Imprimer
Autres documents liés
Résolution 1790 (2011) Version finale
La situation au Bélarus après l’élection présidentielle
1. L’Assemblée parlementaire est consternée
par la vague sans précédent de violences, d’intimidations, d’arrestations
massives et de persécutions à l’encontre d’opposants politiques,
de défenseurs des droits de l’homme, de professionnels des médias,
d’étudiants et de citoyens du Bélarus, qui a suivi l’annonce des résultats
de l’élection présidentielle organisée au Bélarus le 19 décembre
2010.
2. Plus de 600 personnes ont été arrêtées, dont des candidats
à l’élection présidentielle, alors que des agressions étaient perpétrées
et des perquisitions menées au domicile de dirigeants de l’opposition,
de défenseurs des droits de l’homme et de journalistes, ainsi que
dans les locaux de plusieurs organisations non gouvernementales
et d’organes de médias. La répression a continué de manière plus
ciblée dans le mois qui a suivi l’élection et aucun signe d’accalmie
n’est encore perceptible à ce jour. Une répression aussi violente
de la contestation politique et celle, ciblée, menée contre les
opposants politiques, les défenseurs des droits de l’homme et les
professionnels des médias constituent non seulement une réponse
disproportionnée à l’action des protestataires, mais sont également
le signe d’un mépris pur et simple des valeurs fondamentales défendues
par le Conseil de l’Europe.
3. Se félicitant de la résolution adoptée par le Parlement européen
le 20 janvier 2011 sur la situation au Bélarus, l’Assemblée condamne
en particulier l’incarcération par les forces de sécurité, depuis
le 19 décembre 2010, d’Irina Khalip, une journaliste internationalement
reconnue qui travaille pour le quotidien russe Novaya Gazeta, et d’Andrei Sannikov,
le candidat à l’élection présidentielle blessé de manière brutale,
ainsi que les menaces proférées par les autorités qui envisageaient
de placer leur fils âgé de 3 ans dans un orphelinat de l’Etat. L’Assemblée
condamne également le maintien en détention de Natalya Radina, rédactrice
en chef du site internet Charter 97, qui a été arrêtée à la suite
de la rafle réalisée dans ses bureaux par les forces de sécurité,
le 20 décembre 2010 à Minsk.
4. L’Assemblée réaffirme sa conviction que les libertés politiques
doivent être pleinement respectées et que tous les individus et
groupes doivent être en mesure d’exercer pacifiquement leur droit
à la liberté d’expression et de réunion, y compris lorsqu’ils critiquent
sévèrement les autorités ou la conduite des élections.
5. L’Assemblée regrette que, selon l’évaluation préliminaire
de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE)
de la dernière élection présidentielle, et en dépit des améliorations
spécifiques apportées à la législation électorale et au déroulement
de la campagne électorale, le Bélarus ait encore un long chemin
à parcourir avant de respecter les engagements pris envers l’OSCE,
y compris un certain nombre de normes internationales clés pour
des élections démocratiques, telles que la transparence et la responsabilisation
lors du décompte des voix. Ces élections ont été marquées par l’absence
d’accès équitable aux médias pour l’ensemble des candidats et l’utilisation
déloyale des ressources de l’Etat pour soutenir le Président en
exercice.
6. L’Assemblée déplore par ailleurs la décision des autorités
bélarussiennes de ne pas prolonger le mandat du Bureau de l’OSCE
à Minsk, qui assurait une présence dans le pays depuis 1998.
7. A la lumière de ce qui précède, l’Assemblée invite instamment
les autorités bélarussiennes:
7.1. à
libérer immédiatement tous les candidats de l’opposition et leurs
partisans, les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme
détenus pour des motifs politiques;
7.2. à mettre un terme aux actes de harcèlement et d’intimidation
contre les responsables politiques de l’opposition, les médias et
les représentants de la société civile;
7.3. à mener une enquête transparente sur le recours abusif
et disproportionné à la force par la police et les forces de sécurité
contre les manifestants;
7.4. à mettre un terme aux renvois d’étudiants des universités
et aux licenciements de personnes en raison de leur participation
à la manifestation;
7.5. à reconsidérer leur décision de fermer le Bureau de l’OSCE
à Minsk, et à prolonger son mandat en 2011 et au-delà;
7.6. à achever le processus de réforme de la législation et
de la pratique électorales en tenant compte de l’ensemble des recommandations
formulées par le Bureau des institutions démocratiques et des droits
de l’homme (BIDDH) de l’OSCE et par la Commission européenne pour
la démocratie par le droit (Commission de Venise);
7.7. à exiger des responsables présumés des disparitions de
Yuri Zakharenko, Victor Gonchar, Anatoly Krasovsky et Dmitri Zavadsky
qu’ils rendent des comptes, conformément à la Résolution 1371 (2004) sur les personnes
disparues au Bélarus;
7.8. à décréter un moratoire sur les exécutions, comme première
étape vers l’abolition de la peine de mort, conformément à la Résolution 1671 (2009) sur
la situation au Bélarus.
