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Recommandation 1855 (2009)
La régulation des services de médias audiovisuels
1. L’Assemblée
parlementaire rappelle qu’en Europe toutes les réglementations des
médias doivent respecter le droit à la liberté d’expression et d’information,
tel que garanti par l’article 10 de la Convention européenne des
droits de l’homme (STE no 5). La liberté
de recevoir et de transmettre des informations et des idées s’applique
sans considération de frontières.
2. Cette liberté constitue une condition indispensable pour la
démocratie et le progrès culturel et social de tout individu et
de la société dans son ensemble. Des restrictions à cette liberté
ne sont admissibles que si elles sont nécessaires dans une société
démocratique.
3. Les médias audiovisuels et imprimés traditionnels ne cessent
de converger pour former de nouveaux types de médias électroniques
assortis d’images, de son et de texte, auxquels on peut accéder
par le biais de plates-formes fixes ou mobiles utilisant les transmissions
terrestres analogiques ou numériques, le satellite ou le câble.
Beaucoup de ce qui est aujourd’hui considéré comme de la radiodiffusion
pourra à l’avenir être transmis par l’internet, où l’accès à d’innombrables
sources de contenu qui ne connaissent pas de frontières géographiques
est contrôlé par l’usager lui-même.
4. L’article 10, paragraphe 1, de la Convention européenne des
droits de l’homme autorise les Etats à «soumettre les entreprises
de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations».
De l’avis de l’Assemblée, la radiodiffusion et la télévision au
sens de la Convention n’incluent pas la radio ou la télévision par
internet, dont la diffusion ne devrait pas être soumise à des autorisations
nationales. La radio et la télévision par internet devraient être
traitées comme la presse écrite implantée sur le Net ou les sites
web assortis de texte, d’images et de son.
5. Le nombre de chaînes, de programmes et de services accessibles
par le biais des médias audiovisuels s’accroît à la faveur du progrès
technologique, offrant aux spectateurs et aux auditeurs un vaste
choix de programmes et de services linéaires et à la demande. Toutefois,
davantage de contenu audiovisuel ne signifie pas nécessairement
davantage de pluralité, de diversité et de qualité, éléments qui
demeurent des priorités pour les politiques audiovisuelles.
6. Le spectateur, l’auditeur ou le lecteur des nouveaux services
de médias audiovisuels doit assumer une plus grande responsabilité
dans le contenu qu’il choisira ou auquel il pourra même contribuer,
alors qu’il devient plus difficile pour l’autorité de régulation
nationale de réglementer le contenu de ces services. C’est la raison
pour laquelle les législateurs nationaux se voient dans l’obligation
de revoir les réglementations existantes et de mettre en place de
nouveaux moyens en vue de parvenir à leurs objectifs en matière
de politique de médias audiovisuels, objectifs qui restent valables
également dans le nouvel environnement médiatique.
7. L’Assemblée soutient, dans ce contexte, la Déclaration faite
le 20 février 2008 par le Comité des Ministres sur l’affectation
et la gestion du dividende numérique et l’intérêt général. Lors
de la prise de décisions sur l’affectation du spectre des fréquences
radio, les Etats membres devraient veiller à équilibrer les besoins en
spectre des différentes technologies de radiodiffusion et de télécommunication.
Il serait particulièrement judicieux de se pencher sur la question
de la disponibilité du spectre pour les pays non membres de l’Union européenne
et, pour ce qui concerne tous les pays, sur la manière d’affecter
les ressources en spectre afin d’optimiser les possibilités pour
les radiodiffuseurs de service public.
8. Se référant à la Convention européenne sur la télévision transfrontière
(CETT) (STE no 132), l’Assemblée note
que l’évolution technologique des médias audiovisuels rend nécessaire
la révision de la CETT et qu’elle a conduit à des changements législatifs
à l’échelon national ainsi qu’à l’adoption d’une nouvelle directive
sur les services de médias audiovisuels (directive SMA) pour les
Etats membres de l’Union européenne.
9. L’Assemblée note que la directive SMA de l’Union européenne
a pour principal objectif de garantir la liberté des services au
sein du marché intérieur de l’Union européenne, conformément au
droit communautaire. Cette approche diffère de celle de la CETT
qui vise à garantir la liberté de transmission et de retransmission
de services audiovisuels en Europe, sans considération de frontières,
conformément à l’article 10 de la Convention européenne des droits
de l’homme.
