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| Doc. 14784
| 14 décembre 2018
Observation de l’élection présidentielle en Géorgie (28 octobre et 28 novembre 2018)
Auteur(s) : Commission ad hoc du Bureau
Rapporteur : M. Andrej HUNKO,
Allemagne, GUE
0.1. Introduction
1. Lors de sa réunion du 31 mai
2018, le Bureau de l’Assemblée parlementaire a décidé d’observer l’élection
présidentielle en Géorgie et de constituer à cette fin une commission
ad hoc composée de 31 membres et des deux corapporteurs de la commission
de suivi. Le Bureau a par ailleurs autorisé la visite préélectorale
d’une délégation de huit membres (un de chaque groupe politique
et les deux corapporteurs de la commission de suivi). Lors de sa
réunion du 29 juin, le Bureau a nommé M. Andrej Hunko (Allemagne,
GUE) à la fonction de président de la commission ad hoc; le Bureau
a pris note des déclarations sur l’absence de conflit d’intérêts
des candidats à la mission d’observation et a approuvé la composition
de la commission ad hoc (voir annexe 1).
2. Conformément à l’accord de coopération signé entre l’Assemblée
parlementaire et la Commission européenne pour la démocratie par
le droit (Commission de Venise), le 4 octobre 2004, des représentants
de la Commission de Venise ont été invités à se joindre à la commission
ad hoc en qualité de conseillers juridiques.
3. Le Bureau a envoyé une délégation préélectorale en Géorgie
les 19 et 20 septembre 2018 pour faire le point sur les préparatifs
et sur le climat politique à l’approche de l’élection (voir annexe
1).
4. A l’issue de sa visite de deux jours en Géorgie, la délégation
préélectorale a conclu que le climat général était propice à des
élections démocratiques. Toutefois, après des discussions avec différents
interlocuteurs, elle a jugé nécessaire de souligner que la situation
pouvait encore être améliorée et qu’il faudrait mettre à profit le
temps qui restait avant le scrutin pour apporter au moins certaines
améliorations. Elle ne s’attendait pas à ce qu’il y ait des abus
de ressources administratives pendant cette campagne électorale,
comme cela c’était produit lors des élections précédentes. Elle
a cependant insisté sur la nécessité d’une totale transparence en ce
qui concerne le financement de la campagne de tous les candidats.
5. La commission ad hoc a travaillé dans le cadre de la Mission
internationale d’observation électorale (MIOE), qui comprenait des
délégations de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour
la sécurité et la coopération en Europe (AP OSCE), du Parlement
européen, de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation du traité
de l’Atlantique Nord (AP OTAN) et la mission d’observation électorale
du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme
de l’OSCE (OSCE/BIDDH).
6. La commission ad hoc s’est rendue à Tbilissi du 26 au 29 octobre
2018, où elle a rencontré, notamment, les principaux candidats à
l’élection, le président de la commission électorale centrale (CEC),
le chef de la mission d’observation électorale de l’OSCE/BIDDH et
les membres de son équipe, ainsi que des représentants de la société
civile et des médias. Le programme des réunions de la commission
ad hoc est reproduit à l’annexe 2.
7. La mission internationale d’observation électorale a conclu
que l’élection présidentielle tenue le 28 octobre en Géorgie avait
été pluraliste et administrée avec professionnalisme. Les candidats
ont pu faire librement campagne et les électeurs ont pu faire leur
choix sans restrictions. S’agissant de la campagne électorale, la
délégation de l’APCE a noté que le système de financement de la
campagne était étonnamment généreux, avec de l’argent provenant
du budget de l’État et de dons privés – dans un pays ayant un haut niveau
de pauvreté. Elle a également constaté la présence d'un nombre considérable
de «candidats techniques», dont le rôle était de faire campagne
en faveur d'autres candidats, occupant l’espace médiatique et utilisant
les financements publics: tous les candidats n’ont donc pas joué
à armes égales, ce qui n'a pas amélioré la confiance du public dans
le processus électoral démocratique. (Voir Annexe 3).
8. La mission d’observation électorale tient à remercier M. Cristian
Urse, chef du Bureau du Conseil de l’Europe en Géorgie, et son personnel,
ainsi que le secrétariat de la délégation géorgienne auprès de l’APCE, pour
leur contribution à la préparation et à l’organisation de la visite
préélectorale.
1. Contexte politique et cadre juridique
9. Le 28 octobre 2018, la Géorgie
a organisé sa 7e élection présidentielle
depuis l’indépendance du pays en 1991. L’Assemblée parlementaire
du Conseil de l’Europe a observé toutes les élections en Géorgie
depuis 1995. Le contexte de l’élection présidentielle de 2018 diffère
considérablement des précédents, car cette élection était la dernière
où l’électorat géorgien a élu son Président au suffrage direct.
L’actuel Président, M. Guiorgui Margvelashvili, a décidé de ne pas
se présenter à l’élection présidentielle de 2018. En raison de la
récente révision de la constitution, les électeurs géorgiens ont
élu, pour cette élection uniquement

, un Président pour un mandat de six ans

. Pour être élu, le candidat doit
obtenir la majorité absolue des voix au premier tour. S’il n’en
est pas ainsi, un deuxième tour, organisé deux semaines après l’annonce
officielle des résultats du premier tour, oppose les deux candidats
ayant obtenu les meilleurs résultats au premier tour

.
10. Le cadre juridique est composé des textes suivants: la Constitution
de Géorgie de 1995, la loi organique géorgienne «Code électoral
de la Géorgie» (adopté en 2011, modifié pour la dernière fois en
juillet 2018) (ci-après «le Code électoral»), la loi organique géorgienne
de 1997 sur les unions politiques de citoyens, la loi géorgienne
de 2008 sur la Cour des comptes, la loi géorgienne de 2004 sur la
radiodiffusion, le Code administratif général de la Géorgie et les
règlements adoptés par la CEC.
11. La délégation de l’APCE rappelle que la Géorgie a signé et
ratifié la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5)
et son Protocole additionnel (STE no 9),
qui consacrent plusieurs principes essentiels pour une démocratie
effective et véritable, parmi lesquels le droit à des élections
libres (article 3 du Protocole additionnel), la liberté d’expression,
la liberté de réunion et d’association, ainsi que l’interdiction
de la discrimination (articles 10, 11 et 14 de la Convention).
12. Les révisions constitutionnelles de 2010, 2013 et 2017 ont
progressivement réduit les pouvoirs du Président en faveur du Premier
ministre et du parlement. Ainsi, le Président n’est pas habilité
à révoquer le gouvernement sans l’accord du parlement, et la nomination
des gouverneurs incombe désormais au Premier ministre. Depuis les
amendements de 2017

, comme l’a relevé la Commission
de Venise

, le processus de réforme constitutionnelle
a complété l’évolution du système politique géorgien vers un régime
parlementaire, notamment en supprimant l’élection du Président au
suffrage direct et en limitant encore l’étendue des pouvoirs présidentiels.
13. Á la suite de la révision constitutionnelle de 2017, l’élection
au suffrage universel direct du Président a été supprimée et remplacée
par une élection indirecte par un collège électoral. Le nouveau
système électoral entrera en vigueur en 2024, après l’élection présidentielle
de 2018. En outre, les pouvoirs du Président seront limités dans
un certain nombre de domaines. Par exemple, le Président ne sera
pas habilité à mener des négociations internationales avec des pays
étrangers (article 52); il jouira de pouvoirs réduits en temps de guerre,
car seul le Premier ministre pourra décider d’engager les forces
armées, et le Président devra avoir son accord pour proclamer la
loi martiale ou l’état d’urgence; de plus, le Conseil national de
défense, organe consultatif auprès du Président, perdra son statut
permanent et ne sera convoqué qu’en cas d’application de la loi
martiale (article 71).
14. Le Code électoral a été modifié en 2016, 2017 et 2018, sans
large consensus politique, en partie à la suite des recommandations
formulées par la Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH dans leur
avis conjoint de décembre 2011

