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Rapport | Doc. 14143 | 03 octobre 2016

L’incidence de la dynamique démographique européenne sur les politiques migratoires

Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées

Rapporteure : Mme Kristin Ørmen JOHNSEN, Norvège, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 13766, Renvoi 4130 du 22 mai 2015. 2016 - Quatrième partie de session

Résumé

Contrairement à d’autres parties du monde, l'Europe est particulièrement concernée par l’«hiver démographique»: en raison de la baisse de la fécondité, le taux de natalité global moyen s’y est établi à 1,5 enfant par femme, ce qui représente le niveau le plus bas jamais atteint.

Dans le même temps, les pays du Conseil de l'Europe se caractérisent par la population la plus âgée au monde, en raison de la forte proportion de personnes de 65 ans et plus. Cette tendance au vieillissement de la population européenne va d’ailleurs s’accélérer dans l’avenir, du fait de l’allongement de l’espérance de vie. Il en résulte une baisse de la proportion des personnes en âge de travailler dans la population, d’où la nécessité d’attirer de jeunes migrants qualifiés.

En conséquence, pour relever les défis démographiques actuels et mieux utiliser l’important afflux de migrants vers l’Europe, les Etats membres devraient élaborer des stratégies politiques à long terme, fondées sur les besoins du marché du travail, qui permettent de mieux concilier vie familiale et vie professionnelle et encouragent l’entrée rapide des migrants en situation régulière sur le marché du travail, tout en répondant aux besoins d’intégration.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 22 septembre
2016.

(open)
1. Les changements importants de la dynamique de la population européenne au XXIe siècle nécessitent une évaluation de leur incidence sur les futures politiques migratoires en Europe.
2. Les 47 Etats membres du Conseil de l'Europe comptent au total 826 millions d’habitants, soit 11,3 % de la population mondiale. La densité de population moyenne en Europe est de 35 habitants par km², chiffre inférieur à la moyenne mondiale (55 habitants par km2). Il reste donc des possibilités de peuplement.
3. En outre, contrairement à d’autres parties du monde, les pays du Conseil de l'Europe sont particulièrement concernés par un «hiver démographique»: la fécondité a diminué jusqu’à un niveau moyen de 1,5 enfant par femme, soit le plus faible du monde. L’intensité de l’hiver démographique varie selon les pays, ce qui engendre des évolutions démographiques divergentes.
4. Dans le même temps, les pays du Conseil de l'Europe ont la population la plus âgée du monde, caractérisée par la proportion la plus forte de personnes de 65 ans et plus. Cette tendance va d’ailleurs s’accélérer dans l’avenir, également du fait de l’allongement de l’espérance de vie. Il en résulte une baisse de la proportion des personnes en âge de travailler dans la population européenne, d’où la nécessité d’examiner plus activement comment attirer de jeunes migrants qualifiés vers le marché du travail européen.
5. L’Assemblée parlementaire estime que, pour mieux utiliser l’important afflux de migrants que connaît actuellement l’Europe, les pays d’immigration doivent élaborer des stratégies politiques à long terme, fondées sur les besoins du marché du travail, qui favorisent l’intégration des migrants et encouragent leur entrée rapide sur le marché du travail.
6. L’Assemblée est convaincue que, face aux défis démographiques de l’Europe, il faudrait appliquer une approche intersectorielle aux politiques sociales, aux politiques de l’emploi et aux politiques d’immigration, et que les droits de l'homme et la dignité de toute personne devraient figurer au premier rang des priorités de toutes ces politiques.
7. En conséquence, l’Assemblée invite les Etats membres du Conseil de l'Europe concernés:
7.1. à élaborer des politiques destinées à lutter contre le phénomène d’hiver démographique européen:
7.1.1. en prenant des mesures sociales qui encouragent les couples à avoir le nombre d’enfants qu’ils souhaitent;
7.1.2. en élaborant des politiques visant à permettre de mieux concilier vie familiale et vie professionnelle, y compris à favoriser une plus grande participation des femmes et des hommes au marché du travail par l’offre des programmes de formation nécessaires, des possibilités d’aménagement des horaires de travail, un système de congé parental et des services de planning familial, ainsi que des incitations matérielles;
7.1.3. en instaurant des stratégies nationales en matière de garde d’enfants pour encourager les jeunes à combiner vie professionnelle et vie familiale;
7.2. à élaborer des politiques spécialement destinées à enrayer les effets négatifs du vieillissement démographique:
7.2.1. en menant des réformes du marché du travail pour encourager l’emploi des seniors, si c’est nécessaire;
7.2.2. en mettant en œuvre des réformes du système des salaires et des retraites pour rendre l’emploi des seniors plus attractif, si c’est nécessaire;
7.2.3. en élaborant des politiques de l’emploi favorables aux jeunes et en prenant des mesures de prévention de l’exode rural des jeunes;
7.2.4. en soutenant des initiatives d’apprentissage tout au long de la vie visant à augmenter la proportion de travailleurs qualifiés;
7.2.5. en favorisant les politiques de santé pour augmenter l’espérance de vie en bonne santé;
7.3. à élaborer, le cas échéant, des politiques migratoires tournées vers l’avenir et à assurer un transport sécurisé des personnes, qui permettent d’attirer des migrants qualifiés, notamment:
7.3.1. en réalisant des analyses sectorielles du marché du travail pour recenser les secteurs qui manquent réellement de main-d'œuvre qualifiée;
7.3.2. en veillant à ce que soient supprimés, dans le droit interne, tous les obstacles à l’entrée rapide des réfugiés sur le marché du travail;
7.3.3. en donnant aux migrants en situation régulière des possibilités d’accès à l’emploi, ce qui permettrait à la fois de répondre aux besoins des sociétés d’accueil et de lutter contre le travail clandestin et contre la traite et l’exploitation des migrants qui y sont associées;
7.3.4. en développant les formations professionnelles pour les réfugiés afin d’encourager leur intégration dans le marché du travail;
7.3.5. en facilitant la reconnaissance des diplômes et des compétences professionnelles des migrants;
7.3.6. en développant davantage la formation professionnelle et les cours de langue pour les migrants, en particulier les femmes migrantes;
7.3.7. en favorisant l’intégration des migrants et de leurs familles, ce qui suppose de revoir les politiques d’intégration de manière à ce que les migrants ne soient pas victimes de ségrégation dans la société d’accueil et soient associés à la vie sociale et culturelle de la collectivité;
7.3.8. en informant mieux le public sur les avantages économiques des migrations légales et de la diversité culturelle pour la société.
8. L’Assemblée encourage le développement de la coordination des politiques entre les Etats membres du Conseil de l'Europe en lien avec les tendances démographiques et leur influence sur le développement économique. Elle encourage aussi les organisations internationales pertinentes (l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l’Union européenne, par exemple) à collecter des données sur la dynamique démographique des pays européens et à réaliser des études comparatives sur les questions relatives à la population et aux migrations.
9. Enfin, l’Assemblée décide de réétudier cette question régulièrement.

B. Exposé des motifs, par Mme Kristin Ørmen Johnsen, rapporteure

(open)

