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Résolution 2020 (2014) Version finale
Les alternatives au placement en rétention d’enfants migrants
1. L’Assemblée parlementaire est très
préoccupée de constater que le placement en rétention d’enfants migrants
est un phénomène croissant dans les Etats membres du Conseil de
l’Europe. Malgré des améliorations dans la législation et la pratique
de certains pays européens, des dizaines de milliers d’enfants migrants
finissent encore chaque année en rétention. Cette pratique est contraire
à l’intérêt supérieur de l’enfant et constitue une violation manifeste
de ses droits.
2. Des enfants migrants sont fréquemment placés en rétention
dans des Etats membres pour la simple raison qu’ils ne sont pas
en possession des bons documents d’immigration. Ils n’ont commis
aucun crime. Pourtant, ils encourent des sanctions pénales, risquent
de se retrouver dans des conditions de type carcéral, d’être privés
du soutien et de la protection de leur famille et de se voir dénier
plusieurs droits fondamentaux, comme l’accès à la santé et à l’éducation,
et le droit de jouer.
3. L’Assemblée rappelle sa position exprimée dans sa Résolution 1810 (2011) «Problèmes
liés à l'arrivée, au séjour et au retour d'enfants non accompagnés
en Europe», selon laquelle les mineurs non accompagnés ne devraient
jamais être placés en rétention. Le placement d’enfants en rétention
en raison de leur situation ou de celle de leurs parents au regard
des règles d’immigration est contraire à l’intérêt supérieur de
l’enfant et constitue une violation de ses droits tels que définis
par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant.
4. L’Assemblée s’alarme en particulier des conséquences graves
que la rétention, même de très courte durée et dans des conditions
relativement humaines, peut avoir à plus ou moins long terme sur
la santé physique et mentale des enfants. Les enfants migrants placés
en rétention sont particulièrement exposés aux effets négatifs du
placement en rétention et peuvent être gravement traumatisés. Il
existe également un risque élevé que les enfants placés en rétention
fassent l’objet de différentes formes de violence.
5. En plus d’être privés de leur liberté, les enfants migrants
en rétention sont fréquemment privés d’autres droits fondamentaux,
comme le droit au regroupement familial, le droit d’accès à l’éducation
et le droit à des soins de santé de qualité adéquate.
6. L’Assemblée se félicite des solutions alternatives au placement
en rétention d’enfants migrants promues par certains pays européens.
Lorsqu’elles sont correctement appliquées, ces solutions sont plus
efficaces, coûtent moins cher et protègent mieux les droits et la
dignité des enfants; elles privilégient la qualité des retombées
en termes de santé et de bien-être pour les enfants migrants.
7. L’Assemblée constate avec satisfaction que plusieurs Etats
membres, dont la Belgique, le Danemark, la France, la Hongrie, l’Irlande,
l’Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, ont pris des mesures pour
mettre fin au placement d’enfants migrants en rétention. Dans ces
pays, les enfants migrants ne sont pas placés en rétention ou, si
cela se produit, des dispositions législatives, politiques ou pratiques
prévoient leur remise en liberté.
8. Cependant, bien que la législation de la plupart des Etats
membres prévoie la mise en place de solutions alternatives à la
rétention, la majorité d’entre eux ne les appliquent pas dans les
faits.
9. L’Assemblée considère qu’il est urgent de mettre fin au placement
en rétention d’enfants migrants, ce qui nécessite des efforts concertés
de la part des autorités nationales concernées. En conséquence, l’Assemblée
appelle les Etats membres:
9.1. à
reconnaître qu’il n’est jamais dans l’intérêt supérieur d’un enfant
d’être placé en rétention en raison de son statut ou de celui de
ses parents, au regard de la législation sur l’immigration;
9.2. à introduire dans la législation l’interdiction du placement
en rétention d’enfants pour des raisons relatives à l’immigration,
lorsque cela n’a pas encore été fait, et à veiller à la pleine application
de la législation dans les faits;
9.3. à s’abstenir de placer en rétention administrative des
mineurs non accompagnés ou séparés;
9.4. à veiller à ce que les enfants soient traités avant tout
comme des enfants et que les personnes qui se déclarent mineures
soient traitées comme telles jusqu’à preuve du contraire;
9.5. à développer des procédures d’évaluation de l’âge adaptées
aux enfants migrants;
9.6. à poursuivre leurs efforts pour mettre leur législation
sur les étrangers en conformité avec les meilleures pratiques internationales,
tout en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant tel que consacré
par l’article 3 de la Convention des Nations Unies relative aux
droits de l’enfant et en favorisant diverses formes d’alternatives
à la rétention reconnues au niveau international;
9.7. à adopter des alternatives à la rétention qui répondent
à l’intérêt supérieur de l’enfant et permettent aux enfants de rester
avec leur famille et/ou tuteur dans un cadre non carcéral, au sein
de la collectivité, en attendant que la question de leur statut
au regard de la législation sur l’immigration soit résolue;
9.8. à fournir les ressources nécessaires pour développer des
alternatives au placement en rétention d’enfants migrants;
9.9. à s’efforcer d’élaborer et de mettre en œuvre des programmes
alternatifs à la rétention des enfants et de leur famille non privatifs
de liberté, au sein de la collectivité, en s’appuyant sur le «modèle d'évaluation
de la communauté et de placement adapté à l'enfant» (Child-sensitive
Community Assessment and Placement (CCAP) Model);
9.10. à sensibiliser tous les agents publics, notamment la police,
les procureurs et les juges chargés des affaires d’immigration,
aux normes internationales des droits de l’homme, en insistant sur
les droits de l’enfant et les alternatives à la rétention;
9.11. à diffuser les meilleures pratiques sur les alternatives
à la rétention d’enfants migrants dans tous les Etats membres;
9.12. à encourager la collaboration entre les gouvernements
des Etats membres, le Conseil de l’Europe, les agences des Nations
Unies, les organisations intergouvernementales et les organisations de
la société civile pour mettre fin à la rétention d’enfants migrants
et mettre en œuvre des alternatives non privatives de liberté, au
sein de la collectivité, à la rétention des enfants et de leur famille.