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Recommandation 1475 (2000)
Arrivée de demandeurs d'asile dans les aéroports européens
1. Depuis le milieu des années 80, les Etats
membres du Conseil de l’Europe doivent faire face à un nombre toujours
croissant de demandeurs d’asile, dont une bonne partie se présentent aux
aéroports. Outre la nécessité de veiller à ce que tous les demandeurs d’asile
soient traités conformément au droit international relatif aux réfugiés, cet
afflux a créé un problème particulier en ce qui concerne les équipements et les
locaux dont disposent les aéroports pour l’accueil des demandeurs d’asile. Le
personnel doit être pleinement conscient que son rôle est d’apporter son
soutien à l’asile et non de le décourager. Le problème revêt une ampleur
particulière dans les aéroports où affluent les demandeurs (comme Francfort,
Paris ou Londres) ou dans ceux pour lesquels ce phénomène est relativement
récent (essentiellement dans les pays d’Europe centrale, orientale et
méridionale).
2. Le traitement des demandes d’asile à ce stade est un
élément important de la procédure de détermination du statut de réfugié.
L’accès à la procédure prévue par un pays pour l’octroi du statut de réfugié
est essentiel à la notion de protection internationale. Or, les demandeurs
d’asile arrivant dans un aéroport peuvent se voir refuser l’accès à cette
procédure, risquant ainsi le refoulement et des violations de leurs droits
fondamentaux.
3. De plus, l’incohérence et la longueur abusive des
procédures, combinées notamment aux conditions difficiles régnant dans les
aéroports (centres d’accueil inadéquats, par exemple) peuvent rendre indûment
pénible la situation des demandeurs d’asile.
4. L’harmonisation au niveau européen des politiques nationales en matière d’asile est plus que jamais nécessaire. Dans ce contexte, l’Assemblée rappelle et réaffirme ses recommandations antérieures tendant à améliorer la protection et le traitement réservés aux demandeurs d’asile, notamment sa Recommandation 1163 (1991) relative à l’arrivée de demandeurs d’asile dans les aéroports européens; la Recommandation 1236 (1994) relative au droit d’asile; la Recommandation 1309 (1996) relative à la formation du personnel accueillant les demandeurs d’asile aux postes frontière; la Recommandation 1327 (1997) relative à la protection et au renforcement des droits de l’homme des réfugiés et des demandeurs d’asile en Europe; la Recommandation 1374 (1998) relative à la situation des femmes réfugiées en Europe et la Recommandation 1440 (2000) relative aux restrictions au droit d’asile dans les Etats membres du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne. L’Assemblée souligne la nécessité d’une coordination soutenue des politiques en matière d’asile et d’immigration de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe.
5. L’Assemblée note avec satisfaction que d’une manière générale les conditions d’accueil dans les aéroports visités se sont considérablement améliorées depuis l’adoption de la Recommandation 1163 sur ce sujet. Elle se félicite également de l’adoption de la Recommandation nº R (94) 5 du Comité des Ministres aux Etats membres relative aux lignes directrices devant inspirer la pratique des Etats membres du Conseil de l’Europe à l’égard des demandeurs d’asile dans les aéroports européens.
6. L’Assemblée
note néanmoins, non sans préoccupation, que dans plusieurs aéroports recevant
des demandeurs d’asile des problèmes subsistent sur des points essentiels tels
que l’insuffisance de la capacité d’hébergement et l’inadéquation des
conditions matérielles et des équipements. Pour apporter de nouvelles
améliorations, il sera peut-être nécessaire dans certains cas de revoir le
statut et les compétences de l’autorité responsable de la gestion de
l’aéroport.
7. L’Assemblée est particulièrement préoccupée par le fait
que les conditions matérielles et humanitaires dans lesquelles les demandeurs
d’asile sont reçus dans certains aéroports sont loin de satisfaire à des normes
acceptables. Même si dans certains cas cela peut s’expliquer par la situation
économique du pays en question ou par l’afflux considérable de demandeurs, il
convient d’inviter instamment les autorités nationales compétentes à améliorer
la situation le plus rapidement possible.
8. L’Assemblée salue
l’initiative prise par les Pays-Bas de créer une commission parlementaire ad
hoc chargée d’étudier les conditions dans lesquelles les demandeurs d’asile
sont accueillis à l’aéroport de Schiphol. C’est un exemple que tous les Etats
membres du Conseil de l’Europe devraient suivre dans le cadre d’une plus vaste
étude du traitement réservé aux demandeurs d’asile en général tout au long de
la procédure de décision sur l’octroi du statut de réfugié.