1. Introduction

1. En 2015, les 47 Etats membres du Conseil de l'Europe comptaient, ensemble, 826 millions d’habitants, soit 11,3 % de la population mondiale.
2. Ces dernières décennies, la dynamique démographique européenne a connu d’importants changements, qui ont eu des répercussions directes sur l’évolution sociale et économique de l’Europe. Cela fait plusieurs décennies que l’Europe enregistre de faibles taux de natalité. La fécondité moyenne est de 1,5 enfant par femme sur cette période. Elle est inférieure d’un quart au «seuil de simple remplacement des générations», qui s’établit à 2,1 enfants par femme en Europe, compte tenu du niveau sanitaire élevé. Cette situation caractérisée par une fécondité durablement basse a été qualifiée d’«hiver démographique» par les spécialistes.
3. L’hiver démographique a pour première conséquence d’accentuer le vieillissement de la population, c'est-à-dire d’augmenter la proportion de personnes âgées dans la société. Ce phénomène, appelé en démographie vieillissement «par le bas» de la pyramide des âges, est très marqué, en raison de la faiblesse des effectifs des générations naissantes.
4. Une deuxième conséquence, qui ne concerne à ce jour que certains pays européens et un nombre croissant de régions, tient à un excédent des décès par rapport aux naissances, soit un solde naturel négatif, appelé «dépopulation». Cette dépopulation conduit à une diminution de la population, donc à un «dépeuplement» dans les territoires où le solde migratoire est négatif ou insuffisamment positif pour compenser ce solde naturel négatif.
5. Une troisième conséquence de l’«hiver démographique» s’exerce sur la population active. D’une part, celle-ci vieillit au fur et à mesure que les générations d’actifs arrivant sur le marché du travail sont moins nombreuses que les générations précédentes. Ainsi, la proportion des 55-64 ans dans la population active peut devenir plus importante que celle des 25-34 ans. D’autre part, l’intensité de l’«hiver démographique» peut engendrer une baisse de la population active.
6. La baisse de la population active peut être enrayée par l’augmentation du taux d’emploi, par exemple celui des jeunes et des seniors. Mais cela n’est pas nécessairement suffisant pour satisfaire les besoins de l’économie.
7. L’insuffisance de la population active peut signifier un besoin d’immigration, dite «immigration de remplacement». Il convient d’ailleurs de préciser que l’histoire livre divers exemples permettant de comprendre l'impact de la dynamique des populations sur les politiques migratoires.
8. L’Assemblée parlementaire a déjà examiné les questions de population en Europe dans plusieurs de ses résolutions et recommandations 
			(2) 
			Résolutions 1502 (2006), 1767 (2010) et 1864 (2012), et Recommandations 1356 (1998), 1683 (2004) et 1718 (2005).. Le dernier texte en date est la Résolution 1864 (2012) «Tendances démographiques en Europe: transformer les défis en opportunités». Vu les événements qui se sont produits depuis en Europe, notamment la crise économique et l’afflux important de migrants, il est grand temps d’analyser l’incidence de l’actuelle dynamique démographique européenne sur les politiques migratoires.
9. Le présent rapport s’appuie sur une analyse réalisée par M. Gérard-François Dumont, Professeur à l’université Paris-Sorbonne 
			(3) 
			Voir
document AS/Mig/Inf (2016) 16., et sur les conclusions d’une audition organisée par la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées. Il tient aussi compte des données collectées lors de la mission d’information que j’ai effectuée en Allemagne le 31 mai 2016. Les conclusions de la mission en République de Moldova (26-27 septembre 2016) figurent dans un addendum au présent rapport.
10. Le rapport décrit les traits saillants de la dynamique démographique des pays européens, en passant en revue des facteurs comme l’occupation humaine, les taux de natalité, les taux de mortalité et la composition par âge de la population, ainsi que leurs effets. Il analyse les tendances démographiques de l’époque moderne à l’aide de quelques exemples historiques illustrant les effets des tendances démographiques sur les politiques migratoires. Enfin, le rapport tente de déterminer dans quelle mesure les migrations peuvent contribuer à améliorer une situation marquée par le vieillissement de la population européenne et la réduction de la population active.

2. Les traits saillants de la dynamique des populations européennes

11. L’ensemble formé par les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe présente une répartition géographique fort diversifiée de sa population, et une évolution naturelle caractérisée par une très faible fécondité comme par un fort vieillissement.

2.1. Une distribution spatiale très inégale du peuplement 
			(4) 
			Voir
le tableau à l’annexe 1: Populations et densité des Etats membres
du Conseil de l'Europe (ordre alphabétique).

12. Concernant le peuplement des territoires des pays du Conseil de l’Europe, la question qui se pose est la suivante: la densité de population de ces territoires peut-elle être considérée comme telle que les marges de peuplement supplémentaires seraient si faibles qu’elles obligeraient à adopter des politiques rejetant toute immigration, voire encourageant l’émigration?
13. Les 826 millions d’habitants des  Etats membres du Conseil de l’Europe disposent d’une superficie cumulée de 23 835 milliers de km2. La densité moyenne est donc de 35 habitants/km2, soit un chiffre nettement plus faible que celle de l’Inde (400) ou de la Chine (143). Elle est même inférieure à la moyenne mondiale (55), légèrement inférieure à celle de l’Afrique (39) et supérieure à celle de l’Amérique (25). Ces comparaisons peuvent conduire à conclure que l’ensemble géographique formé par les Etats membres dispose d’incontestables marges de peuplement 
			(5) 
			Dumont,
Gérard-François, «Le peuplement de l’Europe: une logique centre-périphérie», Population & Avenir, n° 700, novembre-décembre
2010..
14. Toutefois, le Conseil de l’Europe a pour membre le pays disposant de la plus vaste superficie au monde, la Russie, avec 17 098 milliers de km2, soit 13,4 % de l’écoumène. Or, dans ce pays, de nombreuses et vastes superficies n’offrent, compte tenu des conditions topographiques ou climatiques, que bien peu de possibilités pour l’occupation humaine. En effet, la vie y est difficile pour le métabolisme humain, en raison, d’une part, de températures moyennes basses à très basses toute l’année et, d’autre part, de la localisation d’une grande partie du territoire russe au-delà du cercle polaire arctique, donc avec au moins une journée où le soleil ne se lève pas en hiver et, le plus souvent, plusieurs mois au cours desquels la lumière du jour ne dure que quelques heures. Il n’est donc pas illogique d’examiner le peuplement des pays du Conseil de l’Europe en écartant la Russie, vu sa géographie spécifique.
15. Dans ce cas, les 681 millions d’habitants des 46 Etats considérés vivent sur 6 737 km2. Une telle superficie est équivalente aux deux tiers de celle de la Chine et au double de celle de l’Inde. Mais elle est cinq fois plus faible que celle de l’Afrique et près de sept fois moindre que celle de l’Amérique. La densité moyenne des 46 pays est de 101 habitants/km2, chiffre qui est presque le double de la moyenne mondiale mais qui demeure, à nouveau, inférieur à la densité de la Chine et, davantage encore, de l’Inde. Ces données quantitatives concluent donc au fait que l’Europe dispose, toutes choses égales par ailleurs, de marges de peuplement.
16. Ces dernières sont encore plus incontestables en examinant la répartition géographique de la population. Une caractéristique de l’ensemble géodémographique formé par le Conseil de l’Europe est la répartition très inégale de la population. Examinons-la à l’échelle des Etats, puis à celle des régions.
17. La géographie du peuplement des pays du Conseil de l’Europe présente, grosso modo, une logique centre-périphérie 
			(6) 
			Voir le tableau à l’annexe
2: Populations et densité des Etats membres du Conseil de l'Europe
(ordre de densité décroissante).. En effet, la région la plus dense est ce qu’il est convenu d’appeler la «dorsale européenne». Celle-ci, allant du Royaume-Uni à l’Italie, en passant par le Benelux et l’Allemagne, comporte un ensemble de pays dont la densité de population dépasse 200 habitants/km2 et même légèrement 400 aux Pays-Bas.
18. A la périphérie limitrophe de cette dorsale, les pays européens ont des densités moins importantes, entre 101 et 150 habitants/km². Il s’agit de l’Autriche, du Danemark, de la Hongrie, de la Pologne, de la République slovaque, de la République tchèque et de la France.
19. Au-delà de cette périphérie limitrophe, la densité s’amoindrit à 100 habitants/km² ou moins, tout en restant supérieure à 55 habitants/km2: Bulgarie, Espagne, Roumanie, Ukraine, pays des Balkans. Ne font exception que la République de Moldova et le Portugal, respectivement à 121 et 112 habitants/km2.
20. Enfin, la densité de population est particulièrement faible, inférieure ou nettement inférieure à 55 habitants/km² dans les pays Baltes et dans des pays septentrionaux dont une partie du territoire se situe au-dessus du cercle polaire arctique: Islande, Norvège, Suède et Finlande.
21. Pour retrouver une densité de population équivalente à la moyenne des pays du Conseil de l’Europe, (Russie non comprise), soit autour de 100 habitant/km2, il faut considérer la Turquie et deux des trois pays du Sud-Caucase, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, tandis que la densité de la Géorgie est de moitié inférieure à cette moyenne.
22. Toutefois, deux pays européens peu vastes ont les densités les plus élevées. Le premier, Malte, qui compte 1 333 habitants/km², est, il est vrai, un très petit archipel méditerranéen. Le second, l’Etat à la plus faible superficie, Monaco, avec 40 000 habitants/km², n’est pas très éloigné de la dorsale de peuplement.
23. A l’échelle des pays, le peuplement de l’Europe présente donc une logique géographique d’ensemble.
24. A l’échelle des régions des différents Etats du Conseil de l’Europe, la logique du peuplement resserre la dorsale précisée ci-dessus comme ensemble géographique le plus dense, ne retenant par exemple de l’Allemagne que les régions de l’Allemagne rhénane. A cette échelle des régions, les différences de peuplement sont nettement plus accusées; elles tiennent à des décisions politiques, aux effets de l’urbanisation ou aux résultats des migrations depuis des régions peu attrayantes vers des régions attractives 
			(7) 
			Dumont,
Gérard-François, «Die demographische Herausforderung: externe Schwächung,
interne Spannungen», in: Clouet, Louis-Marie; Marchetti, Andreas, Europa und die Welt 2020, Nomos,
Baden-Baden, janvier 2011, p. 197-217. ISBN 978-3-8329-6017-9..
25. D’une part, la densité de population dépasse 1 000 habitants/km² dans des régions fortement urbanisées et à faible superficie. C’est par exemple le cas en Angleterre, dans les régions de Liverpool, Manchester, Birmingham et, bien sûr, Londres, ou en Allemagne avec les trois villes-Etats (Stadtstaat), Brême, Hambourg et Berlin. Quant à la région Île-de-France autour de Paris, sa densité avoisine 1 000 habitants/km², ce qui constitue notamment un héritage de la politique centralisatrice de la France.
26. D’autre part, la densité est relativement élevée dans des régions européennes qui se montrent attractives par leur dynamisme économique ou par leur qualité de vie supposée, comme certaines régions littorales (Communauté de Valencia, Catalogne, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Ligurie) ou continentales (certains cantons suisses, la Bavière, le Bade-Wurtemberg, le Piémont ou la Lombardie).
27. A l’inverse, les régions septentrionales de l’Europe sont très peu denses. C’est également le cas de régions non littorales ne disposant pas d’une grande ville et ayant subi une forte émigration rurale, comme les Castille espagnoles ou les régions françaises du massif Central.
28. Ainsi, les pays du Conseil de l’Europe ne forment pas ce qu’on appellerait en démographie un «monde plein». Les possibilités de peuplement, en particulier dans les régions fort peu denses, sont incontestables. Un peuplement supplémentaire est donc possible par excédent des naissances sur les décès ou par apport migratoire. Il importe donc de savoir si les pays du Conseil de l’Europe accroissent leur peuplement sous l’effet de leur mouvement naturel, ce qui nécessite d’examiner la natalité et la mortalité.
29. Dans plusieurs autres régions, comme l’Afrique subsaharienne ou le sous-continent indien, l’évolution démographique s’inscrit dans la période dite de la «transition démographique», pendant laquelle une population passe d’une mortalité et d’une natalité élevées à une mortalité et à une natalité abaissées 
			(8) 
			Dumont,
Gérard-François, «Afrique-Europe: l’inversion démographique», dans:
Cluzel, Jean, Solidarité Europe-Afrique,
Paris, Economica, octobre 2013, ISBN 978-2-7178-6636-0.. Dans d’autres régions qui ont terminé leur transition démographique, comme l’Amérique, l’évolution démographique demeure dynamique. En revanche, les pays du Conseil de l’Europe sont, en moyenne, particulièrement concernés par des changements démographiques inédits avec une situation d’«hiver démographique» qui appelle des politiques adaptées.

