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Rapport | Doc. 13666 | 12 janvier 2015

Le changement d’affiliation politique postélectoral des membres et ses répercussions sur la composition des délégations nationales

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteur : M. Jordi XUCLÀ, Espagne, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 13125, Renvoi 3944 du 22 avril 2013. 2015 - Première partie de session

Résumé

Le changement d’affiliation politique d’un parlementaire – ou d’un groupe de parlementaires – au cours de son mandat électif national, également appelé «nomadisme politique», est un phénomène courant dans de nombreux parlements nationaux en Europe. Il reste toutefois sous-estimé dans son ampleur et peu étudié dans ses conséquences sur le fonctionnement de l’institution parlementaire.

Lorsqu’il concerne des membres de l’Assemblée parlementaire, le changement d’affiliation politique au courant d’une législature est susceptible d’influer sur l’équilibre de la représentation politique au sein des délégations nationales à l’Assemblée et servir de fondement à une contestation des pouvoirs.

Compte tenu de la grande diversité des positions et de l’approche réglementaire en la matière, le présent rapport ne vise pas à déterminer si le changement d’affiliation politique constitue ou non un droit des parlementaires – inhérent à la nature de leur mandat – ou doit être autorisé ou au contraire interdit. En revanche, afin de privilégier l’exigence de transparence, d’intégrité, de responsabilité et de confiance qui fonde le contrat qui lie l’élu aux citoyens, il convient de promouvoir une meilleure prise en compte du phénomène du changement d’affiliation politique et de ses conséquences au niveau des parlements nationaux. La même démarche doit prévaloir au niveau des groupes politiques de l’Assemblée.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 12 décembre
2014.

(open)
1. Le changement d’affiliation politique d’un parlementaire – ou d’un groupe de parlementaires – au cours de son mandat électif national est un phénomène courant dans de nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe.
2. Dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, le mandat impératif étant prohibé, le parlementaire a la libre disposition de son mandat. Pour autant, le mandat constitue un contrat moral entre les électeurs et l’élu autour des principes, des valeurs et des opinions défendues dans son programme électoral. Le changement d’affiliation politique postélectoral soulève donc des interrogations et des critiques – notamment de nature déontologique et morale – mettant en cause l’opportunisme politique, l’éventuelle perte de confiance des citoyens envers la classe politique ou la discipline interne des partis.
3. Outre ces critiques d’ordre général, le passage postélectoral de parlementaires d’un groupe politique à un autre ou leur retrait d’un groupe en vue de siéger en tant que membres indépendants emportent des conséquences sur le fonctionnement de l’institution parlementaire. Lorsqu’il s’agit de membres de l’Assemblée parlementaire, de tels faits sont susceptibles d’influer sur l’équilibre de la représentation politique au sein des délégations nationales à l’Assemblée.
4. L’Assemblée constate l’extrême hétérogénéité, au niveau national, des positions face au phénomène du nomadisme politique, ainsi que des réglementations qui s’appliquent dans les parlements nationaux; elle relève que dans la grande majorité des Etats – ainsi qu’à l’Assemblée elle-même – il n’existe pas de réglementation juridique régulant expressément le changement d’affiliation politique en cours de mandat. Elle considère dès lors qu’il n’y a pas lieu de déterminer si le changement d’affiliation politique doit être formellement autorisé ou au contraire interdit.
5. L’Assemblée rappelle que, aux termes de l’article 6.2 de son Règlement, la représentation équitable des forces politiques existantes dans les parlements nationaux est une condition de validité des délégations nationales à l’Assemblée. Or, de nombreux parlements nationaux, en application de leur réglementation interne ou d’une pratique bien établie, procèdent à la désignation de délégations dans les assemblées interparlementaires pour la durée complète de la législature. Les changements qui interviennent dans la composition des groupes politiques au courant d’une législature, y compris les changements d’affiliation partisane, peuvent affecter la représentativité des délégations nationales et servir de fondement à une contestation des pouvoirs.
6. En conséquence, dans le but de renforcer la transparence et l’effectivité de ses procédures, l’Assemblée invite les parlements nationaux à prendre dûment en compte les changements d’affiliation politique de leurs membres de nature à modifier la représentativité de leurs délégations:
6.1. avant l’ouverture de chaque session ordinaire de l’Assemblée, en transmettant des pouvoirs qui tiennent compte de toute modification intervenue dans la composition des groupes politiques et l’équilibre des forces politiques entre la majorité et l’opposition, en indiquant les dispositions réglementaires et la procédure qui s’appliquent à la désignation de délégations et à la distribution des sièges au sein des délégations, ainsi que les références et la date de la décision de nomination, et en communiquant les statistiques à jour de la répartition des groupes politiques représentés au parlement;
6.2. en cours de session, en informant la présidence de l’Assemblée de tout changement intervenu dans l’affiliation politique de ses membres.
7. L’Assemblée constate que, dans tous les Etats membres, prévaut la règle générale que le parlementaire ayant changé d’appartenance politique en cours de législature conserve son siège. Elle considère toutefois qu’il importe de prendre en considération les principes de transparence, d’intégrité, de responsabilité et de confiance sur lesquels se fonde le contrat qui lie l’élu aux citoyens.
8. En conséquence, l’Assemblée invite les parlements nationaux:
8.1. à lancer une réflexion approfondie sur le changement d’affiliation politique des parlementaires, afin de déterminer l’opportunité d’adopter ou non des mesures restreignant le changement de groupe politique, par l’interdiction de rejoindre un autre groupe parlementaire – pour le restant de la législature ou pour une certaine durée – et l’obligation de siéger comme non-inscrit/indépendant, ou la perte de certains droits de participation et de représentation;
8.2. à réviser leur réglementation interne si celle-ci ne comporte pas déjà des dispositions spécifiant la possibilité ou l’interdiction du changement d’affiliation politique, les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique et d’une suspension, exclusion ou démission d’un membre de son groupe politique;
8.3. à tenir compte des changements d’affiliation politique en cours de législature dans la composition des organes parlementaires et leurs présidences; à déterminer ou clarifier les règles et procédures déterminant les conséquences pour les groupes politiques et leurs membres, notamment en termes de participation et de représentation dans les organes parlementaires, des modifications intervenues en cours d’année dans leur composition; et à résoudre tout différend éventuel entre les groupes par le dialogue.
8.4. à promouvoir des règles déontologiques spécifiques en matière d’intégrité des membres, le cas échéant en complétant les lois ou codes de conduite ou d’éthique existants, afin de prévenir et de sanctionner certains actes de corruption comme l’achat ou la vente de votes, ou l’achat d’un parlementaire pour qu’il change de groupe;
8.5. à établir un registre des changements d’affiliation de leurs membres, précisant notamment les raisons du changement.
9. S’agissant de prendre en compte au niveau des groupes politiques à l’Assemblée les conséquences de changements d’affiliation politique au sein des délégations nationales, mais également de promouvoir une plus grande transparence des affiliations, l’Assemblée invite les groupes politiques à l’Assemblée:
9.1. à compléter leur statut ou règlement intérieur, le cas échéant:
9.1.1. afin d’y rendre plus explicites les valeurs et principes qui fondent le groupe et les objectifs qu’il promeut;
9.1.2. afin d’y inclure des dispositions spécifiant la procédure, les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique, et d’une suspension, exclusion ou démission d’un membre;
9.2. à établir un registre des changements d’affiliation de leurs membres au niveau national, ainsi qu’à l’Assemblée;
9.3. à inviter les partis politiques nationaux affiliés à promouvoir dans leur réglementation interne des règles spécifiques établissant les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique et d’une suspension, exclusion ou démission d’un membre.
10. Afin de promouvoir ses recommandations, l’Assemblée décide d’établir un dialogue actif et constructif avec les parlements des Etats membres du Conseil de l’Europe, ainsi qu’avec les parlements bénéficiant du statut d’observateur et de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée, dont la réglementation ne répond pas de manière adéquate aux enjeux soulevés par le changement d’affiliation postélectoral de leurs membres.

