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Résolution 1227 (2000)
Conflit en République tchétchène: développements récents (suivi des Recommandations 1444 (2000) et 1456 (2000) de l’Assemblée parlementaire)
1. L’Assemblée rappelle sa Résolution 1201 (1999) du 4 novembre 1999, sa Recommandation 1444 (2000) du 27 janvier, sa Recommandation 1456 (2000) du 6 avril et sa Résolution 1221 (2000) du 29 juin 2000.
2. L’Assemblée prend note des informations recueillies par sa commission ad
hoc lors de sa visite à Znamenskoïe (Tchétchénie) le 18 septembre et à Moscou
du 19 au 21 septembre 2000, ainsi que de l’audition organisée par la commission
compétente de la Douma d’État le 21 septembre 2000, concernant le
rétablissement de l’économie et du fonctionnement de la société ainsi que le
respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales en République
tchétchène. Elle se félicite de l’esprit constructif de cette audition, de son
caractère franc et ouvert, et de la coopération de la délégation parlementaire
russe pour l’organisation de la visite à Znamenskoïe.
3. L’Assemblée répète qu’elle est convaincue que la conduite de la campagne
militaire de la Fédération de Russie en République tchétchène et les violations
des droits de l’homme qui en ont résulté étaient inacceptables au regard des
principes et des objectifs du Conseil de l’Europe, et que cette conduite aurait
dû être condamnée sans équivoque par le Comité des Ministres.
4. Toutefois, l’Assemblée reconnaît que l’Histoire jugera l’Assemblée non
pas uniquement au nombre ou à la véhémence de ses condamnations répétées, mais
également à ses efforts continus pour aider à promouvoir une solution au
conflit qui respecte les droits de l’homme.
5. L’Assemblée reconnaît qu’il y a eu quelques développements encourageants,
tels que le début du travail des organes des droits de l’homme mis en place par
la Fédération de Russie dans le cadre du conflit tchétchène, à savoir le bureau
de M. Kalamanov – représentant spécial du Président de la Fédération de Russie
pour assurer les droits et les libertés de l’homme et des citoyens en
République tchétchène – la Commission de la Douma d’Etat sur la normalisation
de la situation politique et sociale et économique, et sur la protection des
droits de l’homme en République tchétchène, et la Commission publique nationale
sur les enquêtes criminelles et le respect des droits de l’homme dans le nord
du Caucase.
6. L’Assemblée considère que le travail de ces organes a été un instrument
permettant de recueillir des informations sur les violations des droits de
l’homme en République tchétchène, quelle que soit l’identité de leurs auteurs,
et qu’il commence désormais à assurer une protection des droits de l’homme dans
certains cas particuliers.
7. L’Assemblée considère également que le rôle des trois experts du Conseil
de l’Europe dans le travail du bureau de M. Kalamanov a représenté une
contribution utile et qu’elle doit se poursuivre.
8. Consciente du fait que la Fédération de Russie continue de faire l’objet
d’une procédure de suivi, malgré la suspension des droits de vote de sa
délégation, l’Assemblée invite instamment les autorités russes, dans le cadre
du respect de leurs obligations et engagements envers le Conseil de l’Europe, à
collaborer pleinement avec les deux rapporteurs de sa commission de suivi lors
de la préparation des missions d’enquête qui permettront d’établir un nouveau
rapport d’information.
9. Cependant, l’Assemblée est profondément préoccupée par les violations
graves et persistantes des droits de l’homme en République tchétchène, qui
prennent notamment la forme de bombardements et d’assauts arbitraires et
aveugles, d’arrestations illégales et de mauvais traitements aux détenus,
d’extorsions de fonds et de harcèlement aux points de contrôle, autant
d’attitudes qui entraînent des souffrances inutiles et inacceptables parmi la
population civile. L’Assemblée est d’avis que toute mauvaise volonté
persistante ou toute inaptitude du ministère public à, d’une part, enquêter sur
des crimes commis par les militaires fédéraux contre les populations civiles,
et à, d’autre part, traduire les coupables en justice conduirait à l’absence
d’obligation de rendre des comptes et, de ce fait, à un climat d’impunité qui
favoriserait les violations des droits de l’homme et empêcherait le règlement
politique du conflit.
10. En conséquence, l’Assemblée invite instamment le Gouvernement de la
Fédération de Russie à prendre des mesures rapides et efficaces sur la base du
travail des organes précités afin de remédier sans délai aux violations et aux
lacunes signalées par ceux-ci, et, en particulier:
10.1. à veiller à ce que les services du procureur militaire engagent des
poursuites criminelles systématiques, crédibles et complètes à l’encontre des
membres des forces fédérales impliqués dans des crimes de guerre ou dans
d’autres violations des droits de l’homme;
10.2. à faire cesser toutes les pratiques illégales aux postes de contrôle,
notamment le harcèlement et l’extorsion de fonds, et à limiter activement le
nombre de ces postes au strict minimum;
10.3. à faire cesser toutes les arrestations et détentions illégales ou
arbitraires ainsi que les mauvais traitements physiques ou psychologiques des
personnes détenues;
10.4. à prendre des mesures immédiates afin de clarifier le sort de toutes
les personnes disparues, notamment celui de personnalités telles que Ruslan
Alikhodzhiyev, ancien Président du Parlement de la République
tchétchène;
10.5. à rétablir un système judiciaire efficace en République
tchétchène;
10.6. à accélérer la délivrance des documents d’identité;
10.7. à indemniser les victimes pour la perte ou la destruction de leurs
biens durant le conflit;
10.8. à accélérer le retour des réfugiés et des personnes déplacées dans
leurs propres foyers et, entre temps, à assurer pleinement le respect de leurs
droits, leur sécurité et leur dignité en République tchétchène et ailleurs dans
la Fédération de Russie, notamment à Moscou.
