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Rapport | Doc. 13246 | 25 juin 2013

Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire d’Islande

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteure : Mme Nataša VUČKOVIĆ, Serbie, SOC

Origine - Renvoi en commission: Décision de l'Assemblée du 24 juin 2013. 2013 - Troisième partie de session

Résumé

Le 24 juin 2013, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire islandaise ont été contestés pour des raisons formelles, conformément à l’article 7 du Règlement de l’Assemblée parlementaire, au motif qu’elle ne comprenait aucune femme en qualité de représentante, en méconnaissance de l’article 6.2.a du Règlement.

Conformément au Règlement de l’Assemblée, ces pouvoirs ont été renvoyés à la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles. La commission propose que l’Assemblée ratifie les pouvoirs de la délégation parlementaire islandaise mais prévoit la suspension du droit de vote de leurs membres à l’Assemblée et dans ses organes, conformément à l’article 7.3.c du Règlement, à compter du début de la partie de session d’octobre 2013 de l’Assemblée si la composition de la délégation n’a pas été mise en conformité au Règlement à cette date et jusqu’à ce qu’elle le soit.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 24 juin
2013.

(open)
1. Le 24 juin 2013, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Islande ont été contestés pour des raisons formelles, conformément à l’article 7.1 du Règlement de l’Assemblée, au motif que la délégation ne comprenait aucune femme en qualité de représentante et ce, en méconnaissance de l’article 6.2.a du Règlement.
2. L’Assemblée parlementaire rappelle son engagement à promouvoir une participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique et publique, et à appliquer les principes d’égalité des sexes dans ses structures internes, notamment en favorisant une représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des délégations nationales.
3. L’Assemblée constate que la composition de la délégation islandaise ne remplit pas les conditions fixées à l’article 6.2.a de son Règlement et que ses pouvoirs ont été valablement contestés. Elle note que la délégation a indiqué qu’il ne lui avait pas été possible de satisfaire dans les délais à la condition posée par le Règlement, et qu’elle s’engageait à se mettre en conformité dans les meilleurs délais.
4. En conséquence, l’Assemblée décide de ratifier les pouvoirs de la délégation parlementaire de l’Islande, mais de suspendre le droit de vote de ses membres à l’Assemblée et dans ses organes, conformément à l’article 7.3.c du Règlement, à compter du début de la partie de session d’octobre 2013 de l’Assemblée et jusqu’à ce que la composition de cette délégation soit conforme à l’article 6.2.a du Règlement s’agissant de la désignation, au sein de la délégation, d’au minimum un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant.

B. Exposé des motifs, par Mme Vučković, rapporteure

(open)

1. Introduction et dispositions réglementaires pertinentes

1. Lors de la séance de l’Assemblée du 24 juin 2013, M. José Mendes Bota, Vice-président de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, et plusieurs membres de l’Assemblée ont contesté les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation nationale de l’Islande auprès de l’Assemblée parlementaire pour des raisons formelles, conformément à l’article 7.1.b du Règlement, au motif que ladite délégation ne comportait aucune femme en qualité de représentante, en méconnaissance de l’article 6.2.a.
2. La Résolution 1781 (2010) «30% au moins de représentants de chaque sexe au sein des délégations nationales de l’Assemblée» a modifié les articles 6.2.a et 7.1.b du Règlement, et a fixé de nouvelles conditions relatives à la représentation des sexes, en renforçant les dispositions existantes visant à promouvoir une participation plus équilibrée des femmes et des hommes.
3. L’article 6.2.a, deuxième phrase, dispose que:
«Les délégations nationales doivent comprendre un pourcentage de membres du sexe sous-représenté au moins égal à celui que compte actuellement leur parlement et, au minimum, un membre du sexe sous-représenté désigné en qualité de représentant.»
4. L'absence de l'inclusion d'au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant dans une délégation nationale est expressément reconnue par l'article 7.1.b du Règlement comme un motif qui justifie la contestation des pouvoirs de cette délégation:
« Les pouvoirs peuvent être contestés par au moins dix membres de l’Assemblée présents dans la salle des séances, appartenant à cinq délégations nationales au moins, se fondant sur des raisons formelles basées sur (...) les principes énoncés dans l’article 6.2 du Règlement selon lesquels les délégations parlementaires nationales doivent être composées de façon à assurer une représentation équitable des partis ou groupes politiques existant dans leurs parlements et comprendre, en tout état de cause, un membre du sexe sous-représenté désigné en qualité de représentant.»
5. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles doit donc examiner si la composition de la délégation islandaise a méconnu les principes établis par l’article 6.2.a du Règlement de l’Assemblée.
6. Enfin, aux termes de l’article 7.2, «si la commission conclut à la ratification des pouvoirs, elle peut transmettre au Président de l’Assemblée un simple avis dont il donnera lecture en Assemblée plénière ou en Commission permanente, sans que celles-ci en débattent. Si la commission conclut à la non-ratification des pouvoirs ou à leur ratification assortie de la privation ou de la suspension de certains des droits de participation ou de représentation, le rapport de la commission est inscrit à l’ordre du jour pour débat dans les délais prescrits».