2.2. La natalité presque partout d’«hiver démographique»

30. Au milieu des années 2010, le taux de natalité moyen des Etats membres du Conseil de l’Europe a la particularité d’être le plus faible de tous les ensembles continentaux 
			(9) 
			Voir le tableau à l’annexe
3: Mouvements naturel et migratoire des Etats membres du Conseil
de l'Europe.: il est en effet de 11 naissances pour mille habitants, contre 20 pour la moyenne mondiale. Ce taux est presque aussi élevé que celui de la Chine, pays qui, il est vrai, a accentué la diminution de sa natalité par une politique démographique coercitive. Il est supérieur à celui du Japon, où la fécondité s’est considérablement abaissée depuis plusieurs décennies et où le nombre de personnes âgées est particulièrement élevé en raison d’une des espérances de vie les plus longues au monde. La faible natalité moyenne des Etats du Conseil de l’Europe est bien mise en évidence par deux pourcentages: ces Etats représentent 11,3 % de la population dans le monde mais seulement 6,3 % des naissances, précisément 9,3 millions de naissances en 2015, dans un ensemble mondial qui en a enregistré 147 millions.
31. La principale raison de la faible natalité moyenne des Etats membres tient à l’abaissement de la fécondité 
			(10) 
			Voir le tableau à l’annexe
4: Mortalité infantile, fécondité, composition par âge et espérance
de vie dans les Etats membres du Conseil de l'Europe., ces dernières décennies, jusqu’à un niveau moyen d’environ 1,5 enfant par femme. L’indice synthétique de fécondité de l’Europe est tombé de 2,65 enfants par femme au début des années 1950 à 1,5 dans les années 2010. Or, il faut rappeler que, compte tenu du niveau sanitaire européen, il faudrait 2,1 enfants par femme pour permettre le simple renouvellement des générations, c’est-à-dire pour que cent femmes d’une génération soient remplacées à la génération suivante, soit une trentaine d’années plus tard, par le même effectif de cent femmes. Pour dénommer cette situation, à la fin des années 1970, l’expression «hiver démographique» a été utilisée pour définir une période de fécondité nettement et durablement au-dessous du seuil de remplacement des générations 
			(11) 
			Dumont, Gérard-François, «Fertility
in Europe: What Influence of Family Policies?», Population & Avenir, n° 716, janvier-février
2014..
32. Toutefois, ce régime démographique naturel d’«hiver démographique» connaît des variations spatiales qui révèlent en partie des logiques géographiques. En effet, la géographie de la fécondité, selon les dernières données (2015), met en évidence des contrastes. Un seul pays présente une fécondité supérieure au seuil de remplacement des générations: la Turquie, avec 2,2 enfants par femme. Certes, l’Azerbaïdjan a le même niveau de fécondité mais son seuil de remplacement des générations, compte tenu de taux de mortalité avant l’âge adulte relativement élevés, est de 2,27 enfants par femme. Ensuite, les fécondités les plus élevées, ou les moins basses, donc entre 1,7 et 2,0 enfants par femme, s’observent surtout en Europe septentrionale (Irlande, Islande, Norvège, Royaume-Uni, Suède, Danemark et Finlande), dans le pays le plus vaste de l’Europe occidentale, la France, et en Russie, pays qui a enregistré une hausse de sa fécondité par rapport aux années 2000.
33. A l’inverse, les fécondités très basses, inférieures à 1,4 enfant par femme, s’enregistrent en Europe méridionale (Bosnie-Herzégovine, Espagne, Grèce, Portugal) ou en Europe orientale (République de Moldova, Pologne et Roumanie). De fait, la République de Moldova est le pays du monde dont la population diminue le plus vite 
			(12) 
			Fonds des Nations Unies
pour la population (FNUAP) République de Moldova, Population Trends,
fact-sheet 2016..
34. Entre les deux niveaux ci-dessus, la fécondité est basse, à 1,5 ou 1,6 enfant par femme, dans une quinzaine de pays: Allemagne, Autriche, Ukraine, Croatie, Serbie, etc.
35. Les différences de fécondité selon les pays européens, dues à des facteurs culturels, économiques et sociaux propres à chaque pays, ont aussi des causes politiques: de façon générale, les pays qui consacrent davantage de moyens à la politique familiale ont les fécondités les plus élevées; en revanche, ceux qui ont une politique familiale fort réduite enregistrent une très faible fécondité.
36. La faible fécondité moyenne dans les Etats membres du Conseil de l’Europe est de nature à engendrer une baisse de la population. En effet, une fécondité de 1,5 enfant par femme signifie qu’une cohorte de 100 femmes, soit cent femmes nées une année considérée, serait suivie à la génération suivante, soit une trentaine d’années plus tard, par une cohorte de seulement 71 femmes. Certes, globalement, la projection moyenne à l’horizon 2050 n’anticipe pas une baisse de la population mais une stagnation, avec 831 millions d’habitants en 2050 contre 826 en 2015. Mais cette absence de baisse s’explique principalement par deux hypothèses favorables: une hausse de l’espérance de vie et des apports migratoires.
37. Face à l’«hiver démographique», il est souhaitable que les pays du Conseil de l’Europe déploient des politiques et des services qui permettent aux couples de choisir le nombre d’enfants qu’ils souhaitent et, en particulier, de concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle, ce qui a des chances de faire augmenter le taux de natalité.