11. L’Assemblée invite également instamment le Gouvernement russe:
11.1. à accélérer sa recherche d’une solution
politique au conflit, notamment par des négociations sans conditions préalables
avec des dirigeants civils et avec le commandement militaire
tchétchène;
11.2. à enquêter sur tous les massacres de civils dont se seraient rendues
coupables les troupes russes, en particulier sur les cas signalés à Alkhan-Yurt
(décembre 1999), à Staropromyslovski (janvier 2000) et à Aldi (février 2000),
et à poursuivre les auteurs de ces actes;
11.3. à limiter ses opérations de maintien de l’ordre en République
tchétchène à ce qui est absolument nécessaire pour assurer la protection de ses
propres forces, des autorités locales et de la population;
11.4. à assurer la liberté de circulation de la population civile en
République tchétchène;
11.5. à assurer une liberté de mouvement maximale aux médias en République
tchétchène.
12. L’Assemblée invite instamment les combattants tchétchènes à respecter
pleinement les droits de l’homme et le droit humanitaire international, à
renoncer aux prises d’otages, à cesser leurs opérations de combat et à ouvrir
le dialogue avec les autorités russes, notamment avec l’administration de la
République tchétchène. L’Assemblée condamne l’approbation par les dirigeants
tchétchènes d’une série d’attaques mortelles contre des personnes – et leurs
familles – travaillant pour l’administration de la République tchétchène.
L’Assemblée exprime sa profonde préoccupation à la suite de l’appel du
Président Maskhadov demandant le jugement des treize candidats à l’élection de
la Douma russe par un tribunal de la charia; elle note que les Tchétchènes
prorusses jugés par de tels tribunaux ont été condamnés à mort; elle réaffirme
sa totale opposition à la peine de mort en toutes circonstances; elle décide
donc d’examiner si un tribunal de la charia a été convoqué et, le cas échéant,
si des jugements ont été prononcés.
13. Consciente des inquiétudes concernant les dimensions internationales de
la sécurité, l’Assemblée demande instamment aux membres de la communauté
internationale de ne pas fournir d’aide aux combattants tchétchènes pour leurs
activités militaires.
14. L’Assemblée reste profondément préoccupée par la situation humanitaire
des réfugiés et des personnes déplacées sur le territoire de l’Ingouchie et, en
particulier, sur celui de la République tchétchène. Tandis que leur retour dans
leur foyer dépend directement de l’amélioration de la situation en matière de
droits de l’homme et de logement, leur indemnisation pour la perte et la
destruction de leurs biens, et d’autres mesures d’urgence doivent être
immédiatement prises afin de leur assurer un logement adéquat pour l’hiver, le
chauffage, la nourriture, les soins médicaux et une éducation assortie d’un
matériel convenable. L’Assemblée s’engage à suivre attentivement les problèmes
des réfugiés et à solliciter les aides nécessaires auprès des organismes
compétents.
15. L’Assemblée appelle le Gouvernement russe à autoriser l’accès des
organisations humanitaires internationales et des ONG désireuses de commencer
leurs opérations dans les parties de la République tchétchène où la sécurité de
leur personnel peut être garantie; elle appelle également les gouvernements des
États membres du Conseil de l’Europe à apporter sans délai un soutien généreux
à la réhabilitation humanitaire et à la reconstruction de la République
tchétchène.
16. L’Assemblée appelle le Comité des Ministres à suivre les mesures prises
par la Russie pour respecter ses obligations en tant que Partie signataire à la
Convention européenne des Droits de l’Homme et en réponse aux recommandations
et résolutions de l’Assemblée. L’Assemblée appelle en particulier le Comité des
Ministres à suivre de près les progrès concernant les enquêtes sur les
personnes responsables de violations et les poursuites engagées, et demande
instamment aux États membres, en l’absence de progrès significatifs, de suivre
d’autres voies pour obliger la Fédération de Russie à rendre compte, notamment
celle des plaintes interétatiques devant la Cour européenne des Droits de
l’Homme. Elle appelle également le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à
la tenir régulièrement et effectivement informée des activités des experts du
Conseil de l’Europe au bureau de M. Kalamanov.
17. L’Assemblée réitère sa détermination à travailler avec les organes
parlementaires russes compétents pour assurer le plein respect des normes et
des objectifs du Conseil de l’Europe en République tchétchène. L’Assemblée
soutient les efforts des membres de la Douma d’Etat et de la délégation russe à
l’Assemblée parlementaire qui s’efforcent d’apporter la paix, la démocratie, la
protection des droits de l’homme et la stabilité en République
tchétchène.
18. L’Assemblée décide de prendre les dispositions pratiques nécessaires pour
évaluer les progrès lors de sa partie de session de janvier 2001; elle exprime
l’espoir que, d’ici là, les progrès auront été suffisamment convaincants pour
permettre à la délégation russe de jouir pleinement de ses droits.