B. Exposé des motifs, par M. Xuclà, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Par «changement d’affiliation politique postélectoral», on entend le fait qu’un parlementaire ou un groupe de parlementaires change d’affiliation politique au niveau national pendant son mandat électoral. Ce phénomène, également connu sous l’appellation de «nomadisme politique», est courant dans de nombreux parlements d’Etats membres du Conseil de l’Europe.
2. Le changement d’affiliation politique n’est pas un phénomène récent; il existe depuis plusieurs décennies dans de nombreux pays d’Europe et dans le reste du monde. Parfois rare, il n’est jamais totalement absent et varie dans le temps. Pourtant, malgré l’importance de ce phénomène sur tous les continents 
			(2) 
			Ainsi, en Australie,
de 1950 à 2004, 245 membres du parlement ont changé d’affiliation,
soit 24 % de l’ensemble des membres du parlement ayant siégé au
cours de la période. Reg Wright, sénateur de 1950 à 1978, a changé
d’affiliation à 150 reprises!, il suscite peu d’intérêt, notamment de la part des acteurs de la vie politique et parlementaire, de sorte que son ampleur et son intensité restent sous-estimées 
			(3) 
			Citons
ici le rapport «Nomadisme ou transhumance politique postélectoral
et discipline de parti dans l’espace francophone» de l’Assemblée
parlementaire de la Francophonie (APF) (2012), qui comporte des
informations sur la pratique du nomadisme parlementaire dans 23
parlements francophones, membres de l’APF..
3. Lorsqu’ils se produisent, de tels faits soulèvent critiques et interrogations – notamment sur les plans déontologique et moral – mettant en cause l’opportunisme politique, la perte de confiance des citoyens envers la classe politique ou la discipline interne des partis. Dans un rapport de 2009, la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) du Conseil de l’Europe soulignait pourtant l’importance de l’indépendance du mandat des parlementaires, de la liberté d’opinion et de la liberté de ne pas être soumis à un «mandat impératif» 
			(4) 
			Rapport de la Commission
européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise)
sur le mandat impératif et les pratiques similaires, Etude n° 488/2008,
CDL-AD(2009)027.. Ces mêmes principes figurent au nombre des normes promues par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) 
			(5) 
			Voir le document du
Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de
l’OSCE (OSCE/ BIDDH) sur les «Engagements en faveur des élections
démocratiques dans les pays de l’OSCE», 2003, en application de l’engagement
figurant au paragraphe 7.9 du Document de la conférence sur la dimension
humaine de la CSCE (dit document de Copenhague, 1990), qui stipule
que les Etats «veilleront à ce que les candidats qui obtiennent
le nombre nécessaire de voix requis par la loi soient dûment investis
de leur fonction, et qu’il leur soit permis de conserver celle-ci jusqu’à
ce que leur mandat arrive à expiration ou qu’il y soit mis un terme
pour toute autre raison d’une manière prescrite par la loi conformément
à des procédures parlementaires et constitutionnelles démocratiques».
Il en découle que tout autre motif que l’incompatibilité du mandat
avec une autre fonction n’est pas admissible, en particulier lorsqu’il
porte atteinte à la liberté politique ou la liberté d’opinion: tel
est le cas si un parti cherche à retirer le mandat d’un de ses membres
qui a quitté le parti après son élection, ou si un Etat reconnaît
aux partis le droit de contrôler les mandats remportés sous leur
étiquette., en application des critères de Copenhague.
4. En dehors de ces critiques d’ordre général, le passage postélectoral de membres de l’Assemblée parlementaire d’un groupe politique à un autre ou leur retrait d’un parti en vue de siéger en tant que députés indépendants sont susceptibles d’influer sur l’équilibre de la représentation politique au sein des délégations nationales à l’Assemblée.
5. Le Règlement de l’Assemblée (article 6.2.a) dispose que les parlements nationaux doivent nommer leurs représentants et suppléants parmi leurs membres en veillant à la représentation équitable des partis ou groupes politiques qui y sont représentés. A cet égard, le changement d’affiliation politique postélectoral peut aussi affecter la composition des délégations nationales auprès de l’Assemblée parlementaire et servir de fondement à une contestation des pouvoirs de délégations concernées. La proposition de résolution renvoyée à la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles pour rapport suggère donc d’analyser les raisons qui conduisent au changement d’affiliation politique ainsi que ses répercussions sur le fonctionnement des parlements en vue de «compléter les critères posés par le Règlement en ce qui concerne la représentation équitable des partis ou groupes politiques au sein d’une délégation nationale» 
			(6) 
			Voir Doc. 13125, proposition de résolution relative au changement d’allégeance
politique postélectoral des membres et son implication sur la composition
d’une délégation nationale, présentée par M. Gross et plusieurs
de ses collègues, 31 janvier 2013..
6. Pour obtenir des informations de première main sur les dispositions et les statistiques existantes concernant ce phénomène, un questionnaire a été envoyé en novembre 2013 aux correspondants des parlements nationaux via le Centre européen de recherche et de documentation parlementaires (CERDP) 
			(7) 
			Requête
n° 2417 du 8 novembre 2013.. Les questions portaient essentiellement sur les points suivants: dispositions constitutionnelles, législatives et réglementaires qui régissent le changement d’affiliation politique postélectoral, mécanismes de contrôle interne, garanties existantes au niveau parlementaire, et exemples récents de membres ayant changé d’affiliation politique au cours de leur mandat et réaction de l’opinion publique.
7. Quarante réponses au questionnaire ont été reçues émanant de 36 parlements nationaux 
			(8) 
			Allemagne
(Bundestag et Bundesrat), Andorre, Autriche, Belgique (Chambre des
Représentants et Sénat), Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Canada, Croatie,
Chypre, Danemark, Espagne (Congrès des Députés), Estonie, Finlande,
France (Assemblée nationale), Géorgie, Grèce, Hongrie, Irlande,
Israël, Italie (Sénat), Lituanie, Luxembourg, Monténégro, Pays-Bas
(Seconde Chambre), Norvège, Pologne (Sejm et Sénat), Portugal, Roumanie
(Chambre des députés), Royaume-Uni (Chambre des Communes et Chambre
des Lords), Serbie, République slovaque, Slovénie (Assemblée nationale),
Suède, Suisse, République tchèque (Chambre des députés) et Ukraine.. Les informations globales et détaillées ainsi obtenues ont permis de se faire une idée précise sur la façon dont cette question est gérée en interne, sur les évolutions récentes et sur les principaux problèmes à résoudre. Ces informations nous permettent en outre d’examiner si les règles visant à d’assurer une représentation équitable des partis et groupes politiques au sein des délégations nationales sont toujours pertinentes.