. Dans leur avis formulé conjointement
en 2016, la Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH ont estimé que,
malgré quelques modifications positives, le Code électoral avait
besoin d’être révisé pour garantir l’effectivité des nouvelles dispositions,
ainsi que le plein respect des normes du Conseil de l’Europe et
des engagements contractés auprès de l’OSCE

.
15. En 2016, des modifications ont été apportées au Code électoral,
dont plusieurs concernaient l’élection présidentielle, à savoir:
- la présence de policiers à l’extérieur
d’un bureau de vote, sans que le président de la commission électorale
locale en ait fait la demande ou l’ait approuvée, ne doit être autorisée
que dans des circonstances particulières, lorsqu’il est absolument
nécessaire de protéger l’ordre public et de mettre fin à des troubles;
- des bureaux de vote spéciaux ne seront plus mis en place
dans les unités militaires de toute la Géorgie. À la place, les
militaires voteront dans les bureaux les plus proches de leur lieu
d’affectation. Le nombre maximal d’électeurs dans ces bureaux de
vote est fixé à 2 000;
- les militaires peuvent voter à l’élection présidentielle,
quel que soit le lieu où ils sont inscrits, à condition d’être stationnés
dans leur lieu de déploiement depuis au moins six mois;
- les militaires qui ne peuvent quitter leur lieu de déploiement
pour des raisons de service ou de santé peuvent voter via une urne
mobile
.
2. Administration
des élections, enregistrement des candidats et inscription des électeurs
16. L’élection présidentielle a
été gérée par une administration électorale à trois niveaux, qui
comprenait la CEC au niveau national, 73 commissions électorales
de circonscription et 3 637 commissions électorales locales

. Afin de garantir aux ressortissants
géorgiens servant dans les forces armées à l’étranger le droit au suffrage
universel, deux bureaux de vote ont été mis en place en Afghanistan.
En outre, dix commissions électorales locales spéciales ont été
créées dans des établissements pénitentiaires.
17. La CEC est l’organe suprême de l’administration électorale.
Elle gère et contrôle tous les niveaux de commissions électorales
relevant de son autorité. Elle est composée d’un président et de
11 membres. Sur recommandation du Président, le parlement élit cinq membres
de la CEC, tandis que les partis politiques qualifiés en nomment
six. Le mandat du président et des membres de la CEC nommés par
le parlement est de cinq ans.
18. Une commission électorale de circonscription est un organe
territorial permanent de l’administration électorale qui supervise
la mise en œuvre de la législation électorale et veille à son application
uniforme. Elle se compose de 13 membres. La CEC élit cinq membres
permanents de la commission électorale de circonscription pour un
mandat de cinq ans; en période électorale, les partis qualifiés
en nomment sept et la CEC élit un membre supplémentaire. Le 4 août 2018,
la CEC a sélectionné 72 membres de commissions électorales de circonscription
parmi 173 candidats et rendu un décret confirmant leur nomination

.
19. Une commission électorale locale est un organe territorial
temporaire de l’administration électorale qui assure l’organisation
des élections dans un bureau de vote, la mise en œuvre de la législation
électorale, le respect des procédures électorales pendant le scrutin
et la protection des droits des électeurs, des représentants et
des observateurs. Une commission électorale locale est composée
de 13 membres. Une commission électorale supérieure

élit
six membres et les partis qualifiés nomment les sept autres membres de
la commission électorale locale.
20. Des organisations non gouvernementales (ONG) locales ont fait
savoir que la nomination de membres temporaires des commissions
électorales de circonscription posait problème, car, parmi les membres temporaires
sélectionnés pour les 73 commissions électorales de circonscription,
14 étaient liés soit à des fonctionnaires de l’administration électorale,
soit à d’autres fonctionnaires. De même, dans sept cas, des partisans
ou des militants du parti au pouvoir ont été élus au sein de commissions.
21. En ce qui concerne la composition des commissions électorales
de circonscription et des commissions électorales locales, selon
de nombreux interlocuteurs de la MIOE, certains membres étaient,
semble-t-il, affiliés à des partis politiques. À cet égard, la délégation
préélectorale de l’APCE, dans sa déclaration présentée à la fin
de sa visite à Tbilissi, le 20 septembre, a estimé que la CEC s’acquittait
de sa mission avec professionnalisme et préparait bien l’élection.
Elle a cependant considéré que, si l’on voulait renforcer la confiance
du public dans l’administration électorale à tous les niveaux, il
fallait prendre au sérieux les critiques émanant de la société civile
concernant la méthodologie parfois utilisée pour sélectionner les
membres des organes électoraux de degré inférieur, dont on pouvait
soupçonner qu’elle favorisait le népotisme et/ou certains intérêts
politiques.
22. La CEC a travaillé en toute transparence: ses sessions étaient
ouvertes aux représentants des médias accrédités auprès de la commission
concernée, aux représentants des sujets électoraux, aux observateurs des
organisations nationales d’observation enregistrées auprès de la
commission concernée et à un maximum de deux observateurs d’une
organisation internationale enregistrée auprès de la CEC.
23. Selon la Constitution géorgienne, tout citoyen géorgien ayant
le droit de voter peut être élu Président de la Géorgie s’il est
âgé de 35 ans ou plus, a résidé en Géorgie pendant au moins cinq
ans, n’a pas la double nationalité et vit en Géorgie depuis trois
ans à la date de l’élection.
24. Conformément à la législation, les unions politiques de citoyens
ont le droit de nommer un candidat à la présidence. Si la nomination
est l'initiative d'un groupe d'électeurs, l’article 97 du Code électoral
dispose que la nomination d’un candidat à la présidence de la Géorgie
doit être approuvée par la signature d’au moins 25 000 électeurs
(0,75 % du nombre total d’électeurs). Pour cette élection présidentielle,
la CEC a fixé ce nombre à 25 923 électeurs. En ce qui concerne la
vérification des signatures de soutien, la CEC ne peut rejeter une
signature pour non-authenticité que si l’électeur en question confirme
par écrit qu’il n’a pas donné sa signature en soutien au candidat.
25. En vue de cette élection présidentielle, la CEC a enregistré
25 candidats sur la base d’une procédure inclusive. Parmi ces candidats,
19 avaient été nommés par des partis politiques et six par des groupes d’initiatives.
Vingt-et-un candidats nommés ont été refusés pour différentes raisons.
La délégation d’observation de l’APCE, pendant ses missions préélectorales
et sa mission principale d’observation, a été informée par différents
interlocuteurs du nombre considérable de «candidats techniques»,
dont le rôle était de faire campagne en faveur d'autres candidats,
occupant l’espace médiatique et utilisant les financements publics,
et s’est déclarée préoccupée par le fait que tous les candidats
n’avaient donc pas joué à armes égales, ce qui n'avait pas amélioré
la confiance du public dans le processus électoral démocratique.
26. Parmi les candidats inscrits, les principaux étaient:
- Davit Bakradze du Parti Géorgie
européenne. M. Bakradze a présidé le Parlement géorgien de 2008
à 2012. C’était sa deuxième candidature à la présidence; en 2013,
il était présenté sur la liste du Mouvement national uni (UNM) et
avait obtenu 21,72 % des suffrages;
- Grigol Vashadze, de la coalition dirigée par l’UNM. M. Vashadze
a été ministre des Affaires étrangères de 2008 à 2012. Il est membre
du Conseil politique de l’UNM, l’organe directeur du parti;
- Salome Zourabishvili était une candidate indépendante,
soutenue par le parti au pouvoir – Rêve géorgien–Géorgie démocratique
(GDDG). Née en France dans une famille d’immigrés, elle a été invitée par
le Président, Mikheil Saakashvili, à devenir ministre des Affaires
étrangères en mars 2004, mais a été démise de ses fonctions en octobre
2005 à l’issue d’une confrontation avec la majorité parlementaire.
En 2016, Mme Zurabishvili a été élue
membre du Parlement de Géorgie: elle s’est présentée aux élections
en tant qu’indépendante, mais a été soutenue politiquement par le
GDDG, qui a décidé de ne pas lui opposer de candidat. Bien que Mme Zurabishvili
ne fasse pas partie du groupe des 116 membres du GDDG détenant la
majorité au parlement et qu’elle conserve son statut de parlementaire
indépendante, ses votes et ses déclarations publiques ont été étroitement
alignées sur ceux des parlementaires du parti au pouvoir.
27. Les citoyens âgés d’au moins 18 ans au jour du scrutin ont
le droit de voter. D’après les données de la CEC, le nombre total
d’électeurs s’élevait à 3 518 877 au 27 octobre 2018. La Géorgie
utilise un système d’enregistrement passif des électeurs, c’est-à-dire
que les électeurs détenant un document d’identité valide ou un passeport
sont inscrits de manière permanente sur les listes électorales.
Le Code électoral prévoit des procédures de vérification et de correction
des listes électorales. De plus, des délais ont été fixés pour contester
devant les commissions électorales de circonscription et les tribunaux
d’éventuelles inexactitudes sur les listes électorales. Il est notamment
interdit de modifier les listes électorales au cours des 12 jours
qui précèdent le scrutin

