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Rapport | Doc. 11528 | 14 février 2008

La situation des minorités nationales en Voïvodine et de la minorité ethnique roumaine en Serbie

Commission des questions juridiques et des droits de l'homme

Rapporteur : M. Jürgen HERRMANN, Allemagne

Résumé

Le rapport – qui rappelle que la diversité culturelle doit être perçue non comme une menace mais comme une source d’enrichissement – apporte une description détaillée de la situation des minorités nationales en Vojvodine et aborde les débats identitaires autour de la minorité «valaque» située dans l’est de la Serbie.

Si le rapport constate que la situation des minorités en Vojvodine est relativement bonne, il regrette que les autorités serbes n’aient pas su réagir avec la célérité requise aux incidents interethniques qui ont marqué cette région en 2004. Pour éviter à nouveau de tels débordements, il est indispensable que les autorités réagissent rapidement et avec fermeté à l’égard des auteurs de violence interethnique.

Le rapport constate également que des efforts ont été entrepris pour améliorer les dispositions législatives en faveur des minorités mais dénonce un manque chronique dans la mise en œuvre de ces lois et dans l’adoption de dispositions législatives ou réglementaires complémentaires.

La situation des personnes appartenant à des minorités nationales varie en fonction de leur implantation régionale. Le rapport constate que la situation des membres de la minorité valaque/roumaine de l’est de la Serbie est nettement moins favorable que celle des habitants de Vojvodine.

Concernant les discussions autour de l’identité des membres de la minorité dite «valaque», le rapport rappelle le principe énoncé à l’article 3 de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et réaffirme que toute tentative visant à imposer une identité à une personne, ou à un groupe de personnes, est inadmissible.

A. Projet de résolution

(open)
1. L’Assemblée parlementaire note que les sociétés européennes d’aujourd’hui sont par essence multiculturelles et multiethniques.
2. Elle défend fermement la diversité culturelle, dont l’importance est soulignée dans plusieurs instruments du Conseil de l’Europe et en particulier dans la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE no 157) et dans la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (STE no 148).
3. La diversité ne doit pas être perçue comme une menace mais comme une source d’enrichissement. Elle doit être respectée et protégée en tant que composante fondamentale de toute société démocratique. Or, le respect des principes en matière de droits de l’homme, prééminence du droit et démocratie est la meilleure garantie du respect de la diversité.
4. La Serbie, comme toute la région des Balkans, est l’un des pays les plus multiculturels d’Europe. Elle doit relever les défis inhérents à toute société multiculturelle en veillant à promouvoir une vision de la société fondée sur le respect de la diversité, tout en combattant toute forme d’intolérance et de discrimination.
5. La région, y compris la Serbie, reste marquée par des tensions interethniques, héritage de la politique antiminoritaire des années Milošević. Aujourd’hui encore des incidents à caractère ethnique, à des degrés d’intensité variable, sont recensés en Serbie.
6. L’Assemblée souligne que le dialogue interculturel et le respect de la diversité des cultures sont des garants de la paix et de la stabilité dans la région à long terme.
7. Alors que la situation actuelle en Vojvodine, province caractérisée par une mixité ethnique des plus prononcées en Serbie, semble satisfaisante et que les incidents à caractère ethnique sont peu nombreux et de faible intensité, force est de constater qu’en 2004 – période marquée par des incidents interethniques nombreux et alarmants – les autorités ont réagi bien trop tardivement.
8. L’Assemblée exhorte les autorités serbes à toujours réagir avec beaucoup de célérité et de fermeté contre les auteurs de toute violence interethnique.
9. L’Assemblée se félicite de constater qu’un certain nombre d’initiatives louables, dont le «paquet» législatif de 2002, ont été prises en faveur des droits des minorités nationales et encourage les autorités à poursuivre leurs efforts.
10. Ces efforts devraient être relayés par une politique de communication des autorités de l’Etat, des institutions religieuses ainsi que des médias, en vue de promouvoir l’esprit de tolérance, le dialogue interculturel et de lutter contre les discriminations.
11. L’Assemblée se félicite de constater qu’un projet de loi antidiscrimination a été préparé et soumis aux commentaires de la Commission de Venise. Alors qu’en Serbie les discriminations envers les membres des minorités sont encore courantes, il est particulièrement important qu’une telle loi soit rapidement adoptée et mise en œuvre.
12. L’Assemblée est d’avis que le médiateur peut, et doit, jouer un rôle important en la matière. Elle se félicite donc de la nomination, attendue de longue date, du médiateur de la République de Serbie le 29 juin 2007.
13. Par ailleurs, les autorités doivent tout mettre en œuvre afin de renforcer la confiance des minorités envers les représentants des autorités et pour combattre les préjugés envers les minorités qui peuvent persister au sein des forces de l’ordre et du pouvoir judiciaire. L’Assemblée se félicite de l’existence d’un programme visant à augmenter la représentation des membres des minorités dans leurs rangs, et notamment de la mise en place d’une force de police multiethnique dans le sud de la Serbie. Elle encourage les autorités à étendre cette initiative à d’autres régions, et notamment en Vojvodine.
14. L’Assemblée est cependant inquiète de constater de fortes lacunes en termes de mise en œuvre des droits des minorités. Il est de la responsabilité des autorités nationales, régionales et locales d’assurer la mise en œuvre pleine et entière des dispositions législatives pertinentes.
15. Certaines dispositions législatives font défaut depuis plusieurs années, ce qui empêche que le potentiel du cadre législatif développé en 2002 puisse être exploité au mieux au profit des membres des minorités.
16. L’Assemblée est d’avis que ces lacunes dans le dispositif législatif remettent en cause la crédibilité de la volonté politique des autorités en matière de droits des minorités et n’est pas propice à renforcer la confiance des membres des minorités nationales dans les autorités.
17. De plus, l’Assemblée est préoccupée de constater des divergences d’une région à une autre quant à la mise en œuvre et à l’accès effectif des membres des minorités à leurs droits. Elle constate notamment que les membres des minorités nationales dans le nord-est de la Serbie sont dans une situation nettement moins favorable que ceux de Vojvodine.
18. Quant à la question de l’identité des minorités, et en particulier eu égard au débat autour des minorités roumaine et valaque, l’Assemblée rappelle le principe énoncé à l’article 3 de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et réaffirme que toute tentative visant à imposer une identité à une personne, ou à un groupe de personnes, est inadmissible.
19. L’Assemblée encourage donc les membres de la minorité valaque/roumaine de l’est de la Serbie à joindre leurs efforts et à dépasser leurs désaccords internes dans leur propre intérêt et afin de conserver les spécificités qui constituent leur identité. Les autorités serbes ont ici pour responsabilité de ne pas entraver mais au contraire de soutenir les initiatives en ce sens.
20. Consciente des critiques dont la loi de 2006 concernant les Eglises et les organisations religieuses en République de Serbie a fait l’objet, et notamment la question de la (non)-reconnaissance de l’Eglise orthodoxe roumaine par cette loi, l’Assemblée s’étonne de l’influence prépondérante de l’Eglise orthodoxe serbe pour ce qui est de la reconnaissance d’autres Eglises et/ou communautés religieuses. L’Assemblée invite les autorités serbes à se pencher sur cette question et à supprimer les références au droit canon d’une Eglise par rapport aux autres Eglises ou communautés religieuses.
21. Finalement, consciente que la coopération entre l’Etat de résidence et l’Etat-parent, à travers des accords bilatéraux, présente un réel intérêt afin de garantir la stabilité en Europe, l’Assemblée appelle les autorités serbes à intensifier leurs relations de bon voisinage avec les Etats parents (la Roumanie, la Hongrie et «l’ex-République yougoslave de Macédoine») en mettant pleinement en œuvre les accords bilatéraux qu’elles ont signés.
22. En conséquence, l’Assemblée invite les autorités compétentes de la République de Serbie:
22.1. à accorder aux allégations de violence interethniques une attention accrue et ày réagir avec célérité, fermeté et efficacité, notamment par des enquêtes policières et des poursuites judiciaires efficaces;
22.2. à envisager de réinstituer le poste de ministre des Droits de l’homme et des Minorités;
22.3. à veiller à la mise en œuvre effective des législations en matière de droits des minorités et en particulier des lois adoptées en 2002;
22.4. à mettre en place aussi rapidement que possible le fonds de promotion sociale, économique, culturelle et de développement général des minorités nationales prévu à l’article 20 de la loi-cadre de 2002 sur la protection des droits et libertés des minorités nationales;
22.5. à adopter rapidement une loi antidiscrimination, en tenant compte des remarques formulées par la Commission de Venise;
22.6. à adopter en priorité les textes législatifs relatifs au financement et aux élections des conseils nationaux pour les minorités nationales, en prenant en compte les commentaires des experts du Conseil de l’Europe sur le projet de loi relatif aux élections;
22.7. à définir plus précisément les compétences et obligations des conseils nationaux pour les minorités nationales tout en les dotant des fonds nécessaires à la réalisation de leurs missions;
22.8. à introduire un mécanisme de contrôle par les conseil nationaux pour les minorités des actes de l’exécutif en matière de droits des minorités;
22.9. à convoquer des réunions plus nombreuses et régulières du Conseil national pour les minorités nationales;
22.10. à envisager la nomination d’un médiateur adjoint en charge des questions relatives aux droits des minorités;
22.11. à doter les provinces autonomes de garanties financières adéquates;
22.12. à prendre des mesures positives en faveur des personnes appartenant à des minorités, y compris la minorité valaque/roumaine, et à veiller à l’éradication de toute discrimination à l’encontre de leurs membres;
22.13. à intensifier leurs efforts pour le développement d’initiatives visant à promouvoir un esprit de tolérance et le dialogue interculturel;
22.14. à accélérer les initiatives visant à former des enseignants ayant les qualifications requises pour enseigner les langues et enseigner dans les langues minoritaires;
22.15. à continuer de développer des écoles bilingues et de langue maternelle;
22.16. à supprimer les différences régionales existantes en terme de garanties effectives des droits des minorités (notamment en ce qui concerne l’usage des langues minoritaires dans l’administration, l’enseignement en langues minoritaires, la liberté de religion, etc.) en mettant pleinement en œuvre, et sur tout le territoire, les législations existantes en la matière;
22.17. à prendre les mesures nécessaires afin de fournir aux Valaques/Roumains qui vivent dans l’est de la Serbie (dans les vallées du Timoc, de la Morava et du Danube) l’accès à l’enseignement, aux médias età l’administration publique dans leur langue maternelle et à leur permettre de tenir des services religieux dans cette langue;
22.18. à identifier et appliquer des solutions techniques qui permettraient aux personnes vivant dans l’est de la Serbie de recevoir les émissions en langue roumaine qui sont émises en Vojvodine;
22.19. à prévoir des exceptions aux procédures de privatisation des médias au bénéfice des médias en langues minoritaires afin d’en assurer la viabilité.
23. L’Assemblée appelle également la Serbie et les Etats-parents concernés à convoquer le plus rapidement possible les commissions mixtes intergouvernementales prévues dans les accords bilatéraux relatifs à la coopération dans le domaine de la protection des minorités nationales qu’ils ont conclus.
24. L’Assemblée invite sa commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi) à dûment prendre en compte les propositions contenues dans cette résolution dans le cadre de son dialogue avec les autorités serbes.

B. Projet de recommandation

(open)
1. L’Assemblée parlementaire, se référant à sa Résolution … (2008) relative à la situation des minorités nationales en Vojvodine et de la minorité ethnique roumaine en Serbie, invite le Comité des Ministres à prendre en compte, dans le cadre de son suivi régulier, les recommandations qu’elle a adressées aux autorités serbes dans ladite résolution et à en tenir compte dans le cadre de son prochain cycle de monitoring en vertu de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales.
2. L’Assemblée recommande également au Comité des Ministres et aux autorités serbes d’envisager de lancer de nouveaux programmes d’assistance ciblés afin d’appuyer l’élaboration de plans d’action concrets visant à promouvoir un esprit de tolérance et le dialogue interculturel, et notamment à renforcer la confiance des minorités dans les institutions de l’Etat et pour combattre les préjugés envers les minorités qui peuvent persister au sein des forces de l’ordre et du pouvoir judiciaire.

