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Résolution 1840 (2011) Version finale

Les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 6 octobre 2011 (35e séance) (voir Doc. 12712, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, rapporteur: Lord Tomlinson). Texte adopté par l’Assemblée le 6 octobre 2011 (35e séance).

1. Le terrorisme a un effet direct sur les droits de l’homme, avec des conséquences sur la jouissance du droit à la vie, à la liberté et à l’intégrité physique des individus, en particulier des victimes du terrorisme. Il peut déstabiliser et affaiblir des sociétés entières, compromettre la paix et la sécurité, et menacer le développement social et économique. Il cherche à imposer à la majorité les vues d’une minorité et ne recule devant rien dans la poursuite de ses objectifs. Le terrorisme sape les piliers de la démocratie et de l’Etat de droit sur lesquels repose le respect des droits de l’homme.
2. Les Etats ont le devoir de protéger les vies de leurs citoyens et l’intégrité de l’Etat, et doivent être capables de prendre les mesures appropriées pour lutter contre le terrorisme. Il n’est pas nécessaire d’instaurer un compromis entre les droits de l’homme et les actions efficaces de la lutte contre le terrorisme, la législation des droits de l’homme assurant déjà en elle-même une protection à cet égard. La Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5, «la Convention»), tout comme d’autres instruments internationaux en matière de droits de l’homme, peut être appliquée de manière à permettre aux Etats d’engager des actions raisonnables et proportionnées pour défendre la démocratie et l’Etat de droit contre la menace terroriste.
3. Le concept d’une «guerre contre la terreur» est fallacieux et de peu d’utilité, et menace l’ensemble du cadre des droits de l’homme internationaux. Les terroristes sont des criminels, et non des soldats, et les crimes terroristes ne peuvent être assimilés à des actes de guerre, même s’ils peuvent fréquemment être qualifiés de crimes contre l’humanité.
4. Il y a un risque que des mesures temporaires de lutte contre le terrorisme, jugées nécessaires au moment de leur introduction, deviennent permanentes alors que les conditions initiales ne sont plus réunies. La nécessité de restreindre les libertés individuelles doit faire l’objet d’une évaluation constante tant que ces restrictions restent en place.
5. Les Etats parties à la Convention européenne des droits de l’homme et ses protocoles sont tenus d’assurer, sur leur territoire, y compris en ce qui concerne les personnes ou les régions sous leur contrôle effectif, mais en dehors de leur territoire ordinaire, les droits et libertés qui y sont garantis:
5.1. En particulier, ils doivent veiller à ce qu’aucune exception, quelle qu’elle soit, ne soit faite aux droits non susceptibles de dérogation, comme le droit à la vie et l’interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants. Cela inclut de respecter le principe de non-refoulement, notamment lorsque la Cour européenne des droits de l’homme a indiqué une mesure provisoire en vertu de l’article 39 de son Règlement, et de traiter avec la plus grande prudence les assurances diplomatiques.
5.2. S’agissant des droits faisant l’objet de restrictions au titre de la Convention, toute limitation doit être strictement nécessaire pour protéger le public et proportionnée au but légitime poursuivi, conformément à la jurisprudence de la Cour. En particulier, la détention administrative doit être limitée à quelques rares exceptions et soumise à un contrôle adéquat. La surveillance, l’interception et les mesures connexes doivent être à la disposition d’un Etat; cependant, elles doivent être clairement délimitées par la loi et soumises à un contrôle judiciaire ou à un contrôle politique approprié.
5.3. Les mesures limitant les droits de l’homme doivent être formulées clairement et interprétées de façon stricte, notamment lorsque la responsabilité pénale est engagée, et doivent s’accompagner d’un contrôle judiciaire et politique adéquat.
6. L’Assemblée parlementaire considère que le terrorisme doit être traité en priorité par le système de justice pénale, dont les garanties de procès équitable, intégrées et bien établies, permettent de protéger la présomption d’innocence et le droit à la liberté de tous. Les mesures administratives coercitives prises à des fins préventives devraient avoir une durée limitée, n’être appliquées qu’en dernier ressort et être soumises à des conditions strictes, y compris des exigences minimales quant aux preuves, au contrôle judiciaire et à un contrôle politique approprié. Elles doivent être pleinement conformes aux exigences du droit international des droits de l’homme.
7. Les Etats membres devraient examiner régulièrement leurs législations et pratiques nationales pour veiller à ce que les conséquences des éventuelles mesures antiterroristes soient conformes aux normes du Conseil de l’Europe, en particulier la Convention européenne des droits de l’homme, telle qu’elle est interprétée par la Cour européenne des droits de l’homme. Cela devrait inclure un suivi parlementaire de la présente résolution, conformément à la Résolution 1822 (2011) sur la réforme de l’Assemblée parlementaire.