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Avis 288 (2015)
Budget et priorités du Conseil de l’Europe pour l’exercice biennal 2016-2017
1. Le continent européen est confronté
à un contexte politique et économique tendu, marqué à la fois par les
conséquences de la crise économique et financière de 2008, la consolidation
des finances publiques dans de nombreux Etats membres et de graves
violations de l’Etat de droit et des droits de l’homme. Ces phénomènes
fragilisent la stabilité démocratique et contribuent à l’émergence
de l’extrémisme politique, du racisme et de l’intolérance. L’Assemblée
parlementaire est convaincue que le Conseil de l’Europe dispose d’une
autorité et d’un savoir-faire reconnus, ainsi que de mécanismes
appropriés, lui permettant d’être un partenaire incontournable de
la coopération européenne visant à relever ces défis et à aider
les Etats membres à trouver des solutions efficaces aux problèmes
actuels.
2. Les Etats membres font confiance au Conseil de l’Europe pour
apporter une réponse cohérente à ces crises, mais ils demandent
à l’Organisation, en contrepartie de leur financement, une réelle
plus-value par rapport à son coût, c’est-à-dire d’être efficace
et efficiente.
3. L’Assemblée note que, au cours de son premier mandat, le Secrétaire
Général du Conseil de l’Europe, M. Thorbjørn Jagland, a mis en œuvre
un ensemble de mesures destinées à accroître l’efficacité de l’Organisation
tout en réduisant ses coûts, en particulier sa masse salariale,
ce qui a permis d’économiser 15 millions d’euros sur la période
considérée.
4. L’Assemblée salue également les efforts du Secrétaire Général
pour renforcer la capacité de l’Organisation à lever des ressources
extrabudgétaires (contributions volontaires d’Etats membres et non membres,
et de l’Union européenne, signature de programmes conjoints avec
l’Union européenne et autres sources de financement) afin de rendre
le Conseil de l’Europe encore plus opérationnel. Dans ce contexte, l’Assemblée
souligne l’importance de ses programmes de coopération financés
par ce type de ressources, ciblés sur les problèmes qu’elle a identifiés
dans ses différents rapports.
5. Néanmoins, l’Assemblée considère que le caractère temporaire
de ces ressources additionnelles et l’augmentation de leur part
dans l’ensemble du budget du Conseil de l’Europe peuvent, à moyen
terme, mettre en danger l’équilibre financier de l’Organisation
ainsi que la programmation de ses activités. En effet, ces ressources
ne peuvent pas compenser les coûts induits par leur gestion ni couvrir
les besoins de financement des activités traditionnelles ou des
dépenses d’investissement indispensables pour maintenir, moderniser
et préserver la valeur des actifs de l’Organisation (en particulier
l’entretien des bâtiments et l’utilisation de nouvelles technologies).
6. Etant donné les défis liés aux violences et aux conflits et,
par conséquent, à l’instabilité démocratique, auxquels est confronté
le continent européen, l’Assemblée considère que le Conseil de l’Europe
devrait disposer de plus de moyens pour remplir sa mission et s’inquiète
des répercussions, à moyen et long termes, de la décision du Comité
des Ministres de reconduire le principe de croissance nominale zéro
appliqué aux contributions payées par les Etats membres pour le
prochain budget biennal 2016-2017.
7. L’Assemblée souhaiterait que le Comité des Ministres adopte
des mesures de flexibilité budgétaire, comme elle l’avait déjà suggéré
dans ses précédents avis sur les budgets et priorités du Conseil
de l’Europe, à savoir le report sans limitation des crédits non
dépensés d’une année sur l’autre à l’intérieur du budget biennal
et la mise en place, dans la comptabilité du Conseil de l’Europe,
d’un compte de réserve destiné notamment aux dépenses d’investissement,
alimenté par la totalité, ou un pourcentage à définir, du solde
non dépensé en fin d’exercice budgétaire biennal. Une telle approche
flexible de la programmation budgétaire permettrait de rendre les
actions du Conseil de l’Europe plus efficaces et mieux adaptées
aux réalités changeantes des pays bénéficiaires.
8. L’Assemblée se félicite de la proposition du Gouvernement
de la Turquie de devenir un grand contributeur aux budgets du Conseil
de l’Europe, à compter du 1er janvier
2016, et remercie le Gouvernement et le Parlement turcs de leur
soutien au renforcement des capacités de l’Organisation à remplir
son mandat.
9. L’Assemblée a pris note de la proposition de recommandation
déposée par plusieurs membres sur l’attribution des sièges à l’Assemblée
parlementaire au titre de la Turquie, visant à remédier aux conséquences de
sa sous-représentation (la Turquie est, au niveau de sa population,
au troisième rang des Etats membres du Conseil de l’Europe), en
fixant à 18 le nombre de sièges à l’Assemblée auxquels la Turquie
a droit, et à inclure la langue turque parmi ses langues de travail.