C. Exposé des motifs, par M. Jürgen Herrmann

(open)

1. Introduction

1. Le 25 novembre 2005, l’Assemblée parlementaire a décidé de renvoyer à la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, pour rapport, les propositions de résolution relatives à la «Situation précaire des minorités nationales dans la province de Vojvodine en Serbie-Monténégro» (Doc. 10715, Renvoi no 3147) et à la «Violation des droits de l’homme de la minorité nationale roumaine en Serbie» (Doc. 10726, Renvoi no 3148). A sa réunion de janvier 2006, la commission a nommé M. Jürgen Herrmann (Allemagne, PPE/DC) rapporteur.
2. Le 17 mai 2006 à Budapest, la sous-commission sur les droits des minorités a tenu, sur cette question, un échange de vues auquel plusieurs représentants de minorités nationales 
			(1) 
			Hongroise, croate et
slovaque. ont participé, ainsi que M. Petar Ladjevic, secrétaire du Conseil de la République de Serbie pour les minorités nationales, Mme Anastasia Crickley, membre du Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, M. Gobor Zoltan, adjoint au médiateur de la province autonome de Vojvodine, et M. Stefano Valenti, représentant spécial du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe en Serbie-Monténégro (qui ne formait, à l’époque, qu’un seul Etat).
3. Les 27 et 28 septembre 2006, le rapporteur a effectué une mission d’information portant tout particulièrement sur la situation des minorités nationales en Vojvodine. A la suite de cette visite dans la région, le rapporteur a demandé à la commission, le 6 novembre 2006, de modifier le titre du rapport afin de garantir l’approche la plus objective possible de la question.
4. Les 26 et 27 septembre 2007, il s’est à nouveau rendu en Serbie afin d’effectuer une visite d’information essentiellement consacrée à la situation de la minorité ethnique roumaine.
5. Les différentes étapes suivies témoignent de la diligence dont a fait preuve le rapporteur dans la préparation de ce rapport dont la thématique est complexe.

1.1. Contexte

6. Il convient de remarquer qu’un changement institutionnel majeur est intervenu dans le pays visité. Le référendum sur l’indépendance du Monténégro, qui a eu lieu le 21 mai 2006, a été suivi de la déclaration d’indépendance adoptée par le Parlement du Monténégro le 3 juin 2006. La République du Monténégro a dès lors trouvé une nouvelle place au sein de la communauté internationale et européenne en tant qu’Etat souverain et indépendant 
			(2) 
			Le Monténégro a depuis
adhéré au Conseil de l’Europe, en devenant le 47e Etat membre. Voir
l’avis de l’Assemblée parlementaire relatif à l’adhésion de la République
du Monténégro au Conseil de l’Europe (Avis no 261 (2007)), ainsi que les rapports des commissions saisies pour
avis (Doc. 11205 et Doc. 11207).. L’union d’état de Serbie-Monténégro a cessé d’exister. Ce changement institutionnel a eu d’importantes conséquences sur le cadre légal de la protection des minorités en Serbie 
			(3) 
			Voir par
exemple «The inter-ethnic incidents in Serbia in 2006 – Further
reducing in the run-up to solving the status of Kosovo», CDCS du
18 décembre 2006 (en anglais uniquement)..

1.2. Interprétation du mandat

7. Le rapporteur tient à souligner que son mandat est issu de deux propositions de résolution distinctes qui ont été jointes par le Bureau en vue de la préparation d’un rapport par la commission des questions juridiques et des droits de l’homme. Les deux questions sont évidemment liées dans leur thématique, puisqu’il s’agit dans les deux cas des droits de minorités nationales, mais elles sont distinctes géographiquement et présentent des problématiques spécifiques.
8. C’est la raison pour laquelle le rapporteur a choisi de les traiter distinctement, tant en effectuant des visites spécifiques que dans la présentation formelle de son rapport.
9. La scission entre la Serbie et le Monténégro n’a pas eu d’influence sur le mandat du rapporteur puisque les deux régions concernées sont exclusivement situées sur le territoire serbe.
10. Le rapporteur n’a pas abordé la question des droits des minorités/communautés au Kosovo – située clairement en dehors de son mandat– mais attire l’attention sur l’avis préparé par M. Omtzigt, rapporteur de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme 
			(4) 
			Voir Doc. 11498. La commission saisie pour rapport sur les développements
concernant le futur statut du Kosovo est la commission des questions
politiques; voir Doc. 11472, 20 décembre 2007..

2. Cadre légal de la protection des minorités nationales en Serbie 
			(5) 
			Pour une description
plus exhaustive, le rapporteur renvoi à la lecture de l’«Alternative
Report submitted pursuant to Article 25 § 1 of the FCNM», Voivodina
Center for Human Rights, Voivodina/Serbia, septembre 2007 (en anglais uniquement),
pp. 4 et suivantes, <a href='http://www.minelres.lv/coe/report/ShadowReport_Voivodina_VHRC.pdf'>http://www.minelres.lv/coe/report/ShadowReport_Voivodina_VHRC.pdf</a>.

11. La République de Serbie est partie à la Convention-cadre pour la protection des minorités du Conseil de l’Europe (en vigueur depuis le 1er septembre 2001) (ci-après «la convention-cadre») ainsi qu’à la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (en vigueur depuis le 1er juin 2006) (ci-après «la Charte européenne»).
12. Depuis 2002, la Serbie-Monténégro avait développé un cadre normatif assez complet en matière de droits des minorités qui lui avait valu de nombreux échos positifs de la part de la communauté internationale.
13. En 2002, une loi-cadre fédérale relative à la protection des droits et libertés des minorités nationales avait été adoptée. Par ailleurs, des conseils nationaux pour les minorités nationales, ainsi qu’un Conseil pour les minorités nationales au niveau de la République de Serbie, ont été instaurés. Malheureusement, ces innovations qui avaient été qualifiées de «prometteuses» par le Comité des Ministres 
			(6) 
			Voir RésCNM(2004)12
du 17 novembre 2004., sont loin d’avoir développé tout leur potentiel en raison de l’absence de certaines dispositions législatives (voir ci-dessous paragraphe 26 et suivants).
14. La Charte de 2003 de l’union d’état sur les droits de l’homme, les droits des minorités et les libertés civiles («la charte») était considérée par les organisations internationales comme un instrument solide et adéquat. La Commission européenne pour la démocratie par le droit («Commission de Venise») avait d’ailleurs rendu un avis très positif sur ce texte 
			(7) 
			Voir
CDL(2003)10fin..
15. Force est de constater que cet instrument, qui faisait partie intégrante de la Charte constitutionnelle de l’union d’état de Serbie-Monténégro, a perdu sa validité du fait de la séparation de la Serbie et du Monténégro. Au même moment, le ministère des Droits de l’homme et des Droits des minorités a cessé d’exister. Une Agence pour les droits de l’homme et les droits des minorités a remplacé cette entité.
16. On peut s’interroger sur l’opportunité de remplacer un ministère par une agence. Certes, tous les Etats membres du Conseil de l’Europe n’ont pas un ministère dédié aux droits des minorités, loin s’en faut, mais la Serbie est un pays dans lequel les minorités ont une configuration très particulière. En tout état de cause, la représentativité et l’autorité d’une agence n’égalent pas celle d’un ministère et la symbolique est telle que l’on pourrait y voir une volonté de moins mettre l’accent sur la question des droits de l’homme et des droits des minorités. Il pourrait être opportun de réfléchir à la possibilité de charger un ministre délégué, voire un ministre sans portefeuille, de la mise en œuvre au niveau politique des droits des minorités.
17. La loi-cadre fédérale de 2002 sur la protection des droits et libertés des minorités nationales a été transposée telle quelle dans l’ordre interne et est désormais en vigueur en Serbie 
			(8) 
			Voir «Alternative Report
submitted pursuant to Article 25 § 1 of the FCNM», op. cit., septembre 2007 (en anglais uniquement).. Cela aurait pu être une occasion pour la compléter et/ou la mettre à jour, mais cela n’a pas été le cas. En effet, s’agissant à la base d’une loi-cadre, de nombreuses dispositions législatives supplémentaires sont encore nécessaires. Cette loi prévoyait nombre d’initiatives positives, telle la mise en place d’un fonds de promotion sociale, économique, culturelle et de développement général des minorités nationales (article 20). Un tel fonds n’a toujours pas été institué à ce jour.
18. Par ailleurs, alors que le comité consultatif s’était félicité de la mise en place d’un groupe de travail en vue de la rédaction d’une loi antidiscrimination, une telle loi n’a toujours pas été adoptée à ce jour 
			(9) 
			Ibid., p. 19.. Comme le constate la Commission européenne dans son rapport de novembre 2007, dans la pratique la discrimination est monnaie courante et les minorités ethniques en sont une des cibles les plus fréquentes 
			(10) 
			Voir Serbia 2007 Progress
Report, SEC(2007) 1435, 6 novembre 2007, Commission staff working
document, COM(2007) 663 final, p. 14., il est donc particulièrement important qu’un texte de loi adéquat soit promulgué le plus vite possible. Le rapporteur est confiant que cela pourrait bientôt être une réalité puisqu’un projet de loi existe. La Commission de Venise l’examine actuellement et un de ses membres, M. Ledi Bianku, a conclu que ce projet de loi est l’un des textes législatifs les plus complets en matière de protection contre la discrimination 
			(11) 
			Lire les commentaires
de M. Ledi Bianku sur le projet de la loi interdisant la discrimination
de la République de Serbie (en anglais uniquement), Opinion No.
453/2007, CDL(2007)120.. Le rapporteur invite les autorités compétentes à amender le texte afin de prendre en compte les remarques qui seront formulées par la Commission de Venise dans son avis et de procéder à l’adoption de cette loi dans les meilleurs délais.

La nouvelle Constitution de 2006

19. La nouvelle Constitution, adoptée en séance extraordinaire par l’Assemblée nationale serbe le 29 septembre 2006 et approuvée par référendum les 29 et 30 octobre 2006, a fait l’objet d’un avis par la Commission de Venise 
			(12) 
			Voir l’avis CDL-AD(2007)004,
Avis no 405/2006 adopté les 16 et 17 mars 2007 (http://www.venice.coe.int/docs/2007/CDL-AD(2007)004-f.asp).. D’emblée, la Commission de Venise constate que «beaucoup d’éléments de cette Constitution satisfont aux normes européennes» mais également que certaines normes «sont peu claires, voire contradictoires». C’est manifestement le résultat d’une rédaction trop rapide, état de fait dont s’étaient plaints plusieurs interlocuteurs auprès du rapporteur lors de sa première visite sur place.
20. En termes de protection des minorités, la Commission de Venise remarque que les droits linguistiques des minorités sont moins bien protégés que dans la Constitution de 1990. De fait, le recours à l’alphabet latin, dont l’usage est le plus courant parmi les minorités, ne bénéficie plus d’une protection légale dans la Constitution 
			(13) 
			Voir l’article 10,
paragraphe 1, de la Constitution; lire également «Initial periodical
report presented to the Secretary General of CoE in accordance with
Article 15 of the Charter [for regional or minority languages]»,
MIN-LANG/PR(2007)4, 11 juillet 2007 (en anglais uniquement), paragraphe 2.3,
p. 22, http://www.coe.int/t/e/legal_affairs/local_and_regional_democracy/regional_or_minority_languages/2_monitoring/2.2_States_Reports/Serbia_report1.pdf..
21. Les droits des minorités sont traités au titre II de la Constitution, aux articles 75 à 81. La Commission de Venise accorde une évaluation positive à l’article 22 (Protection des droits de l’homme, des droits des minorités et des libertés fondamentales) et se félicite du chapitre III de la Constitution (Droits des personnes appartenant à une minorité nationale). Elle souhaiterait cependant que les dispositions de l’article 76 permettant la discrimination positive à l’égard des minorités nationales soient élargies et non pas limitées aux seules «conditions de vie extrêmement défavorables» et que celles prévues à l’article 22 ne s’appliquent pas uniquement aux citoyens.
22. La Commission de Venise insiste sur le fait qu’il «appartient maintenant aux autorités de veiller à ce que les droits consacrés par la Constitution deviennent effectifs». Le rapporteur enjoint lui aussi les autorités en ce sens afin que, contrairement à bien des dispositions de la charte, les droits garantis dans la Constitution ne restent pas lettre morte.
23. Le rapporteur pour sa part se félicite de l’interdiction explicite de la discrimination directe ou indirecte inscrite à l’article 21 de la Constitution.
24. Le rapporteur se félicite également de la nomination, attendue de longue date 
			(14) 
			La
loi instituant le médiateur en Serbie date en effet de 2005, Gazette officielle de la République de Serbie,
no 79/2005., du médiateur serbe le 29 juin 2007. Il souligne l’importance du fonctionnement effectif d’une telle institution et partage les inquiétudes soulevées par la Commission de Venise qui regrette que cette institution soit «supervisée» par l’Assemblée nationale et ne soit pas protégée contre une révocation injustifiée par cette dernière 
			(15) 
			CDL-AD(2007)004, paragraphe
58, précité.. Par ailleurs, on pourrait envisager que le médiateur puisse nommer des médiateurs adjoints dédiés à des domaines spécifiques. En l’occurrence, il serait intéressant d’envisager la nomination d’un médiateur adjoint en charge des questions relatives aux droits des minorités (un adjoint spécifique auprès du médiateur pour la province autonome de Vojvodine existe).
25. Le rapporteur est préoccupé de constater un certain recul de la protection des droits des minorités dans la législation serbe et appelle les autorités ày remédier afin de garantir une protection législative au moins égale à celle existant avant la séparation de la Serbie et du Monténégro.

