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Résolution 1816 (2011)
Les risques sanitaires des métaux lourds et d'autres métaux
1. L’Assemblée parlementaire est préoccupée
par le fait que les Etats membres du Conseil de l’Europe, dans le
cadre de leurs politiques de santé, ne portent pas suffisamment
d’attention aux risques sanitaires des métaux, alors que ces risques
sont scientifiquement établis dans beaucoup de cas. Ainsi, il est
de plus en plus évident que l’exposition permanente et à petites
doses de l’être humain à des substances telles que l’aluminium,
le cadmium, le mercure ou le plomb serait un des cofacteurs de certaines
maladies neurologiques, cardio-vasculaires et auto-immunes.
2. Face au droit de chaque personne à un environnement sain,
les stratégies préventives de santé visant à réduire l’exposition
humaine à de telles substances nocives devraient figurer parmi les
priorités politiques. Cela semble d’autant plus urgent face aux
coûts réels élevés de l’utilisation des métaux lourds, fortement soupçonnés
de contribuer à des maladies chroniques qui pèsent lourd sur les
budgets nationaux des caisses d’assurance-maladie.
3. Au-delà de la nécessité d’une action politique et législative
immédiate suivant le principe de précaution, les recherches scientifiques
sur les métaux lourds dans toute leur complexité devraient se poursuivre.
Cela permettra d’établir un lien causal entre la présence de métaux
lourds dans l’environnement humain et certaines pathologies humaines,
d’apporter davantage de réponses appropriées à ces dernières et
de proposer des procédés industriels et des approches thérapeutiques
à la hauteur des connaissances scientifiques actuelles les meilleures.
4. Afin de soutenir les politiques nationales, le droit à un
environnement sain pour chaque personne devrait être mieux ancré
et renforcé dans les normes internationales, y compris dans les
normes du Conseil de l’Europe. L’Assemblée a déjà lancé des appels
en ce sens à plusieurs reprises, par exemple en adoptant sa Recommandation 1885 (2009) sur
l’élaboration d’un protocole additionnel à la Convention européenne
des droits de l’homme relatif au droit à un environnement sain,
mais sans qu’à ce jour une suite concrète n’ait été donnée par le
Comité des Ministres.
5. Toute action concernant les métaux lourds peut s’inscrire
dans un contexte international où les dangers de ces substances
pour la santé humaine et l’environnement sont de plus en plus reconnus.
Ainsi, l’Union européenne est en train de réexaminer sa stratégie
communautaire sur le mercure jusqu’à la fin de 2011, et des négociations
sont en cours dans le cadre du Programme des Nations Unies pour
l’environnement en vue d’élaborer un instrument international contraignant
sur le mercure pour 2013. Les Etats membres du Conseil de l’Europe
devraient prendre part activement aux négociations en cours et agir
en tant que précurseurs d’une évolution vers des politiques sanitaires
et environnementales innovantes.
6. L’Assemblée constate que les connaissances scientifiques et
médicales sur les métaux lourds ont atteint un niveau tel qu’il
n’est plus justifié de retarder des actions concrètes visant à réduire
ou à éliminer leur présence dans l’environnement humain et, ainsi,
d’atténuer leurs conséquences sanitaires. Elle appelle donc tous
les Etats membres à soutenir une approche politique innovante à
la problématique et à prendre les mesures globales suivantes:
6.1. définir les métaux lourds et
les risques sanitaires qu’ils entraînent comme des priorités des politiques
sanitaires et environnementales, tout en suivant le principe de
précaution tel que soutenu par la Recommandation 1787 (2007) sur le
principe de précaution et la gestion responsable des risques; cela
devrait se faire en mettant l’accent sur l’élimination la plus large
possible des métaux lourds de l’environnement humain, sur la prévention
de la bioaccumulation de telles substances dans la nature, la chaîne
alimentaire et, enfin, le corps humain, sur la prévention et le
soin des maladies chroniques générées par ces substances ainsi que
sur la protection particulière des personnes les plus vulnérables;
6.2. promouvoir, au sein de l’Union européenne et dans d’autres
contextes internationaux, l’établissement de règles plus strictes
concernant la production, l’utilisation et l’importation de produits contenant
des métaux lourds, y compris des limites spécifiques d’exposition
aux métaux lourds, notamment pour les personnes les plus vulnérables,
établies en collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé;
6.3. organiser et faciliter des échanges de connaissances et
de bonnes pratiques entre les autorités nationales spécialisées
pour compléter leurs données respectives en la matière et s’inspirer
des mesures politiques efficaces prises ailleurs.
7. L’Assemblée appelle instamment tous les Etats membres à prendre
les mesures de prévention suivantes en ce qui concerne les métaux
lourds les plus toxiques tels que le mercure:
7.1. interdire ou restreindre, lorsque cela est possible et
approprié, l’utilisation des métaux lourds par l’industrie, l’agriculture
et le secteur médical, et, en ce qui concerne ce dernier notamment,
par la restriction, voire l’interdiction, des amalgames comme matériaux
d’obturation dentaire;
7.2. promouvoir une information largement diffusée sur les
effets sanitaires des métaux lourds pour permettre à tous les professionnels
et consommateurs de faire des choix éclairés, sans attendre des mesures
politiques plus radicales sur le choix de méthodes de traitements
médicaux, de produits de consommation et de produits alimentaires,
de moyens de transport;
7.3. promouvoir les recherches scientifiques et technologiques
dans le but de substituer, à long terme, les métaux lourds dans
tous les procédés industriels et agricoles ainsi que dans tous les traitements
médicaux, tout en mettant en place des réglementations strictes
pour prévenir les conflits d’intérêts des experts impliqués tel
qu’évoqué par la Recommandation
1908 (2010) de l’Assemblée sur le lobbying dans une société
démocratique (code européen de bonne conduite en matière de lobbying), notamment
en soutenant la recherche médicale en la matière;
7.4. là où les métaux lourds ne peuvent pas être substitués
immédiatement, réduire au minimum leur arrivée et leur bioaccumulation
dans l’environnement naturel et humain, entre autres en obligeant
tous les utilisateurs et émetteurs de métaux lourds, y compris les
cabinets dentaires, à installer des équipements antipollution et
de filtrage efficaces.
8. Au niveau des normes internationales et européennes, il faut
continuer à promouvoir le droit à la santé et le droit à un environnement
sain en tant que droits humains fondamentaux. A cet égard, l’Assemblée
fait appel aux Etats membres pour continuer à promouvoir, au sein
du Conseil de l’Europe, l’idée d’un protocole additionnel à la Convention
européenne des droits de l’homme sur le droit à un environnement
sain tel que proposé par sa Recommandation
1885 (2009). Par ailleurs, elle considère que 2011 –
année du 50e et du 15e anniversaire respectivement de la Charte
sociale européenne et de la Charte sociale européenne révisée – serait
un moment propice pour introduire le droit à un environnement sain
dans la Charte sociale européenne révisée, par exemple sous l’article
11 relatif au droit à la protection de la santé.