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Résolution 2210 (2018)
Changement climatique et mise en œuvre de l'Accord de Paris
1. En signant l’Accord de Paris en
décembre 2015, 194 pays des Nations Unies et l’Union européenne
ont reconnu le changement climatique comme une menace existentielle
pour l’humanité: il n’y a pas de «Terre B», et la santé de notre
planète est essentielle à notre prospérité. L’entrée en vigueur
de l’accord une année à peine après sa signature reflète la volonté
résolue de la communauté internationale d’agir à grande échelle, en
s’orientant vers une approche ascendante, en rupture avec la logique
descendante suivie jusque-là. Malgré la récente décision de l’Administration
fédérale américaine de quitter l’accord, plus de 70 % des émissions globales
de gaz à effet de serre restent couvertes par les contributions
déterminées au niveau national dans le cadre de l’Accord de Paris.
Cela dit, pour limiter la hausse des températures à 2°C d’ici à
2050, des efforts supplémentaires devront être consentis dans les
dix prochaines années.
2. L’Assemblée parlementaire salue le rôle moteur de l’Europe
dans le pilotage du processus engagé à l’échelle mondiale pour éviter
une «surchauffe» de la planète. Un développement «propre» et plus
durable est le seul moyen de répondre comme il se doit aux besoins
des générations présentes et futures, où qu’elles vivent. Les pays
en développement étant plus sévèrement touchés par le changement
climatique alors qu’ils ont une responsabilité moindre que les pays
développés dans les émissions de gaz à effet de serre, il faudra une
plus grande solidarité entre pays développés et pays en développement
pour assurer le partage de savoir-faire, de ressources (financières)
et de technologies propres, en particulier avec les petits États
insulaires en développement (conformément aux Modalités d’action
accélérées des petits États insulaires en développement (Orientations
de Samoa)).
3. Compte tenu de ce qui précède, l’Assemblée considère que la
mise en œuvre de l’Accord de Paris devrait aller de pair avec celle
des Objectifs de développement durable (ODD) de l’Agenda 2030 du développement
durable adopté par la communauté mondiale la même année. Elle renvoie
aux nombreuses données disponibles montrant que l’investissement
dans des politiques globales plus durables et un développement plus
respectueux de l’environnement est économiquement avantageux et
qu’il constitue également un choix politique responsable pour l’avenir.
À l’échelle mondiale, les événements climatiques extrêmes coûtent
de plus en plus cher, tout comme l’inaction a elle aussi un prix:
en Europe, le coût des dommages liés aux catastrophes climatiques
a déjà doublé entre les années 1980 et les années 2000, totalisant
la somme de 436 milliards d’euros, selon l’Agence européenne pour
l’environnement.
4. L’Assemblée se félicite du lancement du Partenariat de Marrakech
pour l’action climatique globale en vue de la mise en œuvre de l’Accord
de Paris. Cette stratégie entend associer diverses parties prenantes
à l’action pour le climat: elle encourage la collaboration volontaire
de la société civile, du secteur privé, des établissements financiers,
des collectivités locales et territoriales, ainsi que des communautés
locales, le cas échéant. Dans ce contexte, il convient de promouvoir
les modèles de développement urbain, estuarien et insulaire comme
moyens de tirer parti de l’immense potentiel lié à la croissance
verte, servant à la fois les populations et la cause du climat,
ainsi qu’une croissance faiblement émettrice de carbone et les énergies renouvelables.
5. L’intégration par la loi du développement durable et de la
capacité d’adaptation au changement climatique dans les politiques
nationales reste un défi considérable pour les pays européens. L’Assemblée regrette
que les délégations nationales officielles aux réunions mondiales
sur les changements climatiques (COP) ne comprennent que rarement
des parlementaires et elle exhorte les pays européens à montrer l’exemple
du changement en intégrant systématiquement des parlementaires dans
leurs délégations. Cette implication plus étroite des législateurs
devrait favoriser une plus grande cohérence des politiques visant
à honorer les engagements nationaux et internationaux pris dans
le cadre de l’Accord de Paris, à assurer une répartition plus équilibrée
des ressources budgétaires et à mettre en place un cadre législatif
pour l’investissement vert.