Le Conseil national pour les minorités nationales et les conseils nationaux des minorités nationales

26. Un point important a été souligné au cours de la visite du rapporteur en Serbie. Il s’avère que certains textes législatifs et règlements font défaut pour organiser convenablement les travaux des conseils nationaux des minorités nationales. Bien que les conseils nationaux aient une existence légale depuis 2002, il n’y a pas de dispositions législatives régissant leur financement ou l’élection des membres de leur conseil d’administration. Comme leur premier mandat atteindra bientôt son terme, il est urgent que les autorités serbes adoptent les textes législatifs manquants. Dans son avis, le Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales («le comité consultatif») a déjà exhorté le gouvernement à traiter la question du financement des conseils en priorité 
			(16) 
			ACFC/INF/OP/I(2004)002,
27 novembre 2003.. En septembre 2006, les autorités avaient assuré au rapporteur qu’il existait une véritable volonté politique d’adopter les lois et règlements nécessaires dès que possible.
27. Le rapporteur s’inquiète de constater qu’à la date d’aujourd’hui, certains conseils nationaux des minorités nationales arrivent au terme de leur mandat et que, en l’absence de dispositions législatives relatives à l’élection de leurs membres, certains conseils ne peuvent pas être renouvelés 
			(17) 
			Voir
l’annonce du CDCS du 4 juin 2007.. Cela amoindrit clairement l’efficacité du système de représentation des minorités nationales en Serbie. Le rapporteur exhorte les autorités à considérer l’adoption des législations nécessaires comme une priorité et demande aux autorités compétentes (à savoir le ministère de l’Autonomie locale et de l’Administration) de prendre en compte les remarques exprimées par les experts du Conseil de l’Europe sur le projet de loi relatif à l’élection des conseils pour les minorités.
28. Le rapporteur constate par ailleurs avec regret que le Conseil national pour les minorités nationales n’a siégé qu’à une seule et unique reprise au courant de l’année 2006 et aucune fois en 2007 
			(18) 
			Cette information émanant
de diverses sources a finalement été confirmée au rapporteur par
les autorités après que celles-ci lui ont à l’origine annoncé que
le Conseil national pour les minorités nationales avait siégé deux
fois en 2007.. S’il félicite le Gouvernement serbe d’avoir mis en place une telle structure dans l’intérêt des minorités, il est convaincu qu’en siégeant seulement une fois dans l’année 2006 le conseil ne peut pas être en mesure de fonctionner efficacement. Au vu de la forte demande exprimée par les représentants des conseils nationaux pour les minorités nationales pour l’organisation de réunions plus fréquentes et ayant été informé par les autorités que le Conseil national pour les minorités nationales peut se réunir à la demande de seulement un tiers de ses membres, le rapporteur s’étonne véritablement de l’absence de réunion cette année. En effet, le Conseil national pour les minorités nationales étant constitué de 14 membres (7 membres issus des conseils nationaux des minorités nationales, 6 ministres et le Premier ministre), les membres des conseils nationaux pour les minorités nationales atteignent largement le tiers des membres requis pour initier la convocation d’une réunion.
29. Le rapporteur est d’avis que les compétences des conseils nationaux pour les minorités nationales devraient être accrues et être mieux définies. D’une part, ces conseils devraient pouvoir jouer un rôle de contrôle sur les décisions de l’exécutif en matière de minorité, d’autre part, leurs compétences devraient être définies précisément afin d’éviter des dérives d’ordre politique. En effet, les conseils nationaux reçoivent des fonds et il leur revient de les répartir à leur bon vouloir. Les fonds perçus sont évidemment insuffisants pour tout financer et la répartition se connote en termes d’intérêts politiques.
30. Le rapporteur souhaite citer un autre exemple de situation qui devrait être améliorée: à la suite d’une résolution gouvernementale du 11 mai 2006 en vue d’augmenter la participation des membres des minorités ethniques dans les administrations publiques, les avis de vacances doivent être publiés dans des journaux en langue minoritaire 
			(19) 
			Une copie en anglais
de cette résolution gouvernementale est archivée auprès du secrétariat
de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme.. Or, selon les autorités (ce qui n’est pas explicitement spécifié dans la résolution du 11 mai 2006), il appartiendrait aux conseils nationaux pour les différentes minorités de décider dans quel journal la publication aura lieu et de financer la traduction des avis de vacances. Faute de moyens, il semblerait que bon nombre d’avis de vacances ne soient finalement pas publiés dans les journaux en question. Il conviendrait de définir à la fois les compétences et les obligations des conseils nationaux et surtout de leur donner les moyens adéquats pour remplir leurs fonctions. En l’absence de moyens adéquats, le rapporteur suggère que l’Agence des droits de l’homme et des minorités se charge de la publication des avis de vacances dans des journaux en langue minoritaire prévue au point 8 de ladite résolution.

3. Représentation politique des minorités nationales

31. La loi électorale de Serbie ne prévoit aucun seuil minimal pour siéger au parlement pour les listes des partis politiques représentant les minorités nationales. Il s’agit là d’une mesure particulièrement efficace et favorable afin d’assurer que ces partis, qui par leur nature même ne peuvent que recevoir les voix d’un groupe minoritaire, soient effectivement représentés au sein de l’organe législatif serbe 
			(20) 
			Voir l’avis du comité
consultatif qui préconisait la suppression de tels seuils, ACFC/INF/OP/I(2004)002,
27 novembre 2003, paragraphe 102..
32. A la suite des élections législatives de janvier 2007, et après une campagne active, les partis politiques représentant des minorités ont remporté huit sièges et ont formé un groupe parlementaire. L’un d’entre eux a même été nommé vice-président du parlement 
			(21) 
			Voir le document d’information
du Secrétaire Général relatif au respect des obligations et engagements
et mise en œuvre du programme de coopération postadhésion par la
Serbie, SG/Inf(2007) 05 final, 18 juillet 2007.. La Commission européenne se félicite de cette évolution positive en termes de représentation des membres des minorités au parlement 
			(22) 
			Voir Serbia 2007 Progress
Report, SEC(2007) 1435, 6 novembre 2007, Commission staff working
document, COM(2007) 663 final, p. 15..
33. Le rapporteur souhaite également souligner qu’il a rencontré certains parlementaires issus de minorités nationales mais membres des partis politiques généraux. Le rapporteur pense qu’il s’agit là d’un élément important à prendre en compte pour avoir une image fidèle de la représentation des membres des minorités au sein des organes politiques de Serbie.
34. Par ailleurs, le rapporteur félicite le gouvernement qui a initié, par le biais de son Agence pour les droits de l’homme et des minorités, des recherches consacrées aux relations interethniques en vue de renforcer l’intégration des minorités dans la société serbe 
			(23) 
			Voir l’annonce
du CDCS du 4 juin 2007.. Cependant, il semblerait que les résultats des recherches n’aient pas été rendus publics dans le détail. Le rapporteur considère que le manque de publicité, s’il est avéré, donné à ces résultats démontre un manque de transparence. Le manque de transparence suscite toujours des interrogations sur la nature des résultats capables de générer des tensions. Afin de balayer ces doutes, le rapporteur invite l’Agence pour les droits de l’homme et des minorités à rendre publics dans leur intégralité les résultats de ses recherches, dans une volonté de renforcer la confiance mutuelle entre les autorités, la société civile et les membres des minorités.

4. Relations entre la Serbie et les Etats-parents 
			(24) 
			Pour
de plus amples informations sur la question du rôle des Etats-parents,
lire La protection des minorités par
leur Etat-parent, Commission de Venise, Editions du Conseil
de l’Europe, Strasbourg, 2003.

35. La République de Serbie a signé des accords avec plusieurs Etats-parents des membres des minorités nationales présentes sur son territoire. De tels accords existent avec la Roumanie, la Hongrie et «l’ex-République yougoslave de Macédoine». Or, là encore, la pratique ne semble pas toujours suivre les déclarations d’intentions couchées sur le papier.
36. La minorité roumaine faisant particulièrement partie de son mandat, le rapporteur choisit d’illustrer son propos en examinant les relations entre la Serbie et la Roumanie.
37. Deux textes régissent principalement les relations entre la Serbie et la Roumanie: un traité d’amitié, de coopération et de bon voisinage entre la Roumanie et la Serbie (signé le 16 mai 1996) ainsi qu’un accord bilatéral entre le Gouvernement de Roumanie et le Gouvernement fédéral de la République de Yougoslavie relatif à la coopération dans le domaine de la protection des minorités nationales (signé le 4 novembre 2002).
38. Le rapporteur a été informé que la mise en œuvre de ces textes n’est pas satisfaisante. Le ministre des Affaires étrangères de Roumanie s’est rendu en Serbie et a demandé la convocation de la Commission mixte intergouvernementale pour les minorités nationales prévue à l’article 11 de l’accord bilatéral et dont la mission est de promouvoir la mise en œuvre de l’accord.
39. Malgré une réponse positive de la part des autorités serbes à cette demande, la Commission mixte intergouvernementale ne s’est toujours pas réunie. Il semblerait que le même problème existe dans la mise en œuvre des accords bilatéraux avec la Hongrie et «l’ex-République yougoslave de Macédoine».
40. Le rapporteur encourage fortement les autorités serbes à se saisir de la question et à nommer les personnes habilitées à siéger dans les commissions mixtes intergouvernementales. La tenue de telles réunions est nécessaire à ce que les accords bilatéraux ne restent pas lettre morte.
41. La coopération entre l’Etat de résidence et l’Etat-parent, à travers des accords bilatéraux, présente un réel intérêt afin de garantir la stabilité en Europe et mérite d’être prise au sérieux. Le rapporteur appelle les autorités serbes à intensifier leurs relations de bon voisinage avec les Etats-parents en mettant pleinement en œuvre les accords qu’ils ont signés.

5. Caractère multiethnique de la Vojvodine

42. La Vojvodine constitue une «société multiethnique», caractérisée par une grande diversité ethnique, culturelle et linguistique. Selon le dernier recensement effectué en 2002, la population de la région se compose d’environ 26 groupes ethniques dont 65,05 % de Serbes, 14,28 % de Hongrois, 2,79 % de Slovaques, 2,78 % de Croates, 2,45 % de Yougoslaves, 1,75 % de Monténégrins, 1,43 % de Roms, 1,5 % de Roumains, 0,97 % de Bunjevci, 0,77 % de Ruthènes et 0,58 % de Macédoniens 
			(25) 
			Seuls sont inclus les
groupes comptant plus de 10 000 personnes..
43. Au cours de l’histoire, la carte ethnique de la région a été considérablement modifiée. Pendant et après la seconde guerre mondiale, la composition de la population a changé du fait, tout d’abord, de l’extermination de la population juive, puis de l’expulsion d’un grand nombre d’Allemands et de Hongrois et enfin de l’arrivée de nouveaux colons (quelque 200 000 personnes), essentiellement des Serbes et des Monténégrins. Au lendemain des guerres balkaniques des années 1990, la région est devenue la destination d’un très grand nombre de réfugiés de Croatie et de Bosnie.
44. En conséquence, on a observé une baisse notable du nombre de membres de minorités nationales entre 1991 et 2002. Selon le recensement de 1991, la Vojvodine comptait 339 491 habitants hongrois alors qu’ils n’étaient plus que 290 207 d’après le recensement de 2002. Il en va de même des Croates dont le nombre est tombé de 74 808 en 1991 à 56 546 en 2002.