. Les modifications
apportées entre le 15e et le 12e jour
avant le scrutin ne peuvent l’être que par décision judiciaire.
Les interlocuteurs de la délégation d’observation de l’APCE se sont
dits confiants dans l’exactitude des listes électorales.
28. Les électeurs résidant à l’étranger ont le droit de participer
à l’élection présidentielle. Pour pouvoir voter, ils doivent être
inscrits sur le registre du consulat géorgien, ou s’inscrire au
consulat au plus tard le 21e jour avant
le scrutin, c’est-à-dire le 7 octobre 2018. Les bureaux de vote
à l’étranger sont mis en place par la CEC d’après les données communiquées
par le ministère des Affaires étrangères au plus tard 30 jours avant
le jour du scrutin, pour 20 électeurs au minimum et 3 000 au maximum.
Pour le premier tour de l’élection présidentielle du 28 octobre
2018, on a dénombré 5 475 électeurs résidant à l’étranger.
29. Les dispositions de l’article 33 du Code électoral définissent
la procédure d’octroi du droit de vote via la liste électorale mobile
aux personnes handicapées ou à celles qui sont dans l’incapacité
de se rendre dans un bureau de vote (notamment les détenus, les
personnes hospitalisées, les personnes placées en rétention administrative).
Le Code électoral restreint toutefois cette procédure. En particulier,
le nombre d’électeurs inscrits sur une liste électorale mobile ne
doit pas dépasser 3 % des électeurs inscrits sur la liste d’un bureau de
vote. Une fois le nombre maximal d’électeurs atteint, la commission
électorale de circonscription décide de l’ajout d’électeurs sur
la liste électorale mobile à la majorité des deux tiers des membres
présents à l’une de ses séances.
3. Campagne
électorale, financement et environnement médiatique
30. La campagne électorale a été
officiellement lancée le 29 août 2018 et des normes relatives à
son organisation ont été adoptées. Certains partis politiques et
candidats à la présidence ont néanmoins commencé à aller à la rencontre
des électeurs avant le lancement officiel de la campagne préélectorale

.
31. Les candidats ont pu faire campagne sans restrictions. Le
Code électoral ne prévoit pas de période de silence pendant laquelle
il est interdit de faire campagne, sauf dans les médias et les bureaux
de vote. La campagne électorale a été largement couverte par les
médias nationaux et de nombreuses questions ont été débattues sur
les réseaux sociaux. Les candidats les plus actifs ont été Davit
Bakradze, Grigol Vashadze et Salome Zourabishvili. La campagne de
Mme Zourabishvili a bénéficié d’une large
visibilité, de grandes affiches en sa faveur ayant été placardées
sur des panneaux d’affichage, mais aussi sur des bus privés.
32. En ce qui concerne les thèmes de la campagne électorale, il
s’est essentiellement agi de sujets polémiques qui ont polarisé
l’opinion publique, plutôt que de questions concernant le mandat
présidentiel. En particulier, beaucoup ont compris la déclaration
de Salomé Zourabishvili sur la guerre engagée en Ossétie du Sud
en août 2008 comme suggérant que la guerre avait été déclenchée
par le Gouvernement géorgien et non par son voisin du Nord, même
si elle a par la suite clarifié son point de vue. Parmi les autres
sujets polémiques de la campagne électorale, nous pouvons mentionner
le projet de loi du gouvernement visant à légaliser la marijuana
et l'intervention de l'Église orthodoxe géorgienne dans le débat,
alors que le Code électoral interdit aux organisations religieuses
d'intervenir dans la campagne. Alors que les questions sujettes
à controverse ont dominé la campagne au niveau national, dans les
régions, la campagne s'est essentiellement concentrée sur des programmes
précis concernant des problèmes locaux.
33. Les membres de la MIOE ont été informés de cas isolés d'incidents
violents, de perturbations d’activités de campagne, de soupçons
d'abus de ressources administratives, de l'utilisation par certains
hauts fonctionnaires de pages web institutionnelles aux fins de
la campagne et de la participation de fonctionnaires aux activités
de campagne pendant les heures de travail. La délégation de l'APCE
a exprimé son inquiétude à cet égard, y compris pendant sa mission
préélectorale à Tbilissi, et a fait observer que toutes ces activités brouillaient
la frontière entre l'État et le parti au pouvoir et étaient contraires
aux normes du Conseil de l'Europe en matière d'élections démocratiques.
34. Le financement de la campagne est réglementé par la loi sur
les unions politiques de citoyens, le Code électoral et la loi sur
le contrôle des finances publiques. À cela s’ajoute le règlement
de l’institution de contrôle des finances publiques. Le Code électoral
prévoit un financement public (article 56) et privé (article 54). L’institution
est chargée du contrôle du financement des partis politiques et
des dépenses électorales. Selon l’article 27.1 de la loi sur les
unions politiques de citoyens, un citoyen ou une personne morale
peut faire un don par virement bancaire d’un montant maximum de
60 000 GEL ou 120 000 GEL par an, respectivement, à un ou plusieurs
partis politiques

.
35. Aux termes de l’article 26.1 de
la loi sur les unions politiques de citoyens, les restrictions imposées
à un parti politique s’appliquent aussi aux personnes qui ont fait
part de leur intention de se présenter aux élections et qui utilisent
des ressources financières et d’autres ressources matérielles à
cette fin. L’article 26.3 de cette loi
dispose en outre qu’une personne physique qui a annoncé son intention
de se présenter aux élections et qui engage des dépenses à cet effet
doit créer un compte spécial. Le Code électoral soumet cette personne aux
mêmes restrictions qu’un candidat indépendant.
36. Selon l’article 54 du Code électoral, les dépenses de campagne
désignent les sommes d’argent destinées à la campagne électorale
d’un sujet électoral, ainsi que tout type de biens et de services
obtenus à titre gracieux, à l’exception des temps d’antenne gratuits.
Un candidat désigné par un sujet électoral utilise le compte de
campagne de ce dernier. Au cours des élections, un sujet électoral
ne peut utiliser d’autres moyens financiers que ceux provenant du
compte de campagne correspondant.
37. Selon la déclaration sur les constatations et conclusions
préliminaires de la MIOE, les candidats à la présidence ont reçu,
au total, à titre de dons, 5 233 120 laris géorgiens (GEL) (un euro
équivaut à environ 3 GEL). Quelque 3 634 380 GEL ont été donnés
à Mme Zourabishvili, 617 945 GEL à l’UNM
et 599 613 GEL à Géorgie européenne

