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Résolution 1989 (2014) Version finale

L’accès à la nationalité et la mise en œuvre effective de la Convention européenne sur la nationalité

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 9 avril 2014 (15e séance) (voir Doc. 13392, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: M. Boriss Cilevičs; et Doc. 13438, avis de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, rapporteur: M. Rafael Huseynov). Texte adopté par l’Assemblée le 9 avril 2014 (15e séance).Voir également la Recommandation 2042 (2014).

1. L’Assemblée parlementaire réaffirme l’importance des questions relatives à la nationalité. Ces dernières sont étroitement liées aux droits de l’homme et à l’Etat de droit, et représentent par conséquent une priorité pour le Conseil de l’Europe.
2. L’Assemblée rappelle que le droit à une nationalité, envisagé comme le «droit d’être titulaire de droits», est consacré par plusieurs instruments juridiques internationaux, comme la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Bien que ce droit ne soit pas directement consacré par la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 5), la Convention européenne sur la nationalité (STE n° 166) garantit expressément le droit à une nationalité.
3. L’Assemblée déplore que la Convention européenne sur la nationalité ait été ratifiée uniquement par 20 Etats membres du Conseil de l’Europe, dont la plupart ont également formulé des réserves ou des déclarations. Elle invite par conséquent tous les Etats membres concernés à signer et/ou à ratifier sans tarder la convention, sans réserve ni déclaration restrictive.
4. L’Assemblée considère qu’il convient de prévenir et d’éliminer dès que possible l’apatridie, du fait qu’elle empêche les intéressés de jouir de l’ensemble de leurs droits de l’homme et qu’elle porte atteinte à leur dignité humaine. Elle s’inquiète tout particulièrement du nombre élevé d’apatrides, parmi lesquels figurent des enfants, dans certains Etats membres, et notamment en Lettonie, en Fédération de Russie, en Estonie, ainsi qu’en Ukraine.
5. Afin de prévenir et d’éliminer l’apatridie, l’Assemblée invite les Etats membres, s’ils ne l’ont pas encore fait:
5.1. à signer et/ou à ratifier la Convention des Nations Unies relative au statut des apatrides, de 1954, et la Convention relative à la réduction des cas d’apatridie, de 1961;
5.2. à mettre en œuvre les dispositions de ces deux instruments juridiques, et notamment:
5.2.1. à prévoir des garanties contre l’apatridie dans leur droit interne, notamment en garantissant l’acquisition automatique de la nationalité par les enfants nés sur leur territoire, qui, sans cette mesure, seraient apatrides, ainsi que dans les situations où la perte de la nationalité d’une personne entraînerait son apatridie;
5.2.2. à mettre en place des procédures d’identification de l’apatridie conformes aux lignes directrices du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et à éviter de refuser de reconnaître la qualité d’apatride à une personne dont la situation satisfait à la définition d’un apatride donnée à l’article 1er de la Convention relative au statut des apatrides, notamment par l’adoption de définitions «de substitution» de l’apatridie à l’échelon national;
5.2.3. à adopter une législation qui facilite la reconnaissance de la nationalité par l’enregistrement et/ou la naturalisation simplifiée des apatrides sur leur territoire;
5.2.4. à prévoir un accès à l’information, une aide juridictionnelle gratuite et des voies de recours pour les apatrides désireux d’être naturalisés;
5.2.5. à renforcer les procédures d’enregistrement des naissances, si besoin est, de manière à lever les obstacles à l’enregistrement à la naissance des nouveau-nés, indépendamment de leur situation d’immigration, et à sensibiliser à ces procédures les apatrides et les personnes qui risquent de devenir apatrides;
5.2.6. à reconstituer tout registre d’état civil endommagé, y compris en facilitant la coopération internationale entre les services d’état civil;
5.2.7. à réfléchir à des procédures d’enregistrement obligatoire des nouveau-nés de parents apatrides en qualité de ressortissants du pays où ils naissent, à la seule exception que les parents apportent la preuve de l’acquisition immédiate de la nationalité d’un autre Etat.
6. L’Assemblée estime que la délivrance massive, par la Fédération de Russie, de passeports russes à des personnes vivant à l’extérieur de la Fédération de Russie («passeportisation») est contraire aux principes du Conseil de l'Europe. L’Assemblée partage l’avis rendu par la Commission de Venise concernant les amendements à la loi fédérale sur la défense de la Fédération de Russie (CDL-AD(2010)052) et considère que le fait de justifier les actions militaires d’un Etat membre contre d’autres Etats membres par la nécessité de protéger ses propres citoyens est incompatible avec les normes du Conseil de l'Europe.
7. L’Assemblée constate que la possibilité de pluralité de nationalités est devenue une tendance largement admise au cours de ces dernières décennies, en raison de l’augmentation de la mobilité internationale et des mariages mixtes. Il convient que l’interdiction de la pluralité de nationalités ne soit plus un obstacle à l’intégration de groupes importants de ressortissants étrangers résidents de longue durée. L’abandon de la nationalité d’origine ne devrait pas être une condition préalable indispensable à l’acquisition de la nationalité du pays d’accueil.
8. Par conséquent, l’Assemblée invite les Etats membres:
8.1. à revoir leur politique en matière de nationalité à la lumière des normes de droit international relatives aux questions de nationalité;
8.2. à faciliter l’accès à la nationalité (naturalisation) aux résidents de longue durée, conformément aux principes suivants:
8.2.1. la durée exigée pour satisfaire à la condition de résidence ne doit pas excéder cinq ans;
8.2.2. les frais de procédure et les frais occasionnés par la vérification des connaissances linguistiques et civiques doivent être justifiés et proportionnés;
8.2.3. les décisions relatives à la nationalité doivent être motivées et doivent être susceptibles de recours;
8.2.4. il convient que les conditions de naturalisation et leur application ne soient pas discriminatoires pour des motifs de genre, de race, de religion, d’origine nationale ou ethnique, de langue maternelle ou pour d’autres raisons;
8.3. à ne pas établir de distinction entre leurs citoyens en fonction du mode d’acquisition de leur nationalité, afin d’éviter l’apparition de différentes classes de citoyens.
9. L’Assemblée appelle la Fédération de Russie à cesser la délivrance massive de passeports russes dans d’autres Etats membres.
10. L’Assemblée invite les Etats membres à intensifier la coordination de leurs politiques relatives aux questions de nationalité dans les domaines susceptibles de concerner les intérêts de plusieurs Etats, comme les obligations militaires des ressortissants, la protection diplomatique ou les droits de vote des titulaires de plusieurs nationalités, ou encore l’établissement de documents d’état civil ou de pièces d’identité.