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Résolution 1997 (2014) Version finale
Migrants et réfugiés, et la lutte contre le sida
1. Le droit à la santé est un droit
fondamental de l’être humain. De par son universalité, le droit
à la santé s’applique à toutes et à tous, y compris les migrants,
quel que soit leur statut. L’accès aux soins est un élément essentiel
du droit à la santé.
2. Les migrants, y compris les demandeurs d’asile et les réfugiés,
constituent un groupe particulièrement vulnérable au virus de l’immunodéficience
humaine (VIH). Leur taux d’infection élevé est dû à la situation épidémiologique
qui prévaut dans leur pays d’origine et aux difficultés que les
migrants rencontrent pour accéder aux informations concernant le
virus et au traitement de ce dernier une fois qu’ils vivent en Europe.
3. L’Assemblée parlementaire est préoccupée par le fait que les
migrants sont confrontés à de multiples formes de discrimination
et de stigmatisation lorsqu’ils sont dépistés positifs pour le VIH/sida.
Certains pays vont jusqu’à leur refuser l’entrée sur leur territoire
ou le renouvellement de leur titre de séjour. L’Assemblée est également
préoccupée par les politiques qui exigent un dépistage obligatoire
du VIH et par les dépistages qui sont effectués sans le consentement
des migrants concernés.
4. Divers facteurs dissuadent trop souvent les migrants d’accéder
aux services de prévention et de traitement. Ceux-ci peuvent être
liés à des obstacles linguistiques, culturels et sociaux, et à des
difficultés pour accéder au marché de l’emploi, aux services sociaux
et à un logement. Les contraintes financières représentent également
un facteur important lorsque les Etats font payer le dépistage et
le traitement du VIH. En outre, les migrants en situation irrégulière
sont confrontés à un autre problème: ils craignent que leur statut vis-à-vis
des services d’immigration ne soit signalé s’ils prennent contact
avec les autorités sanitaires. L’ensemble de ces facteurs conduit
soit à un phénomène de non-recours ou de recours tardif aux soins,
soit à une impossibilité d’y accéder, ce qui pourrait avoir des
implications catastrophiques pour la santé au plan tant individuel
que public, tout en conduisant, à long terme, à une augmentation
des dépenses de santé.
5. L’Assemblée note que la plupart des pays européens ne disposent
pas de données et d’informations suffisantes sur la transmission
du VIH parmi les migrants. Elle note également une absence de soutien psychologique
ainsi qu’une information et une éducation insuffisantes des migrants
concernant le dépistage, le traitement et les pratiques sexuelles
sans risques, ce qui peut de contribuer à la transmission du virus.
6. L’Assemblée est convaincue que toutes les personnes, y compris
les migrants en situation régulière et irrégulière, vivant avec
le VIH/sida dans les Etats membres du Conseil de l’Europe devraient
bénéficier d’un accès gratuit au traitement. L’Assemblée estime
que cette mesure est dans l’intérêt des personnes séropositives
et du système de santé publique dans son ensemble car elle réduit
le risque de transmettre le virus à d’autres ainsi que les coûts
élevés du traitement d’urgence et d’autres traitements.
7. L’Assemblée considère qu’un migrant séropositif ne devrait
jamais être expulsé s’il apparaît clairement qu’il ne recevra pas
les soins de santé et l’assistance nécessaires dans le pays vers
lequel il sera renvoyé. Le fait d’expulser cette personne reviendrait
à la condamner à mort.
8. L’Assemblée considère que, compte tenu du nombre de migrants,
y compris les réfugiés et les demandeurs d’asile, qui vivent en
Europe avec le VIH, et des difficultés particulières qu’ils rencontrent,
il est nécessaire de prendre un certain nombre de mesures spéciales
concernant ce groupe vulnérable.
9. L’Assemblée demande donc aux Etats membres de faire en sorte
que les programmes et les services de traitement du VIH à destination
des migrants soient assurés dans une mesure appropriée et suffisante,
et plus particulièrement:
9.1. en
ce qui concerne les mesures législatives:
9.1.1. de revoir
et de réviser leur législation dans le but de supprimer les dispositions discriminatoires
et les obstacles juridiques qui entravent les mesures préventives
et le traitement des migrants atteints du VIH/sida;
9.1.2. de retirer les dispositions du droit national qui empêchent
les migrants séropositifs d’entrer sur le territoire ou qui prévoient
leur expulsion uniquement du fait de leur statut sérologique;
9.1.3. d’inclure dans le droit national la notion de protection
des étrangers gravement malades, en leur garantissant une protection
contre l’expulsion lorsque aucun traitement adapté n’est disponible
dans le pays où la personne doit être renvoyée ou lorsqu’un tel
traitement n’y est pas réalistement accessible pour la personne
concernée compte tenu de sa situation personnelle;
9.1.4. de disposer qu’aucune personne ne devrait être détenue
uniquement en raison de son statut sérologique;
9.1.5. d’adopter des dispositions antidiscriminatoires concernant
tous les migrants séropositifs et de veiller à ce que des instances
spécialisées s’assurent de leur respect;
9.2. en ce qui concerne l’accès au dépistage, au traitement
et aux mesures préventives:
9.2.1. de veiller à ce que des
politiques de prévention et de traitement du VIH distinctes selon le
sexe soient élaborées aux niveaux national et international;
9.2.2. d’assurer l’accessibilité pour les migrants aux informations
concernant la prévention, le dépistage et le traitement du VIH;
9.2.3. de garantir aux migrants un dépistage volontaire et anonyme
du VIH;
9.2.4. de faire en sorte que tous les migrants, qu’ils soient
en situation régulière ou irrégulière, bénéficient d’un accès gratuit
et universel au dépistage du VIH et à des conseils en la matière, ainsi
qu’à une éducation sexuelle et des programmes de sensibilisation
sur la prévention du VIH/sida;
9.2.5. de veiller à ce que les groupes vulnérables parmi les
migrants, plus particulièrement les femmes, les enfants, les hommes
ayant des rapports sexuels avec des hommes et les professionnels
du sexe, qui sont particulièrement exposés à l’infection, reçoivent
une attention particulière;
9.2.6. de s’assurer que les besoins des réfugiés et des demandeurs
d’asile sont pris en compte, compte tenu des traumatismes qu’ils
ont pu vivre et qu’ils continuent de subir;
9.2.7. de faire en sorte que les médicaments et le traitement
du VIH soient financièrement accessibles et disponibles pour tous
les migrants porteurs du virus, et que le secteur privé, y compris
les entreprises pharmaceutiques, soit totalement mobilisé pour apporter
des réponses efficaces dans la lutte contre l’épidémie de VIH;
9.2.8. de dissocier leur politique de l’immigration de celle
de la santé, le cas échéant en supprimant l’obligation faite aux
professionnels de santé de signaler des migrants en situation irrégulière;
9.3. en ce qui concerne les mesures politiques:
9.3.1. d’adopter
des plans nationaux de lutte contre le VIH/sida ou, le cas échéant,
de les réviser en y incluant une partie spécifique sur les migrants,
avec la contribution des personnes touchées par le virus et en consultation
avec les représentants de la société civile;
9.3.2. de consacrer davantage de fonds aux services VIH/sida
dans les pays à faible et à moyen revenu par le biais des politiques
de coopération et de développement des Etats membres;
9.3.3. d’allouer des fonds supplémentaires et de renforcer le
soutien aux représentants de la société civile qui travaillent avec
les migrants séropositifs.