5.1. Autonomie de la province

45. La Vojvodine jouit du statut de province autonome au sein de la République de Serbie.
46. L’Assemblée de la province autonome de Vojvodine est l’organe représentatif suprême de la province et se compose de 120 représentants mais elle n’a pas de pouvoir législatif. L’organe exécutif est le Conseil exécutif de la province autonome de Vojvodine qui est tenu de rendre compte de ses actions devant l’Assemblée. Les droits et obligations de ce conseil sont énoncés par la Constitution de la République de Serbie et le statut de la province autonome qui est son instrument juridique suprême.
47. Par le passé, entre 1974 et 1990, la province jouissait d’une bien plus grande autonomie, ce qui engendre régulièrement des demandes d’autonomie accrue. Dans ce contexte, ces dernières années, le conseil exécutif a mené de nombreuses activités de grande ampleur destinées à recouvrer les compétences de la province 
			(26) 
			Voir à cet égard: http://www.vojvodina.sr.gov.yu/index.php?option=com_content&task=view&id=165&Itemid=74
(en anglais uniquement).. La «loi omnibus» 
			(27) 
			Publiée au Journal officiel de la République de Serbie,
no 6, du 7 février 2002. de 2002 a rendu à la province certaines des compétences qu’elle avait perdues sous Milošević mais ses pouvoirs restent limités; elle n’a d’autorité ni sur la police, ni sur la justice, par exemple.
48. Une autonomie accrue de la Vojvodine est régulièrement revendiquée par les partis des minorités comme ce fut le cas dans le cadre de l’adoption de la nouvelle Constitution de la République de Serbie 
			(28) 
			Au cours de la visite
du rapporteur en Serbie, un certain nombre de préoccupations ont
été exprimées concernant les circonstances de l’adoption de la nouvelle
Constitution. La procédure suivie n’aurait pas été suffisamment
transparente, et n’aurait pas ménagé assez de temps pour la consultation.
On peut, en effet, émettre certains doutes quant aux raisons véritables
de l’accélération soudaine de ce processus et estimer que les seules
raisons étaient politiques, notamment s’agissant de la question
du Kosovo.. Considérant que la nouvelle Constitution n’avait pas apporté le degré d’autonomie promis, certains partis ont préconisé le boycott du référendum constitutionnel (pour lequel le taux de participation a été relativement faible) 
			(29) 
			Le parti libéral-démocrate,
la ligue des sociaux-démocrates de Vojvodine, l’alliance civique
de Serbie et l’union sociale-démocrate, par exemple. Après l’adoption
de la nouvelle Constitution, Ivana Dulic-Markovic, membre de G17 Plus,
a ouvertement critiqué le texte, soulignant qu’il ne donnait pas
assez d’autonomie à la Vojvodine.. En outre, la question des droits des minorités a fait l’objet de discussions dans le cadre de la campagne pour les élections législatives du 21 janvier 2007 
			(30) 
			La
communauté démocratique des Hongrois de Vojvodine (DZVM) a déclaré
n’être pas disposée à faire partie du gouvernement sans un accord
général sur la révision du système des droits des minorités nationales, Vecernje Novosti, 30 novembre 2006.. Désormais la question de l’autonomie est de nouveau abordée par les partis des minorités dans le contexte des prochaines élections présidentielles de janvier 2008, le parti des Hongrois a annoncé en novembre 2007 qu’il ne soutiendrait qu’un candidat aux présidentielles partisan d’une plus grande autonomie de la Vojvodine 
			(31) 
			Position exprimée par
Sandor Pal, chef de l’Union démocratique des Hongrois de Vojvodine,
dans une lettre ouverte de novembre 2007..
49. Dans ce contexte, on remarque avec intérêt que l’article 12 de la nouvelle Constitution de la République de Serbie prévoit le droit des citoyens à l’autonomie provinciale et locale. Cependant, comme le souligne la Commission de Venise dans son avis, «bien qu’en principe il s’agisse d’une règle bienvenue, il paraît regrettable de ne pas avoir donné à ce droit de signification concrète dans la Constitution, qui laisse presque intégralement au pouvoir législatif le soin de définir l’étendue de tels droits» 
			(32) 
			Voir l’avis CDL-AD(2007)004,
précité.. Par ailleurs, la Commission de Venise considère que les garanties financières concernant l’autonomie financière des provinces autonomes (article 184) sont «plutôt insuffisantes».

5.2. La situation en 2004

50. Fin 2003 et en 2004, plusieurs rapports ont exprimé de vives inquiétudes concernant des incidents à caractère ethnique survenus en Vojvodine. Les incidents signalés étaient particulièrement alarmants mais il n’y a pas eu de morts. Dans ce contexte, le Parlement européen a adopté, le 16 septembre 2004, une résolution sur «Le harcèlement des minorités en Vojvodine» déclarant «qu’il a été récemment établi que des violences ont été régulièrement commises dans plusieurs villes de la province de Vojvodine à l’encontre des citoyens serbes d’origine ethnique hongroise, telles que la profanation de tombes dans de nombreuses villes, la multiplication d’inscriptions anti-hongroises, la destruction par les flammes du drapeau national de la République de Hongrie et l’agression physique par la police d’un maire représentant la minorité hongroise» 
			(33) 
			Résolution du Parlement
européen sur le harcèlement des minorités en Vojvodine, P6_TA(2004)0016,
16 septembre 2004..
51. L’intervention de la communauté internationale a été perçue comme très positive et très efficace par un certain nombre d’acteurs de la région. Comme indiqué par le Centre de développement de la société civile (CDCS), dans l’un de ses rapports, «Les interventions de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe le 3 octobre 2004 
			(34) 
			Voir la Résolution 1397 (2004) sur le fonctionnement des institutions démocratiques
en Serbie-Monténégro qui énonce ce qui suit: 
			(34) 
			«12.
Il semble que l’on assiste, depuis une date récente, à une augmentation
du nombre d’incidents contre les membres de la communauté hongroise
et d’autres minorités en Vojvodine. Compte tenu du contexte historique
difficile, de l’instabilité politique et de la dégradation des conditions
sociales, il est clair qu’un incident à motivation ethnique, même
s’il s’agit d’un cas isolé, peut avoir des conséquences d’une grande
portée et d’une extrême gravité. 
			(34) 
			13. Dans ce contexte,
l’Assemblée note que, à la suite de la politique menée par le régime
de Milošević, la composition ethnique de la Vojvodine, où de nombreuses
communautés nationales et religieuses coexistaient pacifiquement,
a considérablement changé. L’Assemblée attire l’attention des autorités
de Serbie-Monténégro sur les dispositions pertinentes de la convention-cadre
pour la protection des minorités nationales du Conseil de l’Europe,
en particulier sur l’article 16, qui préconise de s’abstenir de
modifier la composition ethnique dans une aire géographique où réside
une importante minorité nationale» (…) 
			(34) 
			22. L’Assemblée
est préoccupée par le risque de dégradation des relations interethniques
en Serbie, et notamment en Vojvodine. Elle invite les autorités
à faire toute la lumière sur les incidents reposant sur des motifs
ethniques et à prendre les sanctions nécessaires, mais aussi à renforcer
le dialogue avec les représentants de la minorité afin de prévenir
tout risque de détérioration des relations interethniques dans le
pays. Par ailleurs, il convient de faire cesser immédiatement et
de condamner sans réserve toute tentative d’exploiter les tensions
interethniques à des fins politiques, que ce soit aux niveaux local,
national ou international. L’Assemblée note aussi avec inquiétude
qu’il est toujours fait état de mauvais traitements de Roms par
des membres des forces de l’ordre et d’expulsions illégales, et
qu’aucun progrès réel n’a été enregistré dans la lutte contre la
discrimination à l’encontre des Roms en matière d’accès aux droits
sociaux et économiques fondamentaux.», du représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies le 19 octobre 2004, le suivi effectué par l’OSCE (fin octobre 2004) et par l’Union européenne (début février 2005), le rapport du 16 décembre 2004 du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, la visite en Vojvodine du haut-commissaire pour les minorités nationales datant du 16 février 2005, la réunion extraordinaire du 6 juin 2005 de la délégation du Parlement européen pour les relations avec les pays de l’Europe du Sud-Est ont tous amené des changements positifs concernant le nombre d’incidents et l’attitude des autorités à leur sujet» 
			(35) 
			Voir le rapport du
Centre pour le développement de la société civile (CDCS) sur «Les
incidents ethniques en Vojvodine» en date du 24 octobre 2005..
52. Bien que, au sujet des incidents interethniques, les diverses sources présentent des données différentes (dont le ministère serbe de l’Intérieur qui a fourni apparemment au moins deux séries de données différentes 
			(36) 
			Voir
«Ethnic Violence in Vojvodina: Glitch or Harbinger of Conflicts
to come» (Violence ethnique en Vojvodine: péripétie ou présage de
conflits à venir), Centre européen pour les questions liées aux
minorités, document de travail, 27 avril 2006.), d’où la difficulté de disposer de statistiques fiables, ces incidents sont une réalité 
			(37) 
			Il
s’agit, dans la plupart des cas, de graffitis et de dégâts matériels. et il est indispensable que la communauté internationale réagisse. Toutefois, le rapporteur tient à souligner que ce n’est pas seulement la minorité nationale hongroise qui est visée mais aussi les Croates, les Slovaques, les Roms, les Albanais, etc. La communauté hongroise est mieux organisée que les autres minorités, ce qui lui assure une meilleure prise en compte des intérêts des Hongrois au niveau international. En conséquence, l’attention de la communauté internationale s’est exagérément concentrée sur la minorité hongroise, qui, pourtant, n’apparaît pas comme étant un groupe particulièrement visé au sein des diverses minorités nationales. La communauté internationale devrait accorder la même attention à toutes les minorités.
53. Compte tenu des caractéristiques multiethniques de la Vojvodine et de la Serbie dans son ensemble, ainsi que de l’histoire de la région ponctuée de conflits à motivation ethnique sous le régime de Milošević et des expulsions forcées de groupes de population, la violence ethnique est une source de préoccupation particulière qui devrait être traitée par les autorités avec beaucoup de célérité et d’efficacité.