.
Mme Zourabichvili a dépensé 4 084 077 GEL,
David Bakradze, de Géorgie européenne–Mouvement pour la liberté,
a dépensé 882 313 GEL, Grigol Vashadze, de l’UNM, a dépensé 864 525 GEL
et Otar Meunargia, de L’industrie sauvera la Géorgie, a dépensé
222 094 GEL. Tous les autres candidats ont collectivement dépensé
1 132 610 GEL. Trois candidats n'ont fait état d'aucune dépense pendant
la période considérée. Seuls les partis qui ont désigné officiellement
un candidat sont légalement tenus de déclarer leurs revenus et leurs
dépenses pour l'élection présidentielle.
38. La législation relative au financement des partis et des campagnes
électorales manque d'uniformité et les modifications législatives
récentes n'ont pas tenu compte des recommandations formulées il
y a déjà longtemps par le Groupe d'États contre la Corruption du
Conseil de l'Europe (GRECO)

.
La loi prévoit un financement privé pour tous les candidats et un
financement public pour les candidats nommés par des partis. L'absence
de réglementation régissant l'obtention de prêts pour les dépenses
de campagne et les déclarations sur l'utilisation des fonds a pu
contribuer au fait que certains candidats ont été désavantagés.
Compte tenu de la répartition très inégale des dons et des plafonds
de dépenses extrêmement élevés, les candidats n’ont pas joué à armes
égales.
39. A cet égard, la délégation de l’APCE a noté que le système
de financement de la campagne était étonnamment généreux, avec de
l’argent provenant du budget de l’État et de dons privés – dans
un pays ayant un haut niveau de pauvreté.
40. La Commission nationale géorgienne des communications (GNCC)
assure la surveillance des médias et le respect des normes énoncées
dans le Code électoral, et prend les mesures qui s’imposent pour
remédier aux violations

. D’après le Code
électoral, les sujets électoraux qualifiés ont droit à un temps
d’antenne gratuit à des fins de publicité politique. Des financements
publics sont mis à disposition des partis qualifiés pour couvrir
uniquement la publicité préélectorale payante. La loi sur les unions
politiques de citoyens précise que les partis politiques admis au
bénéfice de financements publics compte tenu de leurs résultats
aux dernières élections législatives ont droit à des financements
supplémentaires provenant du budget de l’État pendant l’année où
se tiennent des élections législatives.
41. Le Code électoral demande aux radiodiffuseurs de respecter
les principes d’impartialité et d’équité pendant les campagnes électorales
lorsqu’ils diffusent des émissions socio-politiques ayant trait
aux élections. Tout radiodiffuseur général qui entreprend de couvrir
une campagne électorale devra diffuser les débats préélectoraux
de manière non discriminatoire et assurer la participation de tous
les sujets électoraux qualifiés relevant de sa zone de couverture.
42. Quelques ONG locales se sont plaintes de la publication, par
la GNCC, d’une instruction destinée aux chaînes de télévision qui
imposait aux radiodiffuseurs l’obligation de vérifier la crédibilité
des sondages d’opinion liés aux élections. D’après ces ONG, en imposant
une telle obligation, la GNCC remettait en question sa propre fonction,
qui était d’assurer l’égalité des médias et l’accès des électeurs
aux informations. La GNCC a infligé une amende à l'une les principales
chaînes de télévision privée (Rustavi 2) pour avoir diffusé une publicité
politique payante en dehors de la période électorale sans en avoir
averti l'autorité de régulation, sachant que les radiodiffuseurs
ne sont soumis à une telle obligation que pendant la période préélectorale,
soit pendant les 50 jours avant le jour du scrutin.
43. La surveillance des médias assurée par le BIDDH pendant la
campagne électorale a révélé que les organes de radiodiffusion avaient
pleinement respecté leur obligation légale d'allouer des temps d'antenne gratuits.
Ces temps d'antenne ont été largement utilisés par les candidats
à la présidence, qui ont eu de nombreuses occasions de présenter
leurs points de vue dans le cadre de débats télévisés ou radiodiffusés,
et de fréquentes publicités gratuites