2. Le phénomène du changement d’affiliation politique dans les Etats membres du Conseil de l’Europe

8. Les exemples de changement d’affiliation politique dans les Etats membres du Conseil de l’Europe ne manquent pas. Dans certains pays politiquement instables, on enregistre souvent de forts pourcentages de changement d’affiliation, par exemple en Grèce et en Italie, où, entre 1996 et le printemps 2000, un député sur quatre a changé de parti au moins une fois 
			(9) 
			William B. Heller et
Carol Mershon, «Dealing in Discipline: Party Switching and Legislative
Voting in the Italian Chamber of Deputies, 1988-2000» in American Journal of Political Science,
2008.; c’est aussi le cas dans les jeunes démocraties comme la Hongrie, la Roumanie et la République tchèque. Parmi les exemples récents, citons la Roumanie, où 35 parlementaires ont changé d’affiliation au cours de l’actuelle législature (soit 8 %), et la République tchèque, où 12 % de l’ensemble des parlementaires, soit 24, ont fait de même pendant la législature 2010-2013 
			(10) 
			Informations datant
de janvier 2014.. En Ukraine, le phénomène a pris de telles proportions – 60 % des parlementaires auraient changé de parti politique au moins une fois entre la 3e et la 4e législatures (1998-2002 et 2002-2006), certains ayant même changé de groupe une dizaine de fois – que le législateur a pris des mesures pour mettre un terme à cette pratique 
			(11) 
			Une loi est venue en
2004 modifier la Constitution pour y introduire une disposition
sur le retrait du mandat d’un député qui fait défection du groupe
ou du parti politique au titre duquel il a été élu; la Cour constitutionnelle
a déclaré cette loi inconstitutionnelle en 2010..
9. A l’inverse, dans les démocraties plus anciennes comme la Norvège et la Suède, ces événements sont très rares. Ainsi, en Norvège, les deux dernières législatures n’ont pas connu de changement d’affiliation politique, tandis qu’en Suède, au cours de la législature actuelle, un cas seulement a été signalé.
10. On pourrait avancer qu’un Etat est plus ou moins prédisposé aux changements d’affiliation selon sa stabilité ou instabilité politique et la force ou la faiblesse de ses institutions. Ces paramètres peuvent aussi expliquer pourquoi, à la suite d’une période de troubles internes et de volatilité politique, tel pays jusqu’ici non sujet à ce phénomène affiche des taux plus élevés de changement d’affiliation politique. C’est en particulier le cas de la Grèce. Si, dans le passé, les changements d’affiliation n’y étaient pas très courants, ils se sont anormalement multipliés en raison de la crise économique et des tensions qui en ont résulté. Ainsi, depuis le début de la législature actuelle (à savoir 2012), 15 députés ont déjà changé d’affiliation. Cela étant, il est peu probable que ce phénomène se cantonne aux nouvelles démocraties ou aux démocraties faiblement institutionnalisées, car de nombreux autres paramètres influencent ce choix.

3. Les raisons qui motivent le changement d’affiliation politique

11. Sur la base des informations réunies, plusieurs paramètres expliquent la décision de certains législateurs de changer de parti: considérations idéologiques et électorales, ambition politique, achat de voix. Autrement dit, ce choix résulte en règle générale d’interactions de nature stratégique entre les parlementaires, les dirigeants des partis politiques, les différents partis, les systèmes législatifs et les systèmes de partis ainsi que l’électorat 
			(12) 
			William B. Heller et
Carol Mershon, Political Parties and
Legislative Party Switching, Palgrave McMillan, 2009..
12. Lorsqu’un membre quitte son parti politique ou en est exclu, trois choix se présentent à lui: s’inscrire en tant que membre indépendant/non inscrit, rejoindre un autre groupe politique ou créer un nouveau groupe. Il va de soi que, au-delà de ce que les règles parlementaires permettent ou non en la matière (voir chapitre 4), les raisons qui sont à l’origine de la situation de changement d’affiliation vont influencer ce choix.

3.1. Raisons idéologiques

13. Dans la plupart des cas, le changement de parti résulte d’un désaccord avec la ligne, les principes, les valeurs ou le projet politique du parti, voire le dirigeant du parti. Lorsque le règlement du parlement ne l’interdit pas, les parlementaires «nomades» seront alors davantage portés à créer leur propre groupe politique, ou à rejoindre un autre groupe idéologiquement plus proche.
14. Les exemples suivants illustrent ce constat:
  • En 2008, José Paulo de Carvalho, membre du groupe parlementaire portugais CD-SPP (Centre Démocratique Social–Parti Populaire), a quitté son groupe en invoquant de profondes divergences concernant la stratégie politique générale du parti et la capacité de ce dernier à répondre aux demandes pressantes de la société. Conformément au règlement de l’Assemblée de la République, il a par la suite siégé en qualité de membre non inscrit.
  • En République tchèque, en 2012, suite à un scandale de corruption impliquant le chef du parti «Affaires publiques» et à la sortie du parti de la coalition au pouvoir, 14 membres ont quitté le groupe parlementaire, certains d’entre eux pour créer un nouveau parti soutenant la majorité au pouvoir (tout en siégeant à la chambre en qualité d’indépendants, conformément au règlement).
  • En France, la scission du groupe UMP à l’Assemblée nationale en novembre 2012, suite à la bataille pour la présidence du parti – 70 membres de l’UMP ont créé un nouveau groupe «Rassemblement-UMP» (mais ont rejoint à nouveau le groupe UMP en janvier 2013) constitue un cas à part où il est sans doute moins question d’idéologie que de divergences personnelles.
  • En 2013, trois membres du Parlement andorran ont quitté le groupe social-démocrate, et on rejoint le «groupe parlementaire mixte» (c’est-à-dire les non-inscrits), conformément au règlement, tout en constituant un nouveau parti politique.
  • Au Canada, les sept changements d’affiliation au cours de la présente législature relèvent de divergences idéologiques, ou d’une réaction à l’encontre d’un dirigeant de parti mis en cause dans un scandale.