9. L’Assemblée parlementaire recommande au Comité des Ministres:
9.1. de renforcer le suivi du respect, par les
Etats membres du Conseil de l’Europe, du droit international relatif aux
réfugiés, pour ce qui est de l’accueil des demandeurs d’asile, ainsi que le
suivi du respect des recommandations pertinentes du Comité des
Ministres;
9.2. de charger le comité compétent de veiller à ce
que les Etats membres concernés s’emploient à améliorer la situation dans les
aéroports où des insuffisances ont été relevées;
9.3. d’intensifier encore la coopération paneuropéenne en matière d’asile
en vue d’une étude d’ensemble de la situation des demandeurs d’asile à la
lumière des instruments internationaux relatifs aux
réfugiés.
10. L’Assemblée recommande également au
Comité des Ministres d’inviter instamment les Etats membres:
10.1. à revoir leur législation et leur pratique
en ce qui concerne l’accueil des demandeurs d’asile, notamment:
a. à inclure dans les accords de réadmission auxquels ils sont parties des garanties assurant la protection des demandeurs d’asile;
b. à veiller à ce que les principes dits du «pays tiers sûr» et du «pays d’origine sûr» ne soient pas appliqués de manière arbitraire et à ce que des critères clairs président à la décision de considérer certains pays comme «sûrs», sur la base des recommandations du Comité ad hoc d’experts sur les aspects juridiques de l’asile territorial, des réfugiés et des apatrides (Cahar);
c. à disposer que tout demandeur d’asile débouté bénéficie d’un droit de recours et que ce recours a un effet suspensif;
d. à définir la durée maximale de séjour dans un aéroport ainsi que dans tout centre d’accueil dans l’attente de l’issue de la procédure de détermination;
e. à améliorer les conditions de détention des demandeurs d’asile et à veiller, en particulier, à ce qu’ils ne soient pas détenus avec des délinquants de droit commun;
f. à réexaminer les procédures suivies lors des expulsions en vue d’éliminer les traitements inhumains ou dégradants;
10.2. à revoir et, si nécessaire, améliorer
les conditions matérielles et humanitaires d’accueil dans les aéroports, en
particulier:
a. à assurer l’hébergement des hommes et des femmes dans des locaux distincts, sauf dans le cas des familles qui devraient de préférence ne pas être séparées, même pour de brefs séjours;
b. à accorder une attention particulière aux mineurs non accompagnés, en veillant notamment à ce qu’il soient interrogés par un adulte dûment qualifié et à ce qu’ils bénéficient d’une priorité absolue;
c. à accorder une attention particulière aux femmes réfugiées, conformément à la Recommandation 1374 de l’Assemblée;
d. à héberger les demandeurs séjournant dans les aéroports dans des locaux adéquatement chauffés, ventilés et éclairés par la lumière du jour;
e. en cas de long séjour, à prévoir une sortie quotidienne à l’air libre d’une heure minimum;
f. à servir des repas réguliers et nourrissants;
g. à garantir l’accès aux soins médicaux pendant le séjour à l’aéroport;
h. à assurer la présence d’interprètes non seulement pendant la procédure proprement dite, mais également hors de cette procédure dans le cas de séjour prolongé;
i. à donner sans tarder aux demandeurs la possibilité d’informer les membres de leur famille et, en cas de séjour prolongé, de leur téléphoner et de recevoir leur visite;
10.3. à assurer que les
conditions ci-dessus soient également satisfaites dans les centres d’accueil ou
de rétention situés hors de l’aéroport, dans lesquels les demandeurs d’asile
sont transférés pour la durée de la procédure;
10.4. à renforcer
les relations avec les organisations non gouvernementales de défense des droits
de l’homme et à promouvoir la mise en réseau de leurs
activités.
11. L’Assemblée recommande enfin au Comité
des Ministres d’inviter la Commission européenne à donner la priorité, dans le
cadre de son programme Odysseus, à la formation du personnel accueillant des
demandeurs d’asile aux postes frontière des pays d’Europe centrale et orientale
en organisant des visites et des échanges ayant en particulier pour but
l’enseignement des procédures et des conditions d’accueil les plus humaines à
l’aéroport, dans les pays européens ayant le plus d’expérience dans ce domaine
(par exemple le Danemark et les
Pays-Bas).