.
En ce qui concerne la couverture de la campagne électorale, la délégation de
l'APCE a toutefois observé que le cadre juridique régissant les
médias manquait de clarté sur plusieurs aspects essentiels. Elle
a en particulier constaté qu'un nombre considérable de candidats
à la présidence avaient utilisé le temps d'antenne gratuit et les
publicités payantes pour soutenir d'autres candidats, entraînant une
répartition inégale du temps d'antenne gratuit.
4. Jour
du scrutin
44. Le jour du scrutin, la commission
ad hoc s'est divisée en 15 équipes, qui ont observé l'élection à
Tbilissi et dans ses environs, ainsi que dans différentes régions
de Géorgie. Les membres de la commission ad hoc ont noté que le
vote était bien organisé et que les électeurs avaient pu faire leur
choix sans restrictions.
45. Ils ont cependant constaté un certain nombre de dysfonctionnements
dans les bureaux de vote visités, à savoir:
- plusieurs bureaux de vote étaient surchargés;
- la présence d'un grand nombre de citoyens observateurs
et de médias qui représentaient les intérêts de certains candidats,
en particulier les intérêts des candidats de Géorgie européenne,
de l'UNM et de Rêve géorgien, tandis que certains observateurs n'étaient
pas capables d'indiquer quels partis ou candidats ils représentaient;
- la présence dans certains bureaux de vote ou à proximité
de bureaux de vote de soi-disant «coordinateurs» venus pour orienter
et «assister» les électeurs, et noter qui a voté;
- la présence, à proximité de certains bureaux de vote,
en particulier dans la région de Marneouli (bureau de vote no 085)
et de Bolnissi (bureau de vote no 036),
de «coordinateurs» chargés d'organiser les activités de campagne
en faveur de certains candidats et tentant d'influencer le choix
des électeurs;
- dans certains régions, un transfert organisé d'électeurs
par minibus vers les bureaux de vote;
- l’accès des personnes à mobilité réduite a posé problème
dans un nombre assez important de bureaux de vote;
- des cas isolés de prises de photographies du scrutin dans
les bureaux de vote et de vote familial ont été signalés;
- dans certains bureaux de vote, des cas de non-respect
involontaire des étapes légalement prévues de la procédure de vote
ont été constatés;
- pendant le processus de dépouillement, les observateurs
ont constaté des cas de non-respect involontaire des procédures,
principalement dans les zones rurales, souvent en raison d’un manque
de connaissance des procédures.
46. Selon les résultats officiels annoncés par la CEC, les principaux
candidats ont obtenus les résultats suivants: Salome Zourabishvili
– 38,64 %; Grigol Vashadze – 37,74 %; Davit Bakradze – 10,97 %;
Shalva Natelashvili – 3,74 %; David Uzupashvili – 2,26 %; Zurab
Japaridze – 2,26 %; Kakha Kukava – 1,33 %. Autres candidats: moins
de 1 % des suffrages. Les deux candidats les mieux placés, Salome
Zourabishvili et Grigol Vashadze, ont pris part au deuxième tour
de l’élection présidentielle le 28 novembre 2018.
47. Le deuxième tour de l’élection présidentielle a été observé
M. Andrej Hunko, chef de la délégation, et Mme Reina
de Bruijn-Wezeman, accompagnés de membres du secrétariat de l’Assemblée
et de la Commission de Venise.
48. Le 27 novembre 2018, à Tbilissi, la délégation a rencontré
les deux candidats à la présidence, Salome Zourabishvili et Grigol
Vashadze, et le chef de la mission d’observation électorale de l’OSCE/BIDDH
et son personnel, la Présidente de la CEC, les représentants du
Bureau de l’Audit d’État et les média.
49. La commission ad hoc a travaillé dans le cadre d’une MIOE,
qui comprenait également des délégations de l'Assemblée parlementaire
de l’OSCE, du Parlement européen et de la mission d’observation
électorale de l'OSCE/BIDDH.
50. Le jour du scrutin, la commission ad hoc s’est divisée en
trois équipes, qui ont observé le deuxième tour à Tbilissi et dans
les régions. La MIOE a noté que «le jour du scrutin s'est déroulé
de manière ordonnée malgré un environnement concurrentiel tendu.
L’ouverture, le vote et le dépouillement ont été jugés positifs
dans presque tous les bureaux de vote observés et les procédures
ont généralement été suivies. L’environnement en dehors des bureaux
de vote a renforcé les inquiétudes quant à la possibilité pour les
électeurs de voter sans craindre de représailles, d’autant plus
que les partisans des candidats utilisaient des listes d’électeurs
pour noter qui venait voter. Les observateurs citoyens et les médias
agissaient souvent au nom des partis politiques et intervenaient
parfois dans le comptage».
51. Le 29 novembre 2018, la CEC a annoncé les résultats du deuxième
tour de l’élection présidentielle: Salome Zourabishvili a obtenu
59,52 % et Grigol Vashadze – 40,48 %. Le taux de participation a
été de 56,5 %.
5. Conclusions
et recommandations
52. La délégation de l’Assemblée
a conclu que le premier tour de l’élection présidentielle avait
été pluraliste et administré avec professionnalisme. Les candidats
ont pu faire librement campagne et les électeurs ont pu faire leur
choix sans restrictions. Le jour du scrutin, les membres de la délégation
de l'APCE ont constaté la présence, dans certains bureaux de vote
ou à proximité de bureaux de vote, de soi-disant «coordinateurs» chargés
d'orienter et d'«assister» les électeurs, et de noter qui avait
voté. De telles pratiques doivent être exclues du processus électoral.
53. En ce qui concerne la campagne électorale, la délégation de
l’APCE a noté qu’elle s’est concentrée sur des sujets polémiques
qui ont polarisé l’opinion publique, plutôt que sur des questions
qui concernaient le mandat présidentiel. Alors que les questions
sujettes à controverse ont dominé la campagne au niveau national,
dans les régions, la campagne a été essentiellement axée sur des
programmes précis qui concernaient des problèmes locaux. A l’instar
des élections précédentes, la délégation a été informée de cas isolés
d'incidents violents, de perturbations d’activités de campagne,
de soupçons d'abus de ressources administratives et de la participation
de fonctionnaires aux activités de campagne pendant les heures de travail.
La délégation a exprimé son inquiétude à cet égard, y compris pendant
sa mission préélectorale, et a fait observer que toutes ces activités
brouillaient la frontière entre l'État et le parti au pouvoir et
étaient contraires aux normes du Conseil de l'Europe en matière
d'élections démocratiques.
54. En ce qui concerne le cadre juridique, il est propice à la
conduite d'élections démocratiques. Le Code électoral a été modifié
entre 2016 et 2018, sans large consensus politique, en partie à
la suite des recommandations formulées par la Commission de Venise
et l’OSCE/BIDDH dans leurs avis conjoints. Malgré quelques modifications
positives, le Code électoral devrait encore être révisé pour être
pleinement conforme aux normes du Conseil de l’Europe.
55. La CEC a travaillé en toute transparence; ses sessions étaient
ouvertes aux représentants des médias accrédités et aux représentants
des sujets électoraux. La délégation de l’Assemblée a pris note
du professionnalisme de la CEC, en qui la plupart des parties prenantes
à l'élection avaient toute confiance, et de l'esprit de coopération
des membres des bureaux de vote visités par la délégation le jour
du scrutin. Cependant, elle a également pris acte des critiques
de la société civile concernant la sélection de certains membres
des organes électoraux de degré inférieur, dont on pouvait soupçonner
qu’elle favorisait le népotisme et/ou certains intérêts politiques.
56. En ce qui concerne le financement de la campagne électorale,
la délégation d'observation a noté que la législation relative au
financement des partis et des campagnes électorales manquait d'uniformité
et que les modifications législatives récentes n'avaient pas tenu
compte des recommandations formulées il y a déjà longtemps par le
GRECO. L'absence de réglementation régissant l'obtention de prêts
pour les dépenses de campagne et les déclarations sur l'utilisation
des fonds a pu contribuer au fait que certains candidats ont été désavantagés.
Compte tenu de la répartition très inégale des dons et des plafonds
de dépenses extrêmement élevés, les candidats n’ont pas joué à armes
égales.
57. A cet égard, la délégation de l’APCE a noté que le système
de financement de la campagne était étonnamment généreux, avec de
l’argent provenant du budget de l’État et de dons privés – dans
un pays ayant un haut niveau de pauvreté. Elle a également constaté
la présence d'un nombre considérable de «candidats techniques»,
dont le rôle était de faire campagne en faveur d'autres candidats,
occupant l’espace médiatique et utilisant les financements publics:
tous les candidats n’ont donc pas joué à armes égales, ce qui n'a
pas amélioré la confiance du public dans le processus électoral
démocratique.
58. Pour ce qui est de la couverture médiatique de la campagne
électorale, la délégation d’observation a noté que les organes de
radiodiffusion avaient pleinement respecté leur obligation légale
d'allouer des temps d'antenne gratuits. Ces temps d'antenne ont
été largement utilisés par les candidats à la présidence, qui ont eu
de nombreuses occasions de présenter leurs points de vue dans le
cadre de débats télévisés ou radiodiffusés, et de fréquentes publicités
gratuites. La délégation de l'APCE a aussi observé que le cadre juridique
régissant les médias manquait de clarté sur plusieurs aspects essentiels.
Elle a en particulier constaté qu'un nombre considérable de candidats
à la présidence avaient utilisé le temps d'antenne gratuit et les publicités
payantes pour soutenir d'autres candidats, entraînant une répartition
inégale du temps d'antenne gratuit.
59. La MIOE a conclu que le deuxième tour de l'élection présidentielle
en Géorgie «était concurrentiel et que les candidats pouvaient faire
campagne librement, mais l'une des parties jouissait d'un avantage
indu et le caractère négatif de la campagne des deux côtés compromettait
le processus. Les élections ont été bien organisées. L'absence de
réglementation des principaux aspects du second tour n'a pas apporté
de sécurité juridique. La campagne a été marquée par une rhétorique
sévère. L'abus accru de ressources administratives a estompé davantage
la frontière entre le parti et l'État. Les médias privés ont continué
à manifester une forte polarisation et des préjugés évidents, tandis
que le radiodiffuseur public n'a pas assuré l'indépendance et l'impartialité
éditoriales. Le jour du scrutin, les électeurs ont activement participé
et le processus a été évalué positivement, bien que le suivi observé
des électeurs ait renforcé les inquiétudes relatives à une éventuelle intimidation»