3.2. Exclusion

15. Outre le fait que des législateurs puissent expressément choisir de changer de parti, le changement d’affiliation peut aussi résulter de la décision d’un parti d’exclure un ou plusieurs de ses membres. Cet aspect particulier touche à la réglementation interne du parti et à ses mécanismes disciplinaires, qui sont activés en cas de comportement perturbateur, de violation de la discipline du parti, de désaccord avec la ligne ou le dirigeant du parti, ou de vote contre la ligne du parti.
16. Le 2 juin 2011, le groupe parlementaire chypriote du Parti démocratique (DIKO), qui appartenait alors à la coalition gouvernementale, a décidé d’exclure l’un de ses membres, en l’occurrence M. Zacharias Koulias. Cette exclusion a été causée par le refus de M. Koulias de voter en faveur de la réélection du dirigeant du parti DIKO à la présidence de la Chambre. Cette décision a soulevé un tollé au sein du parti, également parce que la décision de M. Koulias de ne pas soutenir la candidature de son parti a été déterminante pour l’élection du président de la Chambre et a modifié, in fine, l’équilibre des pouvoirs en son sein.
17. En Finlande, au cours de la législature actuelle, l’Alliance de gauche, qui fait partie de la coalition gouvernementale, a exclu deux de ses représentants, M. Markus Mustajärvi et M. Jyrki Yrttiaho, qui ont ensuite constitué leur propre groupe parlementaire de sensibilité de gauche. Ces deux membres ont été exclus après avoir voté contre l’élection du Premier ministre et s’être rangé aux côtés de l’opposition lors du vote de confiance au gouvernement concernant le débat sur le programme gouvernemental.
18. Le Royaume-Uni fournit plusieurs exemples de membres de la Chambre des Communes exclus de leur groupe politique; tel est le cas au cours de la présente législature dans le cadre du scandale des dépenses parlementaires (ainsi, un membre suspendu du groupe travailliste en 2010 est devenu indépendant, avant d’être réintégré en 2012 dans le groupe, puis à nouveau en être exclu quelques mois plus tard face à de nouvelles charges), ou à l’encontre de membres confrontés à des poursuites pénales.
19. Ces différents cas soulèvent plusieurs questions quant à l’équilibre entre l’exercice libre du mandat électoral par les parlementaires et leur subordination à la ligne de leurs partis respectifs. Comment les partis contrôlent-ils l’exercice du mandat politique? Dans quelle mesure ce contrôle doit-il être considéré comme légitime?
20. Les réglementations dépendent des partis et varient selon les pays. Toutefois, quasiment aucun Etat membre du Conseil de l’Europe ne sanctionne le départ d’un parlementaire de son parti, ni le vote contre la ligne du parti, par la perte du siège parlementaire. La discipline partisane ne saurait remettre en cause le principe de libre disposition du mandat… et, inversement, rares sont les parlementaires prompts au suicide politique. De nombreux partis ont néanmoins fixé des règles en matière de suspension et d’exclusion. Il pourrait être souhaitable de conserver ces mécanismes destinés à protéger le système de partis dans certaines limites (voir également le chapitre 5).

3.3. Stratégie politique, profit personnel, pot-de-vin

21. L’opportunisme constitue la dernière explication au nomadisme parlementaire, et met en exergue les ambitions et buts personnels. Dans ce cas, le changement n’est rien d’autre que le résultat d’une stratégie, à savoir le calcul d’un profit personnel en termes d’ambition ou de gains d’influence politique ou le résultat d’une corruption, à savoir une rétribution financière ou autre en échange d’un changement d’affiliation.
22. La décision de quitter un parti pour en rejoindre un autre peut relever d’une stratégie globale de «survie» politique, en particulier à l’approche d’une échéance électorale. Ainsi, à l’approche des élections législatives de 2014 en République de Moldova, par vagues successives les membres du Parti des Communistes de la République de Moldova ont rejoint le Parti des Socialistes de la République de Moldova ou le nouveau parti, «Patria». Dans les démocraties récentes où le système parlementaire est encore faible et le système de partis volatile, on observe que la loyauté au parti s’efface devant l’intérêt personnel. Le membre d’un parti politiquement fragilisé sera tenté de vouloir rejoindre la majorité au pouvoir. Ainsi, à l’issue des élections législatives de 2012 en Géorgie, neuf parlementaires du Mouvement national uni ont fait défection pour rejoindre le bloc rival «Rêve géorgien» (alors qu’un élu «Rêve géorgien» est devenu indépendant).
23. Il est probable que la corruption des partis politiques constitue un problème majeur dans les pays en développement ou en transition, où les institutions politiques s’avèrent plutôt faibles. Mais dans un contexte plus général, la corruption des responsables politiques a aussi pour effet de saper la confiance de l’opinion dans la politique et de menacer la pérennité de la démocratie.
24. Un exemple est fourni par l’accusation portée contre l’ex-premier ministre italien, Silvio Berlusconi, pour corruption de l’ex-sénateur Sergio de Gregorio. M. Berlusconi a été accusé d’avoir versé, en 2007, 3 millions d’euros à Sergio de Gregorio – alors membre du parti de centre-gauche d’Antonio di Pietro «Italia dei Valori» – en vue de l’amener à changer d’affiliation politique. Le passage de M. de Gregorio au centre-droit a contribué à renverser le gouvernement de Romano Prodi, ce qui a provoqué une nouvelle élection, remportée par M. Berlusconi. Sergio de Gregorio ayant coopéré avec les enquêteurs, il a été condamné à 20 mois de prison, tandis que le procès de M. Berlusconi est toujours en cours.