10. L’Assemblée invite le Comité des Ministres à accepter la proposition
du Gouvernement turc, sans réduire pour autant le montant des contributions
versées aux différents budgets de l’Organisation par les autres Etats
membres.
11. S’agissant des priorités pour 2016 et 2017, l’Assemblée prend
note des choix stratégiques du Secrétaire Général concernant les
domaines prioritaires suivants:
11.1. renforcer
la Cour européenne des droits de l’homme et le principe de responsabilité
partagée avec les différents organes du Conseil de l’Europe actifs
dans ce domaine (organes institutionnels comme l’Assemblée parlementaire,
le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, le Commissaire aux droits
de l’homme et autres mécanismes normatifs du Conseil de l’Europe);
11.2. renforcer la coopération avec les Etats membres;
11.3. soutenir les principes démocratiques;
11.4. renforcer l’assistance aux pays du voisinage;
11.5. renforcer la Charte sociale européenne (révisée) (STE
no 163);
11.6. renforcer la cohésion entre le Secrétaire Général et les
organes statutaires, en particulier l’Assemblée parlementaire;
11.7. accroître les capacités opérationnelles du Conseil de
l’Europe.
12. Face aux attaques terroristes survenues à Paris, à Copenhague
et tout récemment à Tunis, l’Assemblée soutient les initiatives
prises par le Secrétaire Général pour lutter contre le terrorisme,
la radicalisation et l’extrémisme en utilisant au mieux l’ensemble
des instruments juridiques du Conseil de l’Europe et en proposant
de nouveaux instruments.
13. L’Assemblée est profondément convaincue que la stratégie du
Conseil de l’Europe de lutte contre le terrorisme devrait être prévue
sur le long terme et inclure, outre les instruments juridiques,
d’autres activités de l’Organisation, à savoir la gouvernance démocratique,
y compris les différents aspects des élections, la lutte contre
la corruption, l’éducation, l’enseignement, la culture et le dialogue
interreligieux.
14. L’Assemblée précise qu’elle a agi à son niveau en établissant
un réseau parlementaire – l’Alliance parlementaire contre la haine
– dont l’objectif est de faire campagne contre le racisme, la haine
et l’intolérance, en coopération avec les parlements nationaux,
aux niveaux national et européen, ainsi qu’une plateforme parlementaire
contre la corruption.
15. L’Assemblée considère que le Conseil de l’Europe devrait accroître
son rôle en s’attaquant, au niveau paneuropéen, aux défis relatifs
aux droits de l’homme et à la cohésion sociale liés à la gestion
des flux migratoires, incluant les réfugiés et les demandeurs d’asile,
et les migrants en situation irrégulière. L’Assemblée déplore l’absence
de comité spécifique du côté intergouvernemental de l’Organisation
qui soit chargé de ces questions. La création d’un tel organe permettrait
la mise en place d’une action à la fois renforcée et coordonnée,
et assurerait une plus grande efficacité dans ce domaine.
16. L’Assemblée considère que l’ensemble des actions doivent aller
de pair avec la mise en place d’un système cohérent de protection
des droits de l’homme à l’échelle européenne, et d’une coopération
renforcée avec les Etats membres pour lutter contre le terrorisme,
en veillant à ce que les Etats n’adoptent pas des mesures contraires
aux principes et à la jurisprudence relatifs à l’application de
la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5).
A cet égard, l’Assemblée tient à souligner le rôle de législateur
que doivent jouer ses membres en tant qu’élus des parlements nationaux
des Etats membres.
17. S’agissant de l’efficacité de la Convention européenne des
droits de l’homme et des suites données à la Déclaration de Brighton
de 2012, l’Assemblée rappelle l’importance de donner au Conseil
de l’Europe les moyens financiers lui permettant de remplir ses
obligations sans affaiblir ses autres activités et programmes, comme
elle l’avait déjà proposé dans sa Résolution 1856 (2012) «Garantir
l’autorité et l’efficacité de la Convention européenne des droits
de l’homme» et en particulier dans sa Recommandation 1812 (2007) sur la dimension
politique du budget du Conseil de l’Europe, dans laquelle elle suggérait
d’établir des barèmes minimaux de contributions des Etats membres
afin de couvrir au moins le coût administratif d’un juge à la Cour européenne
des droits de l’homme.
18. Afin de permettre aux journalistes de tous les Etats membres,
en particulier des Etats qui font l’objet d’une procédure de suivi
ou d’un dialogue postsuivi avec l’Assemblée, de couvrir de manière
libre et indépendante les activités du Conseil de l’Europe, l’Assemblée
invite le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à réintroduire
le financement des invitations de journalistes à l’occasion des
événements majeurs organisés par l’Organisation, y compris les parties
de session de l’Assemblée.