5.3. Mesures prises et situation actuelle

54. Selon les informations disponibles, face aux manifestations d’hostilité à l’égard des minorités, les autorités n’ont pas réagi avec assez de rapidité et de vigueur, ni marqué une réelle volonté de prendre des mesures pour faire cesser les incidents. Il a été signalé, et c’est très regrettable, que les autorités n’ont réagi à ces incidents que lentement et sous la pression internationale 
			(38) 
			Voir
le document de travail du Centre européen pour les questions liées
aux minorités «Ethnic Violence in Vojvodina: Glitch or Harbinger
of Conflicts to come», 27 avril 2006; à cet égard, le Comité des
Ministres du Conseil de l’Europe a déclaré, dans sa RésCNM(2004)12
du 17 novembre 2004, que «Les relations interethniques sont toujours
affectées par le difficile héritage du régime précédent et la détérioration
des conditions sociales. En dépit de progrès sensibles, des cas
de tensions interethniques sont encore signalés et sont source de
préoccupation. Les efforts déployés pour établir la tolérance et
la confiance, avec des résultats notables, par exemple en ce qui
concerne la minorité albanaise du sud de la Serbie, doivent être
poursuivis et étendus dans d’autres parties de la Serbie-Monténégro,
dont en particulier la Vojvodine. La
protection des minorités nationales devrait bénéficier d’une attention
accrue des forces de l’ordre s’agissant en particulier de l’effectivité
des enquêtes et de la prévention des incidents violents récemment
commis contre des personnes appartenant à la minorité hongroise
ainsi qu’à d’autres minorités nationales. Toute tentative
d’exploiter les tensions interethniques à des fins politiques, que
ce soit au niveau local, national ou international devrait être
stoppée immédiatement et clairement condamnée» (italique ajouté
par le rapporteur).. Les réactions de la police et de la justice notamment ont été jugées inappropriées.
55. C’est seulement fin 2004 que les autorités ont commencé à manifester leur intention de traiter le problème, lorsqu’en septembre, le Premier ministre, Vojislav Koštunica, a visité plusieurs villes de Vojvodine et discuté à ce sujet avec des représentants de la police, de la justice et de l’administration. Les commissions pour la sécurité et les relations interethniques du Parlement de Serbie ont tenu une réunion conjointe en présence des chefs de file politiques des minorités nationales le 10 septembre 2004, à Subotica.
56. De fait, des signes tangibles d’une meilleure compréhension du problème au niveau politique ont été enregistrés, ainsi qu’un changement positif dans l’attitude de la police qui a fait preuve d’une plus grande efficacité dans son action 
			(39) 
			Voir le document du
Centre pour le développement de la société civile (CDCS) sur «La
gestion de la crise dans les relations interethniques en Vojvodine»,
daté du 22 novembre 2005.. En conséquence, on observe, depuis fin 2004, une diminution substantielle du nombre d’actes hostiles aux minorités, tendance qui s’est confirmée tout au long de 2005 et 2006 
			(40) 
			Voir
le rapport du Centre pour le développement de la société civile
(CDCS) sur «Les incidents interethniques en Serbie en 2006», daté
du 18 décembre 2006.. Ces résultats montrent qu’une réaction plus rapide et plus ferme au niveau politique aurait probablement permis d’éviter l’escalade des tensions tout au long de l’année 2004. A cette époque, les autorités n’ont assurément pas réagi comme il convenait. Toutefois, la réaction au niveau du pouvoir judiciaire et en termes de poursuites a été apparemment beaucoup plus lente et le rapporteur a recueilli des plaintes selon lesquelles, même si l’action de la police s’est considérablement améliorée, les enquêtes restent encore souvent bloquées au niveau du procureur.
57. L’adjoint au médiateur de la province autonome de Vojvodine a déclaré devant la sous-commission sur les droits des minorités de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, le 17 mai 2006, à Budapest, que «la durée des enquêtes de police sur les auteurs de harcèlement et d’agressions, le nombre d’affaires que la police n’a pas réussi à élucider, la façon dont ces affaires sont présentées à la télévision nationale indiquent que la République de Serbie contribue à perpétuer ce type d’affaires par son inaction ou des actions dilatoires»; l’adjoint au médiateur a, néanmoins, souligné «que, par rapport à 2004, la police avait, en 2005, fait preuve d’une efficacité accrue s’agissant de retrouver les auteurs de ces agressions» 
			(41) 
			Déclaration
archivée par le secrétariat de la commission des questions juridiques
et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire.. Le rapporteur considère qu’il est encourageant de constater que plusieurs condamnations pour attitude extrémiste et incitation à la haine raciale ou religieuse ont été prononcées 
			(42) 
			Voir Serbia 2007 Progress
Report, SEC(2007) 1435, 6 novembre 2007, Commission staff working
document, COM(2007) 663 final, p. 15..
58. Globalement, certains progrès concrets ont été réalisés en matière de droits des minorités avant 2004 et ont déjà été salués 
			(43) 
			ACFC/INF/OP/I(2004)002,
27 novembre 2003 et ResCNM(2004)12, 17 novembre 2004..
59. On peut qualifier de notables les changements institutionnels et les dispositions réglementaires mis en œuvre en 2002 en matière de décentralisation, de protection et de politiques en faveur des minorités (loi omnibus, loi sur les minorités, instauration de conseils nationaux pour les minorités nationales, modification des lois sur les élections législatives en Serbie et Vojvodine, en tenant compte du principe de discrimination positive à l’égard des minorités) 
			(44) 
			Il reste un sujet d’inquiétude,
à savoir le fait que les partis de la minorité comme de la majorité
doivent recueillir 10 000 signatures pour se présenter aux élections
(voir le document du Centre pour le développement de la société
civile (CDCS) sur la «Situation concernant la protection des minorités
nationales, notamment les Roumains et les Vlasi), ce qui est un
véritable problème pour les petites minorités. Dans ce contexte,
il convient de souligner l’initiative de la commission électorale
de la République visant à faciliter le dépôt des listes de candidats
des partis politiques des minorités nationales mentionnées dans
le premier rapport soumis par le Secrétaire Général du Conseil de
l’Europe sur le respect des obligations et engagements et la mise
en œuvre du programme de coopération postadhésion, SG/Inf(2006)15
final, 18 décembre 2006. ainsi que l’institution du médiateur de la province 
			(45) 
			Décision
du médiateur de la province; le médiateur de la province a publié,
en 2004, une déclaration générale concernant les incidents interethniques
fréquents en Vojvodine, soulignant que, dans l’environnement multinational
de la province, la vie communautaire constitue le mode de vie de
la population; voir le résumé du rapport annuel du médiateur pour
2004 (uniquement en anglais).. Ces mesures établies par la République de Serbie sont extrêmement positives en matière de protection des droits des minorités et tous les représentants des minorités nationales que le rapporteur a rencontrés ont jugé très positive la création de conseils nationaux des minorités nationales.
60. Le 17 septembre 2004 a été pris un arrêté sur la création du Conseil de la République de Serbie pour les minorités nationales qui vise à assurer une communication permanente entre les représentants des conseils nationaux des minorités nationales.
61. Une partie substantielle de ce cadre juridique favorable existait, certes, déjà à l’époque, ce qui n’a pas empêché l’année 2004 d’être marquée par une escalade de la violence interethnique en Vojvodine. Cette réalité préoccupante montre qu’il y a encore beaucoup à faire pour améliorer la tolérance entre les communautés. Il est particulièrement important de noter que, bien que le nombre d’incidents ait diminué, la violence interethnique existe toujours et se déclenche essentiellement entre les jeunes, comme l’ont signalé de nombreux interlocuteurs du rapporteur au cours de sa visite à Novi Sad 
			(46) 
			Certains d’entre eux
ont même fait état d’une véritable «radicalisation ethnique» de
la jeunesse.. Des mesures éducatives s’imposent pour favoriser une meilleure acceptation des différentes communautés. Dans son avis, le comité consultatif a déjà souligné qu’il fallait renforcer encore les initiatives visant à promouvoir un esprit de tolérance et le dialogue interculturel 
			(47) 
			ACFC/INF/OP/I(2004)002,
27 novembre 2003 et ResCNM(2004)12, 17 novembre 2004..
62. En septembre 2005, le secrétariat de Vojvodine pour la législation, l’administration et les minorités nationales a lancé un projet de promotion du multiculturalisme et de la tolérance en Vojvodine qui vise à améliorer les relations interethniques. Cette initiative a essentiellement pour cible les enfants scolarisés et le projet englobe une campagne médiatique en faveur du multiculturalisme. Le rapporteur se félicite de ce projet qui représente un pas en avant dans la bonne direction et espère que d’autres de plus grande envergure suivront. Le rapporteur souligne l’importance de ce genre de projets eu égard aux tensions qui peuvent exister entre les membres de différentes minorités. En effet, il est inquiétant de constater notamment une certaine méfiance vis-à-vis des Roms déplacés. Le rapporteur note par exemple certaines réactions de rejet de la part de membres de minorités dans l’hypothèse de l’utilisation des maisons abandonnées en Vojvodine en vue de la réadmission et de l’installation des personnes qui seront expulsées de l’Union européenne dans les prochains mois 
			(48) 
			Voir la position
de Bálint Pásztor, Union des Hongrois de Vojvodine/SVM, 18 octobre
2007, <a href='http://serbie-droitshumains.blogspot.com/2007/10/inquitude-en-vovodine.html'>http://serbie-droitshumains.blogspot.com/2007/10/inquitude-en-vovodine.html</a> (en français seulement).. Dans ce contexte, les autorités doivent cependant veiller à bien respecter les dispositions de l’article 16 de la convention-cadre tout en promouvant le respect mutuel et la tolérance entre les membres des minorités 
			(49) 
			Article
16: «Les parties s’abstiennent de prendre des mesures qui, en modifiant
les proportions de la population dans une aire géographique où résident
des personnes appartenant à des minorités nationales, ont pour but
de porter atteinte aux droits et libertés découlant des principes
énoncés dans la présente convention-cadre.».
63. En outre, des efforts sont déployés pour accroître la proportion de membres de minorités nationales dans les services de l’Etat particulièrement sensibles comme la police, l’action publique et les tribunaux, dans lesquels ils restent largement sous-représentés 
			(50) 
			Une décision en date
du 11 mai 2006 a été prise afin d’accroître le nombre de membres
de minorités nationales dans l’administration. En Vojvodine, il
est à présent possible de passer l’examen écrit d’entrée à l’école
de police en hongrois.. Ces efforts ont été accueillis avec satisfaction par les ONG que le rapporteur a rencontrées lors de sa visite à Novi Sad; les ONG ont également affirmé n’avoir observé, dans ce domaine, aucune discrimination systématique à l’égard des membres de minorités. Toutefois, il est à déplorer qu’il y ait apparemment un manque réel de fonctionnaires parlant la langue de la minorité, même dans les municipalités où les membres de cette minorité représentent une très large majorité des habitants. Le rapporteur est conscient de la constitution en Serbie du Sud d’une force de police multiethnique et estime qu’une telle initiative pourrait aussi être une solution appropriée pour la Vojvodine. Le rapporteur félicite par ailleurs l’ombudsman de Vojvodine qui a publié des recommandations visant à accroître la représentation des minorités dans l’administration publique.
64. S’agissant de l’éducation dans la langue minoritaire, le comité consultatif a pris acte, dans son avis, de l’adoption de plusieurs mesures satisfaisantes, soulignant que la situation en Vojvodine constitue un exemple positif mais concluant aussi qu’il existe des insuffisances dans plusieurs régions en matière d’enseignement de certaines langues minoritaires ou dispensé dans ces langues. Il exhorte, par conséquent, les autorités à s’efforcer davantage d’évaluer l’importance de la demande et à réexaminer la situation afin de garantir l’application pleine et entière de la législation nationale en matière d’enseignement des ou dans les langues minoritaires 
			(51) 
			ACFC/INF/OP/I(2004)002,
27 novembre 2003, et ResCNM(2004)12, 17 novembre 2004..A cet égard, le rapporteur a été informé qu’il y avait un manque de professeurs ayant les qualifications requises pour enseigner les langues minoritaires. En même temps, on lui a signalé la mise en œuvre actuellement d’initiatives positives pour régler ce problème comme la création d’un centre de formation des enseignants à Subotica.
65. Concernant les questions d’éducation en général, les représentants des ONG ont déclaré au rapporteur déplorer que les jeunes membres des minorités nationales aient apparemment une maîtrise de plus en plus mauvaise de la langue serbe tandis que, dans la plupart de cas, les jeunes Serbes ne parlent aucune langue minoritaire (même s’ils résident dans une ville où vit une minorité numériquement très importante). Ils ont suggéré de développer les écoles bilingues, ce qui permettrait aux communautés d’apprendre à mieux se connaître et constituerait un outil efficace pour promouvoir l’esprit de tolérance.
66. Il convient également de souligner le rôle joué par les médias. En effet, la couverture médiatique est un important facteur d’approche et de perception globales des problèmes. En l’occurrence, certains médias ont, semble-t-il, joué un rôle préjudiciable à la reconnaissance de la violence à l’égard des minorités en ignorant pratiquement, pendant plusieurs mois, les incidents survenus et parfois même en relayant l’information avec des accents nationalistes. Les autorités devraient faire un réel effort pour garantir que les médias rendent compte de l’actualité de manière objective, en respectant leur obligation d’informer et d’avertir le public, sans contribuer à créer un climat d’hostilité à l’égard des minorités. A cette fin, elles devraient veiller, par tous les moyens légaux dont elles disposent et par des poursuites judiciaires, le cas échéant, à ce que la loi contre l’incitation à la haine soit correctement appliquée. Des inquiétudes se sont également exprimées concernant le manque d’indépendance des responsables des programmes de télévision en langue minoritaire dans la province de Vojvodine 
			(52) 
			Inquiétudes
exprimées par le président du Conseil national croate devant la
sous-commission sur les droits des minorités le 17 mai 2006; il
s’est plaint du manque de coopération avec les conseils nationaux
des responsables des émissions en langue minoritaire sur la chaîne
de télévision de Novi Sad..
67. Les médias doivent assumer la responsabilité spéciale qui est la leur en matière de promotion d’un climat de tolérance et de respect interculturel, tel qu’énoncé dans la Recommandation no R (97) 21 du Comité des Ministres sur les médias et la promotion d’une culture de tolérance.
68. Dans ce contexte, le rapporteur note avec satisfaction que l’Agence pour les droits de l’homme et des minorités a conclu un accord avec les télévisions et les conseils nationaux pour les minorités sur la teneur d’émissions relatives aux minorités dans le but de promouvoir l’esprit de tolérance.

