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Avis 288 (2015)

Budget et priorités du Conseil de l’Europe pour l’exercice biennal 2016-2017

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 21 avril 2015 (13e séance) (voir Doc. 13743, rapport de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, rapporteur: M. Rudy Salles). Texte adopté par l’Assemblée le 21 avril 2015 (13e séance).

1. Le continent européen est confronté à un contexte politique et économique tendu, marqué à la fois par les conséquences de la crise économique et financière de 2008, la consolidation des finances publiques dans de nombreux Etats membres et de graves violations de l’Etat de droit et des droits de l’homme. Ces phénomènes fragilisent la stabilité démocratique et contribuent à l’émergence de l’extrémisme politique, du racisme et de l’intolérance. L’Assemblée parlementaire est convaincue que le Conseil de l’Europe dispose d’une autorité et d’un savoir-faire reconnus, ainsi que de mécanismes appropriés, lui permettant d’être un partenaire incontournable de la coopération européenne visant à relever ces défis et à aider les Etats membres à trouver des solutions efficaces aux problèmes actuels.
2. Les Etats membres font confiance au Conseil de l’Europe pour apporter une réponse cohérente à ces crises, mais ils demandent à l’Organisation, en contrepartie de leur financement, une réelle plus-value par rapport à son coût, c’est-à-dire d’être efficace et efficiente.
3. L’Assemblée note que, au cours de son premier mandat, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, M. Thorbjørn Jagland, a mis en œuvre un ensemble de mesures destinées à accroître l’efficacité de l’Organisation tout en réduisant ses coûts, en particulier sa masse salariale, ce qui a permis d’économiser 15 millions d’euros sur la période considérée.
4. L’Assemblée salue également les efforts du Secrétaire Général pour renforcer la capacité de l’Organisation à lever des ressources extrabudgétaires (contributions volontaires d’Etats membres et non membres, et de l’Union européenne, signature de programmes conjoints avec l’Union européenne et autres sources de financement) afin de rendre le Conseil de l’Europe encore plus opérationnel. Dans ce contexte, l’Assemblée souligne l’importance de ses programmes de coopération financés par ce type de ressources, ciblés sur les problèmes qu’elle a identifiés dans ses différents rapports.
5. Néanmoins, l’Assemblée considère que le caractère temporaire de ces ressources additionnelles et l’augmentation de leur part dans l’ensemble du budget du Conseil de l’Europe peuvent, à moyen terme, mettre en danger l’équilibre financier de l’Organisation ainsi que la programmation de ses activités. En effet, ces ressources ne peuvent pas compenser les coûts induits par leur gestion ni couvrir les besoins de financement des activités traditionnelles ou des dépenses d’investissement indispensables pour maintenir, moderniser et préserver la valeur des actifs de l’Organisation (en particulier l’entretien des bâtiments et l’utilisation de nouvelles technologies).
6. Etant donné les défis liés aux violences et aux conflits et, par conséquent, à l’instabilité démocratique, auxquels est confronté le continent européen, l’Assemblée considère que le Conseil de l’Europe devrait disposer de plus de moyens pour remplir sa mission et s’inquiète des répercussions, à moyen et long termes, de la décision du Comité des Ministres de reconduire le principe de croissance nominale zéro appliqué aux contributions payées par les Etats membres pour le prochain budget biennal 2016-2017.
7. L’Assemblée souhaiterait que le Comité des Ministres adopte des mesures de flexibilité budgétaire, comme elle l’avait déjà suggéré dans ses précédents avis sur les budgets et priorités du Conseil de l’Europe, à savoir le report sans limitation des crédits non dépensés d’une année sur l’autre à l’intérieur du budget biennal et la mise en place, dans la comptabilité du Conseil de l’Europe, d’un compte de réserve destiné notamment aux dépenses d’investissement, alimenté par la totalité, ou un pourcentage à définir, du solde non dépensé en fin d’exercice budgétaire biennal. Une telle approche flexible de la programmation budgétaire permettrait de rendre les actions du Conseil de l’Europe plus efficaces et mieux adaptées aux réalités changeantes des pays bénéficiaires.
8. L’Assemblée se félicite de la proposition du Gouvernement de la Turquie de devenir un grand contributeur aux budgets du Conseil de l’Europe, à compter du 1er janvier 2016, et remercie le Gouvernement et le Parlement turcs de leur soutien au renforcement des capacités de l’Organisation à remplir son mandat.
9. L’Assemblée a pris note de la proposition de recommandation déposée par plusieurs membres sur l’attribution des sièges à l’Assemblée parlementaire au titre de la Turquie, visant à remédier aux conséquences de sa sous-représentation (la Turquie est, au niveau de sa population, au troisième rang des Etats membres du Conseil de l’Europe), en fixant à 18 le nombre de sièges à l’Assemblée auxquels la Turquie a droit, et à inclure la langue turque parmi ses langues de travail.