2. Conformité de la composition de la délégation parlementaire de l’Islande avec l’article 6.2 du Règlement de l’Assemblée

7. A la suite d’élections législatives, le parlement de l’Islande – l’Alþingi – a présenté les pouvoirs de sa nouvelle délégation à l’ouverture de la partie de session de l’Assemblée de juin 2013. Le rapport du Président de l’Assemblée sur la vérification des pouvoirs des représentants et des suppléants pour la troisième partie de la session ordinaire de 2013 de l'Assemblée (Doc. 13235) montre que la délégation nationale islandaise ne comporte aucune femme en qualité de représentante.

2.1. Pouvoirs des membres de la délégation de l’Islande transmis le 19 juin 2013

8. La délégation parlementaire islandaise se compose, en application des articles 25 et 26 du Statut du Conseil de l'Europe (STE n° 1), de trois représentants et trois suppléants. Le rapport du Président de l’Assemblée sur la vérification des pouvoirs des représentants et des suppléants pour la troisième partie de la session ordinaire de 2013 de l'Assemblée mentionne que la composition de la délégation parlementaire islandaise s’établit de la manière suivante:

Représentants:

Mr Karl GARÐARSON (Progressive Party)

Mr Ögmundur JÓNASSON (Left-Green Movement)

Mr Brynjar NÍELSSON (Independence Party)

Suppléants:

Mr Guðbjartur HANNESSON (Social Democratic Alliance)

Ms Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR (Independence Party)

Ms Jóhanna María SIGMUNDSDÓTTIR (Progressive Party)

9. Après réception des pouvoirs de la délégation islandaise, le Secrétariat de l’Assemblée parlementaire s’est mis en relation avec elle. Aucun courrier n’a été formellement adressé au Président de l’Assemblée pour fournir des éléments d’explication. Toutefois, il a été indiqué au Secrétariat de l’Assemblée, par courrier électronique, que la délégation a été élue (en séance plénière) le 6 juin 2013, sur la base des propositions de nomination des différents partis politiques sans que ceux-ci se soient préalablement consultés, et que le non-respect des conditions fixées par le Règlement de l’Assemblée n’avait été découvert qu’ultérieurement ; les procédures internes en vigueur à l’Alþingi n’ont pas permis d’opérer une modification de la délégation en temps utile avant la partie de session, notamment par impossibilité d’organiser une concertation entre les groupes politiques dans des délais rapprochés. L’assurance a été donnée que les partis politiques concernés pourraient à nouveau délibérer de la composition de la délégation avant la partie de session suivante de l’Assemblée, en octobre 2013.
10. Rappelons également que la mention de ces dispositions réglementaires figure expressément dans le courrier adressé chaque année par le Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire aux présidents des parlements des Etats membres, au début du mois précédant l’ouverture de la nouvelle session, afin que ceux-ci en tiennent compte dans la désignation de leurs délégations.
11. Lors de sa réunion du 24 juin 2013, la commission du Règlement a tenu un échange de vues avec M. Garđarson, président de la délégation islandaise. Celui-ci a confirmé les éléments d’information susmentionnés et a indiqué que la délégation serait modifiée dans les délais pour la partie de session d’octobre 2013 de l’Assemblée.