6. Minorité ethnique valaque/roumaine

69. Plusieurs questions se posent concernant la minorité ethnique roumaine en Serbie. Le rapporteur a pu constater des disputes quant à la définition même de la minorité ethnique roumaine, mais aussi des inégalités régionales quant à l’exercice effectif des droits des minorités nationales.

6.1. Définition de la minorité ethnique roumaine en Serbie: Valaques/Roumains

70. Il est particulièrement difficile de définir clairement les contours de la minorité ethnique roumaine.

Problématique

71. Il semble en premier lieu particulièrement difficile de chiffrer la partie de la population serbe issue de la minorité ethnique roumaine. En effet, les différents recensements témoignent de différences énormes. Si, selon le recensement de 1991, on comptait 42 331 Roumains et 17 807 Valaques en Serbie 
			(53) 
			Voir le rapport présenté
par la République fédérale de Yougoslavie conformément à l’article
25, paragraphe 1, de la Convention-cadre pour les minorités nationales,
16 octobre 2002, ACFC/SR(2002)003., on en comptait respectivement 34 576 et 40 054 lors du recensement de 2002 
			(54) 
			Voir les résultats
officiels du recensement de 2002 sous http://www.statserb.sr.gov.yu/Ter/epop.htm.. Le rapporteur note que plusieurs de ses interlocuteurs ont allégué que les recensements auraient fait l’objet de manipulations, mais sans en apporter la preuve 
			(55) 
			Il
a, entre autres, été mis en avant que les formulaires auraient été
remplis au crayon de bois et pouvaient donc être modifiés à loisir..
72. La minorité ethnique roumaine est implantée dans des régions bien distinctes sur le territoire serbe. Cette minorité est située principalement en Vojvodine et dans l’est de la Serbie, plus précisément dans les vallées du Timoc, de la Morava et du Danube. Les Valaques sont presque exclusivement installés dans l’est de la Serbie.
73. Les Valaques sont un groupe ethnique présent en Serbie et dans d’autres pays voisins, culturellement et linguistiquement apparenté aux Roumains.
74. D’aucuns considèrent que les Valaques font directement partie de la minorité roumaine, d’autres qu’il s’agit d’une minorité distincte. Le fait que les Valaques se soient organisés indépendamment de la minorité roumaine en fondant leur propre Conseil pour la minorité nationale valaque montre qu’une partie des Valaques considère ne pas appartenir à la minorité roumaine.
75. Le rapporteur remarque que le processus de mise en place d’un Conseil national pour la minorité valaque a été long et difficile. En effet, le Gouvernement serbe a longtemps refusé d’enregistrer un tel conseil car il ne se différenciait pas du Conseil national pour la minorité roumaine, déjà existant. Les statuts proposés pour l’enregistrement du Conseil national pour la minorité valaque, outre le fait qu’il portait le même nom en roumain que celui pour la minorité roumaine, prévoyaient que la langue de la minorité valaque/de travail du conseil soit le roumain littéraire. Le gouvernement considérait qu’il s’agissait donc d’une seule et même minorité et la loi ne permet pas la création de plusieurs conseils nationaux pour une même minorité (un Conseil national pour la minorité roumaine avait déjà été enregistré).
76. La langue est un sujet de discorde entre les différentes sensibilités de la minorité ethnique «roumaine». D’aucuns considèrent que, la langue vlasi n’ayant pas de forme écrite, la seule langue écrite commune à tout la minorité ethnique roumaine est le roumain littéraire. Cela constitue à leurs yeux une preuve que les Valaques sont des membres de la minorité roumaine. D’autres, au contraire, lancent des tentatives de codification de la langue vlasi afin d’affirmer un peu plus l’indépendance et la particularité de cette minorité.
77. Finalement, peu avant la visite du rapporteur dans l’est de la Serbie, un vote des membres du futur conseil national de la minorité valaque a permis d’en modifier les statuts et d’inscrire que la langue serait «le serbe et la langue “maternelle”». A la suite de cette modification, le Conseil national pour la minorité valaque a pu être enregistré légalement le 31 juillet 2007. Au sein de ce conseil national, deux tendances sont représentées: l’une qui considère que la minorité valaque est tout à fait indépendante de la minorité roumaine, l’autre considérant au contraire qu’il s’agit de la même minorité.
78. Le rapporteur a entendu toutes les parties et a pu remarquer que le vote sur la modification des statuts était particulièrement contesté parmi les membres de la minorité valaque, certains d’entre eux revendiquant de revenir sur cette décision. D’après les informations qui lui ont été transmises, il semblerait d’ailleurs qu’une décision en ce sens (réaffirmant que la langue écrite de la minorité est le roumain littéraire) ait été prise au sein du Conseil national pour la minorité valaque. Mais les autorités ont fait savoir au rapporteur que tout retour en arrière sur cette modification des statuts entraînerait que le Conseil national pour la minorité valaque soit rayé des registres.A la date d’aujourd’hui, pourtant, le rapporteur n’a pas été informé d’une évolution en ce sens.

Position des gouvernements concernés

79. La position des autorités roumaines à cet égard est très tranchée, le Président Basescu a d’ailleurs fait savoir que cette division est une «erreur» et a appelé les deux associations à s’unifier 
			(56) 
			Déclaration
faite le 19 avril 2006 lors de la visite officielle du Président
roumain en Serbie.. Il considère que la Roumanie peut apporter sa protection à la minorité ethnique roumaine et donc également aux Valaques. Par ailleurs, il considère que la division nuit à la protection des intérêts de la minorité ethnique roumaine puisqu’elle en affaiblit la représentation. Il est clair que les autorités roumaines font tout pour inciter les membres de la minorité valaque à s’organiser de manière unifiée avec les membres de la minorité roumaine en Serbie mais tout en respectant la liberté de chacun de choisir sa propre identité 
			(57) 
			Voir en ce sens les
déclarations de l’ambassadeur de Roumanie en Serbie, M. Ion Macovei:
«Nous avons essayé de nous rapprocher de notre minorité en Vojvodine,
mais aussi des Roumains de Serbie orientale. Là-bas, certains se déclarent
comme Roumains, d’autres disent qu’ils parlent le roumain, mais
ne savent pas s’ils sont roumains ou valaques. Toutes ces questions
peuvent trouver des réponses si nous parlons sincèrement sur le
plan bilatéral. Toutefois, tout dépend des citoyens eux-mêmes. Ils
doivent s’exprimer eux-mêmes sur leur identité. Nous les considérons
comme des Roumains, mais nous ne les forcerons pas à s’exprimer
sur ce qu’ils ne sont pas ou ne désirent pas être. C’est le choix
de tout individu», Roumanie-Serbie: alliance diplomatique et bon
voisinage, Courrier des Balkans,
11 décembre 2007, <a href='http://balkans.courriers.info/article9363.html'>http://balkans.courriers.info/article9363.html</a>. Publié dans la presse: 11 décembre 2007 (en français
seulement)..
80. Le rapporteur fait remarquer que cette position des autorités roumaines n’est pas sans un certain intérêt puisque l’accroissement potentiel en termes numériques de la minorité roumaine serait très important si les Valaques s’y joignaient. Ainsi la minorité ethnique roumaine se rapprocherait-elle numériquement de la minorité hongroise (actuellement la plus importante en Serbie), voire la dépasserait.
81. Le Gouvernement serbe, pour sa part, se veut le plus neutre possible sur cette question. Certains interlocuteurs du rapporteur lui ont fait part de leur conviction que les autorités serbes ont tout intérêt à ce que la minorité ethnique roumaine reste divisée afin qu’elle garde des proportions moins importantes et qu’elles feraient tout pour maintenir une division artificielle dans ses rangs. D’aucuns sont allés jusqu’à affirmer que la passivité des autorités eu égard à la minorité valaque équivaudrait à une assimilation silencieuse. Des remarques du même ordre sont parvenues au rapporteur en ce qui concerne la minorité croate et la minorité bunjevci, ou encore la minorité ukrainienne et la minorité ruthénienne 
			(58) 
			Voir également «Alternative
Report submitted pursuant to Article 25 §1 of the FCNM», op. cit., pp. 15 et suivantes..
82. Pourtant, le rapporteur n’a pas pu constater d’ingérence réelle des autorités sur cette question. Les conditions pour l’enregistrement d’un Conseil national de la minorité valaque indépendant ne lui semblent pas abusives. A sa demande expresse lors de ses rencontres sur place, les autorités serbes ont assuré au rapporteur qu’elles ne s’opposeraient pas à ce que les Valaques rejoignent les Roumains sous le chapeau du Conseil national de la minorité roumaine s’ils décidaient de former une seule grande minorité ethnique roumaine. Les autorités n’encouragent pas cette fusion (et ce n’est pas leur rôle), mais ne l’empêchent pas pour autant.
83. Par ailleurs, il convient de remarquer que le recensement de 2002 mentionnait tant la minorité roumaine, que la minorité valaque. Le comité consultatif a considéré qu’il s’agissait là d’un élément positif témoignant de la reconnaissance égale au sens de l’article 3 de la Convention-cadre de l’identité des deux minorités par les autorités 
			(59) 
			ACFC/INF/OP/I(2004)002,
27 novembre 2003..

Position du rapporteur: rappel des principes

84. Partant, le rapporteur pense que la position des autorités serbes en la matière a été a priori raisonnable et n’a pas entravé la liberté des membres d’une minorité nationale de se reconnaître, ou non, comme tels, conformément à l’article 3 de la convention-cadre, dont les dispositions doivent rester la référence de base en la matière. Pour autant le rapporteur appelle les autorités à prendre des mesures positives en faveur des minorités, y compris de la minorité valaque, et à veiller à l’abolition de toute discrimination à l’encontre de ses membres.
85. Le rapporteur a été frappé par les divergences de points de vue au sein même des membres de la minorité valaque eu égard à la question de leur appartenance, ou non, à la minorité ethnique roumaine. Cette discussion fait l’objet de guerres intestines, connotées d’intérêts politiques différents, à tel point que certains membres de la minorité dite «valaque», qui sont même parmi les membres fondateurs du Conseil national pour la minorité roumaine dont le siège est en Vojvodine, sont presque considérés comme des traîtres par leurs pairs défenseurs d’une minorité valaque distincte.
86. Il n’appartient en aucun cas au rapporteur de se positionner en juge et de trancher sur cette question. Le rapporteur tient à répéter le principe fondamental énoncé à l’article 3 de la convention-cadre qui prévoit en son alinéa premier: «Toute personne appartenant à une minorité nationale a le droit de choisir librement d’être traitée ou ne pas être traitée comme telle et aucun désavantage ne doit résulter de ce choix ou de l’exercice des droits qui y sont liés.» Le rapporteur rappelle que toute tentative visant à imposer une identité à une personne, ou à un groupe de personnes, est inadmissible 
			(60) 
			Voir en ce sens les
paragraphes 26 et 123 de l’avis du comité consultatif, ACFC/INF/OP/I(2004)002,
27 novembre 2003..