10. L’Assemblée invite le Comité des Ministres à accepter la proposition du Gouvernement turc, sans réduire pour autant le montant des contributions versées aux différents budgets de l’Organisation par les autres Etats membres.
11. S’agissant des priorités pour 2016 et 2017, l’Assemblée prend note des choix stratégiques du Secrétaire Général concernant les domaines prioritaires suivants:
11.1. renforcer la Cour européenne des droits de l’homme et le principe de responsabilité partagée avec les différents organes du Conseil de l’Europe actifs dans ce domaine (organes institutionnels comme l’Assemblée parlementaire, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, le Commissaire aux droits de l’homme et autres mécanismes normatifs du Conseil de l’Europe);
11.2. renforcer la coopération avec les Etats membres;
11.3. soutenir les principes démocratiques;
11.4. renforcer l’assistance aux pays du voisinage;
11.5. renforcer la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163);
11.6. renforcer la cohésion entre le Secrétaire Général et les organes statutaires, en particulier l’Assemblée parlementaire;
11.7. accroître les capacités opérationnelles du Conseil de l’Europe.
12. Face aux attaques terroristes survenues à Paris, à Copenhague et tout récemment à Tunis, l’Assemblée soutient les initiatives prises par le Secrétaire Général pour lutter contre le terrorisme, la radicalisation et l’extrémisme en utilisant au mieux l’ensemble des instruments juridiques du Conseil de l’Europe et en proposant de nouveaux instruments.
13. L’Assemblée est profondément convaincue que la stratégie du Conseil de l’Europe de lutte contre le terrorisme devrait être prévue sur le long terme et inclure, outre les instruments juridiques, d’autres activités de l’Organisation, à savoir la gouvernance démocratique, y compris les différents aspects des élections, la lutte contre la corruption, l’éducation, l’enseignement, la culture et le dialogue interreligieux.
14. L’Assemblée précise qu’elle a agi à son niveau en établissant un réseau parlementaire – l’Alliance parlementaire contre la haine – dont l’objectif est de faire campagne contre le racisme, la haine et l’intolérance, en coopération avec les parlements nationaux, aux niveaux national et européen, ainsi qu’une plateforme parlementaire contre la corruption.
15. L’Assemblée considère que le Conseil de l’Europe devrait accroître son rôle en s’attaquant, au niveau paneuropéen, aux défis relatifs aux droits de l’homme et à la cohésion sociale liés à la gestion des flux migratoires, incluant les réfugiés et les demandeurs d’asile, et les migrants en situation irrégulière. L’Assemblée déplore l’absence de comité spécifique du côté intergouvernemental de l’Organisation qui soit chargé de ces questions. La création d’un tel organe permettrait la mise en place d’une action à la fois renforcée et coordonnée, et assurerait une plus grande efficacité dans ce domaine.
16. L’Assemblée considère que l’ensemble des actions doivent aller de pair avec la mise en place d’un système cohérent de protection des droits de l’homme à l’échelle européenne, et d’une coopération renforcée avec les Etats membres pour lutter contre le terrorisme, en veillant à ce que les Etats n’adoptent pas des mesures contraires aux principes et à la jurisprudence relatifs à l’application de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5). A cet égard, l’Assemblée tient à souligner le rôle de législateur que doivent jouer ses membres en tant qu’élus des parlements nationaux des Etats membres.
17. S’agissant de l’efficacité de la Convention européenne des droits de l’homme et des suites données à la Déclaration de Brighton de 2012, l’Assemblée rappelle l’importance de donner au Conseil de l’Europe les moyens financiers lui permettant de remplir ses obligations sans affaiblir ses autres activités et programmes, comme elle l’avait déjà proposé dans sa Résolution 1856 (2012) «Garantir l’autorité et l’efficacité de la Convention européenne des droits de l’homme» et en particulier dans sa Recommandation 1812 (2007) sur la dimension politique du budget du Conseil de l’Europe, dans laquelle elle suggérait d’établir des barèmes minimaux de contributions des Etats membres afin de couvrir au moins le coût administratif d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme.
18. Afin de permettre aux journalistes de tous les Etats membres, en particulier des Etats qui font l’objet d’une procédure de suivi ou d’un dialogue postsuivi avec l’Assemblée, de couvrir de manière libre et indépendante les activités du Conseil de l’Europe, l’Assemblée invite le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à réintroduire le financement des invitations de journalistes à l’occasion des événements majeurs organisés par l’Organisation, y compris les parties de session de l’Assemblée.