Imprimer
Autres documents liés
Résolution 2054 (2015)
L’égalité et la non-discrimination dans l’accès à la justice
1. L’accès à la justice est un aspect
inhérent à l’Etat de droit et une exigence fondamentale de toute
société démocratique. L’article 6 de la Convention européenne des
droits de l’homme (STE no 5) consacre
le droit à un procès équitable et l’article 13 énonce le droit à
un recours effectif. Ces deux droits relèvent du concept plus large
d’accès à la justice, qui renvoie aux différents éléments conduisant
à la réparation appropriée de la violation d’un droit, tels que
l’information sur les droits et sur les procédures, l’aide judiciaire,
la représentation juridique, la qualité pour agir ou l’accès général
aux tribunaux.
2. L’Assemblée parlementaire déplore que l’accès à la justice,
bien qu’il soit essentiel à la jouissance effective de leurs droits
par les individus, soit trop souvent entravé par des obstacles d’ordre
pratique et juridique. Le manque d’information juridique, le manque
de confiance dans les autorités, les effets de la crise économique
sur l’aide judiciaire et les lacunes du cadre juridique applicable
à certaines situations spécifiques contribuent considérablement
à la persistance d’obstacles à l’accès à la justice.
3. L’Assemblée constate avec préoccupation que ces obstacles
sont plus difficiles à surmonter pour certains groupes de personnes
qui sont particulièrement exposés à la discrimination et sont également
moins à même de connaître leurs droits et les voies de recours existantes.
A cet égard, l’Assemblée rappelle qu’il est nécessaire de garantir
à tous l’égalité d’accès à la justice en levant les obstacles qui
empêchent les personnes de comprendre et d’exercer leurs droits,
et de demander réparation dans l’éventualité d’une violation. L’Assemblée
souligne que la coopération entre la société civile, les entités
administratives et judiciaires et les instances chargées de l’application
de la loi est de la plus haute importance pour garantir l’égalité
d’accès à la justice.
4. A la lumière de ces considérations, l’Assemblée invite les
Etats membres:
4.1. à promouvoir
et à améliorer les connaissances juridiques en recherchant et en
mettant en œuvre des mécanismes d’information spécifiques et des
stratégies de communication innovantes;
4.2. à veiller à ce qu’une information suffisante sur les droits
et les procédures soit disponible dans différentes langues, dans
différents formats et dans un langage clair, en s’appuyant sur des intermédiaires
de la société civile pour diffuser des informations ciblées;
4.3. à faire en sorte que les infractions soient plus souvent
signalées en élaborant des mécanismes d’incitation visant à rétablir
la confiance dans les autorités et à réduire l’effet dissuasif des
frais encourus.
5. L’Assemblée invite les Etats membres à s’assurer que toutes
les catégories de personnes ont accès à des recours effectifs et,
en particulier:
5.1. à garantir
qu’une aide judiciaire est fournie à toute personne, accusée ou
victime, et à prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que
les catégories de personnes exposées à la discrimination peuvent
bénéficier de cette aide;
5.2. à signer et/ou à ratifier l’Accord européen sur la transmission
des demandes d’assistance judiciaire (STE no 92),
s’ils ne l’ont pas déjà fait;
5.3. à recourir aux nouvelles technologies et à veiller à ce
que les catégories de personnes défavorisées à cet égard aient à
leur disposition d’autres formes d’accès aux institutions judiciaires;
5.4. à lever les obstacles juridiques qui s’opposent à la qualité
pour agir, notamment en permettant aux tribunaux d’accepter les
demandes de tierce intervention et d’organismes de promotion de
l’égalité pour représenter les personnes au cours des procédures
dans certains cas, et en rendant sans objet le statut légal d’immigration
pour la conduite des procédures judiciaires;
5.5. à signer et/ou ratifier la Charte européenne des langues
régionales ou minoritaires (STE no 148) en
vue de garantir aux personnes parlant une langue régionale ou minoritaire
le plein exercice de leurs droits linguistiques devant les tribunaux
pénaux, civils et administratifs, pendant la durée des procédures judiciaires,
conformément à l’article 9 de la charte;
5.6. à signer et/ou à ratifier la Charte sociale européenne
(révisée) (STE no 163) et le Protocole additionnel
à la Charte sociale européenne prévoyant un système de réclamations
collectives (STE no 158), s’ils ne l’ont
pas déjà fait;
5.7. à promouvoir et à développer le recours aux mécanismes
quasi judiciaires et aux modes alternatifs de résolution de conflits.
6. L’Assemblée invite les Etats membres à intensifier leurs efforts
pour lever les obstacles juridiques, sociaux, économiques et culturels
à l’accès des femmes à la justice et, à cette fin:
6.1. à signer et/ou à ratifier la
Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte
contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique
(STCE no 210), s’ils ne l’ont pas déjà
fait;
6.2. à mener une analyse approfondie de l’incidence du genre
sur l’accès à la justice, en particulier en recueillant des données
ventilées par genre, et à adopter des politiques sensibles au genre
qui tiennent compte des obstacles particuliers auxquels se heurtent
les femmes en ce qui concerne l’accès à la justice.
7. En ce qui concerne les catégories de personnes particulièrement
exposées à la discrimination et pour veiller à ce que toutes les
personnes bénéficient pleinement de l’accès à la justice sur un
pied d’égalité, l’Assemblée invite les Etats membres:
7.1. à mener des études à l’échelon
national pour évaluer l’ampleur des obstacles auxquels se heurtent
ces catégories de personnes et à mettre en œuvre des mesures spécialement
adaptées pour lever ces obstacles;
7.2. à dispenser à la police et aux professionnels du droit,
notamment aux avocats et aux juges, une formation spécifique sur
les questions de discrimination;
7.3. à intensifier leurs efforts pour lutter contre la discrimination
à laquelle se heurtent ces catégories de personnes dans l’exercice
de leurs droits et, à cet effet:
7.3.1. à adopter des lois
ou à modifier la législation existante pour introduire des dispositions sur
la discrimination multiple dans le cadre juridique de lutte contre
la discrimination en vigueur;
7.3.2. à mettre en place des organismes nationaux de promotion
de l’égalité et à soutenir leur travail;
7.3.3. à lever les obstacles qui entravent l’accès à la justice
des personnes ayant un handicap intellectuel, conformément à la
jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.