4. Les effets du changement d’affiliation politique

4.1. Sur la situation et le statut des parlementaires concernés

25. Contrairement à ce qui a cours dans certains pays situés hors de l’Europe 
			(13) 
			C’est
la Constitution qui prévoit qu’un parlementaire perd son siège en
cas de démission, de changement d’affiliation ou d’exclusion d’un
parti ou groupe politique au Belize, en République kirghize, en
Namibie, au Népal, au Nigéria, aux Seychelles, au Sierra Leone,
à Singapour et au Zimbabwe. Des législations «anti-défection» existent
dans un plus grand nombre de pays, par exemple au Bangladesh, en
Inde, au Pakistan, et dans plusieurs Etats africains tels que la République
d’Afrique du Sud, le Cameroun, le Ghana, le Malawi ou l’Ouganda., dans aucun Etat membre du Conseil de l’Europe n’existe la possibilité de révoquer, en cours de législature, le mandat d’un parlementaire qui change d’affiliation politique 
			(14) 
			En Serbie, jusqu’en
2003, la loi électorale disposait que la démission d’un député de
son parti politique ou son exclusion de celui-ci entraînait la révocation
de son mandat. Voir également la note de bas de page 12.. Pour autant, de nombreux pays ont pris des mesures destinées à décourager cette pratique et à réduire la fragmentation des partis. Ainsi, il existe dans plusieurs Etats membres une obligation des parlementaires de siéger dans le groupe politique du parti au titre duquel ils ont été élus (Autriche, Belgique, République tchèque, Estonie, entre autres).
26. Le Portugal fait ici figure d’exception: en vertu de l’article 8 du Statut des membres de l’Assemblée de la République, les parlementaires qui adhèrent à un parti politique autre que celui sous la bannière duquel ils ont été élus perdent leur siège de député. Bien que les règles constitutionnelles ne soient pas explicites à ce sujet, les experts portugais soutiennent que les membres qui changent de groupe parlementaire doivent aussi perdre leur siège, même s’ils n’adhèrent pas à un parti autre que celui auquel ils appartenaient au moment de l’élection. Cela étant, pour garantir la liberté fondamentale des députés et du parlement, les membres qui, de leur plein gré ou par choix de leur parti, quittent un groupe politique sans en rejoindre un autre ne perdent pas leur siège, mais deviennent «non affiliés».
27. En Estonie, la réglementation sur ce sujet est assez proche: lorsqu’un député quitte son groupe, il n’est officiellement pas en mesure d’en rejoindre un autre, car le règlement intérieur dispose que les membres du Riigikogu issus de la liste de candidats d’un même parti politique ne peuvent former qu’un seul groupe. Autrement dit, en cas de changement d’affiliation, les membres concernés deviennent indépendants.
28. Lorsqu’un membre quitte son groupe politique, il pourrait en théorie avoir le choix de s’inscrire en tant que membre indépendant, de rejoindre un autre groupe politique qui représente mieux ses convictions, ou de créer un nouveau groupe. Or, les règles varient considérablement d’un pays à l’autre; certains, par exemple, interdisent le changement de groupe politique pendant une législature, les parlementaires qui souhaitent changer d’affiliation étant alors obligés d’exercer leur mandat en tant que membre non inscrit/indépendant (par exemple en Belgique, en Bosnie-Herzégovine, en Bulgarie et en Estonie). Les cas de membres rejoignant le groupe des indépendants sont donc très fréquents.
29. De même, la procédure parlementaire peut aussi permettre la création, en cours de législature, de nouveaux groupes parlementaires. Ce fut le cas du groupe «Ensemble pour la Serbie», créé en 2012 par un courant dissident composé de sept membres du Parti démocratique serbe. La seule limite imposée par le règlement serbe est que les groupes parlementaires doivent compter au minimum cinq membres.
30. Toutefois, la création d’un nouveau groupe peut être subordonnée à des conditions restrictives, requérant généralement un nombre minimal de membres (parfois un nombre supérieur à celui requis pour les groupes constitués en début de législature comme en République tchèque; ce minimum requis n’existe pas en Finlande où un groupe peut ne comprendre qu’un seul membre). En Autriche, la création d’un groupe n’est possible que dans les 30 jours suivant l’ouverture de la législature.
31. De nouveaux groupes peuvent aussi résulter de la fusion ou de la scission de partis existants. Dans le premier cas, plusieurs groupes fusionnent en une nouvelle entité; dans le second, la désintégration d’un groupe conduit à la création de deux ou plusieurs groupes distincts.
32. Des législations anti-défection en Europe ont instauré des mesures pour sanctionner le choix de changement d’affiliation politique en cours de législature. En règle générale, ces mesures sont les suivantes:
  • obligation pour le parlementaire concerné de s’inscrire sous l’étiquette «indépendant» ou non-inscrit (par exemple en Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie et Estonie);
  • perte de certains droits de participation et de représentation et de privilèges (aides financières et représentation dans les commissions notamment) et réduction de ses pouvoirs.
33. Dans l’ensemble, les lois anti-défection sévères sont rares dans les démocraties anciennes, mais fréquentes dans les démocraties plus récentes, lesquelles font souvent valoir qu’elles constituent des mesures temporaires destinées à consolider un système de partis chaotique 
			(15) 
			Kenneth
Janda, Laws against Party Switching, Defecting, or Floor-Crossing
in National Parliaments, Northwestern University, 2009..
34. En Irlande, les députés qui quittent un parti parlementaire et deviennent indépendants se voient habituellement réduire leur temps de parole au Dáil, qu’il s’agisse des affaires émanant du gouvernement ou des députés. En outre, ils n’ont plus accès aux ressources du groupe parlementaire tels travaux de recherche ou service de presse.
35. En Suède, les députés qui quittent un groupe en cours de législature ne peuvent ni former un nouveau groupe ni en rejoindre un autre au cours de la même législature. Rien ne les empêche toutefois de former un groupe-parti informel, qui n’a pas de statut officiel et ne bénéficie d’aucune subvention financière ou autre avantage.
36. Dans la plupart des parlements, le changement de groupe entraîne la perte de toutes les fonctions dans les organes parlementaires (commissions, délégations auprès des organisations internationales, etc.) détenues au titre de l’ancien groupe politique (Autriche, Bulgarie), soit automatiquement, soit sur décision de l’Assemblée/Chambre ou des commissions (Croatie). Dans certains cas, le parlementaire concerné perd de plein droit ses fonctions de membre de commission (Andorre, France). Dans d’autres, il peut toutefois conserver son siège en commission mais en perdant ses fonctions de président ou de vice-président de commission (Canada).
37. Cette mesure a en général un caractère automatique, mais elle suppose parfois une décision formelle du parlement. Ainsi, le député Josip Salapić (Croatie) ayant quitté l’Union démocratique croate en 2012 et étant devenu, le même jour, membre de l’Alliance démocratique croate de Slavonie et Baranja, a perdu toutes ses fonctions représentatives, alors qu’un autre député, Mirela Holy, ayant quitté le parti social-démocrate en 2013, a pu conserver ses fonctions d’abord en tant qu’indépendante, puis comme membre du groupe du développement durable.
38. D’autres parlements ont une réglementation plus souple: au Danemark, le parlementaire conserve son siège en commission mais perd toute fonction de président ou de vice-président.
39. Les parlementaires qui changent d’affiliation politique sont non seulement soumis à des restrictions internes, mais doivent aussi faire face à l’électorat. En règle générale, la population voit ces changements d’un mauvais œil, la frustration du public à cet égard étant des plus manifestes lorsque les députés agissent dans le but de réaliser un profit personnel. En revanche, les cas de changement d’affiliation motivés par des divergences idéologiques sont plus acceptables. Quoi qu’il en soit, ces députés doivent faire face à une perte de crédibilité et risquent davantage de ne pas être réélus.

4.2. Sur la situation des groupes politiques

40. Les groupes politiques qui connaissent des défections peuvent rencontrer diverses difficultés en fonction de l’étendue du phénomène. Parmi les répercussions principales, citons le risque de sous-représentation, voire de disparition, la réduction des contributions et aides financières et la perte d’influence politique dans les organes parlementaires.
41. La sous-représentation a une incidence sur les groupes qui, en vertu du règlement intérieur, doivent compter un nombre minimal de membres pour exister. En Belgique, les groupes politiques de la Chambre doivent compter au minimum cinq membres. Lorsqu’un groupe ne peut plus prétendre à cette qualification, ses membres peuvent soit rejoindre un autre groupe existant soit continuer de siéger en tant que membres indépendants. Dans cette dernière hypothèse, ils sont soumis à des restrictions supplémentaires, notamment le retrait de leurs droits de vote dans les commissions parlementaires.
42. En Andorre également, un groupe politique qui passe en dessous du seuil minimal est automatiquement dissous et ses membres rejoignent le groupe parlementaire mixte (c’est-à-dire les non-inscrits).
43. La République tchèque a également mis en place une limitation en ce qui concerne la création de nouveaux groupes politiques en cours de législature: les groupes doivent compter dix membres au minimum, contre seulement trois en début de législature. D’autres restrictions prévoient que les groupes politiques récemment constitués ne sont pas autorisés à être représentés proportionnellement dans les organes de la Chambre (sauf s’il en est décidé autrement par vote en plénière) et que la contribution publique continue d’appartenir au parti politique sur la liste duquel le député figurait au moment de l’élection.