6.2. Question de la (non)-reconnaissance de l’Eglise orthodoxe roumaine en tant qu’Eglise traditionnelle

87. La nouvelle loi de 2006 concernant les Eglises et les organisations religieuses en République de Serbie 
			(61) 
			Adoptée en avril 2006
et entrée en vigueur le 7 mai 2006. ne reconnaît pas l’Eglise orthodoxe roumaine en tant qu’Eglise traditionnelle. Les sept Eglises traditionnelles reconnues aux termes de cette loi sont les suivantes: l’Eglise orthodoxe serbe, l’Eglise catholique romaine, l’Eglise évangélique slovaque, l’Eglise chrétienne évangélique, l’Eglise réformée, la communauté islamique et la communauté juive. On peut s’interroger sur les raisons pour lesquelles l’Eglise orthodoxe roumaine ne fait pas partie de cette liste 
			(62) 
			C’est d’autant plus
étrange que le comité consultatif avait considéré dans son avis
(précité) que les autorités devaient porter une attention particulière
aux différences de traitement entre les religion en vue d’assurer
une protection égale devant la loi des personnes issues de minorités
nationales. En l’occurrence, on peut s’interroger pour savoir si
les personnes appartenant à la minorité roumaine bénéficient effectivement
du même niveau de protection de leur liberté de religion que les
membres d’autres minorités nationales dont l’Eglise serait reconnue
dans la loi de 2006.. De surcroît, l’Eglise orthodoxe roumaine ne fait même pas partie de la liste des confessions religieuses énumérées à l’article 17 de ladite loi.
88. Cette nouvelle loi, alors qu’elle était en projet, avait fait l’objet d’un certain nombre de critiques par la Commission de Venise 
			(63) 
			Voir CDL-AD(2006)24,
14 juin 2006.. En substance, la Commission de Venise a soulevé plusieurs interrogations quant à la possible application discriminatoire des critères requis dans la procédure d’enregistrement. Par ailleurs, elle s’est inquiétée du fait que l’enregistrement puisse conditionner des droits élémentaires (entre autres, l’acquisition de la personnalité morale) et a rappelé que l’application de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme ne peut pas être subordonnée à un système d’enregistrement.
89. Plus particulièrement, en ce qui concerne les droits des minorités, la Commission de Venise relève que certaines dispositions (article 33 et article 34) «pourraient provoquer des biais en faveur de l’Eglise locale dominante et la discrimination de minorités locales».
90. Il semblerait que cette nouvelle loi, et son application par le ministère des Cultes considérée parfois comme arbitraire 
			(64) 
			Voir «International
Religious Freedom Report 2007» du Bureau of Democracy, Human Rights
and Labour du ministère des affaires étrangères des Etats-Unis,
disponible sous <a href='http://www.state.gov/g/drl/rls/irf/2007/90198.htm'>http://www.state.gov/g/drl/rls/irf/2007/90198.htm</a>. ou discriminatoire, ait détérioré le respect de la liberté de religion en Serbie.
91. Selon des informations transmises au rapporteur par les autorités serbes, l’Eglise orthodoxe roumaine serait reconnue selon la loi serbe. Par ailleurs, il semblerait que, dans une assez large mesure, les relations entre l’Eglise orthodoxe serbe et l’Eglise orthodoxe roumaine soient réglées directement par les autorités ecclésiastiques elles-mêmes; les relations entre l’Eglise orthodoxe serbe et son homologue roumaine étant réglées par le droit canon. Les deux Eglises ont conclu un accord de reconnaissance. En novembre 2006, l’Eglise orthodoxe serbe a reconnu l’évêché Dacia Felix de confession orthodoxe roumaine, alors que l’Eglise orthodoxe roumaine a reconnu l’évêché orthodoxe serbe de Timișoara en Roumanie. Cet accord ne donnerait cependant pas de juridiction à l’évêché de l’Eglise orthodoxe roumaine sur la région du Timoc placée uniquement sous la juridiction de l’Eglise orthodoxe serbe. Or c’est dans cette région que les membres de la minorité ethnique roumaine se plaignent le plus de ne pas pouvoir librement pratiquer leur culte.
92. A l’heure actuelle, l’Eglise orthodoxe roumaine est donc représentée par un vicaire en Serbie. D’aucuns souhaiteraient qu’un évêché puisse être créé. Le Parlement de Vojvodine a approuvé une proposition d’amendement en vue de l’ajout de l’Eglise orthodoxe roumaine à la liste des Eglises traditionnelles inscrite dans la loi de 2006.
93. A Negotin, dans la vallée du Timoc, le rapporteur a rencontré un groupe d’interlocuteurs parmi lesquels se trouvait Bojan Aleksandrovic, prêtre de confession orthodoxe roumaine. Le père Aleksandrovic s’est plaint que des barrières administratives aient été volontairement placées afin de l’empêcher de construire une église pour sa paroisse. Par ailleurs, il a allégué avoir fait l’objet de menaces de mort et avoir été empêché de porter plainte au motif qu’il n’y aurait pas de base légale à une telle démarche. Le père Aleksandrovic considère que l’Eglise orthodoxe serbe est en fait une Eglise d’Etat puisque la construction d’une église d’une autre confession nécessite une autorisation émanant des autorités de l’Eglise orthodoxe serbe (et cela lui a été spécifié par le ministère compétent par écrit).
94. A Belgrade, le rapporteur a rencontré les responsables de l’Eglise orthodoxe roumaine (et notamment le vicaire) qui se sont montrés tout à fait satisfaits de la situation de l’Eglise orthodoxe roumaine en Serbie qui dénombre 39 paroisses (en plus de certaines plus petites entités). Contrairement aux positions relayées par la presse, ils considèrent que l’Eglise orthodoxe roumaine est parfaitement reconnue dans la législation serbe et ont cité le règlement sur le contenu et la manière de tenir le registre des Eglises et des communautés religieuses (Gazette officielle de la République de Serbie, 26 juillet 2006, no 43/2006) dont l’article 2 dispose: «Avec l’accord de l’Eglise orthodoxe serbe, l’unité organisationnelle de l’Eglise orthodoxe roumaine de Banat est inscrite au registre» (traduction non officielle) 
			(65) 
			Un extrait du règlement
en question a été transmis au rapporteur lors de cette rencontre..
95. Il a également été fait état de l’enseignement de la religion orthodoxe roumaine dans les écoles, les enseignants étant d’ailleurs rémunérés par l’Etat serbe. Les représentants de l’Eglise orthodoxe roumaine ont informé le rapporteur de l’existence de manuels en langue roumaine (dont ils ont d’ailleurs transmis certains exemplaires au rapporteur).
96. Par ailleurs, les représentants de l’évêché de l’Eglise orthodoxe roumaine ont informé le rapporteur que le prêtre Aleksandrovic n’était pas reconnu par leur Eglise (en effet, il n’aurait pas fini la formation requise à la faculté de théologie). Dans l’est de la Serbie, la situation est telle qu’il n’existe à ce jour pas de compétence pour l’Eglise orthodoxe roumaine, toute paroisse de cette confession nécessite donc l’accord des autorités de l’Eglise orthodoxe serbe. Selon les représentants de l’Eglise orthodoxe roumaine en Serbie, l’Eglise orthodoxe serbe est disposée à faire lire des messes en vlasi/roumain car des prêtres d’origine valaque ont été adoubés. Mais cela nécessiterait un accord entre les deux Eglises. Cependant, si les choses sont si simples et nécessitent une simple entente entre les deux Eglises, le rapporteur se demande pourquoi aucune solution n’a été trouvée à ce jour.
97. Si le rapporteur a donc pu constater que les relations entre le clergé de l’Eglise orthodoxe serbe et celui de l’Eglise orthodoxe roumaine de Serbie semblent être cordiales, il s’étonne cependant qu’une telle latitude de décision soit laissée à l’Eglise orthodoxe serbe dont l’influence en termes de reconnaissance d’autres Eglises ou communautés religieuses semble exacerbée. Il s’étonne également de l’importance du statut apparemment accordé au droit canon dans un Etat séculier. Il craint que cela témoigne d’une séparation incomplète de l’Eglise et de l’Etat. Cet état de fait ne serait pas en soi préoccupant si les compétences étaient clairement définies, mais en l’occurrence un certain flou semble régner. La Commission de Venise a d’ailleurs clairement recommandé que le statut juridique du droit canonique et des décisions ecclésiales soit défini plus précisément.
98. En ce qui concerne la possibilité pratique d’assister à une messe selon le culte orthodoxe roumain, et en langue vlasi/roumaine, la situation est très inégale selon la région considérée. Les «Roumains» vivant en Vojvodine n’ont aucune difficulté à assister à une messe célébrée selon le culte orthodoxe roumain dans leur langue maternelle. La situation est plus complexe pour les membres de la minorité roumaine ou valaque habitant dans l’est de la Serbie. Il semblerait que cela soit parfois possible dans certains villages mais pas systématiquement. Par ailleurs, il est allégué que toute tentative nouvelle de tenir une messe selon le culte orthodoxe roumain dans une localité dans l’est de la Serbie soit soumise à de fortes pressions et à des réactions d’hostilité.
99. Le rapporteur enjoint les autorités serbes, en coopération avec les représentants des deux Eglises, à trouver une solution pratique afin que la liberté de religion soit une réalité également dans l’est de la Serbie. Il semble nécessaire de réfléchir à la possibilité de reconnaître une juridiction à l’Eglise orthodoxe roumaine, par exemple en étendant les compétences territoriales de l’évêché Dacia Felix.

6.3. Usage de la langue vlasi/roumaine dans l’administration, dans l’enseignement et dans les médias

100. Il a été rapporté que l’utilisation de la langue vlasi dans les administrations locales n’est pas implantée même dans les localités dans lesquelles les membres de cette minorité représentent plus de 15 % de la population. Cette proportion de 15 % est prévue par la législation nationale pour l’usage d’une langue dans l’administration. Or la langue vlasi ne fait pas partie des langues minoritaires pour lesquelles la Serbie s’est engagée sur la base de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. En effet, le rapporteur pense qu’il est nécessaire de rappeler que certaines des dispositions de la charte s’appliquent à toutes les langues minoritaires, y compris à celles qui ne sont pas mentionnées dans l’instrument de ratification 
			(66) 
			Selon
l’instrument de ratification déposé par la Serbie, l’albanais, le
bosniaque, le bulgare, le hongrois, le romani, le roumain, le ruthénien,
le slovaque, l’ukrainien et le croate sont protégés par les dispositions
de la charte.. En vertu des principes énoncés dans la partie II de la charte, et en particulier à son article 7, la langue vlasi doit bénéficier des mesures de protection des langues régionales ou minoritaires 
			(67) 
			Voir en ce sens le
«Initial periodical report presented to the Secretary General of
the Council of Europe in accordance with Article 15 of the Charter»
– Serbia – MIN-LANG/PR(2007)4, 11 septembre 2007, p. 122, http://www.coe.int/t/e/legal_affairs/local_and_regional_democracy/regional_or_minority_languages/2_monitoring/2.2_States_Reports/Serbia_report1.pdf.
101. Le problème de l’enseignement dans la langue minoritaire est double: d’une part, il n’est guère possible d’enseigner en vlasi puisqu’il s’agit d’une langue essentiellement orale, d’autre part on manque d’enseignants qualifiés pour enseigner en langue roumaine.
102. Les autorités serbes et les représentants des minorités devraient joindre leurs efforts afin de trouver des solutions pratiques à ce problème. Une politique proactive en la matière serait très souhaitable car l’enseignement dans la langue maternelle, voire de la langue maternelle, est indéniablement un élément qui permet à une minorité de ne pas cesser d’exister. L’enseignement est un vecteur de viabilité du pluralisme, car la langue est l’élément essentiel des différentes cultures.
103. Selon les informations transmises au rapporteur, il semblerait qu’à plusieurs reprises des membres de la minorité valaque/roumaine aient collecté des signatures dans une pétition demandant que soit assuré l’enseignement de leur langue, sans succès.
104. En matière de médias, force est de constater que les membres de la minorité roumaine et/ou valaque résidant dans l’est de la Serbie sont fortement désavantagés par rapport à ceux vivant en Vojvodine.
105. Si les membres de la minorité roumaine de Vojvodine ont accès à un spectre assez large de médias écrits, radiophoniques et télévisuels en langue roumaine, une telle offre n’existe pas dans l’est de la Serbie. Les habitants du nord-est de la Serbie n’ont pas la possibilité de recevoir les émissions transmises par la télévision de Vojvodine. A la suite de la demande du rapporteur, ses interlocuteurs, y compris les autorités, ont mis en avant des contraintes techniques, les émissions de Vojvodine n’étant accessibles que par le câble. Certaines initiatives ont été amorcées pour introduire un journal en langue roumaine dans l’est de la Serbie mais elles n’ont apparemment pas été couronnées de succès.
106. Les autorités ont pour leur part signalé que l’obligation issue de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires d’avoir des médias écrits en langues minoritaires ne s’applique pas au vlasi qui n’a pas été inclus par la Serbie dans l’instrument de ratification. Le rapporteur rappelle ici les éléments indiqués au paragraphe 100 ci-dessus.
107. Ayant constaté la demande de la part des membres de la minorité valaque/roumaine dans la vallée du Timoc, le rapporteur appelle les autorités serbes et les acteurs concernés à réfléchir à des moyens d’étendre l’offre de médias télévisuelle en langue roumaine existant en Vojvodine afin que les personnes le souhaitant puisse également en bénéficier dans l’est de la Serbie. En l’état actuel des technologies, il ne s’agit sans doute pas d’une demande irréalisable.
108. Par ailleurs, le rapporteur a été informé de l’actuelle privatisation des médias écrits en Serbie et il est conscient que de petites entités, et notamment celles en langues minoritaires, ne pourront pas survivre à une vague de privatisation. Le rapporteur invite les autorités à prévoir des exceptions afin d’assurer la viabilité des médias en langue minoritaire.
109. En conclusion, le rapporteur a pu constater que la minorité valaque craint de perdre son identité, ses particularités, son mode d’expression et se bat en ce sens pour une reconnaissance indépendante de la minorité roumaine. Or il a également pu constater que deux parties d’une même minorité travaillent dans le même but, mais avec des moyens complètement différents. Ces divergences ne peuvent que nuire à la protection des droits de cette minorité et présentent le danger de pouvoir facilement être exploitées en vue d’une assimilation croissante des membres de la minorité à la majorité du pays. Le rapporteur craint fort que si les disputes internes persistent, voire se renforcent, une perte d’identité d’une partie des membres de cette minorité ne soit quasi inéluctable. Au contraire, si les membres de la minorité – que l’on souhaite l’appeler roumaine ou valaque importe peu – s’unissent, ils auront une réelle opportunité de faire respecter les droits que leurs donnent la loi et les normes internationales.

