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Résolution 2259 (2019)

L’escalade des tensions autour de la mer d’Azov et du détroit de Kertch et les menaces pour la sécurité européenne

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 24 janvier 2019 (7e séance) (voir Doc. 14811, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteur: M. Andreas Nick). Texte adopté par l’Assemblée le 24 janvier 2019 (7e séance).

1. L’Assemblée parlementaire est gravement préoccupée par l’escalade des tensions entre la Fédération de Russie et l’Ukraine dans la région de la mer d’Azov et du détroit de Kertch, qui a atteint son paroxysme le 25 novembre 2018, date à laquelle trois navires militaires ukrainiens ont tenté de relier Odessa, sur la rive ukrainienne de la mer Noire, à la ville de Marioupol, située sur les bords de la mer d’Azov.
2. Le service des gardes-frontières du Service fédéral de sécurité russe (FSB) a ouvert le feu sur les bâtiments susmentionnés, les a arraisonnés et a capturé 24 militaires ukrainiens, dont trois ont été blessés. L’incident s’est produit en mer Noire, près de l’entrée du détroit de Kertch. Il y a cependant un désaccord entre l’Ukraine et la Russie quant à l’endroit exact de l’incident et au statut juridique de cet endroit. À l’heure actuelle, les militaires ukrainiens sont détenus en Russie. L'Assemblée condamne l'utilisation de la force militaire par la Fédération de Russie contre les navires militaires ukrainiens et leurs équipages.
3. Le 26 novembre 2018, la loi martiale a été instaurée dans plusieurs régions d’Ukraine pour une durée de trente jours par une directive sur «les mesures extrêmes visant à garantir la souveraineté nationale et l’indépendance de l’Ukraine». L’Assemblée se félicite de la levée de la loi martiale en Ukraine le 26 décembre 2018.
4. L’Assemblée souligne que la Fédération de Russie et l’Ukraine sont membres du Conseil de l’Europe et qu’elles se sont engagées à respecter son Statut (STE no 1), selon lequel la consolidation de la paix fondée sur la justice et la coopération internationale est d’un intérêt vital pour la préservation de la société humaine et de la civilisation. Elles se sont toutes deux engagées à résoudre pacifiquement leurs différends.
5. Se référant au Traité entre la Fédération de Russie et l’Ukraine sur la coopération et l’usage de la mer d’Azov et du détroit de Kertch, signé en décembre 2003 et ratifié par les deux pays en avril 2004, l’Assemblée note que, selon l’article 2.1 du traité, le libre passage des navires marchands et de guerre de la Fédération de Russie comme de l’Ukraine dans la mer d’Azov et le détroit de Kertch, considérés comme des eaux territoriales communes, doit être respecté et ce droit de passage assuré.
6. L’Assemblée prie donc instamment la Fédération de Russie:
6.1. de libérer immédiatement les militaires ukrainiens et de veiller à ce qu’ils bénéficient des soins médicaux ainsi que de l’assistance juridique et/ou consulaire nécessaires, conformément aux dispositions pertinentes du droit international humanitaire telles que les Conventions de Genève;
6.2. d’assurer la liberté de passage dans la mer d’Azov et le détroit de Kertch, conformément au traité susmentionné et à toute autre procédure convenue d’un commun accord, et de respecter la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer;
6.3. de s’abstenir de toute violence en cas de divergences d’opinions sur les violations de frontière alléguées et de s’en remettre plutôt aux procédures susmentionnées et à d’autres méthodes internationales de résolution des conflits.
7. L’Assemblée invite les autorités de la Fédération de Russie et de l’Ukraine:
7.1. à respecter le Traité sur la coopération et l’usage de la mer d’Azov et du détroit de Kertch, et les règles reconnues de navigation dans le canal;
7.2. à s’abstenir de toute nouvelle mesure susceptible d’aggraver les différends juridiques entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, d’intensifier le conflit et de menacer la sécurité dans l’ensemble de la région. Elle soutient pleinement les efforts déployés par les deux Parties concernées dans le cadre d’actions diplomatiques et de procédures juridiques.
8. Pour sa part, l’Assemblée:
8.1. réitère son engagement envers la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans ses frontières internationalement reconnues et rappelle à cet égard la Résolution 1990 (2014) relative au réexamen, pour des raisons substantielles, des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation russe, la Résolution 2034 (2015) relative à la contestation, pour des raisons substantielles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie, la Résolution 2063 (2015) relative à l’examen de l’annulation des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie (suivi du paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015)) et la Résolution 2132 (2016) relative aux conséquences politiques de l’agression russe en Ukraine;
8.2. exprime sa vive inquiétude au sujet de la construction par la Russie du pont sur le détroit de Kertch, qu’elle considère comme illégale et constitutive d’une nouvelle violation de la souveraineté de l’Ukraine, ainsi qu’au sujet de la politique russe de fouille sélective de navires ukrainiens et internationaux, ce qui gêne la navigation à destination et en provenance de la mer d’Azov;
8.3. soutient la proposition du Parlement européen pour que le mandat de la Mission spéciale d’observation en Ukraine de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) – qui couvre l’ensemble du territoire de l’Ukraine, y compris les zones maritimes – porte également sur la nouvelle zone de tensions dans la mer d’Azov et ses environs;
8.4. soutient la proposition, faite par l’Allemagne et la France, que des pays tiers observateurs surveillent le trafic maritime et garantissent la liberté de navigation dans le détroit de Kertch;
8.5. exhorte les États membres du Conseil de l’Europe à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter une nouvelle escalade de la violence, qui pourrait avoir des conséquences dangereuses pour la sécurité dans l’ensemble de la région;
8.6. appelle les organes internationaux compétents dans ce domaine, comme le Comité international de la Croix-Rouge et le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe, à rendre visite aux militaires ukrainiens emprisonnés, en attendant leur libération, et soutient toute action diplomatique d’États membres visant à obtenir leur libération.