4.3. Sur la composition des organes parlementaires

44. Le changement de groupe politique affecte aussi les organes parlementaires, telles les commissions dont la composition s’établit en règle générale à la proportionnelle des groupes, les fonctions à la tête de ces organes étant également attribuées sur la base de l’appartenance à un groupe.
45. S’agissant des sièges dans les organes parlementaires (commissions, délégations dans les organisations internationales, etc.) attribués sur la base de la représentation proportionnelle des groupes:
  • soit le groupe politique ayant perdu un ou des membres du fait d’un changement d’affiliation conserve les sièges, cette distribution ne pouvant faire l’objet d’une révision pendant toute la durée de la législature (Belgique, sauf en cas de disparition du groupe ou de division du groupe en deux);
  • soit la composition des organes est modifiée pour tenir compte du changement d’affiliation d’un ou de membres, soit de manière automatique (Bulgarie) soit sur décision de l’Assemblée/Chambre ou des commissions (Croatie, Chypre, Estonie, Finlande, République tchèque);
  • soit la composition des organes n’est pas modifiée, à l’exception des présidences ou vice-présidences de commission.
46. A Chypre, lorsqu’un changement d’affiliation politique se produit, la commission de sélection de la Chambre des représentants décide des changements à apporter à la composition des commissions. En règle générale, la participation des membres aux commissions n’est pas modifiée; cependant, si le membre concerné était officiellement désigné par le parti pour occuper une fonction officielle – président d’une commission, porte-parole parlementaire, membre d’une délégation parlementaire auprès d’une organisation internationale, etc. –, le parti lance une procédure de nomination et nomme un nouveau membre.
47. Au Luxembourg, en vertu de son règlement, la Chambre des Députés décide, sur proposition de la Conférence des Présidents, du nombre de sièges à attribuer, commission par commission, aux groupes politiques et aux membres indépendants, de manière proportionnelle. Les changements d’affiliation politique sont relativement rares au Luxembourg et il n’existe pas de dispositions écrites régissant la réorganisation des commissions parlementaires. C’est pourquoi ces questions sont examinées au cas par cas par la Conférence des Présidents. Récemment, il a été décidé que les députés devaient conserver leur siège dans les commissions auxquelles ils participaient avant leur changement d’affiliation.
48. En République slovaque, les députés qui changent d’affiliation politique conservent normalement leur siège. Cela étant, quatre commissions – la commission des mandats et des immunités, la commission sur l’incompatibilité de fonctions, la commission des affaires européennes et la commission des affaires constitutionnelles et juridiques – doivent obligatoirement être constituées sur la base du principe de proportionnalité et les membres qui changent d’affiliation politique sont tenus de renoncer à leur qualité de membre.

4.4. Sur le fonctionnement institutionnel global

49. Le changement d’affiliation d’un grand nombre de parlementaires est susceptible d’entraîner des conséquences d’un tout autre ordre de mesure, pouvant même conduire un Etat à l’instabilité politique. Ainsi, en février 2014, le Parti national libéral roumain a quitté le gouvernement de coalition et rejoint l’opposition. Cet événement a marqué la dissolution officielle de l’Union sociale-libérale de coalition, qui regroupait le PNL et le PSD (Parti social-démocrate). Le Premier ministre roumain social-démocrate, Victor Ponta, est néanmoins parvenu à assurer la continuité du gouvernement de gauche grâce à la participation de l’UDMR, le parti ethnique hongrois.
50. En Albanie, en 2013, la défection d’un seul membre de l’opposition qui a rejoint la coalition parlementaire et gouvernementale au pouvoir, a permis à celle-ci de disposer des 84 sièges nécessaires à l’adoption de lois exigeant une majorité qualifiée des trois cinquièmes des députés au parlement.

5. Réglementer le problème: des approches nationales hétérogènes

51. Il ressort de ce qui précède des différences majeures en matière de réglementation concernant le changement d’affiliation politique en Europe. Il convient de souligner que dans certains pays, en général les démocraties stables, le changement d’affiliation politique, peu répandu, n’est pas perçu comme un problème; dans d’autres pays en revanche, cette pratique est prise davantage au sérieux, car le nombre de défections est si élevé qu’il menace la stabilité institutionnelle et la représentation politique. Les pays européens peuvent être classés selon leur degré plus ou moins élevé de réglementation dans ce domaine. Trois systèmes ont ainsi été mis en évidence: strictement réglementé, modérément réglementé et sous-réglementé.

5.1. Systèmes strictement réglementés

52. Cette catégorie comprend les pays dont la législation encadre de façon systématique le phénomène du changement d’affiliation politique, dont les dispositions sont, en règle générale, les plus sévères et où ce phénomène est normalement très fréquent. Les meilleurs exemples sont l’Autriche, l’Espagne et la Hongrie.
53. Dans le passé, en Autriche, le changement d’affiliation politique de membres isolés survenait de temps à autre, mais la situation a radicalement changé en 2012 avec la création d’un nouveau parti et la démission de membres du Conseil national de leur groupe parlementaire pour le rejoindre et créer un nouveau groupe politique. A la suite de cet événement, le Conseil national a, en juin 2013, décidé de modifier son règlement de telle sorte qu’il n’est aujourd’hui possible de constituer un groupe parlementaire que pendant les 30 jours qui suivent la séance constituante de la chambre nouvellement élue. De plus, les députés qui étaient candidats sur la même liste ne sont autorisés à former qu’un seul et même groupe parlementaire. Les possibilités de changement d’affiliation postélectoral des députés sont aujourd’hui plus limitées, deux solutions seulement s’offrant à eux: devenir des parlementaires non affiliés à un groupe ou à un parti, ou rejoindre un groupe existant. Le règlement dispose en outre que les groupes parlementaires décident des nominations et des fonctions occupées par leurs membres dans les commissions; en conséquence, lorsqu’un membre quitte son groupe parlementaire, celui-ci invalide immédiatement les appartenances et les fonctions du membre en question.
54. En vertu des dispositions en vigueur en Hongrie, les membres qui quittent leur groupe ou qui en sont exclus doivent être considérés comme indépendants; ce n’est que six mois après leur départ qu’ils peuvent éventuellement rejoindre un autre groupe. S’agissant de la participation aux organes parlementaires, l’Assemblée nationale a le droit, pendant sa séance constituante, de dresser la liste des commissions ainsi que le nombre de leurs vice-présidents et de leurs membres, sur la base d’un consensus entre les différents groupes parlementaires. Le nombre de membres délégués par chaque groupe aux commissions permanentes est déterminé au prorata de l’effectif du groupe. En cas de changement d’affiliation politique, il incombe au groupe concerné de décider si le député peut ou non continuer de siéger à la commission.
55. En Espagne, le transfert d’un groupe parlementaire à un autre est accepté à condition qu’il survienne au cours des cinq premiers jours d’une session, cette règle ne s’appliquant pas au groupe mixte. Si, au cours d’une législature, l’effectif d’un groupe parlementaire passe à moins de la moitié du minimum requis pour la constitution d’un groupe, le groupe en question est dissous et ses membres rejoignent automatiquement le groupe mixte. S’agissant de la participation des parlementaires aux commissions, le changement d’affiliation politique entraîne aussi la perte de certains privilèges, notamment la fonction de président, de vice-président ou de porte-parole dans les commissions et autres organes parlementaires.