6. Compte tenu de ce qui précède, l’Assemblée appelle à des mesures
nationales fortes pour promouvoir la mise en œuvre de l’Accord de
Paris à tous les niveaux de gouvernance. Elle invite les États membres:
6.1. à établir une stratégie nationale
ambitieuse, accompagnée d’un plan d’action concret, construite et
mise en place avec la participation active et directe des autorités
régionales, pour intégrer les ODD, notamment lorsqu’ils ont trait
à la question du changement climatique, dans les principaux domaines d’intervention
politique;
6.2. à élaborer un plan national de souscription de capitaux
détaillant les ressources financières à mobiliser pour mettre en
œuvre ce plan d’action, en envisageant des sources de financement
nationales et internationales, ce qui assurerait une certaine sécurité
aux investisseurs nationaux et étrangers, et permettrait d’exploiter
au mieux le potentiel de croissance du développement durable;
6.3. à tenir des consultations régulières avec les différentes
parties prenantes (société civile, secteur privé, établissements
financiers et universitaires, collectivités locales et territoriales,
et populations locales) pour suivre les progrès accomplis en matière
de réduction des émissions et d’adaptation aux effets négatifs du
changement climatique, et à identifier les secteurs qui posent problème
dans la réalisation des contributions déterminées au niveau national;
6.4. à mettre à profit les possibilités régionales d’échange
de bonnes pratiques et de co-investissement dans des modèles de
développement respectueux du climat dans le cadre du Partenariat
de Marrakech pour l’action climatique globale;
6.5. à prendre et à honorer leur engagement de reconstituer
le Fonds vert pour le climat créé en 2010 dans le cadre de la Convention-cadre
des Nations Unies sur les changements climatiques, en accord avec
le principe des responsabilités communes mais différenciées;
6.6. à faire progresser la transition vers l'économie circulaire,
à prendre des dispositions pour encourager à la fois le secteur
public et le secteur privé à réutiliser les matériaux d'un produit
en fin de vie, et à établir des objectifs nationaux ambitieux de
recyclage pour 2030 et 2050;
6.7. à promouvoir une vision durable de l’urbanisation par
la poursuite de politiques visant à créer des «villes intelligentes»
afin de transformer les villes européennes en guides mondiaux pour
attirer des investissements durables, en portant une attention particulière
à l’efficacité énergétique des bâtiments, aux moyens de réduire
les émissions de gaz à effet de serre provenant du secteur du transport,
du chauffage urbain et de la climatisation collective, à la production
d’énergies renouvelables, à la gestion des déchets et aux activités
industrielles innovantes et durables;
6.8. à planifier la transition vers des pratiques agricoles
plus innovantes et plus durables, de façon à optimiser l'utilisation
des ressources naturelles, à maximiser la création de valeur ajoutée,
à protéger la biodiversité européenne et à réduire de manière significative
– ou à capter et à orienter vers d'autres usages – les émissions
de gaz à effet de serre;
6.9. à prévoir des mesures volontaires et contraignantes pour
faire en sorte que le secteur privé assume sa juste part des efforts
entrepris pour atteindre les objectifs climatiques nationaux;
6.10. à restructurer leur production et leur consommation d’énergie
de manière à ce que les matières premières fossiles soient de plus
en plus dirigées vers des usages non énergétiques et progressivement remplacées
par des sources d’énergie renouvelable;
6.11. à favoriser l’adoption de mesures ambitieuses pour les
marchés publics verts, en renforçant l’intervention du secteur public
pour créer une demande du marché en faveur de solutions innovantes
à faibles émissions de carbone et en renforçant le rôle joué par
l’industrie européenne dans l’apport de ces solutions;
6.12. à assurer la participation de parlementaires nationaux
aux négociations mondiales sur le climat et aux consultations gouvernementales
qui se déroulent en amont pour déterminer la position nationale dans
ces négociations;
6.13. là où c’est possible, à envisager d’adhérer au Système
d’échange de quotas d’émissions de l’Union européenne, en suivant
l’exemple d’autres États non membres de l’Union européenne;
6.14. à garantir une politique climatique tenant compte du genre
avec la mise en œuvre du Plan d’action pour la parité hommes-femmes,
selon les modalités convenues lors de la COP23.
7. L’Assemblée souligne l’importance de l’action parlementaire
en ce qui concerne les mesures précitées. Elle considère que les
législateurs des Parties à l’Accord de Paris ont le devoir de vérifier
si la feuille de route sur cinq ans visant à évaluer les politiques
nationales en matière de climat est en bonne voie et est conforme aux
objectifs nationaux convenus. L’Assemblée invite, par conséquent,
les parlements nationaux à veiller à ce que des structures, des
mécanismes et des ressources spécifiques soient mis en place pour
intensifier les efforts nationaux en matière de lutte contre le
changement climatique.
8. Enfin, l’Assemblée encourage vivement les trois États membres
qui ne l’ont pas encore fait (Fédération de Russie, Saint-Marin
et Turquie) à ratifier au plus tôt l’Accord de Paris.