.
60. La délégation d’observation de l’APCE a également souligné
que «le deuxième tour de l’élection présidentielle a confirmé les
inquiétudes exprimées par la délégation de l’Assemblée après le
premier tour – en particulier le système étonnamment généreux de
financement des campagnes et des partis provenant du budget de l’État
et de dons privés. En outre, on peut s'interroger sur le moment,
juste avant le second tour, de l'annonce par le gouvernement d'une
opération d’allègement de la dette de centaines de milliers d'électeurs, financée
par une fondation privée affiliée au chef du parti au pouvoir. Cette
augmentation du rôle de l'argent dans la politique dans un pays
très pauvre et sans mécanisme de contrôle efficace n'a pas contribué
à la confiance du public dans des élections démocratiques» (voir
annexe 4).
61. La délégation de l'APCE considère que l'Assemblée devrait
poursuivre sa coopération étroite avec les institutions géorgiennes,
par le biais de sa procédure de suivi, ainsi qu’avec la Commission
de Venise, afin de résoudre les problèmes constatés pendant l'élection
présidentielle de 2018, de consolider encore le cadre juridique
et d'améliorer les pratiques électorales.
Annexe 1 – Composition
de la commission ad hoc
(open)
Sur la base des propositions des groupes
politiques de l’Assemblée, la commission ad hoc se composait comme
suit:
Président: M. Andrej
HUNKO, Allemagne*
Groupe du Parti populaire
européen (PPE/DC)
- Mme Boriana
ÅBERG, Suède*
- M. Corneliu Mugurel COZMANCIUC, Roumanie
- Mme Iryna GERASHCHENKO, Ukraine
- Mme Inese LĪBIŅA-EGNERE, Lettonie
- M. Georgii LOGVYNSKYI, Ukraine
- M. Rónán MULLEN, Irlande
- Mme Bérengère POLETTI, France
- M. Birgir THÓRARINSSON, Islande
Groupe des socialistes,
démocrates et verts (SOC)
- Mme Maryvonne
BLONDIN, France*
- M. Boriss CILEVIČS, Lettonie
- M. Etienne GRECH, Malte
- Mme Josephine ORTLEB, Allemagne
- M. Stefan SCHENNACH, Autriche
Groupe des conservateurs
européens (CE)
- Lord David BLENCATHRA,
Royaume-Uni*
- Sir Edward LEIGH, Royaume-Uni
Alliance des démocrates
et des libéraux pour l’Europe (ADLE)
- Mme Reina
de BRUIJN-WEZEMAN, Pays-Bas
- M. Alfred HEER, Suisse*
- Mme Nellija KLEINBERGA, Lettonie
- M. Andrii LOPUSHANSKYI, Ukraine
- Mme Olena SOTNYK, Ukraine
Groupe pour la gauche
unitaire européenne (GUE)
- M. Paul GAVAN, Irlande
- Mme Miren Edurne GORROTXATEGUI,
Espagne
- M. Andrej HUNKO, Allemagne*
Rapporteure de la commission
de suivi
- Mme Kerstin
LUNDGREN, Suède
Commission de Venise
- M. Eirik HOLMØYVIK,
membre suppléant, Norvège
- M. Gaël MARTIN-MICALLEF, Conseiller juridique
Secrétariat
- M. Chemavon CHAHBAZIAN,
Chef de la Division d’observation des élections et de coopération interparlementaire
- Mr Bogdan TORCATORIU
- Mme Danièle GASTL, Assistante
- Mme Anne GODFREY, Assistante
* Membre de la mission préélectorale.
Annexe 2 – Programme
des réunions de la mission d'observation électorale (26-29 octobre
2018)
(open)
Vendredi 26 octobre
2018
13:00-13:20 M. Kristian Vigenin, coordinateur spécial,
chef de la mission d’observation de courte durée de l’OSCE
- M. Andrej Hunko, chef de la
délégation de l’APCE
- Mme Margareta Cederfelt, chef
de la délégation de l’AP OSCE
- Mme Laima Liucija Andrikiene,
chef de la délégation du Parlement européen
- Mme Rasa Jukneviciene, chef
de la délégation de l’AP OTAN
13:20-15:30 Réunion d’information par la mission
d’observation électorale du BIDDH – 1ère partie:
- Allocution de bienvenue: Ambassadeur
Geert-Hinrich Ahrens, chef de la mission
- Le contexte politique, le paysage médiatique et la campagne:
Mme Gabriela Skulova, analyste politique,
et M. Egor Tilpunov, analyste des médias
- Cadre juridique, recours – Mme Kseniya
Dashutina, analyste juridique
- Administration des élections et inscription des électeurs:
Mme Iuliia Shypilova, analyste des élections
15:30-17:00 Loi et administration électorales,
table ronde
- Mme Tamar
Zhvania, présidente, commission électorale centrale
- M. Mikheil Benidze, directeur exécutif, Société internationale
pour des élections équitables et pour la démocratie (ISFED)
- M. Suikhan Saladze, président, Association géorgienne
des jeunes avocats (GYLA)
17:30-19:00 Campagne et médias, table ronde
- M. George Gvimradze, directeur
de l’information et des questions d’actualité, Radiodiffuseur public
géorgien
- M. Nika Gvaramia, directeur général, Rustavi 2
- Mme Eka Gigauri, directrice
exécutive, Transparency International
- Mme Tamar Khorbaladze, présidente
du conseil d’administration, Media Development Foundation (MDF)
- M. Ivane Makharadze, chef du service de régulation des
services médiatiques audiovisuels, Commission nationale géorgienne
des communications
Samedi 27 octobre 2018
09:00-11:55 Rencontres avec les candidats à la
présidentielle:
- Mme Salome
Zourabichvili – candidate indépendante
- M. David Bakradze – «Géorgie européenne–Mouvement pour
la liberté»
- M. David Usupashvili – «Démocrates libres»
- M. Gregory Vashadze – Opposition unie «L’union fait la
force»
- M. Shalva Natelashvili – Parti travailliste de Géorgie
- M. Zurab Japaridze – «Nouveau centre–Girchi»
- M. Kakha Kukava – «Géorgie libre»
12:10-13:10 Réunion d’information par la mission d’observation
des élections du BIDDH – 2e partie:
- Procédures
le jour du scrutin et formulaires d'observation: Mme Iuliia
Shypilova, analyste des élections et Mme Meaghan
Fitzgerald, chef adjointe de la mission
- M. Anders Eriksson et M. Max Bader, analystes statistiques
- Sécurité: M. Davor Ćorluka, expert en sécurité
13:10-13:30 Réunion d’information régionale avec les observateurs
à long terme de la MOE du BIDDH pour les équipes déployées à Tbilissi
Dimanche 28 octobre
2018
Observation de l’élection
Lundi 29 octobre 2018
08:00 Réunion de debriefing de la délégation
14:30 Conférence de presse
Annexe 3 – Communiqué
de presse de la Mission internationale d’observation électorale
(premier tour)
(open)
Les électeurs
ont eu véritablement le choix et les candidats ont fait campagne
librement, mais dans des conditions inéquitables, affirment les
observateurs internationaux
Tbilissi, 29 octobre 2018 – L’élection présidentielle du 28
octobre en Géorgie a été pluraliste et gérée de manière professionnelle.
Les candidats ont pu faire campagne librement et les électeurs ont
eu véritablement le choix malgré des cas de détournement de fonds
publics et une participation à la campagne de hauts responsables
de l’État du parti au pouvoir pas toujours conforme à la loi, ont
conclu les observateurs internationaux dans une déclaration préliminaire
publiée aujourd’hui. Un déséquilibre important des dons et des plafonds
de dépenses excessivement élevés ont aussi contribué à des conditions
inéquitables, est-il indiqué dans la déclaration.
Si les radiodiffuseurs de service public ont fourni à tous
les candidats un espace pour présenter leurs positions, la forte
polarisation des médias privés et l’absence de reportages analytiques
ainsi que les campagnes négatives et la virulence du discours des
participants ont limité la capacité des électeurs à faire un choix
en toute connaissance de cause, ont ajouté les observateurs. Les
modifications légales qui ont renforcé la représentation du parti
au pouvoir à tous les niveaux de l’administration électorale et
la transparence insuffisante dans la sélection des membres sans
affiliation partisane des commissions de niveau inférieur ont pesé
sur l’idée que le grand public s’est faite de leur impartialité.
«Lors de cette élection, la Géorgie a apporté la preuve de
la maturité de sa démocratie, ce qui suscite encore plus d’attentes.
Par conséquent, tout en saluant les réalisations, il importe d’être
conscient des insuffisances liées au climat de la campagne, aux
finances et à l’environnement juridique en général», a déclaré Kristian Vigenin,
coordinateur spécial et chef de la mission d’observation de courte
durée de l’OSCE. «Nous espérons que la population géorgienne participera
activement au second tour et que le résultat reflétera parfaitement
sa volonté.»
Si, d’une manière générale, les libertés fondamentales ont
été respectées et si les candidats ont pu faire campagne librement,