5.2. Systèmes modérément réglementés

56. Sont considérés comme modérément réglementés tous les systèmes qui disposent d’une réglementation sur cette question, mais qui s’appuient essentiellement sur des mécanismes non contraignants ou donnent lieu à des examens au cas par cas.
57. Au Danemark, un changement d’affiliation politique n’a pas d’incidence sur la participation d’un membre à des commissions pendant l’année parlementaire où ce changement intervient, étant donné que les commissions sont établies en début d’année. Cela étant, les présidents ou vice-présidents qui changent d’affiliation politique perdent souvent leur poste. S’agissant des membres ordinaires qui siègent dans des commissions et changent d’affiliation politique, ils ne participent de nouveau à des commissions que si le parti qu’ils représentent désormais compte suffisamment de membres pour être représenté dans des commissions.
58. En République slovaque, mis à part les quatre commissions qui doivent être constituées sur la base du principe de proportionnalité et dont les membres doivent renoncer à leur siège en cas de changement d’affiliation politique, les députés qui changent d’affiliation conservent leur qualité de membre dans les organes parlementaires. Cela étant, si le membre concerné est président ou vice-président de commission, il ne perd pas son siège ex lege, mais en application d’une pratique politique selon laquelle le parlement met au vote la révocation de son mandat et l’élection d’un nouveau président.
59. En Croatie, à la suite d’un changement d’affiliation politique d’un parlementaire, la commission des élections, des nominations et de l’administration élabore et soumet à l’Assemblée, après examen approfondi, un projet de décision concernant la révocation du mandat du membre de l’organe de travail et la nomination d’un nouveau membre. Le projet de décision est ensuite examiné en session plénière, laquelle décide in fine si le parlementaire en question peut ou non rester membre des mêmes organes de travail.

5.3. Systèmes sous-réglementés

60. Dernière catégorie, les systèmes sous-réglementés peuvent être définis comme ceux dans lesquels les litiges sont pour l’essentiel résolus non par des normes et des réglementations, mais par la conciliation et le dialogue. On les trouve habituellement dans les pays où les changements d’affiliation politique sont quasiment inexistants.
61. En Suède, les nominations au parlement restent valables pour la totalité de la législature. Un député qui quitte son groupe a donc le droit de continuer de siéger dans les mêmes commissions. Cela étant, en règle générale, les membres indépendants abandonnent de leur plein gré leur siège pour ne pas rompre l’équilibre politique dans les travaux des commissions.
62. En Norvège, un député a le droit de changer de parti politique en cours de législature, mais cette possibilité n’est pas expressément réglementée par une disposition, car elle est vue comme une conséquence du fait que le mandat appartient personnellement au député. S’agissant du maintien de la participation à des commissions parlementaires, la situation n’est pas non plus expressément réglementée, mais fait souvent l’objet d’une négociation avec le parti politique.
63. Une pratique quasi identique existe en Finlande, où la Constitution ne prévoit rien en ce qui concerne la réorganisation des organes en cours de législature. Les décisions sont entièrement du ressort de la session plénière et du Conseil du président, qui peuvent faire des propositions à ce sujet. Cela étant, en pratique, ces questions sont généralement réglées par la négociation, ce qui permet d’éviter de reconstituer l’organe concerné.

6. Implications du changement d’affiliation politique de ses membres pour l’Assemblée parlementaire

6.1. Dispositions réglementaires existantes

64. Le Règlement de l’Assemblée parlementaire ne régit pas expressément le changement d’affiliation politique de ses membres pendant leur mandat électoral. Il fait néanmoins référence au caractère équitable de la représentation politique, comme condition de validité des pouvoirs présentés par les délégations nationales, qui peut in fine fournir une raison de contester ceux-ci.
65. L’article 6.2.a dispose que «les délégations parlementaires nationales doivent être composées de façon à assurer une représentation équitable des partis ou groupes politiques existant dans leurs parlements». Parallèlement, en vertu de l’article 7, les pouvoirs des délégations nationales peuvent être contestés en Assemblée au motif spécifique que la composition des délégations concernées ne répond pas aux exigences d’une représentation équitable. A cet égard, en 2011, l’Assemblée a adopté des principes visant à apprécier la notion de représentation équitable des partis ou groupes politiques dans les délégations nationales à l’Assemblée parlementaire (Résolution 1798 (2011) sur la représentation équitable des partis ou groupes politiques des parlements nationaux au sein de leurs délégations à l’Assemblée parlementaire) 
			(16) 
			A
ce titre, il est demandé aux parlements, en matière de désignations,
de prendre des décisions «équitables, à savoir honnêtes, impartiales,
justes, correctes, non discriminatoires»..
66. Il n’en demeure pas moins que ces dispositions n’intègrent pas la problématique du changement d’affiliation politique au sein des délégations nationales.

6.2. Conséquences du changement d’affiliation politique nationale sur le fonctionnement de l’Assemblée parlementaire

67. Les pouvoirs des délégations nationales sont ratifiés à l’ouverture de la session ordinaire et pour la durée de celle-ci (un an). Lorsqu’un membre d’une délégation change de groupe politique dans son parlement en cours d’année, il n’est pas rare que celle-ci souhaite procéder à la modification de sa composition, en général à la demande de l’ancien groupe politique du parlementaire concerné, qui souhaite pourvoir le siège par un autre de ses membres. Or, tant le Statut du Conseil de l’Europe (STE no 1) (article 25) que le Règlement de l’Assemblée (article 11.4) ne prévoient la possibilité de procéder à de nouvelles désignations en cours d’année que pour pourvoir des sièges vacants par suite de décès ou de démission.
68. Tel a été le cas de M. Michel Hunault (France, GDE) en 2010, qui a quitté son parti politique national mais s’est maintenu dans la délégation alors que celui-ci souhaitait pourvoir à son remplacement. On citera également M. Yusuf Ziya Irbeç, membre de la délégation turque, qui a démissionné de son groupe politique en mars 2011 mais qui est resté membre de la délégation jusqu’à la ratification par l’Assemblée d’une nouvelle délégation en octobre 2011, nonobstant les dispositions du règlement de la Grande Assemblée nationale turque qui prévoient que la démission du groupe entraîne ipso facto celle des délégations auquel le membre appartient.
69. En janvier 2012, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Ukraine ont été contestés, en vertu de l’article 7, au motif que la composition de la délégation ne satisfaisait pas au critère de représentation équitable des partis ou groupes politiques. De fait, la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles avait relevé que la liste des membres de la délégation ukrainienne contenait des informations trompeuses sur l’affiliation politique de trois membres, qui étaient inscrits comme membres du Bloc Ioulia Timochenko alors qu’ils siégeaient en réalité au parlement sous d’autres étiquettes politiques 
			(17) 
			Voir l’Avis de la commission
au Président de l’Assemblée parlementaire (AS/Pro (2012) 03 def).
Les trois membres concernés avaient été exclus en 2010 du groupe
BYUT-Batkivshchnyna en raison de leur collaboration avec la majorité proprésidentielle;
deux d’entre eux n’étaient membres d’aucun groupe ni d’aucune faction
et le dernier avait rejoint le Parti des Régions, qui appartenait
à la majorité parlementaire. 
			(17) 
			Sur la base des critères
énoncés dans la Résolution 1798
(2011) de l’Assemblée sur la représentation équitable des partis
ou groupes politiques des parlements nationaux au sein de leurs
délégations à l’Assemblée parlementaire, la commission du Règlement
a conclu que les pouvoirs de la délégation parlementaire ukrainienne
devaient néanmoins être ratifiés.. La commission du Règlement a noté que l’insécurité juridique pesant sur le fonctionnement des institutions parlementaires ukrainiennes – groupes de parlementaires quittant un bloc pour un autre; création en 2010 et 2011 de deux groupes de députés; parlementaires devenus indépendants, mais faisant plus ou moins officieusement cause commune avec la majorité – ainsi que la difficulté à obtenir des données fiables concernant le nombre exact de parlementaires affiliés à des formations d’opposition, ne lui ont pas permis d’évaluer dans quelle mesure les critères énoncés dans le Règlement de l’Assemblée en matière de représentation politique équitable avaient été satisfaits.

