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Résolution 2207 (2018)
Égalité entre les femmes et les hommes, et pension alimentaire des enfants
1. Les modèles familiaux évoluent
en Europe, où l’on assiste à une diminution des mariages et à une augmentation
des séparations et des divorces. Un nombre croissant d’enfants vivent
dans des familles recomposées ou avec un seul de leurs parents,
le parent n’ayant pas la garde quotidienne des enfants ayant pour
obligation de contribuer financièrement au coût de leur éducation.
Dans l’immense majorité des cas en Europe, les familles monoparentales
ont une femme à leur tête. C’est pourquoi la pension alimentaire
pour enfant, particulièrement importante pour les familles monoparentales,
n’est pas neutre du point de vue du genre. Les modalités de détermination
du montant à verser et les conséquences d’un défaut de paiement affectent
les femmes de façon disproportionnée. Par conséquent, la réglementation
en matière de pension alimentaire pour enfant et le fonctionnement
du dispositif devraient être considérés non seulement comme des questions
relevant simplement des domaines de la vie familiale en général
et du bien-être des enfants, mais aussi comme spécifiquement liées
à l’égalité entre les femmes et les hommes.
2. L’Assemblée parlementaire est préoccupée par le fait que le
non-respect de l’obligation de versement d’une pension alimentaire
pour enfant a un impact financier important pour la mère qui porte
la responsabilité au quotidien et vient s’ajouter aux inégalités
auxquelles les femmes font face dans le monde du travail, y compris
l’écart de rémunérations persistant, la ségrégation des genres par
secteur économique et les difficultés dans la progression de carrière.
L’absence d’aménagement des conditions de travail et de structures complètes
et abordables pour l’accueil des enfants rend encore plus difficile
l’équilibre entre vie professionnelle et vie de famille. La législation
et les politiques en matière de pension alimentaire pour enfant,
et leur mise en œuvre effective sont l’une des multiples façons
de lutter contre l’inégalité entre les femmes et les hommes.
3. L’Assemblée rappelle les recommandations formulées dans la Résolution 1921 (2013) «Égalité
des sexes, conciliation vie privée-vie professionnelle et coresponsabilité»,
la Résolution 1939 (2013) «Le
congé parental, moyen d'encourager l’égalité des sexes» et la Résolution 2079 (2015) «Égalité
et coresponsabilité parentale: le rôle des pères».
4. Les familles monoparentales sont particulièrement exposées
au risque de pauvreté et de pauvreté des enfants, qui entraîne ségrégation
sociale et discrimination, et met en péril leur dignité humaine.
L’Assemblée considère que toutes les familles monoparentales et
leurs enfants devraient avoir accès aux pensions alimentaires pour
enfant afin d’être en mesure de satisfaire leurs besoins élémentaires
et d'offrir aux enfants les mêmes chances dans la vie.
5. Le non-respect de l’obligation alimentaire pour enfant (le
fait de se soustraire intentionnellement, de manière irrégulière,
en totalité ou en partie, à l’obligation de verser une pension alimentaire
pour enfant) peut être utilisé afin d’exercer une pression psychologique
sur le parent ayant la responsabilité quotidienne de la garde, ce
qui peut avoir des conséquences sérieuses sur les enfants également.
Ce comportement devrait alors être considéré comme une forme de
violence psychologique, et devrait être traité en tant que tel.
Les enfants, en particulier, sont traumatisés lorsqu’ils sont témoins
d’actes de violence domestique, de quelque nature que ce soit.
6. Étant donné les nombreux mariages et relations binationaux,
l’obligation alimentaire pour enfant relève aussi du droit international
privé, pour ce qui est de la nécessité de garantir un recouvrement
international effectif des pensions. Tel est le but principal de
la Convention de La Haye de 2007 sur le recouvrement international
des aliments destinés aux enfants et à d'autres membres de la famille,
qui a été ratifiée par la plupart, mais pas la totalité, des États
membres du Conseil de l’Europe et qui est entrée en vigueur le 1er août 2014
dans tous les pays de l’Union européenne, sauf au Danemark.
7. Au vu de ce qui précède, l’Assemblée demande aux États membres
et observateurs du Conseil de l’Europe et aux États dont le parlement
bénéficie du statut d’observateur auprès de l’Assemblée:
7.1. de signer et de ratifier, s’ils
ne l’ont pas déjà fait, la Convention de La Haye de 2007 sur le recouvrement
international des aliments destinés aux enfants et à d'autres membres
de la famille, et son Protocole sur la loi applicable aux obligations
alimentaires, et de garantir leur pleine mise en œuvre;
7.2. en ce qui concerne le non-respect de l’obligation alimentaire
pour enfant:
7.2.1. dans l’intérêt supérieur de l’enfant,
de mettre en place des mécanismes de remplacement efficaces de la
pension alimentaire, reposant sur le paiement anticipé par l’État
en cas de non-versement, ou de versement partiel ou de versement
irrégulier de la pension alimentaire, que le non-respect de l’obligation
soit intentionnel ou non. Le paiement anticipé devrait intervenir
à la demande et être accordé dans un délai raisonnable, sans frais
ou avec un coût minime pour le bénéficiaire;
7.2.2. d’assurer un financement approprié et pérenne pour le
versement des pensions de remplacement et un investissement adéquat
dans les structures s’occupant de la gestion des dossiers, notamment
du recouvrement auprès du débiteur des sommes avancées par l’État;
7.2.3. de mettre en place des sanctions effectives pour le non-respect
de l’obligation alimentaire pour enfant (non-versement, ou versement
partiel ou irrégulier, de manière intentionnelle ou non, de la pension
alimentaire), y compris des sanctions pénales lorsque ce non-respect
constitue une forme de violence psychologique, conformément aux
dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention
et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence
domestique (STCE no 210, «Convention
d’Istanbul»);
7.2.4. de prévenir le non-respect intentionnel de l’obligation
alimentaire pour enfant en travaillant en collaboration étroite
avec les services fiscaux et les services chargés des enquêtes financières;
7.2.5. de promouvoir une «culture du paiement», en menant des
actions d’information et de sensibilisation sur les conséquences
néfastes pour l’enfant et le parent qui en a la garde quotidienne
du non-versement, du versement partiel ou du versement différé de
la pension; il s’agit également de prévenir l’accumulation des dettes;
7.2.6. d’encourager une médiation entre parents séparés afin
de résoudre les conflits liés au versement de la pension alimentaire
pour enfant;
7.3. en ce qui concerne la pauvreté des femmes et la pauvreté
des enfants:
7.3.1. d’adopter et de mettre en œuvre des
stratégies sexospécifiques de lutte contre la pauvreté des femmes;
7.3.2. de mettre en place des avantages visant spécifiquement
les familles monoparentales, par exemple des tarifs réduits et des
taux de taxes plus faibles sur les produits et services typiquement
destinés aux enfants;
7.4. de promouvoir les possibilités de contact entre parents
seuls, à des fins de conseil et de soutien mutuels;
7.5. de renforcer la coopération internationale dans le domaine
de l’obligation alimentaire pour enfant en vue de faciliter le recouvrement
des pensions alimentaires et d’échanger les bonnes pratiques dans ce
domaine.