2.3. Des conditions de mortalité particulièrement favorables

38. Dans les années 2010, les pays du Conseil de l’Europe enregistrent ensemble une hausse du nombre des décès, précisément à 9,3 millions en 2015, soit 18,2 % des décès totaux dans le monde (51 millions). Cela ne s’explique nullement par une détérioration des conditions de vie. Bien au contraire, ces dernières années, l’espérance de vie s’est accrue pour les deux sexes. Toutefois, plus le nombre de personnes âgées augmente et plus celui de décès est susceptible de s’accroître. La raison de l’augmentation du nombre de décès tient donc essentiellement à la croissance du nombre de personnes susceptibles de décéder puisque, selon la formule de J.M. Keynes: «à long terme, nous serons tous morts».
39. La baisse de la mortalité, qui engendre une hausse de la longévité, tient à quatre facteurs principaux:
  • une meilleure alimentation, plus complète, plus riche et plus variée, notamment grâce au progrès technique agricole, et au développement des possibilités de transports et, donc, d’échanges;
  • de meilleures conditions et pratiques d’hygiène;
  • les progrès et le développement des techniques médicales et pharmaceutiques et des réseaux sanitaires;
  • le progrès du machinisme qui diminue la pénibilité du travail.
40. La géographie de la mortalité des pays du Conseil de l'Europe peut être approchée par l’espérance de vie 
			(13) 
			Voir le tableau à l’annexe
4: Mortalité infantile, fécondité, composition par âge et espérance
de vie dans les Etats membres du Conseil de l'Europe en 2015.. Celle des femmes à la naissance est égale ou supérieure à 79 ans dans tous les pays d’Europe septentrionale et occidentale, ainsi que dans la plupart des pays d’Europe orientale et méridionale, Chypre, Géorgie et Turquie comprises.
41. A un niveau plus faible, donc inférieur à 79 ans, ne figure qu’une minorité de pays: Bulgarie, République de Moldova, Roumanie, Russie, Ukraine, Bosnie-Herzégovine, “l’ex-République yougoslave de Macédoine”, Serbie, Arménie et Azerbaïdjan.
42. Dans tous les pays, l’espérance de vie à la naissance des hommes est inférieure à celle des femmes, les plus grands écarts existant en Lettonie (9 ans), Lituanie et Ukraine (10 ans), et enfin en Russie (11 ans).
43. Bien entendu, il faut espérer que la baisse, il est vrai considérable au cours des dernières décennies, des mortalités infantile, infanto-adolescente et maternelle, se poursuivra. Mais, compte tenu de leurs niveaux déjà très bas, les progrès encore envisageables ne pourront pas avoir d’effets démographiques considérables. Des progrès sont également possibles en matière d’espérance de vie des personnes âgées, mais il ne faut pas en attendre une hausse significative de la population.
44. Toutefois, le risque que l’amélioration de l’espérance de vie puisse s’arrêter existe, en cas de détérioration des systèmes sanitaires, d’assurance maladie ou des pratiques d’hygiène. Par exemple, le développement possible des conduites à risque, comme la consommation de drogues (tabac, stupéfiants, alcool, etc.), pourrait avoir des effets délétères sur l’espérance de vie et, du fait de l’âge jeune des personnes concernées par ces conduites, conduire à une augmentation du nombre d’années potentielles de vie perdues. Face à ce risque, il faut améliorer l’éducation à la santé et à l’hygiène. En outre, la vigilance et la réactivité des pouvoirs publics à l’égard des industries doivent être amplifiées afin que la qualité de l’alimentation tant humaine qu’animale soit préservée (additifs alimentaires, produits phytosanitaires, produits cosmétiques, perturbateurs endocriniens), ainsi que l’environnement dans lequel les populations vivent (air, eau, etc.). La baisse de la mortalité excessive des personnes en âge de travailler rendra aussi la main-d'œuvre en meilleure santé et plus nombreuse, ce qui diminuera la nécessité de migrations de travail.

2.4. La géographie des taux d’accroissement naturel

45. Le bilan de la natalité et de la mortalité de l’année 2015, assez semblable à celui des années précédentes, signifie donc une stagnation démographique, avec un nombre semblable de naissances et de décès.
46. Toutefois, à l’examen des données du Population Reference Bureau de l’année 2015, le régime démographique naturel des pays du Conseil de l’Europe marque une différence entre des pays ayant un taux d’accroissement naturel positif, donc plus de naissances que de décès, et ceux avec un taux nul ou négatif. La géographie de ces derniers recouvre des pays d’Europe centrale et orientale (Bulgarie, Hongrie, République de Moldova, Pologne, Roumanie, République tchèque, Russie), septentrionale (Estonie, Lettonie, Lituanie, Finlande) ou méridionale (Bosnie-Herzégovine, Croatie, Grèce, Italie, Portugal et Serbie). Ces pays cumulent les effets d’une fécondité particulièrement basse et d’une longévité moindre par rapport à la moyenne. Seul un pays d’Europe occidentale, l’Allemagne, a un taux d’accroissement naturel négatif.
47. A l’opposé, en 2015, les pays du Conseil de l’Europe à taux d’accroissement naturel nettement positif, donc équivalent à la moyenne mondiale (qui est de 1,2 pour cent habitants), ne sont que deux: la Turquie et l’Azerbaïdjan.
48. Dans les pays du Conseil de l’Europe à taux d’accroissement naturel positif mais nettement inférieur à la moyenne mondiale, la raison fondamentale de ce niveau positif est presque toujours ce qu’on appelle en démographie l’effet d’inertie. Ce dernier signifie que l’analyse d’une population doit prendre en compte l’évolution démographique cachée dans la composition par sexe et par âge (la pyramide des âges). Ainsi, des pays du Conseil de l’Europe (Danemark, Autriche, Luxembourg ou Suisse) enregistrent une croissance démographique naturelle, donc un excédent des naissances sur les décès, en dépit d’une fécondité fort abaissée, en raison de leur pyramide des âges leur donnant (encore) une proportion relativement élevée de femmes en âge fécond 
			(14) 
			Dumont, Gérard-François, «L’Union
européenne face à l’immigration», Diplomatie,
n° 76, septembre-octobre 2015, p. 25-30..
49. Le bilan du mouvement naturel des Etats membres engendre des perspectives incontestables: sauf forte remontée de la fécondité, important accroissement de l’espérance de vie ou apports migratoires, la population est appelée à diminuer sous l’effet de son vieillissement.

2.5. Un vieillissement de la population qui s’accentue

50. En effet, l’ensemble formé par les pays du Conseil de l’Europe est la région la plus vieillie du monde, en raison de la proportion élevée de personnes âgées de 65 ans ou plus dans l’ensemble de sa population.
51. La première cause du vieillissement de la population européenne est ce qu’on appelle le vieillissement «par le bas», dû à une fécondité fort abaissée. Il en résulte des effectifs moindres dans les générations de jeunes, ce qui favorise une diminution du pourcentage de la population jeune et, inversement, une augmentation de celui de la population âgée. Cet incontestable vieillissement «par le bas» se trouve complété par une autre cause: les progrès sanitaires et hygiéniques ainsi que les améliorations des conditions de vie qui engendrent le vieillissement «par le haut». Ce dernier résulte de l’augmentation de l’espérance de vie des personnes âgées.
52. Les échanges migratoires constituent un troisième facteur pouvant avoir des effets sur l’intensité du vieillissement. Mais il s’agit, en ce qui concerne les pays du Conseil de l’Europe, d’un frein au vieillissement puisque l’immigration y est constituée, pour l’essentiel, de populations jeunes. En effet, la propension à émigrer vers l’Europe pour des raisons économiques (y trouver un travail ou un meilleur travail, avec des revenus supérieurs, ou y chercher une amélioration de ses conditions de vie) est inversement proportionnelle à l’âge des actifs. Par exemple, les ressortissants d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie qui viennent assurer des services aux particuliers, notamment dans le domaine de la garde d’enfants ou de l’aide aux personnes âgées, font partie des générations de jeunes actifs. Il en va de même pour les immigrants travaillant dans les métiers du bâtiment et des travaux publics.
53. Le caractère généralement jeune de l’immigration en Europe concerne aussi les demandeurs d’asile et, plus encore, le regroupement familial, qui voit entrer principalement des femmes et des enfants, ainsi que les étudiants originaires des autres continents. En outre, comme l’attestent les régularisations d’immigrés en situation illégale effectuées dans plusieurs Etats membres ces dernières décennies, leur moyenne d’âge est également nettement inférieure à la moyenne.
54. Le facteur migratoire exerce un autre effet limitant le vieillissement dans la mesure où il concerne des populations à la fois en plus forte proportion d’âge à la fécondité et ayant souvent des fécondités plus élevées que la population déjà présente. Le système migratoire européen concourt donc à rajeunir la population, mais l’intensité des vieillissements «par le haut» et «par le bas» gomme largement cet effet.
55. Le vieillissement européen semble appelé à s’accentuer à l’avenir puisque les projections démographiques laissent généralement penser que les effets des deux premiers facteurs étudiés, les vieillissements «par le haut» et «par le bas», vont s’intensifier: probable diminution des naissances en raison de la baisse du nombre de femmes en âge de procréer, donc même en cas de légère remontée de la fécondité et de hausse de l’espérance de vie des personnes âgées.
56. Un quatrième facteur joue dans le même sens: l’héritage démographique, avec des générations arrivant à l’âge de la retraite plus nombreuses que les précédentes, dont le nombre avait été minoré en raison des effets des guerres mondiales.
57. Toutefois, l’intensité du vieillissement est fort différente selon l’Etat membre. Les écarts de vieillissement sont importants entre les maxima de l’Italie (22 % de 65 ans ou plus en 2015), de l’Allemagne et de la Grèce (21 %) et les minima de la Turquie (8 %) et de l’Azerbaïdjan (7 %). Ces écarts s’expliquent par les intensités variables des facteurs du vieillissement: évolution des niveaux et des calendriers de la fécondité, différences dans l’évolution de l’espérance de vie des personnes âgées et les niveaux atteints selon les pays, variété dans l’héritage démographique, différences dans le système migratoire et la composition par âge des flux d’immigration et d’émigration.
58. Comme les intensités et les rythmes du vieillissement sont fort différents selon les territoires européens, l’éventail de ses conséquences économiques, sociales ou politiques est très large. Selon les tendances du début du XXIe siècle, les plus forts vieillissements à venir devraient se constater en Europe orientale, qui cumule à la fois des fécondités très basses, des potentialités d’augmentation de l’espérance de vie des personnes âgées et une moindre attractivité migratoire vis-à-vis de populations jeunes susceptibles de minorer le vieillissement.
59. Les Etats membres qui enregistrent une forte émigration de leurs jeunes actifs devraient déployer des politiques d’emploi pour faciliter leur attractivité économique et diminuer l’exode rural qui, en raison de son importance, nuit à la fois à leur bon équilibre démographique et à leur dynamique économique.