2.2. Evaluation

12. La contestation des pouvoirs de la délégation islandaise se fonde sur une méconnaissance de la disposition concernant la désignation, en qualité de représentant, au sein d’une délégation d’au minimum un membre du sexe sous-représenté (l’article 6.2.a du Règlement). Au vu de la composition de la délégation figurant ci-dessus, ainsi que du tableau de la représentation des hommes et des femmes au sein du parlement islandais 
			(2) 
			Le Parlement islandais
comporte 25 femmes et 38 hommes. et au sein de la délégation parlementaire, il apparaît clairement que les femmes font partie de la catégorie du sexe sous-représenté.
13. Conformément à l’article 25 du Statut, les membres (représentants et suppléants) d’un Etat membre du Conseil de l'Europe auprès de l’Assemblée sont «élus par [leur] parlement en son sein ou désignés parmi les membres du parlement selon une procédure fixée par celui-ci». Le Règlement établit, par ailleurs, les conditions à satisfaire en matière de composition des délégations ayant trait, notamment, à la représentation équitable des partis ou groupes politiques ou à la désignation des membres du sexe sous-représenté.
14. La délégation visée par la contestation des pouvoirs ne remplit pas, à l’évidence, la condition fixée à l’article 6.2.a d’avoir au sein d’une délégation nationale au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant.
15. Il convient de rappeler la position de principe de l’Assemblée réaffirmée dans sa Résolution 1585 (2007) relative au principe d’égalité des sexes à l’Assemblée parlementaire suivant lequel les parlements nationaux doivent s’assurer que les délégations nationales à l’Assemblée comprennent un pourcentage de femmes au moins égal à celui que comptent leurs parlements nationaux «en se fixant comme objectif une proportion de 30 % au minimum, tout en gardant à l’esprit que le seuil devrait être de 40 %».
16. L’Assemblée a déjà eu à connaître d’une contestation des pouvoirs des délégations de l’Irlande et de Malte, en 2004, au motif que celles-ci ne comportaient pas au moins une femme parmi leurs membres, ce qui constituait une obligation réglementaire à l’époque des faits. L’Assemblée avait alors décidé 
			(3) 
			Voir Doc. 10051, rapport de la commission du Règlement et des immunités
du 27 janvier 2004, et Résolution
1360 (2004). de ratifier les pouvoirs des délégations irlandaise et maltaise en assortissant, toutefois, la ratification d’une suspension de droit de vote des membres des délégations concernées à l’Assemblée et dans ses organes jusqu’à ce que les compositions de ces délégations soient conformes à l’article 6.2.a du Règlement.
17. Dans l’exposé des motifs figurant dans le rapport, la commission du Règlement a considéré qu’il était «excessif de déclarer que l’ensemble de la délégation nationale n’est pas en conformité avec le Règlement et de refuser l’accréditation des pouvoirs de tous les membres», et que «l’Assemblée ne peut sélectionner elle-même lequel des sièges alloués à une délégation parlementaire nationale n’est pas correctement pourvu et ne peut arbitrairement déclarer que les pouvoirs de tel ou tel membre de la délégation concernée ne sont pas ratifiés».
18. Un second précédent est intervenu en janvier 2011, lorsque, à l’ouverture de la session ordinaire de l’Assemblée de 2011, l’Assemblée avait examiné une contestation, pour des raisons formelles, des pouvoirs non encore ratifiés des délégations parlementaires du Monténégro, de Saint-Marin et de la Serbie, reposant sur le même motif, à savoir qu’elles ne comprenaient aucune femme en qualité de représentante. L’Assemblée avait alors adopté la Résolution 1789 (2011), sur la base d’un rapport de la commission du Règlement, par laquelle elle décidait de ratifier les pouvoirs des délégations parlementaires concernées mais de suspendre leurs membres de leur droit de vote à l’Assemblée et dans ses organes à compter du début de la partie de session suivante et jusqu’à ce que la composition de ces délégations soit conforme au Règlement.
19. La commission du Règlement avait alors relevé, dans son rapport 
			(4) 
			Voir Doc. 12488, rapport de la commission du Règlement, des immunités
et des affaires institutionnelles du 24 janvier 2011, paragraphe
23., que, «pour des parlements de petite taille, il peut être difficile de composer des délégations parlementaires qui respectent tous les critères fixés par la Règlement – représentation équitable des partis ou groupes politiques, et représentation des sexes. (…) La commission admet également que les procédures dans certains parlements ne leur permettent pas de modifier la composition de leurs délégations parlementaires aisément, dès lors que ces procédures prévoient la désignation des délégations pour la durée d’une législature, la consultation ou la décision des groupes politiques, ou la nécessaire ratification de la composition en séance plénière».

