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Résolution 2038 (2015) Version finale
La protection des témoins: outil indispensable pour la lutte contre le crime organisé et le terrorisme en Europe
1. L’Assemblée parlementaire, se référant
à sa Résolution 1784
(2011) sur la protection des témoins: pierre angulaire
de la justice et de la réconciliation dans les Balkans, réaffirme
qu’une protection fiable et durable doit être garantie aux témoins
qui défendent la vérité et la justice, notamment une aide juridique
et psychologique et une solide protection physique avant, pendant
et après le procès.
2. L’Assemblée rappelle que les témoins peuvent être particulièrement
vulnérables aux menaces et à l’intimidation, réelles ou supposées,
dont leurs proches ou eux-mêmes font l’objet de la part des auteurs d’actes
criminels, surtout lorsqu’il s’agit de criminalité organisée ou
de terrorisme.
3. Les dépositions des témoins sont primordiales pour le bon
fonctionnement de la justice pénale dans tout Etat respectueux de
l’Etat de droit. Elles sont essentielles à l’efficacité de l’enquête
et des poursuites engagées à l’encontre de la criminalité organisée
et du terrorisme, car elles contribuent au démantèlement de puissantes structures
criminelles, y compris celles à caractère transnational.
4. La criminalité organisée à forte implantation transnationale
a augmenté en Europe en raison de la mondialisation, de la suppression
des contrôles aux frontières dans l’espace Schengen et de l’évolution
des nouvelles technologies de communication. Les témoins qui ont
besoin d’être protégés ne sont plus seulement les victimes ou les
témoins d’actes criminels, mais aussi les criminels eux-mêmes. Sans
la coopération des «collaborateurs de justice», qui connaissent
de l’intérieur les structures criminelles, il serait difficile,
voire impossible de mener efficacement des enquêtes sur les infractions
graves et de démanteler les structures criminelles. C’est la raison
pour laquelle des mesures de protection des témoins perfectionnées,
notamment les «programmes de protection des témoins», qui impliquent
la réinstallation, voire le changement d’identité du témoin ou du
collaborateur de justice, ont été élaborées au cours de ces vingt
dernières années.
5. Plusieurs instruments juridiques internationaux appellent
les Etats à prendre les mesures qui s’imposent pour protéger efficacement
les témoins contre les actes éventuels de représailles ou d’intimidation
et à renforcer la coopération internationale dans ce domaine. La
Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale
organisée et la Convention des Nations Unies contre la corruption
règlent cette question dans les affaires de criminalité organisée
transnationale et de corruption. Au sein du Conseil de l’Europe,
les dispositions relatives à la protection des témoins figurent
dans la Convention pénale sur la corruption (STE no 173),
la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE
no 197), le Deuxième Protocole additionnel
à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale
(STE no 182) et les Recommandations du
Comité des Ministres no R (97) 13 sur
l’intimidation des témoins et les droits de la défense, Rec(2001)11
concernant les principes directeurs pour la lutte contre le crime
organisé et Rec(2005)9 relative à la protection des témoins et des
collaborateurs de justice.
6. L’Assemblée observe que, dans le cadre de la lutte contre
la criminalité organisée et le terrorisme, bien que le Conseil de
l’Europe ait déjà fait une promotion active des mesures et des programmes
de protection des témoins, leur mise en œuvre connaît d’importantes
disparités. Alors que certains Etats membres ont acquis une expérience
approfondie dans ce domaine, d’autres semblent moins actifs.
7. L’Assemblée déplore l’existence de nombreuses disparités dans
ces régimes de protection des témoins et souligne que les Etats
doivent coopérer dans ce domaine, notamment dans les cas de réinstallation
des témoins et collaborateurs de justice originaires de petits pays.
8. L’Assemblée considère que, pour lutter efficacement contre
la criminalité organisée et le terrorisme, des mesures supplémentaires
doivent être prises en matière de protection des témoins. Elle appelle
par conséquent les Etats membres:
8.1. à établir ou, si besoin est, à revoir leurs mécanismes
de protection des témoins; il importe que les unités de protection
des témoins coopèrent avec les services répressifs et soient indépendantes
de l’enquête menée et des poursuites engagées dans l’affaire concernée;
8.2. à allouer des ressources financières et humaines suffisantes
aux services chargés de la protection des témoins;
8.3. à réexaminer leurs dispositions relatives à l’allégement
des peines et à l’octroi d’une immunité de poursuites dans les affaires
de criminalité organisée et de terrorisme, afin d’inciter davantage
les collaborateurs de justice à coopérer avec les autorités;
8.4. à établir des statistiques sur les résultats de la coopération
des témoins, y compris les collaborateurs de justice, avec les services
d’investigation et les autorités judiciaires dans les affaires de criminalité
organisée et de terrorisme, notamment sur le nombre de condamnations
prononcées sur la base de leur témoignage;
8.5. à renforcer la coopération internationale dans le domaine
de la protection des témoins, notamment:
8.5.1. en échangeant
des informations et en mettant en commun les meilleures pratiques
de façon régulière;
8.5.2. en concluant, si besoin est, des accords/arrangements
sur la réinstallation des témoins et d’autres mesures de protection;
8.6. à intensifier ou, si besoin est, à renforcer la coopération
avec les organes internationaux compétents, notamment Europol, Interpol
et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.
9. L’Assemblée rappelle également que les Etats membres, lorsqu’ils
établissent et mettent en œuvre des mesures et des programmes de
protection des témoins, doivent respecter le droit à un procès équitable
et les droits de la défense. Il importe que toute décision de mettre
fin à une mesure ou à un programme de protection de témoins soit
prise après un examen complet des menaces qui pèsent sur la vie
des personnes protégées.