2.6. La double inversion de la pyramide des âges

60. Une autre caractéristique démographique des Etats membres, résultant essentiellement de l’évolution de la natalité et de la mortalité, tient à la forme de la pyramide des âges. En effet, alors que celle de la population dans le monde a logiquement une forme pyramidale, celle des pays du Conseil de l’Europe compte au moins deux différences notables. La première tient à une proportion d’effectifs beaucoup plus élevée parmi les générations les plus âgées, avec une prépondérance de femmes, en raison, d’une part, de la longévité plus élevée en Europe et, d’autre part, de la longévité supérieure des femmes par rapport aux hommes.
61. La seconde tient à la base étroite de la pyramide des âges, puisque les générations de moins de 20 ans sont nettement moins nombreuses que celles correspondant à la population active, en conséquence de la fécondité abaissée. Ainsi, la pyramide des âges a enregistré une double inversion: davantage de personnes âgées que de jeunes et, au sein de la population active, davantage d’actifs âgés que d’actifs jeunes.
62. En conséquence, plusieurs pays enregistrent une diminution de leur population active et émettent, comme l’Allemagne, le souhait de trouver ce qu’il est convenu d’appeler, depuis un rapport des Nations Unies paru en 2000, des «migrations de remplacement». A partir des chiffres livrés par Eurostat, il est ainsi possible de noter qu’entre 2005 et 2015, l’éventail des évolutions de la tranche d’âge 15-64 ans est considérable: il varie entre +23,0 % pour le Luxembourg, exclusivement grâce à des apports migratoires, et +15,4 % pour la Turquie, en raison de sa dynamique naturelle, et -14,6 % pour la Lettonie. Près de 20 pays du Conseil de l’Europe ont enregistré une diminution de leur population dans cette tranche d’âge. Outre la Lettonie, la Lituanie, la Bulgarie et la Roumanie ont connu les plus forts pourcentages de baisse de leur population active, supérieurs à 7 %. En dépit des apports migratoires dont elle a bénéficié dans cette période 2005-2015, l’Allemagne a vu sa population de la même tranche d’âge diminuer de 2,72 %.
63. Certes, la baisse de la population active peut être enrayée par l’augmentation du taux d’emploi, par exemple celui des jeunes et des seniors. Mais cela n’est pas nécessairement suffisant pour satisfaire les besoins de l’économie. D’autres pays ont enregistré une hausse de leur population active uniquement grâce à des apports migratoires, comme la Suisse, l’Autriche et l’Italie, ou grâce à une combinaison d’apports migratoires et de fécondité moins abaissée dans les précédentes décennies, comme la France ou le Royaume-Uni. Or, entre des pays européens ayant un système économique semblable, la création de richesses est corrélée à l’importance de la population active, plus précisément à la population active ayant un emploi. Par exemple, le produit intérieur brut (PIB) de la France est six fois supérieur à celui de la Belgique parce que la France compte une population active six fois supérieure.
64. Pour mieux réfléchir à l'impact de la dynamique des populations sur les politiques migratoires, il est utile de prendre des exemples historiques qui permettront une mise en perspective.

3. Exemples historiques illustrant les effets des évolutions démographiques sur les politiques migratoires

65. L’histoire recèle de nombreux exemples de politiques migratoires dont la mise en œuvre s’est notamment fondée sur les dynamiques démographiques, qu’il s’agisse des niveaux de peuplement, de natalité ou de mortalité.

3.1. Niveau de peuplement et politique migratoire

66. Déjà, des auteurs du passé, comme Platon ou Machiavel, proposent dans leurs ouvrages la mise en œuvre de politiques migratoires variables selon le peuplement. Platon, dans Les Lois, s’affiche partisan de la fixité démographique du peuplement. Il souhaite dans la cité d’Athènes «ajuster le nombre des foyers au chiffre de cinq mille quarante», et il présente tout un ensemble de mesures publiques pour y parvenir. Platon demande un encouragement à l’émigration si la natalité est jugée trop élevée et, dans le cas contraire, et si on ne parvient pas à augmenter la natalité, une politique d’immigration. Machiavel, dans ses Histoires florentines (1520-1526), conseille aux princes et aux républiques «d’entretenir partout une abondante population». Toutefois, selon les ressources exploitables, il souhaite une mise en œuvre de politiques d’émigration ou d’immigration.
67. Dans la réalité, nombre de pays, jugeant leur peuplement insuffisant par rapport à leur potentiel économique, ont déployé des politiques migratoires favorisant l’immigration. Par exemple, le Brésil, au XIXe siècle et dans le premier quart du XXe siècle, a souhaité accueillir une importante immigration européenne, qui atteignit son apogée de 1900 à la guerre de 1914-1918. De même, l’Argentine du XIXe siècle encouragea l’immigration d’Européens, parfois en fournissant gratuitement des terres ou en les louant à un faible prix. Le cas des Etats-Unis encourageant l’immigration européenne est bien connu, avec une politique migratoire d’immigration choisie, par le biais de deux réglementations: d’une part, des interdictions selon l’origine des personnes, avec des quotas fixés pour décourager et empêcher la venue d’immigrants non européens (quotas supprimés seulement en 1965) et, d’autre part, un tri effectué, par exemple de 1892 à 1954, à Ellis Island, dans la baie de New York, principale porte d'entrée aux Etats-Unis pour les 12 millions de personnes qui purent y transiter. Parmi les mesures d’attraction migratoire, en dépit des contraintes ci-dessus complétées par l’interdiction à certaines catégories de personnes (anarchistes, polygames, etc.), il faut rappeler la sécurité juridique offerte par les Etats-Unis aux immigrants avec l’attribution de la nationalité américaine aux enfants dès leur naissance, selon un systématique jus soli toujours en vigueur à ce jour.
68. Au XXe siècle comme au XXIe, les exemples du Canada et de l’Australie, deux pays très faiblement peuplés puisque la densité de population y est respectivement de 4 et de 3 habitants/km2, sont bien connus. Par exemple, le Parlement du Canada vote chaque année une loi fixant le nombre d’immigrants que ce pays est prêt à accueillir dans le cadre de sa politique d’immigration choisie. Ces dernières décennies, parmi les pays avides d’immigration, il faut citer le cas du Gabon, pays au très faible peuplement (7 habitants/km2) et n’ayant pas assez de population active compte tenu de son potentiel économique, par exemple en minerais ou dans tout ce qui concerne l’industrie du bois.
69. A l’inverse, il est arrivé que des pays à fort peuplement découragent l’immigration et notamment le retour de leurs ressortissants ayant auparavant émigré. Ainsi, l’Inde, après son indépendance en 1947, prôna l’intégration des communautés indiennes émigrées dans les nouveaux Etats issus du démembrement de l’Empire britannique, communautés représentant plusieurs millions d’habitants. Aussi les nombreux Indiens résidant en Birmanie et en Malaisie furent-ils enjoints d’adopter la nationalité de ces nouveaux Etats devenant indépendants et, donc, à ne pas revenir concourir au peuplement de l’Inde. Ensuite, en 1972, le Gouvernement indien se montra à nouveau très réticent à l’accueil de ses émigrés d’outre-mer. Il fit savoir qu’il n’était pas prêt à recevoir ses ressortissants, au nombre d’environ 50 000, qui avaient été expulsés par le Gouvernement ougandais d’Amin Dada. Nombre d’entre eux durent donc trouver refuge ailleurs, notamment au Royaume-Uni.

