Imprimer
Autres documents liés

Résolution 1489 (2006)

Mécanismes visant à garantir la participation des femmes à la prise de décision

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 17 mars 2006 (voir Doc.10743, rapport de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, rapporteuse: Mme Cliveti).

1. En dépit des progrès réalisés en Europe pour une meilleure égalité des chances et des droits pour les femmes et les hommes, l’Assemblée parlementaire constate que la participation des femmes à la prise de décision reste encore limitée. Les femmes continuent d’être sous-représentées en Europe, dans les parlements nationaux et régionaux, dans les conseils municipaux, dans les gouvernements, et dans les postes à responsabilité, que ce soit dans les partis politiques, la fonction publique ou les entreprises.
2. L’Assemblée considère que la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision est une condition préalable pour un meilleur fonctionnement de la démocratie et de la société, tout comme le respect des droits des femmes, leur autonomie financière et leur éducation, dans le contexte d’un partage des responsabilités entre les femmes et les hommes. La sous-représentation constante des femmes dans la prise des décisions politiques et économiques illustre un déficit démocratique fondamental tant au niveau des Etats membres du Conseil de l’Europe que dans le contexte international plus général.
3. L’adoption de lois ou de plans d’action, ou la mise en place de mécanismes institutionnels, visant à l’égalité des chances entre les sexes s’est rarement traduite par davantage de participation réelle des femmes aux plus hauts niveaux de prise de décision nationale et internationale. Dans de nombreux pays européens, l’égalité entre les sexes n’est pas considérée comme prioritaire, et l’interdiction de la discrimination à l’égard des femmes, lorsqu’elle est consacrée dans la législation, n’est pas toujours appliquée dans la pratique. Les lois sur l’égalité ou sur la parité n’ont ainsi donné qu’exceptionnellement les résultats escomptés.
4. La persistance des stéréotypes et des traditions ou les discriminations subies pour entrer dans le monde du travail ou dans la vie politique – puis «faire carrière» dans la profession de son choix – sont autant d’entraves à la participation des femmes à la prise de décision. La majorité des Etats membres n’a pas atteint l’objectif fixé dans la Recommandation Rec(2003)3 du Comité des Ministres sur la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique et publique, qui était que «la représentation de chacun des deux sexes au sein d’une instance de décision dans la vie politique ou publique ne doit pas être inférieure à 40 %».
5. L’Assemblée est aujourd’hui convaincue de la nécessité de rattraper le retard. Compte tenu de la sous-représentation des femmes dans les instances de prise de décision, il faut d’urgence promouvoir des mesures positives car celles qui ont été prises jusqu’à présent pour promouvoir la participation des femmes à la prise de décision n’ont eu qu’un impact limité. Le Conseil de l’Europe et ses Etats membres doivent donc identifier les mécanismes et les bonnes pratiques à mettre en place pour promouvoir l’application de la Recommandation Rec(2003)3 et sensibiliser les structures de décision et les citoyens européens à la nécessité de la participation des femmes à la prise de décision.
6. L’Assemblée invite donc les Etats membres et observateurs du Conseil de l’Europe:
6.1. à se donner pour objectif de parvenir à l’équilibre entre les femmes et les hommes dans les processus décisionnels, en commençant par atteindre une masse critique d’au moins 40 % de femmes dans toutes les instances gouvernementales et élues;
6.2. dans cette perspective, à considérer comme prioritaire la mise en œuvre de la Recommandation Rec(2003)3 du Comité des Ministres, qui ne pourra être appliquée avec succès que si l’on crée ou renforce les mécanismes nationaux et internationaux de promotion de la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision, et si l’on en fait une priorité dans tous les ministères par l’application de l’approche intégrée (gender mainstreaming);
6.3. à veiller à la participation équilibrée des femmes et des hommes dans les délégations internationales;
6.4. à suivre et à évaluer les progrès, grâce à la collecte régulière, à l’analyse et à la diffusion des données quantitatives et qualitatives sur les femmes et les hommes à tous les niveaux, dans les divers postes de décision des secteurs public et privé, et à diffuser annuellement les données sur le nombre de femmes et d’hommes employés aux divers niveaux de la fonction publique;
6.5. à sensibiliser les médias à la question de l’égalité entre les femmes et les hommes pour les préparer au rôle qu’ils jouent dans la formation de l’opinion publique sur la place des femmes dans la société et à l’impact de la représentation des femmes dans les médias sur leur niveau de participation dans la vie publique et politique;
