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Résolution 2147 (2017)

La nécessité de réformer les politiques migratoires européennes

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 26 janvier 2017 (7e séance) (voir Doc. 14248, rapport de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, rapporteur: M. Ian Liddell-Grainger). Texte adopté par l’Assemblée le 26 janvier 2017 (7e séance).

1. L’Assemblée parlementaire est très préoccupée par l’incapacité des dirigeants européens à trouver des moyens d’action communs et à traiter avec efficacité la crise actuelle des migrations et des réfugiés. Cela inclut la perte continuelle de vies humaines en mer Méditerranée, l’inadéquation des conditions d’accueil, le partage des responsabilités entre les États concernant l’afflux massif de personnes, les violences aux frontières et contre les migrants, et, en conséquence, la perte de confiance du public dans la capacité des gouvernements et des institutions européennes à faire face à la crise.
2. La réponse inadéquate de l’Europe au développement actuel et à l’arrivée massive continuelle de réfugiés et de migrants a mis en lumière les failles systémiques des instruments et des mécanismes juridiques en vigueur. Cela inclut l’incapacité à contrôler les frontières extérieures de l’Union européenne, le caractère inapplicable du Règlement de Dublin dans la pratique, le dysfonctionnement des systèmes d’asile et les divisions entre les États en fonction de leur position politique et de leur situation géographique.
3. En outre, l’Assemblée déplore l’absence d’une vision d’ensemble précise de la gestion des flux migratoires et de solutions durables ainsi que le manque de débat sérieux, à l’échelon européen, sur le phénomène migratoire dans une perspective à long terme, et ses conséquences pour les sociétés d’accueil.
4. L’Assemblée se félicite des efforts constants de la Turquie et de l’Allemagne pour prendre en charge la plupart des réfugiés et des migrants irréguliers récemment arrivés sur leur territoire, et reconnaît les efforts consentis par l'Italie et la Grèce confrontées à l’arrivée – en tant que pays d'entrée – des principaux flux de réfugiés et de migrants.
5. Plusieurs attentats terroristes récents commis par des réfugiés ou des demandeurs d’asile soulèvent des questions de sécurité.
6. Un autre sujet de préoccupation est que l’intégration culturelle et sociale est parfois un échec, augmentant le risque de radicalisation de certains jeunes d’origine immigrée, y compris de deuxième et troisième générations.
7. En outre, l’Assemblée souligne que le droit et l’obligation de protéger les frontières nationales et extérieures de l’Union européenne ne sont pas incompatibles avec l’engagement de faire respecter le droit humanitaire international.
8. Malheureusement, le dysfonctionnement des procédures de détermination du statut des migrants ne permet pas de distinguer rapidement les personnes ayant réellement besoin d’une protection internationale des autres migrants. Cette situation, couplée à des politiques de retour inefficaces, met à mal le concept de protection internationale et peut conduire à des abus. L’Assemblée estime qu’il est capital de renforcer le cadre politique et juridique existant aux niveaux national et européen afin de garantir l’efficacité du système d’asile.
9. L’Assemblée renvoie à ses Résolution 2000 (2014) sur l’arrivée massive de flux migratoires mixtes sur les côtes italiennes, Résolution 2088 (2016) «La Méditerranée: une porte d’entrée pour les migrations irrégulières», Résolution 2118 (2016) «Les réfugiés en Grèce: défis et risques – Une responsabilité européenne», Résolution 2073 (2015) «Pays de transit: relever les nouveaux défis de la migration et de l’asile», Résolution 2109 (2016) sur la situation des réfugiés et des migrants dans le cadre de l’Accord UE-Turquie du 18 mars 2016, Résolution 2072 (2015) «Après Dublin: le besoin urgent d’un véritable système européen d’asile», Résolution 2089 (2016) sur le crime organisé et les migrants, et aux Résolution 2113 (2016) «Après les attaques de Bruxelles, un besoin urgent de répondre aux défaillances de sécurité et de renforcer la coopération contre le terrorisme», Résolution 2090 (2016) «Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l'Europe» et Résolution 2093 (2016) «Attaques récentes contre des femmes: nécessité d’une communication objective et d’une réponse globale».
10. En conséquence, l’Assemblée appelle:
10.1. les États membres du Conseil de l'Europe:
10.1.1. à engager un dialogue digne de ce nom avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et d’autres acteurs internationaux sur l’interprétation des dispositions juridiques de la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés, dont les conditions de reconnaissance du statut de réfugié, ainsi que sur la question de la définition d’un «pays tiers sûr»;
10.1.2. à intensifier leurs efforts pour trouver une solution constructive concernant une répartition négociée de manière plus équitable des responsabilités afin de mettre pleinement en œuvre les conclusions de juin 2015 du Conseil européen concernant la relocalisation et la réinstallation des réfugiés;
10.1.3. à continuer les opérations de recherche et de sauvetage en mer Méditerranée à une échelle au moins aussi vaste qu’à l’heure actuelle;
10.1.4. à étudier les possibilités de développer des filières de migration légales, y compris d’augmenter la proportion de relocalisations et d’admissions pour des raisons humanitaires ainsi que le regroupement familial, en vue de mettre un terme aux migrations irrégulières;
10.1.5. à étudier et à promouvoir des initiatives pour renforcer les capacités institutionnelles et normatives des pays d’origine et de transit;
10.1.6. à réfléchir aux nouveaux défis à relever concernant les politiques d’intégration, y compris les menaces pour la sécurité et la radicalisation;
10.1.7. à tirer pleinement parti de la Banque de développement du Conseil de l'Europe en matière de projets sociaux concernant l’accueil des migrants et leur intégration.
10.2. les États membres et les institutions de l’Union européenne:
10.2.1. à garantir l’efficacité des contrôles aux frontières extérieures en appliquant les mesures suggérées par la Commission européenne dans sa série de propositions validées par le Parlement européen en juillet 2016, notamment en assurant le financement et le fonctionnement d’un nouveau corps européen de garde-frontières et de garde-côtes en conformité avec les normes européennes et internationales qui s’appliquent en la matière;
10.2.2. à accroître l’efficacité des politiques de retour en dotant le bureau européen pour les opérations de retour nouvellement créé des ressources et des moyens opérationnels nécessaires; à harmoniser les pratiques de retour dans toute l’Europe et à envisager un partage des coûts;
10.2.3. à étudier les moyens de mieux repérer les personnes ayant besoin d’une protection internationale et à organiser le traitement externe des demandes d’asile dans le cadre de procédures sûres établies hors d’Europe dans des pays tiers sûrs, pour autant que les droits fondamentaux des demandeurs d’asile soient garantis, comme l'a déjà recommandé l'Assemblée dans de précédentes résolutions et conformément aux normes de l’Union européenne;
10.2.4. à apporter à la Grèce et à l’Italie un soutien financier et matériel approprié pour garantir de bonnes conditions d’accueil des réfugiés et des migrants et un fonctionnement des hotspots conforme aux engagements antérieurs.
11. L’Assemblée reconnaît la nécessité d’engager d’une façon significative un dialogue avec le Gouvernement turc pour un programme effectif de partage du fardeau au regard de l’importance de la crise des réfugiés à laquelle la Turquie est confrontée.
12. L’Assemblée décide de poursuivre sa réflexion sur ces questions et de faire le bilan des progrès réalisés à l’occasion du débat sur les migrations qui se tiendra au cours de la partie de session de juin 2017.