3.2. Evolution de la natalité et politique migratoire

70. Concernant les dynamiques de la natalité, elles ont également des effets sur les politiques migratoires. Toute faible natalité engendre, une vingtaine d’années plus tard, des insuffisances de population active. Aussi est-il arrivé que des pays cherchent à compenser ce manque par des migrations de remplacement. Par exemple, la France du XIXe siècle s’est caractérisée par une fécondité exceptionnellement abaissée, d’où la faiblesse de sa population active. Elle a donc décidé de favoriser l’immigration, à l’époque essentiellement européenne. Pour cela, elle conforta par exemple le maintien des enfants de familles dont les parents étaient de nationalité étrangère en instaurant en 1851 le double jus soli, c’est-à-dire en attribuant automatiquement la nationalité française à toute personne née en France d’un étranger lui-même né en France.
71. En revanche, dans des pays à forte natalité, les dirigeants n’agissent guère pour freiner l’émigration, bien que cette dernière ait pour effet de réduire leurs ressources humaines, et plus particulièrement les plus actives puisque l’émigration se concentre sur la tranche d’âge des 18-30 ans. Dans tous les pays africains portés ces dernières décennies par une natalité élevée et ses effets stimulant la croissance démographique, aucun gouvernement n’a mis en œuvre d’action freinant l’émigration. Qui plus est, peu d’actions ont été ou sont conduites pour lutter contre les passeurs qui, exploitant la misère humaine, privent en même temps les pays d’une force de travail parfois particulièrement compétente (médecins, ingénieurs, etc.).

3.3. Evolution de la mortalité et politique migratoire

72. Les dynamiques de la mortalité exercent également des effets sur les politiques migratoires. Des pays ayant souffert d’une forte mortalité limitant les effectifs de la population peuvent opter pour des politiques migratoires visant à attirer des actifs dans leur pays. Par exemple, après la première guerre mondiale, la France, après avoir perdu 1 350 000 jeunes hommes dans le conflit, et face à 2 millions de blessés à productivité réduite ou nulle du fait de leurs blessures, décida de conduire des politiques destinées à faire venir des actifs d’autres pays, qu’ils soient limitrophes ou non, comme la Pologne. Autre exemple: après la seconde guerre mondiale, la Belgique a passé des accords avec l’Italie pour aller y recruter des travailleurs. En vertu d’un protocole signé à Rome le 23 juin 1946 et de ses annexes du 26 avril 1947, des ouvriers italiens étaient recrutés en Italie, après avoir passé les tests médicaux, avant d’être acheminés par train dans les principales gares de Wallonie.
73. L’existence d’une mortalité forte, due à une pandémie dans un pays, peut avoir l’effet contraire, poussant des pays limitrophes à fermer leurs frontières pour empêcher l’immigration. Par exemple, lors de l’épidémie de choléra au Zimbabwe, d'août 2008 à juillet 2009, le Botswana a renforcé ses 500 km de grillage électrifié le long de la frontière pour empêcher l’arrivée éventuelle de Zimbabwéens contaminés.
74. Les exemples ci-dessus montrent que différents pays ont déployé ou déploient des politiques migratoires qui ne sont pas indépendantes de la dynamique des populations.

4. Les migrations peuvent-elles résoudre les problèmes démographiques de l’Europe? 
			(15) 
			Une
audition sur le sujet a été organisée en avril 2016.

75. Du tableau dans l’annexe 3, qui rend compte des mouvements naturel et migratoire des Etats membres du Conseil de l'Europe, il ressort clairement que, même si l’on prend en compte l’augmentation importante des flux migratoires vers l’Europe ces dernières années, provoquée notamment par l’arrivée de réfugiés, la dynamique démographique européenne n’a pas été influencée de manière significative. Il est donc peu probable que les migrations puissent à elles seules enrayer le déclin démographique de l’Europe.
76. Cependant, les migrations pourraient être considérées comme un facteur contribuant à contrebalancer le vieillissement démographique de l’Europe. Nombreux sont les pays européens qui ne parviendront pas à maintenir leurs systèmes de protection sociale sans une augmentation du nombre de contribuables qui travaillent. Par exemple, environ 20 % de la population de l’Allemagne est âgée de plus de 65 ans et l’accroissement naturel de la population est négatif. Face à ce problème, le Gouvernement allemand dépense quelque 250 millions d’euros par an en allocations familiales pour essayer d’inverser la tendance, mais sans grand succès. Sous l’effet de la réinstallation de réfugiés ces deux dernières années, une légère augmentation de la population a toutefois été enregistrée. Cela dit, même si les arrivées de migrants continuent au rythme actuel, il sera difficile d’inverser une tendance au déclin démographique qui s’observe depuis une dizaine d’années déjà. En outre, intégrer autant de réfugiés sur le marché du travail ne va pas de soi. De fait, la grande majorité des réfugiés arrivés en Allemagne ces dernières années étaient peu qualifiés et avaient un faible niveau d’instruction. Or, ce sont surtout des postes qualifiés que l’Allemagne a besoin de pourvoir 
			(16) 
			Dumont,
Gérard-François, Les migrations internationales.
Les nouvelles logiques migratoires, Paris, Éditions Sedes (Armand
Colin), 1995, ISBN 2-7181-9429-4 ISSN 1248-7244..
77. Le problème est que le gouvernement, qui se concentre sur la recherche d’une solution à la question des réfugiés et de leur intégration, n’a pas de stratégie bien structurée pour encourager l’accroissement naturel de la population et attirer des migrants diplômés pour occuper les postes qualifiés vacants.
78. Il faut aussi garder à l’esprit que, pour ce qui est d’attirer la main-d'œuvre qualifiée, l’Europe sera en concurrence avec des pays comme l’Australie, le Canada, les Etats-Unis et la Nouvelle-Zélande. Ces pays d’immigration traditionnelle se caractérisent par une croissance démographique et par des marchés du travail très attractifs. Pour être concurrentielle, l’Europe devra impérativement rétablir la confiance sur les questions migratoires dans sa population. Les citoyens européens surestiment souvent le nombre de migrants présents dans leur pays et craignent que ces étrangers ne leur prennent leur emploi. Les données de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) montrent que les migrations permanentes de pays tiers vers les pays européens est faible, bien plus faible que vers les Etats-Unis. Cependant, la migration nette en provenance de pays non membres de l’Union européenne stimule la dynamique démographique des pays européens 
			(17) 
			Dumont, Gérard-François, «L’immigration
et l’Europe», Revue politique et parlementaire,
n° 1046, janvier/mars 2008, p. 27-34. ISSN 0035-385X..
79. A long terme, l’afflux de jeunes travailleurs migrants pourrait atténuer les problèmes démographiques de certains pays européens, notamment en comblant un manque de travailleurs qualifiés et en contribuant ainsi à la croissance du PIB et au financement des retraites. Cela suppose de mettre en place des politiques qui créent des conditions favorables à la participation des migrants au marché de l’emploi. Ces politiques devraient être fondées sur une analyse sectorielle complète du marché de l’emploi permettant de recenser les besoins réels de main-d'œuvre immigrée. Il est également nécessaire de lever tous les obstacles liés au droit interne qui empêchent les réfugiés qualifiés d’accéder rapidement à l’emploi.
80. Il faudrait encourager la conclusion d’accords bilatéraux entre les pays d’origine des migrants et les pays d’accueil pour réduire le coût des migrations et garantir aux migrants des possibilités d’emploi légal et une couverture sociale. De tels accords contribuent aussi à lutter contre le travail clandestin et à prévenir l’exploitation des migrants.
81. Les pays d’accueil devraient certes créer des possibilités légales, pour les réfugiés, de s’intégrer plus vite sur le marché du travail, mais ils devraient aussi promouvoir la formation professionnelle des réfugiés qui n’ont pas les compétences requises. Concernant les migrants hautement qualifiés, il importe de faciliter la reconnaissance de leurs diplômes et de leur expérience professionnelle.
82. Enfin, si un travail décent constitue le meilleur moyen d’inciter les migrants à s’intégrer, les pays d’accueil devraient aussi revoir leurs politiques d’intégration, de manière à ce que les migrants ne soient pas victimes de ségrégation dans la société d’accueil, mais participent à la vie sociale et culturelle de la collectivité. Il importe également d’encourager la participation des femmes migrantes au marché du travail. Cela favorisera leur intégration et réduira les risques de ségrégation. Il faudrait organiser des programmes d’intégration spécialement destinés aux femmes, qui comprennent des cours de langue, une formation professionnelle et une familiarisation avec la culture du pays d’accueil. Quant à la population locale, elle devrait être mieux informée des avantages économiques des migrations légales et de la diversité culturelle pour la société. Les citoyens européens devraient être encouragés à accepter les différences culturelles et religieuses des migrants lorsqu’elles ne sont pas contraires à la loi ni aux valeurs des droits de l'homme. Dans le même temps, le droit interne devrait prévoir des mesures strictes contre toutes les formes de discrimination, de racisme et de xénophobie.