3. Conclusions

20. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles considère que les pouvoirs de la délégation parlementaire islandaise ont été valablement contestés au motif que la délégation ne comportait pas au moins une femme en qualité de représentant et ce, en méconnaissance à l’article 6.2.a du Règlement.
21. Conformément à l’article 7.3 du Règlement, la commission peut proposer, dans son rapport:
  • la non ratification des pouvoirs de la délégation;
  • la ratification des pouvoirs de la délégation;
  • la ratification des pouvoirs de la délégation, assortie de la privation ou de la suspension de l’exercice par les membres concernés de certains droits de participation ou de représentation en ce qui concerne les activités de l’Assemblée et de ses organes.
22. La commission du Règlement considère que dans le cas dont elle est saisie, il convient d’adopter à l’égard de la délégation concernée la même position que celle qui a prévalu en 2011, en se référant à la Résolution 1789 (2011).
23. En conséquence, et compte tenu des assurances fournies par le Parlement islandais, la commission propose à l’Assemblée de ratifier les pouvoirs de la délégation parlementaire islandaise, mais de prévoir la suspension automatique du droit de vote de leurs membres à l’Assemblée et dans ses organes, conformément à l’article 7.3.c du Règlement, à compter de la partie de session d’octobre 2013 si la composition de la délégation n’a pas été mis en conformité à l’article 6.2.a du Règlement à cette date et de nouveaux pouvoirs présentés, s’agissant de la désignation d’au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant, et jusqu’à ce qu’elle le soit.

Remarques additionnelles

24. La formulation des articles 6.2, 7.1 et 7.2 du Règlement, en ce qu’ils mentionnent la notion de «sexe sous-représenté», serait susceptible d’engendrer une certaine confusion quant à l’interprétation précise que la commission du Règlement pourrait en donner en cas de contestation des pouvoirs dans certains cas de figure. Si le sexe sous-représenté est déterminé sur la base des statistiques de la composition du parlement national et de la délégation, force serait alors de constater qu’une délégation ne comportant que des représentants de sexe masculin et dont toutes les femmes seraient suppléantes, mais issue d’un parlement composé, par exemple, à 70 % de femmes, n’encourrait en aucun cas la sanction prévue à l’article 7… puisque les hommes constituent dans cet exemple le sexe sous-représenté. Il y aurait donc lieu pour la commission de réexaminer le libellé de ces articles, dans le cadre du rapport en cours sur la réforme de l’Assemblée parlementaire.
25. Par ailleurs, l’obligation qui incombe aux délégations d’inclure au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité de représentant pourrait ne pas être respectée par une délégation, sans pour autant que celle-ci encoure une contestation de ses pouvoirs: en effet, une délégation pourrait s’affranchir de cette obligation, au moins temporairement, simplement en ne procédant pas à la nomination de l’intégralité de sa délégation et en pourvoyant partiellement les sièges de représentants – qui le seraient alors uniquement par des hommes. La commission pourrait donc également s’interroger sur cette situation, dans le cadre du rapport susmentionné.