6.3. Conséquences du changement d’affiliation à un groupe politique de l’Assemblée parlementaire sur le fonctionnement de celle-ci

70. Le changement d’affiliation à un groupe politique au sein de l’Assemblée parlementaire n’est pas rare. On se souviendra ainsi que l’ensemble des parlementaires français membres de l’UMP avait massivement quitté le groupe GDE en janvier 2004, pour rejoindre le groupe PPE/DC. Plus récemment, en juin/juillet 2014, le groupe GDE (devenu depuis CE) a pris la decision de suspendre ses membres russes et d’exclure deux parlementaires italiens de la Lega Nord – tous ayant rejoint les rangs des non-inscrits.
71. Il va de soi que si le départ volontaire ou l’exclusion d’un membre isolé ne constitue en soi pas un obstacle au bon fonctionnement de l’Assemblée (par exemple, M. Remigijus Ačas, membre de la délégation lituanienne, était affilié au GDE entre 2008 et 2011, puis à l’ADLE en 2013-2014), le départ massif de parlementaires d’un groupe de l’Assemblée pour un autre soulève des questions bien spécifiques, notamment parce que le nombre de membres affiliés à un groupe conditionne la dotation budgétaire qui lui est versée ainsi que la répartition des postes dans les bureaux des commissions, le nombre de sièges à pourvoir dans trois commissions (commission de suivi, commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, et, à partir de janvier 2015, commission sur l’élection des juges à la Cour européenne des droits de l’homme) et la position sur la liste des orateurs en séance plénière.
72. En juillet 2014, le rapporteur a adressé un questionnaire aux groupes politiques de l’Assemblée afin d’évaluer plus précisément l’ampleur du phénomène du changement d’affiliation politique au sein des délégations nationales et ses répercussions sur les groupes, et de connaître les règles internes que les groupes étaient susceptibles d’appliquer dans les cas en cause.
73. Les réponses fournies par les secrétariats des groupes établissent qu’il n’existe aucune règle formelle spécifique régulant le changement d’affiliation politique. D’une manière générale, on observe que les règlements intérieurs et statuts des groupes politiques de l’Assemblée déterminent davantage les conditions d’affiliation, que la suspension et l’exclusion du groupe 
			(18) 
			Seul
le statut du Groupe socialiste à l’Assemblée dispose que tout membre
du groupe pourra être provisoirement suspendu s’il «va plusieurs
fois à l’encontre du comportement décidé par le Groupe», et il pourra
en être exclu s’il «continue à aller à l’encontre du comportement
décidé par le Groupe». Les règlements intérieurs des groupes PPE/DC, ALDE
et CE (anciennement GDE et dont le règlement est en cours de révision)
ne contiennent aucune disposition régissant la suspension, l’exclusion
ou la démission du groupe, que ce soit du point de vue de la procédure,
des conditions ou des conséquences. Rappelons, enfin, que le groupe
GUE n’a pas de règlement intérieur formel. . De même, tous les groupes ne tiennent pas de registre en la matière, ni de statistiques. Les décisions de changement d’affiliation politique des membres, pour des raisons idéologiques ou autres – qu’il s’agisse de la démission d’un parti national adhérent ou de l’affiliation à un autre groupe politique de l’Assemblée –, ou du changement d’adhésion d’un parti national à un groupe politique, font l’objet d’un examen par les groupes au cas par cas.

7. Conclusions et propositions

74. La commission du Règlement a examiné de manière approfondie le phénomène du nomadisme politique dans les parlements nationaux en Europe, l’ampleur du changement d’affiliation politique au sein des délégations nationales de l’Assemblée, ses conséquences éventuelles pour la composition des délégations nationales ainsi que les dispositions qui régissent le fonctionnement de l’Assemblée en la matière.
75. La commission constate l’extrême hétérogénéité au niveau national des positions face au phénomène du nomadisme politique – et plus encore des réglementations existantes, qui sont complexes et varient grandement d’un Etat à l’autre. Le présent rapport ne vise donc pas à déterminer si le changement d’affiliation politique constitue ou non un droit des parlementaires – inhérent à la nature de leur mandat – ou doit être autorisé ou au contraire interdit. En revanche, il entend promouvoir une plus grande prise en compte du phénomène au niveau des parlements nationaux, mais également au niveau des groupes politiques de l’Assemblée parlementaire.
76. Ainsi, les parlements nationaux sont invités:
  • à lancer une réflexion approfondie sur le changement d’affiliation politique des membres, afin de déterminer l’opportunité d’adopter des mesures restreignant le changement de groupe politique;
  • à réviser leur réglementation interne si celle-ci ne comporte pas déjà des dispositions spécifiant la possibilité ou l’interdiction du changement d’affiliation politique, ainsi que les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique;
  • à tenir compte des changements d’affiliation politique en cours de législature dans la composition des organes parlementaires et leurs présidences; à déterminer ou clarifier les règles et procédures déterminant les conséquences pour les groupes politiques et leurs membres, notamment en termes de participation et de représentation dans les organes parlementaires, des modifications intervenues en cours d’année dans leur composition;
  • à promouvoir des règles déontologiques spécifiques en matière d’intégrité des membres, afin de prévenir et de sanctionner certains actes de corruption comme l’achat ou la vente de votes, ou l’achat d’un parlementaire pour qu’il change de groupe;
  • à établir un registre des changements d’affiliation de leurs membres.
77. S’agissant de prendre en compte au niveau des groupes politiques de l’Assemblée parlementaire les conséquences du changement d’affiliation politique, la commission considère qu’il serait souhaitable que les groupes politiques mettent en œuvre les propositions suivantes:
  • compléter leur statut ou règlement intérieur, le cas échéant, afin d’y rendre plus explicites les valeurs et principes qui fondent le groupe et les objectifs qu’il promeut, et d’y inclure des dispositions spécifiant la procédure, les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique, d’une suspension, d’une exclusion ou d’une démission d’un membre;
  • établir un registre des changements d’affiliation de leurs membres au niveau national, ainsi qu’à l’Assemblée;
  • inviter les partis politiques nationaux affiliés à promouvoir dans leur réglementation interne des règles spécifiques établissant les conditions et les conséquences d’un changement d’affiliation politique, d’une suspension, d’une exclusion ou d’une démission d’un membre.
78. La commission considère, en outre, qu’il n’y a pas lieu de modifier le Règlement de l’Assemblée ou d’élaborer une réglementation pararéglementaire spécifique pour traiter le problème à son niveau. Toutefois, les parlements nationaux sont appelés à prendre dûment en compte les changements d’affiliation politique de leurs membres de nature à modifier la représentativité de leurs délégations:
  • avant l’ouverture de chaque session annuelle de l’Assemblée, en transmettant des pouvoirs qui tiennent compte de toute modification intervenue dans la composition des groupes politiques et l’équilibre des forces politiques entre la majorité et l’opposition;
  • en cours de session, en informant la présidence de l’Assemblée de tout changement intervenu dans l’affiliation politique de ses membres.