5. Conclusion et recommandations

83. Compte tenu de la distribution spatiale très inégale du peuplement selon les territoires, les Etats européens doivent prendre en compte leur situation démographique particulière pour tenter de corriger cette distribution.
84. Face à une natalité presque partout proche d’un hiver démographique, il est souhaitable de promouvoir des politiques qui permettent aux couples d'avoir le nombre d’enfants qu’ils désirent, car cela a des chances de faire augmenter les taux de natalité. Dans ce dessein, il convient, par des politiques adaptées (politique «familiale», conciliation entre vie professionnelle et vie familiale supposant des systèmes de garde des enfants en bas âge, etc.), de permettre aux parents potentiels de choisir librement le nombre de leurs enfants, en levant les freins qui empêchent ce libre choix.
85. Le fait que les conditions de mortalité soient particulièrement favorables par rapport aux autres régions du monde ne doit pas être considéré comme un acquis. Il faut agir pour maintenir ces conditions favorables, voire pour améliorer davantage l’espérance de vie en bonne santé. Puisque le droit à la santé est un droit de l’homme, cela suppose de poursuivre les efforts pour améliorer l’hygiène, notamment à travers l’éducation à l’hygiène, et, parallèlement, de renforcer les réseaux sanitaires et le contrôle sur l'utilisation des produits chimiques (produits phytosanitaires, cosmétiques, perturbateurs endocriniens, etc.).
86. Même si les migrations ne peuvent pas constituer une solution permanente aux défis démographiques de l’Europe, des politiques migratoires proactives pourraient améliorer la situation. Pour mieux utiliser l’important afflux de migrants que connaît actuellement l’Europe, les pays d’accueil devraient élaborer des stratégies politiques à long terme, fondées sur les besoins du marché du travail, qui favorisent l’intégration des migrants et encouragent leur entrée rapide sur le marché du travail.
87. A travers l’ensemble de ses réglementations, tout pays a une politique migratoire, même si elle ne fait pas l’objet d’une formulation explicite. Il est juste que les Etats, de même qu’ils se choisissent une politique étrangère, une politique économique ou une politique sociale, réfléchissent à leur politique migratoire, souhaitable pour le pays et conforme au bien commun comme aux intérêts de leur population. Cette réflexion doit se fonder sur des valeurs, comme celles énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l'homme ou dans la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5). Elle doit également prendre en compte le principe de réalité, ce qui suppose de bien connaître la dynamique démographique du pays et les besoins de son marché du travail 
			(18) 
			Dumont,
Gérard-François, «L'avenir des droits de l'homme face aux bouleversements
démographiques», Agir, Société de stratégie,
n° 53, mai 2014, p. 77-86..
88. Face au vieillissement de la population qui s’accentue et parfois au dépeuplement, la politique migratoire de chaque pays doit s’adapter. Cela suppose, par exemple, que les gouvernements prennent des mesures pour inciter les jeunes à rester dans leurs pays d'origine où s'observent de forts taux d'émigration, ce qui limitera les effets du vieillissement.
89. Au sein des pays du Conseil de l’Europe, l’intensité de l’hiver démographique est variable selon les pays, engendrant des évolutions qui peuvent être divergentes. Il en résulte que les politiques migratoires ne devraient pas être nécessairement les mêmes, mais dépendre de la dynamique propre à la population concernée.

Annexe 1 – Populations et densité des Etats membres du Conseil de l'Europe (ordre alphabétique anglais) 
			(19) 
			Tous
les tableaux: © Gérard-François Dumont, Chiffres PRB, Population & Avenir, no 725.

(open)

 

Etats

Superficie

(milliers de km2)

Population

mi-2015

(millions)

Densité

habitants/

km2 2015

Projection: population 2050

(millions)

1

Albanie

29

2,9

100

2,8

2

Andorre

0,5

0,1

160

0,07

3

Arménie

30

3,0

100

2,5

4

Autriche

84

8,6

102

9,5

5

Azerbaïdjan

87

9,7

111

12,1

6

Belgique

31

11,2

361

13,1

7

Bosnie-Herzégovine

51

3,7

73

3,2

8

Bulgarie

111

7,2

65

5,8

9

Croatie

57

4,2

74

3,6

10

Chypre

9

1,2

133

1,4

11

République tchèque

79

10,6

134

11,1

12

Danemark

43

5,7

133

6,3

13

Estonie

45

1,3

29

1,2

14

Finlande

338

5,5

16

6,1

15

France (métropolitaine)

552

64,3

116

72,3

16

Géorgie

70

3,8

54

4,7

17

Allemagne

357

81,1

227

76,4

18

Grèce

132

11,5

87

9,7

19

Hongrie

93

9,8

105

9,4

20

Islande

103

0,3

3

0,4

21

Irlande

70

4,6

66

5,8

22

Italie

301

62,5

208

63,5

23

Lettonie

65

2,0

31

1,4

24

Liechtenstein

0,2

0,04

200

0,05

25

Lituanie

65

2,9

45

2,4

26

Luxembourg

3

0,6

200

0,7

27

«L’ex-République yougoslave de Macédoine»

26

2,1

81

1,8

28

Malte

0,3

0,4

1333

0,4

29

République de Moldova

34

4,1

121

2,9

30

Monaco

0,001

0,04

40 000

0,05

31

Monténégro

14

0,6

43

0,8

32

Pays-Bas

42

16,9

402

17,9

33

Norvège

385

5,2

14

6,7

34

Pologne

313

38,5

123

34

35

Portugal

92

10,3

112

9,1

36

Roumanie

238

19,8

83

16,4

37

Fédération de Russie

17 098

144,3

8

134,2

38

Saint-Marin

0,06

0,03

500

0,03

39

Serbie

88

7,1

81

6,1

40

République slovaque

49

5,4

110

5,0

41

Slovénie

20

2,1

105

2,0

42

Espagne

506

46,4

92

43,7

43

Suède

450

9,8

22

12,4

44

Suisse

41

8,3

202

9,0

45

Turquie

784

78,2

100

93,5

46

Royaume-Uni

243

65,1

268

77,0

47

Ukraine

604

42,8

71

32,3

 

TOTAL

23 833

825,8

35

830,8

TOTAL sans RUSSIE

6 735

681,5

101

696,6

Annexe 2 – Populations et densité des Etats membres du Conseil de l'Europe (ordre de densité décroissante)

(open)
 

Etats

Superficie

(milliers de km2)

Population

mi-2015

(millions)

Densité

habitants/

km2 2015

Projection: population 2050

(millions)

1

Monaco

0,001

0,04

40 000

0,05

2

Malte

0,3

0,4

1 333

0,4

3

Saint-Marin

0,06

0,03

500

0,03

4

Pays-Bas

42

16,9

402

17,9

5

Belgique

31

11,2

361

13,1

6

Royaume-Uni

243

65,1

268

77,0

7

Allemagne

357

81,1

227

76,4

8

Italie

301

62,5

208

63,5

9

Suisse

41

8,3

202

9,0

10

Liechtenstein

0,2

0,04

200

0,05

11

Luxembourg

3

0,6

200

0,7

12

Andorre

0,5

0,1

160

0,07

13

République tchèque

79

10,6

134

11,1

14

Chypre

9

1,2

133

1,4

15

Danemark

43

5,7

133

6,3

16

Pologne

313

38,5

123

34

17

République de Moldova

34

4,1

121

2,9

18

France (métropolitaine)

