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Recommandation 1634 (2003)

Mesures fiscales visant à encourager la conservation du patrimoine culturel

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - (voir Doc. 9913, rapport de la commission de la culture, de la science et de l'éducation, rapporteur: Baroness Hooper; et Doc. 9980Doc. 9980, avis de la commission des questions économiques et du développement, rapporteur: Mme Griffiths). Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l'Assemblée, le 25 novembre 2003

1. Tout en reconnaissant à notre patrimoine culturel (mobilier et immobilier, et incluant les métiers nécessaires à leur entretien) son importance intrinsèque, l'Assemblée parlementaire souligne également sa valeur économique et éducative, et sa contribution à la bonne volonté et à l'entente internationales.
2. Les bâtiments historiques et autres objets d'intérêt historique et culturel ont à cet égard un rôle majeur à jouer; ils doivent être protégés, soignés et entretenus pour le bénéfice des générations présentes et futures.
3. La responsabilité de la conservation de tout objet ou site précis incombe en premier lieu à son propriétaire. Si nécessaire, le propriétaire devrait recevoir le soutien et les encouragements que la collectivité est en mesure de proposer.
4. Les fonds publics proviennent de différentes sources: telles que des organisations internationales, des Etats, et des autorités locales et régionales. Ces fonds sont toutefois de moins en moins adaptés aux besoins de promotion et de préservation de la culture. Des difficultés spécifiques existent pour les pays qui possèdent un patrimoine historique particulièrement riche, ainsi que dans les anciens Etats aux économies centralisées. De surcroît, en période de conjoncture économique difficile, la culture est souvent la première victime des réductions budgétaires.
5. Le secteur privé peut également jouer un rôle aux niveaux du mécénat d'entreprise et des contributions de fondations et de particuliers. Les propriétaires privés peuvent être encouragés par le pouvoir de l'exemple, soutenus par une information et directement aidés grâce au parrainage ou à la loterie nationale. Les revenus tirés de l'utilisation ou de l'exposition de biens culturels pourraient également servir à aider à l'entretien de ces derniers (comme les revenus générés par le tourisme, les publications ou les droits cinématographiques).
6. On ne peut cependant trop attendre du secteur privé en l'absence de certaines mesures. La voie médiane, de l'incitation fiscale, est une nécessité urgente.
7. Les aménagements fiscaux peuvent être souples. Ils font partie de la politique culturelle. Leur application varie selon que la propriété est publique, institutionnelle ou privée. Les allègements fiscaux peuvent être limités à certains domaines spécifiques, tels que l'entretien d'églises rarement utilisées ou de biens récemment privatisés. Leur octroi peut être, par exemple, assujetti à l'accessibilité au public, un entretien correct, un legs à l'Etat.
8. L'Assemblée a milité par le passé en faveur de mesures fiscales à la conservation du patrimoine aux niveaux tant national qu'européen. La question a été fréquemment soulignée par les ministres européens chargés du patrimoine culturel. L'Assemblée se félicite des propositions détaillées formulées par le Comité des Ministres dans sa Recommandation no R (91) 6 sur les mesures susceptibles de favoriser le financement de la conservation du patrimoine architectural et dans laquelle il est fait référence de façon précise à la fiscalité. Cependant, nombre de ces propositions n'ont pas été mises en pratique. L'examen de la situation dans les Etats membres demandé en 1994 n'a pas été publié.
9. L'Union européenne a fait elle-même l'expérience d'une réduction de la TVA pour les services à forte intensité de main-d'œuvre et cinq pays appliquent cette réduction aux bâtiments. Une telle mesure pourrait constituer une étape en direction d'une «exception culturelle», pour autant qu'elle soit explicitement appliquée au patrimoine culturel.
10. L'Assemblée recommande par conséquent au Comité des Ministres:
10.1. d'étudier les systèmes existants qui font appel à des encouragements et à des allègements fiscaux dans le domaine de la protection et de la conservation du patrimoine, en procédant pays par pays, et de publier les résultats de cette étude;
10.2. de faire appel aux nouvelles technologies de l'information, par exemple dans le cadre de Herein (Réseau européen du patrimoine), pour constituer une base de données pouvant servir de guide de bonne pratique en matière d'incitation fiscale et pour identifier les anomalies intéressantes;
10.3. d'étudier les moyens de coordonner les mesures fiscales en suivant l'exemple de Transnational Giving Europe, de sorte que celles-ci soient applicables au niveau européen ou international, en vue d'encourager:
a. l'intervention d'organisations non gouvernementales internationales dans le domaine du patrimoine (comme dans le cas des organisations privées travaillant sous les auspices de l'Unesco à Venise); et
b. l'action et l'aide internationales en faveur de la protection des sites, bâtiments et objets d'importance mondiale mis en danger ou endommagés par des guerres ou des conflits, comme c'est le cas dans les Balkans et en Irak;
10.4. d'encourager les gouvernements à reconnaître et à soutenir le rôle des organisations intergouvernementales, comme l'Unesco et le Conseil de l'Europe lui-même, et non gouvernementales, comme Europa Nostra, pour ce qui est des mesures fiscales en faveur de leurs activités;
10.5. d'engager un dialogue direct avec les autorités concernées de l'Union européenne, de façon à veiller à ce que toute législation européenne future sur la TVA prévoit spécifiquement le cas de la protection du patrimoine et, en particulier, de l'entretien régulier et de l'amélioration des biens qui permettent d'éviter le surcoût d'éventuels travaux de restauration majeurs, et d'encourager la mise en application de modalités similaires dans les autres pays européens.