7. Conclusion

110. Comme le notait déjà le comité consultatif dans son avis (précité), la région des Balkans reste marquée par des tensions interethniques, triste héritage de la politique antiminoritaire des années Milošević. Aujourd’hui encore, des incidents à caractère ethnique, plus ou moins violents et avec plus ou moins d’acuité, sont recensés en Serbie. De toute évidence, il est, aujourd’hui encore, nécessaire de reconstruire la confiance entre les minorités et les autorités serbes ainsi qu’entre les minorités elles-mêmes. Les autorités doivent prendre plus de mesures positives et volontaristes en ce sens et surtout en assurer la mise en œuvre pleine et effective.
111. La communauté internationale a accordé une grande attention à la situation des minorités nationales en Vojvodine en 2004, ce qui a eu pour effet d’inciter les responsables politiques à se préoccuper davantage de la violence à l’égard des minorités. Il était urgent de réagir car les incidents se multipliaient à un rythme alarmant. Toutefois, il convient de souligner qu’à de nombreux égards, les minorités nationales jouissent d’une bien meilleure protection de leurs droits en Vojvodine que partout ailleurs en Serbie. Pourtant, si les incidents sont moins nombreux, ils n’ont pas disparu pour autant; la société n’est donc pas encore totalement débarrassée de toute prétention nationaliste. Compte tenu des débats sur le statut du Kosovo, il est de la plus haute importance que les autorités de la République de Serbie poursuivent leurs efforts en faveur des minorités nationales et prennent toutes les mesures nécessaires pour éviter une nouvelle escalade de la violence interethnique.
112. Le rapporteur constate que sur de nombreux plans (éducation dans la langue maternelle, protection de la langue maternelle, exercice de la religion dans la langue maternelle, représentation dans les instances politiques et dans les administrations, initiatives culturelles, etc.) la situation de la minorité valaque dans l’est de la Serbie est nettement moins favorable que celles des membres des minorités nationales vivant en Vojvodine. Alors qu’un certain nombre d’initiatives en Vojvodine ont été considérées par le comité consultatif comme louables, il a notamment constaté que la situation de la minorité valaque dans le nord-est de la Serbie est beaucoup moins développée.
113. En 1997, l’Assemblée parlementaire s’était déjà déclarée «préoccupée par la situation critique de la langue et de la culture aroumaines qui existent depuis plus de deux millénaires dans la péninsule Balkanique» 
			(68) 
			Voir la Recommandation 1333 (1997) de l’APCE..
114. Le rapporteur ne peut que confirmer le danger qu’il a pu constater. La culture valaque (ou «aroumaine») est effectivement menacée. Personne ne conteste les liens très étroits entre la culture roumaine et la culture valaque, mais – sans entrer dans la discussion de la dénomination de ces minorités – il existe certaines spécificités. Ce sont ces spécificités qui sont menacées de disparition.
115. Or, chaque culture régionale, ou spécifique à un certain groupe de population, participe à l’édifice du pluralisme culturel et donc à la richesse de nos sociétés.
116. Le rapporteur encourage fortement les membres de la minorité valaque/roumaine de l’est de la Serbie à joindre leurs efforts et à dépasser leurs conflits internes dans leur propre intérêt et afin de conserver les spécificités qui constituent leur identité. Les autorités serbes ont ici pour responsabilité de ne pas entraver mais au contraire de soutenir les initiatives en ce sens.
117. Par ailleurs, un des problèmes constants en Serbie, et très entravants en termes de garantie effective des droits et libertés fondamentales, concerne les insuffisances dans le domaine législatif et en termes de mise en œuvre des lois.
118. En effet, comme l’a déjà relevé le Comité des Ministres, «les principaux problèmes concernant la protection des minorités nationales en Serbie (…) ont trait à l’application concrète des normes en pratique» 
			(69) 
			Résolution ResCMN(2004)12
relative à la mise en œuvre de la Convention-cadre pour la protection
des minorités nationales par la Serbie-Monténégro, 17 novembre 2004.. Ce constat est toujours valable aujourd’hui. Par contre, si le comité consultatif avait considéré dans son avis de 2004 que ces problèmes étaient en partie dus à une mauvaise coopération entre les entités de l’union d’état de Serbie-Monténégro, on ne peut plus y voir aujourd’hui la raison de la non-application des normes en pratique.
119. Le rapporteur exhorte les autorités serbes à assurer la mise en œuvre complète et effective des normes édictées en matière de protection des minorités nationales. Il en va de la confiance entre les différents groupes qui constituent la population de Serbie et de la paix interethnique.
120. Enfin, et c’est un élément essentiel des conclusions du rapporteur, les autorités serbes ont le devoir de limiter les différences régionales en termes de protection des droits des minorités et de prendre des initiatives en ce sens: la discrimination géographique flagrante existante est inacceptable.
121. Plus concrètement, le rapporteur invite les autorités compétentes:
  • à accorder aux allégations de violence interethniques une attention accrue et à y réagir avec célérité, fermeté et efficacité, notamment par des enquêtes policières et des poursuites judiciaires efficaces;
  • à envisager de réinstituer le poste de ministre des Droits de l’homme et des Minorités;
  • à veiller à la mise en œuvre effective des législations en matière de droits des minorités et en particulier des lois adoptées en 2002;
  • à mettre en place aussi rapidement que possible le fonds de promotion sociale, économique, culturelle et de développement général des minorités nationales prévu à l’article 20 de la loi-cadre de 2002 sur la protection des droits et libertés des minorités nationales;
  • à adopter rapidement une loi antidiscrimination, en tenant compte des remarques formulées par la Commission de Venise;
  • à adopter en priorité les textes législatifs relatifs au financement et aux élections des conseils nationaux pour les minorités nationales, en prenant en compte les commentaires des experts du Conseil de l’Europe sur le projet de loi relatif aux élections;
  • à définir plus précisément les compétences et obligations des conseils nationaux pour les minorités nationales tout en les dotant des fonds nécessaires à la réalisation de leurs missions;
  • à introduire un mécanisme de contrôle par les conseils nationaux pour les minorités des actes de l’exécutif en matière de droits des minorités;
  • à convoquer des réunions plus nombreuses et régulières du Conseil national pour les minorités nationales;
  • à envisager la nomination d’un médiateur adjoint en charge des questions relatives aux droits des minorités;
  • à doter les provinces autonomes de garanties financières adéquates;
  • à prendre des mesures positives en faveur des membres des minorités, y compris la minorité valaque, et à veiller à l’éradication de toute discrimination à l’encontre de leurs membres;
  • à intensifier leurs efforts pour le développement d’initiatives visant à promouvoir un esprit de tolérance et le dialogue interculturel;
  • à accélérer les initiatives visant à former des enseignants ayant les qualifications requises pour enseigner les langues et en langues minoritaires;
  • à continuer de développer des écoles bilingues;
  • à supprimer les différences régionales existantes en termes de garanties effectives des droits des minorités (notamment en ce qui concerne l’usage des langues minoritaires dans l’administration, l’enseignement en langues minoritaires, la liberté de religion, etc.) en mettant pleinement en œuvre, et sur tout le territoire, les législations existantes en la matière;
  • à réfléchir à des solutions techniques qui permettraient aux personnes vivant dans l’est de la Serbie de pouvoir recevoir les émissions en langue roumaine qui sont émises en Vojvodine;
  • à prévoir des exceptions aux procédures de privatisation des médias au bénéfice des médias en langues minoritaires afin d’en assurer la viabilité.
122. Le rapporteur appelle également la Serbie et les Etats-parents concernés à convoquer le plus rapidement possible les commissions mixtes intergouvernementales prévues dans les accords bilatéraux relatifs à la coopération dans le domaine de la protection des minorités nationales qu’ils ont conclus.

Commission chargée du rapport: commission des questions juridiques et des droits de l’homme.

Renvoi en commission: Doc. 10715 et 10726, et Renvoi no 3147 du 25 novembre 2005.

Projet de résolution et projet de recommandation adoptés à l’unanimité par la commission le 22 janvier 2008.

Membres de la commission: Mme Herta Däubler-Gmelin (Présidente), M. Christos Pourgourides, M. Pietro Marcenaro, Mme Nino Nakashidzé (Vice-Présidents), M. Miguel Arias, M. José Luis Arnaut, M. Jaume Bartumeu Cassany, Mme Meritxell Batet, Mme Marie-Louise Bemelmans-Videc, Mme Anna Benaki, M. Luc Van den Brande, M. Erol Aslan Cebeci, Mme Ingrīda Circene (remplaçant: M. Boriss Cilevičs), Mme Alma Čolo, M. Joe Costello, Mme Lydie Err, M. Valeriy Fedorov, M. Aniello Formisano, M. György Frunda, M. Jean-Charles Gardetto, M. József Gedei, M. Valery Grebennikov, Mme Carina Hägg, M. Holger Haibach (remplaçant: M. Jürgen Herrmann), Mme Gultakin Hajiyeva, Mme Karin Hakl (remplaçante: Mme Michaela Sburny), M. Andres Herkel, M. Serhiy Holovaty (remplaçant: M. Ivan Popescu), M. Michel Hunault, M. Rafael Huseynov (remplaçant: M. Ali Huseynov), Mme Fatme Ilyaz, M. Kastriot Islami, M. Željko Ivanji, Mme Iglica Ivanova, Mme Kateřina Jacques, M. Karol Karski, M. András Kelemen, Mme Kateřina Konečná, M. Nikolay Kovalev, M. Eduard Kukan, M. Oleksandr Lavrynovych, Mme Darja Lavtižar-Bebler, Mme Sabine Leutheusser-Schnarrenberger, M. Humfrey Malins, M. Andrija Mandić, M. Alberto Martins, M. Dick Marty, M. David Marshall, Mme Assunta Meloni, M. Morten Messerschmidt, Mme Ilinka Mitreva, M. Philippe Monfils, M. Felix Müri (remplaçant: M. Andreas Gross), M. Philippe Nachbar (remplaçant: M. Michel Dreyfus-Schmidt), M. Fritz Neugebauer, M. Tomislav Nikolić, M. Anastassios Papaligouras, M. Ángel Pérez Martínez, Mme Maria Postoico, Mme Marietta de Pourbaix-Lundin, M. John Prescott, M. Jeffrey Pullicino Orlando, M. Valeriy Pysarenko (remplaçant: M. Hryhoriy Omelchenko), Mme Marie-Line Reynaud, M. François Rochebloine, M. Francesco Saverio Romano, M. Paul Rowen, M. Armen Rustamyan (remplaçant: M. Raffi Hovannisian), M. Kimmo Sasi, M. Ellert Schram, M. Christoph Strässer, M. Mihai Tudose, M. Tuğrul Türkeş, Mme Özlem Türköne, M. Vasile Ioan Dănuţ Ungureanu, M. Øyvind Vaksdal, M. Egidijus Vareikis, M. Klaas de Vries, Mme Renate Wohlwend, M. Marco Zacchera, M. Krzysztof Zaremba, M. Łukasz Zbonikowski, M. Vladimir Zhirinovsky, M. Miomir Žužul.

N.B. Les noms des membres présents à la réunion sont indiqués en gras.

Ce texte sera débattu ultérieurement.