8. L’Assemblée est convaincue que toute sanction et toute restriction
appliquées aux contacts et relations avec les responsables de ces
événements, y compris les plus hauts responsables du pays, ne devraient
pas mener à un isolement accru du peuple bélarussien.
9. L’Assemblée est également convaincue de l’intérêt de sanctions
ciblées, visant les personnes directement responsables des actes
de répression les plus flagrants, sous réserve qu’elles soient infligées selon
une procédure équitable et transparente. Elle invite par conséquent
tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, y compris ceux qui
ne sont pas membres de l’Union européenne, à souscrire aux sanctions dirigées
par l’Union européenne contre les personnalités officielles bélarussiennes.
10. L’Assemblée décide en conséquence de renforcer le dialogue
avec les forces démocratiques du Bélarus, la société civile, les
groupes d’opposition, les médias libres et les défenseurs des droits
de l’homme. Dans le même esprit, l’Assemblée appelle tous les Etats
membres du Conseil de l’Europe:
10.1. à
maintenir et à renforcer le dialogue avec la société civile bélarussienne
et à investir dans des contacts interpersonnels avec le Bélarus
à tous les niveaux;
10.2. à envisager de faciliter l’octroi de visas aux citoyens
ordinaires du Bélarus ainsi que la possibilité de prévoir de manière
temporaire des lieux de refuge sûrs pour les opposants politiques,
les défenseurs des droits de l’homme et les professionnels des médias
qui sont menacés;
10.3. à encourager les universités à ouvrir leurs portes aux
étudiants bélarussiens renvoyés en raison de leurs activités politiques;
10.4. à appuyer la poursuite des activités du Bureau de l’OSCE
à Minsk dans le cadre du mandat qui lui a été confié;
10.5. à s’abstenir explicitement de toute reconnaissance du
résultat des élections présidentielles du Bélarus;
10.6. à encourager et à appuyer les efforts déployés pour recueillir
et conserver des preuves contre les auteurs de violations graves
des droits de l’homme en vue de sanctions ciblées et de futures
poursuites pénales.
11. S’agissant de ses relations avec le Bélarus, l’Assemblée rappelle
que, dans sa Résolution
1727 (2010) sur la situation au Bélarus: développements
récents, adoptée en avril 2010, après un débat selon la procédure d’urgence
provoqué essentiellement par l’exécution de deux détenus en mars
2010, elle avait décidé de suspendre ses activités impliquant des
contacts à haut niveau entre elle et les autorités bélarussiennes, réaffirmant
qu’il ne pouvait y avoir de progrès dans le dialogue sans progrès
vers les normes du Conseil de l’Europe.
12. Au vu du nouveau recul sérieux constaté, l’Assemblée réaffirme
sa décision de suspendre ses activités impliquant des contacts à
haut niveau avec les autorités bélarussiennes. Elle appelle par
ailleurs le Bureau de l’Assemblée à ne pas lever la suspension du
statut d’invité spécial du Parlement du Bélarus:
12.1. jusqu’à ce qu’un moratoire sur
l’exécution de la peine de mort ait été décrété par les autorités bélarussiennes
compétentes;
12.2. jusqu’à ce qu’il y ait des progrès substantiels, tangibles
et vérifiables en termes de respect des valeurs et principes démocratiques
défendus par le Conseil de l’Europe.
13. L’Assemblée appelle tous les partis politiques des Etats membres
du Conseil de l’Europe et du Parlement européen à prendre des mesures
énergiques pour soutenir leurs partis frères au Bélarus en intensifiant
l’aide personnelle aux dirigeants incarcérés et aux membres de leur
famille, en soutenant financièrement le fonctionnement des partis
et en invitant ces derniers à participer activement aux réunions européennes
des partis, à tous les niveaux.