552

64,3

116

72,3

19

Portugal

92

10,3

112

9,1

20

Azerbaïdjan

87

9,7

111

12,1

21

République slovaque

49

5,4

110

5,0

22

Hongrie

93

9,8

105

9,4

23

Slovénie

20

2,1

105

2,0

24

Autriche

84

8,6

102

9,5

25

Arménie

30

3,0

100

2,5

26

Albanie

29

2,9

100

2,8

27

Turquie

784

78,2

100

93,5

28

Espagne

506

46,4

92

43,7

29

Grèce

132

11,5

87

9,7

30

Roumanie

238

19,8

83

16,4

31

«L’ex-République yougoslave de Macédoine»

26

2,1

81

1,8

32

Serbie

88

7,1

81

6,1

33

Croatie

57

4,2

74

3,6

34

Bosnie-Herzégovine

51

3,7

73

3,2

35

Ukraine

604

42,8

71

32,3

36

Irlande

70

4,6

66

5,8

37

Bulgarie

111

7,2

65

5,8

38

Géorgie

70

3,8

54

4,7

39

Lituanie

65

2,9

45

2,4

40

Monténégro

14

0,6

43

0,8

41

Lettonie

65

2,0

31

1,4

42

Estonie

45

1,3

29

1,2

43

Suède

450

9,8

22

12,4

44

Finlande

338

5,5

16

6,1

45

Norvège

385

5,2

14

6,7

46

Fédération de Russie

17 098

144,3

8

134,2

47

Islande

103

0,3

3

0,4

 

TOTAL

23 833

825,8

35

830,8

TOTAL sans RUSSIE

6 735

681,5

101

696,6

Annexe 3 – Mouvements naturel et migratoire des Etats membres du Conseil de l'Europe

(open)

Etats

Taux de natalité 2015 ‰

Taux de mortalité

2015 ‰

Naissances

2015

milliers

Décès

2015

milliers

Accroisse-ment naturel

2015

Taux d’accroiss-ement naturel %

Taux d’accroiss-ement migratoire ‰

Albanie

12

7

35

20

15

0,5

-6

Andorre

9

4

1

0

0

0,5

-7

Arménie

14

9

42

27

15

0,5

-6

Autriche

10

9

86

77

9

0,1

6

Azerbaïdjan

18

6

175

58

116

1,2

0

Belgique

11

10

123

112

11

0,1

5

Bosnie-Herzégovine

7

9

26

33

-7

-0,2

0

Bulgarie

9

15

65

108

-43

-0,6

0

Croatie

9

12

38

50

-13

-0,3

-2

Chypre

12

6

14

7

7

0,6

-12

République tchèque

10

10

106

106

0

0,0

2

Danemark

10

9

57

51

6

0,1

7

Estonie

10

12

13

16

-3

-0,2

-1

Finlande

10

10

55

55

0

0,0

3

France (métro.)

12

8

772

514

257

0,4

0

Géorgie

14

12

53

46

8

0,2

-2

Allemagne

8

11

649

892

-243

-0,3

5

Grèce

9

10

104

115

-12

-0,1

-1

Hongrie

9

13

88

127

-39

-0,4

-3

Islande

13

6

4

2

2

0,7

3

Irlande

15

6

69

28

41

0,9

-5

Italie

8

10

500

625

-125

-0,2

2

Lettonie

11

14

22

28

-6

-0,3

-4

Liechtenstein

9

7

0

0

0

0,2

4

Lituanie

11

14

32

41

-9

-0,3

-4

Luxembourg

11

7

7

4

2

0,4

19

«L’ex-République yougoslave de Macédoine»

11

10

23

21

2

0,1

0

Malte

10

8

4

3

1

0,2

3

République de Moldova

11

11

45

45

0

0,0

-1

Monaco

6

7

0

0

0

-0,1

13

Monténégro

12

10

7

6

1

0,2

-1

Pays-Bas

10

9

169

152

17

0,1

2

Norvège

12

8

62

42

21

0,4

7

Pologne

10

10

385

385

0

0,0

0

Portugal

8

10

82

103

-21

-0,2

-3

Roumanie

9

13

178

257

-79

-0,4

-4

Fédération de Russie

13

13

1 876

1 876

0

0,0

2

Saint-Marin

9

8

0

0

0

0,1

5

Serbie

9

14

64

99

-36

-0,5

-2

République slovaque

10

9

54

49

5

0,1

0

Slovénie

10

9

21

19

2

0,1

0

Espagne

9

9

418

418

0

0,0

-2

Suède

12

9

118

88

29

0,3

8

Suisse

10

8

83

66

17

0,2

11

Turquie

17

5

1 329

391

938

1,2

3

Royaume-Uni

12

9

781

586

195

0,3

4

Ukraine

11

15

471

642

-171

-0,4

1

TOTAL

11

11

9 306

9 306

0

0,0

2

Annexe 4 – Mortalité infantile, fécondité, composition par âge et espérance de vie dans les Etats membres du Conseil de l'Europe en 2015

(open)

Etats

Taux de mortalité infantile ‰

Taux de fécondité

enfants/femme

Seuil de rempla-cement

%

-15 ans

%

+65 ans

Espérance de vie des hommes

Espérance de vie des femmes

Albanie

7,9

1,8

2,12

19

12

76

80

Andorre

3,4

1,3

15

18

Arménie

9

1,5

2,18

19

11

72

78

Autriche

3

1,5

2,07

14

18

78

84

Azerbaïdjan

11

2,2

2,27

22

6

72

77

Belgique

3,8

1,8

2,07

17

18

78

83

Bosnie-Herzégovine

5

1,2

2,09

15

16

72

78

Bulgarie

7,6

1,5

2,09

14

20

71

78

Croatie

4,1

1,5

2,08

15

18

74

81

Chypre

5

1,4

2,08

17

12

78

82

République tchèque

2,4

1,5

2,07

15

17

76

82

Danemark

4

1,7

2,07

17

19

79

83

Estonie

2,8

1,5

2,08

16

19

73

81

Finlande

2,2

1,7

2,06

16

20

78

84

France (métro.)

3,5

2,0

2,07

19

18

79

85

Géorgie

10

1,7

2,15

17

14

71

79

Allemagne

3,3

1,5

2,07

13

21

78

83

Grèce

3,7

1,3

2,08

15

21

78

83

Hongrie

4,6

1,4

2,08

15

18

72

79

Islande

1,7

1,9

2,05

20

14

81

84

Irlande

3,7

2,0

2,09

22

13

79

83

Italie

2,9

1,4

2,07

14

22

80

85

Lettonie

3,5

1,6

2,08

15

19

70

79

Liechtenstein

3,3

1,5

15

16

81

84

Lituanie

3,8

1,7

2,08

15

18

69

79

Luxembourg

3,1

1,5

2,06

17

14

80

84

«L’ex-République yougoslave de Macédoine»

10

1,5

2,08

17

13

73

77

Malte

5,5

1,4

2,08

15

16

80

84

République de Moldova

10

1,3

2,10

16

10

68

76

Monaco

1,4

13

24

Monténégro

4,4

1,6

2,10

18

14

74

79

Pays-Bas

3,8

1,7

2,07

17

17

79

83

Norvège

2,4

1,8

2,07

18

16

80

84

Pologne

4,2

1,3

2,08

15

15

74

82

Portugal

2,8

1,2

2,08

14

19

77

83

Roumanie

8,8

1,3

2,10

16

17

71

78

Fédération de Russie

9,3

1,8

2,10

16

13

65

76

Saint-Marin

2,2

1,5

15

18

84

89

Serbie

5,7

1,6

2,08

14

18

73

78

République slovaque

6

1,4

2,07

15

14

73

80

Slovénie

2,1

1,6

2,07

15

18

78

84

Espagne

2,9

1,3

2,08

15

18

80

86

Suède

2,2

1,9

2,08

17

20

80

84

Suisse

3,9

1,5

2,07

15

18

81

85

Turquie

11

2,2

2,12

24

8

75

79

Royaume-Uni

3,9

1,9

2,07

18

17

79

83

Ukraine

9,6

1,5

2,11

15

15

66

76

TOTAL

5,9

1,7

2,1

16.6

16.1

74

81