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Résolution 1239 (2001)

Liberté d’expression et fonctionnement de la démocratie parlementaire en Ukraine

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 janvier 2001 (6e séance) (voir Doc. 8945voir Doc. 8945, rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe, rapporteurs: Mmes Severinsen et Wohlwend; Doc. 8955, avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme; rapporteur: M. Eörsi ; et Doc. 8946, avis de la commission de la culture, de la science et de l’éducation, rapporteur: M. Urbańczyk). Texte adopté par l’Assemblée le 25 janvier 2001 (7e séance).

1. Bien que l’Assemblée apprécie les diverses mesures prises par l’Ukraine au cours des dix dernières années pour assurer les droits de l’homme et les libertés fondamentales, y compris dans le domaine de la liberté d’expression, elle est préoccupée par l’intimidation, les agressions répétées et les meurtres dont les journalistes sont victimes en Ukraine et par les fréquents abus de pouvoir des autorités ukrainiennes compétentes en matière de liberté d’expression.
2. Les mesures prises par les autorités ukrainiennes et la Verkhovna Rada (parlement) pour enquêter sur la disparition du journaliste Heorhiy Gongadzé, et leurs efforts pour rendre justice à toutes les parties en cause, devraient être considérées comme un test pour la liberté d’expression et le fonctionnement de la démocratie parlementaire en Ukraine. L’Assemblée exprime sa préoccupation devant le peu d’empressement avec lequel les services du procureur général d’Ukraine ont traité cette affaire. Les résultats divergents des recherches menées par les services du procureur général et par la commission ad hoc de la Verkhovna Rada ont entraîné une crise de confiance entre l’exécutif et le parlement.
3. Les allégations mêlant les autorités ukrainiennes à la disparition de M. Gongadzé peuvent avoir de très graves conséquences pour le fonctionnement des institutions ukrainiennes. Il est donc de la plus haute importance d’établir l’authenticité des éléments de preuve sur lesquels se fondent ces allégations – les enregistrements sur cassettes audio fournis par M. Melnychenko, ancien membre du Service de sécurité du Président de l’Ukraine. A cet égard, l’Assemblée prend note que les autorités ukrainiennes se sont déclarées disposées à faciliter le processus d’établissement de l’authenticité de ces enregistrements.
4. L’Assemblée constate que, le 16 janvier 2001, la Verkhovna Rada a organisé une audition parlementaire sur les problèmes concernant la liberté d’expression et se réjouit des activités qu’elle entreprend dans le domaine de la liberté de la presse et des mass media en Ukraine. L’Assemblée prend également acte du décret présidentiel sur «les mesures supplémentaires concernant l’activité libre des mass media, le renforcement de la liberté d’expression en Ukraine», en tant que signe que le problème de la presse en Ukraine pourrait enfin être abordé, comme il convient, au plus haut niveau gouvernemental.
5. L’Assemblée engage les autorités ukrainiennes compétentes à prendre les mesures suivantes en vue d’améliorer le contexte général dans lequel opèrent les médias et, à long terme, de jeter les bases d’une démocratisation stable et irréversible du secteur des médias:
  • enquête transparente et immédiate sur tous les cas de violences et de morts de journalistes;
  • suppression immédiate des règlements et pratiques autorisant la fermeture d’organes de médias et la suspension de la radiodiffusion sans décision de justice;
  • adoption dans les plus brefs délais d’amendements à la législation concernant les amendes pour diffamation et dépénalisation de la diffamation;
  • amendement de la loi sur le Conseil national de la télévision et de la radiodiffusion conformément à l’expertise menée par le Conseil de l’Europe;
  • création des conditions d’égalité pour le fonctionnement de tous les médias, par l’amendement de la loi de 1997 sur le soutien public aux médias et la protection sociale des journalistes;
  • arrêt des pratiques consistant à faire pression sur les médias par le biais de l’impression et de la distribution;
  • promotion d’un service public de radiodiffusion;
  • ratification de la Convention européenne sur la télévision transfrontière.
6. Concernant en particulier le cas de M. Gongadzé, l’Assemblée invite donc instamment les autorités ukrainiennes compétentes:
6.1. à établir la date et les circonstances précises de la mort de la personne dont le corps a été retrouvé dans les environs de Tarascha;
6.2. à mener rapidement une enquête rapide, approfondie et transparente sur la disparition ou le décès de M. Gongadzé, et à en faire connaître les résultats dans les délais les plus brefs possible;
6.3. à établir les causes et les circonstances précises de la disparition ou du décès de M. Gongadzé, et à livrer à la justice les responsables de ce crime;
6.4. à prier instamment la commission d’enquête ad hoc du Parlement ukrainien (Verkhovna Rada) de procéder de manière aussi rapide et approfondie que possible;
6.5. à prier instamment le pouvoir exécutif d’apporter son soutien, mais de ne pas s’ingérer dans l’une ou l’autre des enquêtes;
6.6. à respecter les droits des proches de la victime, y compris leur qualité de partie civile dans l’affaire du décès de M. Gongadzé.
7. L’Assemblée estime que, si la Verkhovna Rada de l’Ukraine formule une demande d’assistance, le Conseil de l’Europe devrait:
7.1. diligenter une expertise indépendante pour établir l’authenticité des bandes originales des enregistrements susmentionnés;
7.2. diligenter une expertise indépendante pour établir la date et les circonstances précises de la mort de la personne dont le corps a été retrouvé dans les environs de Tarascha, y compris une nouvelle expertise ADN.
8. L’Assemblée considère également que les résultats de ces expertises devront être publiés.