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Résolution 2038 (2015) Version finale

La protection des témoins: outil indispensable pour la lutte contre le crime organisé et le terrorisme en Europe

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 30 janvier 2015 (9e séance) (voir Doc. 13647, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: M. Arcadio Díaz Tejera). Texte adopté par l’Assemblée le 30 janvier 2015 (9e séance).Voir également la Recommandation 2063 (2015).

1. L’Assemblée parlementaire, se référant à sa Résolution 1784 (2011) sur la protection des témoins: pierre angulaire de la justice et de la réconciliation dans les Balkans, réaffirme qu’une protection fiable et durable doit être garantie aux témoins qui défendent la vérité et la justice, notamment une aide juridique et psychologique et une solide protection physique avant, pendant et après le procès.
2. L’Assemblée rappelle que les témoins peuvent être particulièrement vulnérables aux menaces et à l’intimidation, réelles ou supposées, dont leurs proches ou eux-mêmes font l’objet de la part des auteurs d’actes criminels, surtout lorsqu’il s’agit de criminalité organisée ou de terrorisme.
3. Les dépositions des témoins sont primordiales pour le bon fonctionnement de la justice pénale dans tout Etat respectueux de l’Etat de droit. Elles sont essentielles à l’efficacité de l’enquête et des poursuites engagées à l’encontre de la criminalité organisée et du terrorisme, car elles contribuent au démantèlement de puissantes structures criminelles, y compris celles à caractère transnational.
4. La criminalité organisée à forte implantation transnationale a augmenté en Europe en raison de la mondialisation, de la suppression des contrôles aux frontières dans l’espace Schengen et de l’évolution des nouvelles technologies de communication. Les témoins qui ont besoin d’être protégés ne sont plus seulement les victimes ou les témoins d’actes criminels, mais aussi les criminels eux-mêmes. Sans la coopération des «collaborateurs de justice», qui connaissent de l’intérieur les structures criminelles, il serait difficile, voire impossible de mener efficacement des enquêtes sur les infractions graves et de démanteler les structures criminelles. C’est la raison pour laquelle des mesures de protection des témoins perfectionnées, notamment les «programmes de protection des témoins», qui impliquent la réinstallation, voire le changement d’identité du témoin ou du collaborateur de justice, ont été élaborées au cours de ces vingt dernières années.
5. Plusieurs instruments juridiques internationaux appellent les Etats à prendre les mesures qui s’imposent pour protéger efficacement les témoins contre les actes éventuels de représailles ou d’intimidation et à renforcer la coopération internationale dans ce domaine. La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et la Convention des Nations Unies contre la corruption règlent cette question dans les affaires de criminalité organisée transnationale et de corruption. Au sein du Conseil de l’Europe, les dispositions relatives à la protection des témoins figurent dans la Convention pénale sur la corruption (STE no 173), la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197), le Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (STE no 182) et les Recommandations du Comité des Ministres no R (97) 13 sur l’intimidation des témoins et les droits de la défense, Rec(2001)11 concernant les principes directeurs pour la lutte contre le crime organisé et Rec(2005)9 relative à la protection des témoins et des collaborateurs de justice.
6. L’Assemblée observe que, dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme, bien que le Conseil de l’Europe ait déjà fait une promotion active des mesures et des programmes de protection des témoins, leur mise en œuvre connaît d’importantes disparités. Alors que certains Etats membres ont acquis une expérience approfondie dans ce domaine, d’autres semblent moins actifs.
7. L’Assemblée déplore l’existence de nombreuses disparités dans ces régimes de protection des témoins et souligne que les Etats doivent coopérer dans ce domaine, notamment dans les cas de réinstallation des témoins et collaborateurs de justice originaires de petits pays.
8. L’Assemblée considère que, pour lutter efficacement contre la criminalité organisée et le terrorisme, des mesures supplémentaires doivent être prises en matière de protection des témoins. Elle appelle par conséquent les Etats membres:
8.1. à établir ou, si besoin est, à revoir leurs mécanismes de protection des témoins; il importe que les unités de protection des témoins coopèrent avec les services répressifs et soient indépendantes de l’enquête menée et des poursuites engagées dans l’affaire concernée;
8.2. à allouer des ressources financières et humaines suffisantes aux services chargés de la protection des témoins;
8.3. à réexaminer leurs dispositions relatives à l’allégement des peines et à l’octroi d’une immunité de poursuites dans les affaires de criminalité organisée et de terrorisme, afin d’inciter davantage les collaborateurs de justice à coopérer avec les autorités;
8.4. à établir des statistiques sur les résultats de la coopération des témoins, y compris les collaborateurs de justice, avec les services d’investigation et les autorités judiciaires dans les affaires de criminalité organisée et de terrorisme, notamment sur le nombre de condamnations prononcées sur la base de leur témoignage;
8.5. à renforcer la coopération internationale dans le domaine de la protection des témoins, notamment:
8.5.1. en échangeant des informations et en mettant en commun les meilleures pratiques de façon régulière;
8.5.2. en concluant, si besoin est, des accords/arrangements sur la réinstallation des témoins et d’autres mesures de protection;
8.6. à intensifier ou, si besoin est, à renforcer la coopération avec les organes internationaux compétents, notamment Europol, Interpol et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.
9. L’Assemblée rappelle également que les Etats membres, lorsqu’ils établissent et mettent en œuvre des mesures et des programmes de protection des témoins, doivent respecter le droit à un procès équitable et les droits de la défense. Il importe que toute décision de mettre fin à une mesure ou à un programme de protection de témoins soit prise après un examen complet des menaces qui pèsent sur la vie des personnes protégées.