie économique par le biais d’une législation claire et équitable, en adoptant une position ferme à l’encontre des monopoles et des oligopoles, en réduisant les subventions aux entreprises et secteurs économiques, et en renforçant le contrôle public sur le lancement et la mise en œuvre des projets publics;
m. étant donné que la portée internationale de la corruption ne cesse de s’accroître, soutenir des instruments de coopération internationale tels que ceux mentionnés au paragraphe 3 ci-dessus;
n. engager la société civile dans un débat permanent sur la corruption, dès la scolarité, et l’impliquer dans les progrès de la lutte contre la corruption.