plusieurs activités de campagne ont été perturbées et certains bureaux
ou matériels de campagne des partis ont été vandalisés. La campagne
a été dominée par des sujets polarisants, le dénigrement et de vives
accusations entre le parti au pouvoir et l’un des partis d’opposition.
«Le scrutin d’hier a été bien organisé et les électeurs ont
fait leur choix sans restriction», a indiqué Andrej Hunko, chef
de la délégation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.
«Des sommes prodigieuses ont été dépensées pendant la campagne électorale,
et ce dans un pays où le niveau de pauvreté est élevé. Le nombre
important de candidats qui ont apparemment fait campagne pour le
compte d’autres candidats, compromettant ainsi l’égalité des chances
et entamant la confiance des citoyens dans le processus électoral
a été un autre sujet de préoccupation.»
Selon Margareta Cederfelt, chef de la délégation de l’Assemblée
parlementaire de l’OSCE: «Avec le scrutin d’hier, la Géorgie a montré
que des efforts sont faits pour améliorer le processus électoral.
J’encourage toutes les parties prenantes aux élections, en particulier
les médias et la société civile, à faire preuve du plus haut degré
d’éthique professionnelle, en particulier pendant la campagne du
second tour. Je tiens à féliciter la population géorgienne, les
jeunes en particulier, qui ont une fois de plus apporté la preuve
de leur profond attachement à la démocratie.»
La collecte de données personnelles d’électeurs par le parti
au pouvoir n’a pas laissé d’être préoccupante et des pressions liées
à cette pratique ont été observées le jour du scrutin. Le vote a
fait l’objet d’une évaluation positive malgré quelques problèmes
de procédure lors du dépouillement et le fait que de nombreux citoyens observateurs
et représentants des médias ont agi au nom de partis politiques.
Les représentants des candidats et des organisations citoyennes
et internationales ont été autorisés à observer l’ensemble du processus
électoral et l’accréditation s’est faite sans discrimination et
avec professionnalisme. Pendant la période préélectorale, de hauts
responsables du parti au pouvoir et de hauts fonctionnaires ont
violemment attaqué le travail et les représentants de groupes de
citoyens observateurs. Cela étant, le travail d’observation de plus
de 70 organisations de citoyens observateurs a contribué à la transparence
du processus.
«Nous nous félicitons du caractère pluraliste de l’élection
et de l’engagement résolu d’organisations indépendantes de la société
civile, mais nous sommes préoccupés par le fait que certaines ont
été la cible d’attaques verbales de la part de hauts responsables
de l’État», a indiqué Laima Andrikienė, chef de la délégation du
Parlement européen. «Nous regrettons aussi que l’occupation de l’Ossétie
du Sud et de l’Abkhazie par la Russie et la décision des autorités
locales de fait de fermer la frontière administrative avec l’Ossétie
du Sud à l’occasion des élections ait privé de nombreux citoyens
géorgiens de la possibilité de voter».
Au total, 25 candidats, 16 issus de partis politiques et 9
indépendants, ont été enregistrés dans le cadre d’un processus transparent
et inclusif. Les données sur les électeurs ont pu être achetées
et l’authenticité des signatures de soutien n’a pas pu être vérifiée
faute de mécanisme efficace. Il est devenu clair pendant la campagne
qu’un nombre important de candidats s’étaient faits enregistrer
de manière à pouvoir profiter des fonds publics et du temps d’antenne
gratuit pour soutenir d’autres candidats, qui ont ainsi bénéficié
d’un avantage déloyal.
«La Géorgie est un exemple positif de réforme et un élément
moteur de l’intégration euro-atlantique. J’ai été hier impressionnée
de voir de nombreux citoyens déterminés à exercer leur droit démocratique»,
a indiqué Rasa Juknevičienė, chef de la délégation de l’Assemblée
parlementaire de l’OTAN. «Cela étant, ces élections montrent que
sans garanties solides, la concentration du pouvoir et des ressources
peut être un risque pour la démocratie».
Du côté positif, les deux radiodiffuseurs de service public
ont décidé d’offrir à tous les candidats le même temps d’antenne
gratuit et ont organisé de nombreux débats au cours desquels ceux-ci
ont pu présenter leurs points de vue. L’autorité de régulation des
médias n’a pas toujours été transparente et impartiale lorsqu’elle
est intervenue dans la campagne. Les résultats de la surveillance
des médias ont mis en évidence une nette partialité dans la couverture
des médias privés.
«L’engagement visible des électeurs ne devrait pas être amoindri
par les membres de la classe politique qui font campagne. Malheureusement,
nous avons été témoins d’affrontements violents, d’exagérations grossières,
de campagnes de dénigrement et d’insultes personnelles», a déclaré
l’ambassadeur Geert-Hinrich Ahrens, chef de la mission d’observation
électorale du Bureau des institutions démocratiques et des droits
de l’homme de l’OSCE. «En cas de second tour, la mission d’observation
électorale du BIDDH restera sur place pour l’observer».
Le cadre juridique offre une bonne base pour la tenue d’élections
démocratiques. Si la révision du Code électoral en 2017 et 2018
a apporté des améliorations techniques, certaines lacunes demeurent
et les modifications récentes ont été une occasion manquée de tenir
compte d’autres recommandations antérieures du BIDDH et du Conseil
de l’Europe et de supprimer les lacunes et les incohérences, est-il
indiqué dans la déclaration.
La législation sur le financement des partis et des campagnes
électorales n’est pas uniforme et les récentes modifications législatives
n’ont pas tenu compte des recommandations de longue date du BIDDH
et du GRECO du Conseil de l’Europe. L’absence de réglementation
sur l’obtention de prêts pour financer les dépenses de campagne
et l’établissement de rapports sur l’utilisation de ces fonds contribue
potentiellement à une inégalité des chances. Bien que la Cour des
comptes ait vérifié et publié rapidement les rapports avant l’élection,
l’absence de délais précis pour traiter des violations et de l’insuffisance
des ressources de l’institution ont soulevé des inquiétudes quant
à l’efficacité du contrôle du financement des campagnes électorales.
Annexe 4 – Communiqué
de presse de la Mission internationale d’observation électorale
(second tour)
(open)
Les candidats
ont fait campagne librement pour le second tour en Géorgie et l’élection
a été pluraliste, malgré l’avantage indu dont l’un des camps a bénéficié
et malgré le ton dénigrant de la campagne, qui a nui au processus,
affirment les observateurs internationaux
Tbilissi, 29 novembre 2018 – Le second tour de l’élection
présidentielle en Géorgie a permis une réelle concurrence et les
candidats ont pu faire campagne librement, bien que l’un des camps
ait bénéficié d’un avantage indu et bien que le ton dénigrant de
la campagne, dans les deux camps, ait nui au processus, selon les
conclusions formulées par les observateurs internationaux dans leur
déclaration préliminaire. Si l’élection a été bien administrée,
l’absence de dispositions régissant des aspects clés du second tour
a néanmoins entraîné un manque de sécurité juridique, estiment les
observateurs.
La campagne pour le scrutin du 28 novembre a été entachée
par des propos agressifs et par des incidents de violence isolés,
ainsi que par une utilisation à mauvais escient des ressources de
l’État, phénomène qui s’est accentué par rapport au premier tour
et a estompé davantage encore la limite entre parti et État, d’après
les observateurs. Ceux-ci ajoutent que les médias privés ont continué
à se caractériser par un fort clivage et par une couverture peu
objective de la campagne, tandis que le radiodiffuseur public n’a
pas assuré l’indépendance et l’impartialité éditoriales.
«Les citoyens géorgiens ont fait leur choix. Il appartiendra
ensuite aux autorités de traiter sans tarder tous les aspects problématiques
mis en évidence dans nos conclusions préliminaires et dans le rapport
final sur l’élection», a déclaré Kristian Vigenin, coordonnateur