10. Ayant pris note de l’avancement de la rédaction d’un protocole
portant amendement à la CETT en vue de la transformer en une nouvelle
convention du Conseil de l’Europe, l’Assemblée estime qu’il convient
de prendre en compte les considérations suivantes:
10.1. les possibilités d’orienter
l’interprétation de cette nouvelle convention et d’en superviser
la mise en œuvre devraient être renforcées;
10.2. la mission de service public des services médias audiovisuels
devrait être définie et expliquée;
10.3. le rôle du comité permanent devra être réexaminé eu égard
à sa fonction de contrôle du respect des obligations contractées
au titre de la convention et à sa fonction d’arbitrage;
10.4. la transmission de services de médias audiovisuels à la
demande devrait être traitée comme les services de télédiffusion
et ne devrait pas relever des dispositions plus restrictives reprises
de la directive SMA de l’Union européenne;
10.5. des conseils devraient être donnés à propos de l’exigence
portant sur les services de programmes d’un radiodiffuseur «entièrement
ou principalement» tournés vers le territoire d’une Partie en vue
de se soustraire à la législation nationale de cette Partie;
10.6. des garanties procédurales, telles qu’un avis préalable
du comité permanent ou un arbitrage, devraient être exigées avant
qu’une Partie puisse prendre, à l’encontre d’un radiodiffuseur établi
à l’étranger qui aurait contourné la législation nationale de la
Partie de réception, des mesures pour autant que celles-ci visent
à limiter le droit à la liberté d’information par le biais de services
de médias audiovisuels.
11. L’Assemblée invite les Parties à la CETT à prendre en compte
la présente recommandation lors de la révision de la CETT.
12. L’Assemblée recommande au Comité des Ministres:
12.1. de transmettre la présente recommandation
aux ministères compétents;
12.2. d’allouer des ressources suffisantes pour permettre au
comité permanent institué par la CETT d’assumer sa mission de contrôle
du respect par les Parties des obligations qu’elles ont contractées
au titre de la convention;
12.3. d’inviter les Etats non membres intéressés à adhérer à
la convention révisée, en vue d’en étendre le champ d’application
à d’autres pays;
12.4. de charger son comité directeur compétent d’étudier les
défis qui se feront jour à l’avenir pour ce qui concerne la force
exécutoire de la régulation existante en matière de radiodiffusion
en raison de la convergence croissante observée dans le secteur
des médias audiovisuels, et d’élaborer des lignes directrices politiques
relatives aux nouveaux moyens de contrôle du contenu, y compris
par le biais de l’autorégulation et de la corégulation des médias,
la recherche sur le contenu et les outils de filtrage à l’intention
des usagers, la maîtrise des médias par les utilisateurs, le soutien
du public pour la qualité culturelle des contenus et la coopération
internationale en vue de lutter contre les contenus illégaux, par exemple
dans le cadre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité
(STE no 185), et par l’élaboration éventuelle
d’un protocole à cette convention;
12.5. de charger son comité directeur compétent d’entreprendre
une étude de faisabilité à propos de la mise en place de normes
communes aux Etats membres du Conseil de l’Europe pour ce qui concerne les
contenus audiovisuels à caractère commercial qui n’entrent pas dans
le champ d’application de la convention révisée ainsi que les contenus
audiovisuels produits et partagés publiquement par les utilisateurs.
13. L’Assemblée invite les ministres qui participeront à la Conférence
ministérielle du Conseil de l’Europe sur les médias et les nouveaux
services de communication (Reykjavík, mai 2009) à indiquer qu’ils
continuent de soutenir:
13.1. la
régulation au niveau national de leurs politiques de médias audiovisuels
en tant que parties intégrantes de leurs politiques culturelles
générales, tout en garantissant la coopération internationale et
en respectant le droit à la liberté d’information par le biais des
services de médias audiovisuels, conformément à l’article 10 de
la Convention européenne des droits de l’homme et à l’article 19
du Pacte international des Nations Unies relatif aux droits civils
et politiques;
13.2. la garantie, par le biais d’une régulation et d’une pratique
appropriées, de l’indépendance de leurs instances nationales de
régulation pour le secteur des médias audiovisuels à l’égard de
toute influence partisane, gouvernementale ou commerciale excessive;
13.3. la préservation du principe de radiodiffusion de service
public au sein d’un environnement médiatique changeant et son extension
à l’ensemble des services de médias audiovisuels.
14. L’Assemblée invite les Etats membres de l’Union internationale
des télécommunications des Nations Unies:
14.1. à travailler à coordonner, à l’échelon international,
les normes technologiques nécessaires à la convergence technologique
des médias audiovisuels, tout en garantissant le droit à la liberté d’information
sans considération des frontières, conformément à l’article 19 du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques;
14.2. à élaborer, en vue de la Conférence mondiale des radiocommunications,
qui se tiendra en 2011, des décisions sur l’affectation du spectre
de fréquences radio à la suite de l’arrêt de la diffusion analogique
dans de nombreux pays.