6.6. à associer les organisations non gouvernementales dans la conduite de ces campagnes;
6.7. à favoriser l’accès des femmes à la prise de décision dans toutes les sphères de la vie publique, en brisant le «plafond de verre»;
6.8. à renforcer les mécanismes institutionnels;
6.9. à réviser les règles, les procédures et, si nécessaire, les systèmes électoraux pour qu’ils intègrent la dimension de l’égalité entre les femmes et les hommes pour atteindre, d’ici à 2020, une représentation minimale de 40 % de femmes au sein de leur parlement et des autres assemblées élues, en poussant à la rédaction rapide de la charte de l’égalité électorale proposée par l’Assemblée dans sa Recommandation 1676 (2004) sur la participation des femmes aux élections;
6.10. à donner des incitations financières aux partis qui atteignent l’objectif d’une participation d’au moins 40 % de femmes dans les instances dirigeantes du parti et parmi les candidats élus;
6.11. à prendre en compte la dimension égalitaire lors de l’adoption des budgets nationaux, régionaux et locaux;
6.12. à s’assurer de la mise en œuvre appropriée de la législation existante sur la stratégie d’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes;
6.13. à adopter une loi-cadre et un programme gouvernemental sur l’égalité entre les femmes et les hommes, ainsi qu’à créer des mécanismes pour évaluer la mise en œuvre de cette loi et de ce programme, et à en assurer leur mise en œuvre décentralisée;
6.14. à nommer, dans les structures de médiation déjà existantes, un ou une spécialiste sur les questions d’égalité entre les femmes et les hommes;
6.15. à veiller à ce que les institutions publiques se fixent comme objectif raisonnable d’avoir un nombre proportionnel de 40 % de femmes à des postes élevés afin de remédier à toute représentation déséquilibrée des hommes et des femmes;
6.16. à promouvoir la participation de représentants de la société civile, en particulier ceux qui manifestent un intérêt actif pour les questions d’égalité entre les femmes et les hommes dans tous les débats de politiques, créant ainsi une «passerelle» pour les femmes de la vie associative à la vie politique.
7. L’Assemblée invite les assemblées parlementaires nationales et régionales à instaurer des commissions pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
8. L’Assemblée décide de veiller à l’application pleine et entière du principe de la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision au sein du Conseil de l’Europe, dans ses organes et ses instances, et décide donc:
8.1. de réaffirmer ses Résolutions 1366 (2004) et 1426 (2005) sur les candidats à la Cour européenne des Droits de l’Homme, d’après lesquelles elle a décidé de ne pas prendre en considération les listes de candidats ne comportant pas au moins un candidat de chaque sexe, excepté lorsque les candidats appartiennent au sexe sous-représenté à la Cour, c’est-à-dire représentant moins de 40 % du nombre total de juges;
8.2. de préparer un rapport, en consultation avec ceux qui sont impliqués dans les procédures d’élection en question, sur la réalisation de la représentation des deux sexes concernant les candidatures au Comité pour la prévention de la torture, les postes de commissaire aux droits de l’homme, de Secrétaire Général et de Secrétaire Général adjoint du Conseil de l’Europe, et de Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire;
8.3. de poursuivre la mise en œuvre de sa Résolution 1348 (2003) sur la représentation paritaire au sein de l’Assemblée parlementaire et de la renforcer par des dispositions contraignantes, en modifiant le Règlement de l’Assemblée si nécessaire;
8.4. d’encourager les femmes parlementaires à travailler ensemble, au-delà des clivages nationaux et politiques, au sein du groupe informel de femmes membres de l’Assemblée afin d’accroître leur représentation à des postes à responsabilités tels que présidentes de commissions, de sous-commissions et de délégations nationales, et de les inciter à présenter leur candidature aux fonctions de rapporteurs et à apposer leur nom sur les listes des orateurs;
8.5. d’inviter le Bureau à proposer des solutions aux problèmes qui ont été identifiés par la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, en particulier la présence insuffisante des femmes dans les bureaux des groupes politiques, dans les délégations nationales et dans les commissions, et le nombre insuffisant de femmes rapporteurs;
8.6. d’encourager ses groupes politiques à prendre en compte le principe d’égalité des sexes lors de la désignation des membres des bureaux des commissions et des orateurs qui interviendront en leur nom lors des débats;
8.7. d’encourager les délégations nationales à nommer davantage de femmes vice-présidentes de l’Assemblée et des délégations nationales elles-mêmes;
8.8. d’encourager les commissions à nommer davantage de femmes rapporteurs.