spécial et chef de la mission d’observation à court terme de l’OSCE.
«Je pense que nous poursuivons le même but: améliorer le processus
électoral, et ainsi renforcer la démocratie dans le pays. J’espère
que maintenant, après des mois de campagne marqués par des tensions et
par un clivage de la société, la nouvelle Présidente mettra tout
en œuvre pour garantir l’unité de la nation.»
Ce second tour a été organisé car aucun candidat n’avait recueilli
plus de 50 pour cent des suffrages exprimés lors du premier tour,
le 28 octobre. La décision de la Commission électorale centrale
(CEC) de fixer la date du second tour au 28 novembre – un mercredi
– a provoqué une controverse, suscité des objections de la part des
partis d’opposition et conduit la société civile à lancer des appels
à revenir sur ce choix. En choisissant la date du scrutin, la CEC
a certes agi dans le cadre de ses prérogatives, mais les circonstances
ayant entouré la décision ont entamé la confiance dans l’institution.
Par ailleurs, l’élection a été bien gérée et la CEC a organisé des
formations pour remédier aux défaillances procédurales constatées
lors du premier tour.
Les activités de campagne se sont intensifiées à l’approche
du second tour et plusieurs manifestations, contre l’opposition
ou contre le gouvernement, organisées avant le scrutin ont attisé
les tensions entre les deux camps. Les autorités n’ont rien fait
pour limiter les propos dénigrants, virulents et parfois agressifs.
À l’utilisation à mauvais escient de ressources de l’État s’est
ajoutée l’annonce de plusieurs mesures sociales et financières,
en particulier un allègement de la dette de 600 000 personnes, financé
par une institution privée liée au dirigeant du parti au pouvoir.
Ces incidents et l’implication dans la campagne de hauts fonctionnaires membres
du parti au pouvoir ont estompé davantage encore la séparation entre
État et parti, selon la déclaration des observateurs.
«Nous notons que la date du second tour n’a pas été choisie
de manière inclusive ni dans l’intérêt de tous les électeurs, ce
qui a fait soupçonner une motivation politique de ce choix», a indiqué
Laima Andrikienė, chef de la délégation du Parlement européen. «L’annonce,
quelques jours seulement avant un second tour âprement disputé,
d’un allègement de la dette de 600 000 personnes, rendu possible
grâce à une entité dont le propriétaire est le dirigeant du parti
au pouvoir, pourrait être considérée comme une tentative d’achat
de voix. Les cas d’intimidation et de pression sur des électeurs
doivent faire l’objet d’enquêtes approfondies et de poursuites.
En outre, l’envoi massif de messages téléphoniques préenregistrés
et de textos est une pratique très discutable.»
Margareta Cederfelt, chef de la délégation de l’Assemblée
parlementaire de l’OSCE s’est exprimée ainsi: «Lors de ce second
tour, le peuple géorgien a une nouvelle fois montré son attachement
à la démocratie en participant activement au processus électoral.
Malheureusement, l’utilisation accrue de propos agressifs dans la
campagne de l’entre-deux-tours a rendu le climat électoral très
tendu.»
La collecte de données sur les électeurs et leurs préférences
politiques faisait craindre des intimidations et douter de la possibilité
pour la population de voter sans peur de représailles. Ces inquiétudes
ont été renforcées par la présence à l’extérieur des bureaux de
vote, le jour du scrutin, de soutiens des candidats, qui utilisaient
les listes électorales pour noter qui venait voter, ont déclaré
les observateurs. Les opérations d’ouverture de bureau, de vote
et de dépouillement réalisées le jour du scrutin ont été évaluées
positivement dans la quasi-totalité des bureaux de vote observés,
et les procédures ont généralement été suivies, même si les observateurs
citoyens et les représentants des médias agissaient souvent au nom
de partis politiques et se sont parfois immiscés dans le comptage
des voix.
Les obligations liées à la publication des comptes de campagne
pour le second tour ont été définies moins de deux semaines avant
le scrutin. Le déséquilibre important des dons de campagne en faveur
de la candidate soutenue par le parti au pouvoir, déjà constaté
lors du premier tour, s’est confirmé lors du second tour. Il n’y
a aucune obligation de rendre compte des activités de campagne menées
par des tiers, y compris des mouvements de protestation publique,
qui ont principalement profité à la candidate soutenue par le parti
au pouvoir. Les deux candidats ont reçu des aides de partis qui
ne présentaient pas de candidat au second tour et ces contributions
n’ont pas été déclarées. La plupart des plaintes relatives au financement
de la campagne pour les deux tours n’avaient pas encore été examinées
lors du scrutin du second tour, ce qui a renforcé les doutes sur
l’application effective des règles de financement de la campagne,
est-il indiqué dans la déclaration.
«Le second tour de l’élection présidentielle a confirmé les
inquiétudes exprimées par la délégation de l’APCE après le premier
tour, notamment au sujet du caractère étonnamment généreux du système
de financement de la campagne et du parti par le budget de l’État
et des dons privés. En outre, il est permis de s’interroger sur l’opportunité
de l’annonce gouvernementale, faite juste avant le second tour,
concernant l’allègement de la dette de centaines de milliers d’électeurs,
financé par une fondation privée liée au dirigeant du parti au pouvoir»,
a déclaré Andrej Hunko, chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire
du Conseil de l'Europe. «Ce rôle accru de l’argent dans la politique
d’un pays caractérisé par un niveau de pauvreté élevé, et dépourvu de
mécanismes de contrôle efficaces, n’était pas propre à susciter
la confiance de la population dans les élections démocratiques.»
L’ambiguïté des dispositions applicables à la campagne a entraîné
un manque de sécurité juridique et des interprétations incohérentes
et contradictoires. En outre, les modifications récentes n’ont pas
permis de régler les problèmes constatés lors de précédentes élections
à deux tours ni de donner suite aux recommandations déjà formulées
par le BIDDH, qui préconisait d’établir des règles claires pour
le second tour.
L’absence de dispositions précises a aussi eu pour effet de
limiter la durée de la campagne officielle dans les médias. Sans
y être contraints par la loi, la plupart des radiodiffuseurs nationaux
ont néanmoins accordé du temps d’antenne aux deux candidats. Le
radiodiffuseur public était ouvertement défavorable à l’opposition.
Les médias privés ont continué à se caractériser par un fort clivage
et par une couverture peu objective de la campagne, et certains
ont exprimé plus énergiquement leurs opinions politiques à l’approche
du second tour, selon les résultats du suivi des médias.
«La Géorgie a une bonne réputation démocratique au niveau
international et l’attachement à la démocratie manifesté par les
citoyens et les électeurs était impressionnant. L’élection a cependant
été entachée par une confrontation inutilement violente, par des
tentatives de dénigrement et par des attaques personnelles de la part
de certains membres de la classe politique, qui auraient mieux fait
de traiter les questions vraiment importantes pour la Géorgie, comme
l’État de droit et les inégalités économiques», a estimé l’ambassadeur Geert-Hinrich
Ahrens, chef de le mission d’observation électorale du Bureau des
institutions démocratiques et des droits de l'homme de l’OSCE. «Ces
pratiques de dénigrement ont été pires encore qu’avant le premier tour.»
Près de 700 plaintes ont été déposées après le premier tour.
Elles concernaient principalement des manquements aux règles lors
du vote et du dépouillement. Nombre de ces recours ont été rejetés
pour des raisons formelles, ce qui témoigne de la méconnaissance
des procédures de la part des auteurs des plaintes. Les plaintes
n’ont pas été dûment examinées quant au fond et les commissions
ont donné des interprétations étroites ou incohérentes de la loi,
ce qui a porté atteinte au droit à un recours effectif.