1. Introduction
1. L’arrivée massive de migrants en situation irrégulière,
de demandeurs d’asile et de réfugiés sur les rivages du sud de l’Europe
n’est pas un phénomène nouveau. L’Assemblée parlementaire a déjà
abordé ce problème dans plusieurs rapports et adopté un certain
nombre de textes pertinents, notamment la
Résolution 1637 (2008) sur les
boat people de l’Europe: arrivée
par mer en Europe du Sud de flux migratoires mixtes, la
Recommandation 1645 (2004) sur
l’accès à l’assistance et à la protection pour les demandeurs d’asile
dans les ports maritimes et les zones côtières en Europe, et la
Résolution 1521 (2006) sur
l’arrivée massive de migrants irréguliers sur les rivages de l’Europe
du Sud.
2. Les événements en Tunisie, en Egypte et en Libye cette année
sont cependant à l’origine d’une nouvelle vague de personnes désespérées,
prêtes à tout pour fuir le danger et/ou refaire leur vie ailleurs.
2. Rétrospective des événements
- Tunisie: le 17 décembre
2010, un jeune vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, s’immole par
le feu pour protester contre la saisie de sa marchandise par la
police. Cet acte tragique est suivi par une vague de protestations
dans tout le pays, qui culmine par le départ du Président de la
Tunisie, M. Ben Ali, qui s’enfuit du pays le 14 janvier 2011.
- Egypte: le 17 janvier 2011, un homme s’immole par le feu
à proximité du parlement pour protester contre les mauvaises conditions
de vie en Egypte. Les jours suivants, les Egyptiens descendent dans
la rue pour manifester contre le régime du Président Hosni Moubarak.
Après dix-huit jours de protestations massives, le Président Moubarak
démissionne le 11 février 2011 et cède le pouvoir à l’armée.
- Libye: des protestations éclatent en Libye, le 16 février,
à la suite de l’arrestation d’un militant des droits de l’homme.
Le 25 février, la vague de protestations atteint Tripoli. Les forces
rebelles ainsi que les civils prennent un grand nombre de villes
et subissent ensuite l’attaque des forces loyales au colonel Muammar
al-Kadhafi. Le 18 mars 2011, le Conseil de sécurité des Nations
Unies vote en faveur d’une zone d’exclusion aérienne et de frappes
aériennes contre les forces du colonel Kadhafi. Le 20 mars 2011,
les forces britanniques, américaines et françaises participent à
l’opération «Aube de l’Odyssée» et attaquent
l’armée du colonel Kadhafi. Quelques jours plus tard, l’OTAN prend
le contrôle des opérations militaires des alliés en Libye. Le 30
mars, le ministre des Affaires étrangères libyen démissionne.
- Des protestations d’intensité variable ont également lieu
actuellement au Yémen, en Syrie, au Maroc, en Algérie, en Arabie
saoudite, au Bahreïn et en Jordanie.
3. Le 8 mars 2011, la commission des questions politiques
de l’Assemblée a tenu un échange de vues sur la situation en Egypte.
Le 11 mars 2011, la Commission permanente de l’Assemblée a tenu
un débat d’actualité sur le Conseil de l’Europe et les démocraties
émergentes dans le monde arabe. Le 15 mars 2011, la commission des
migrations, des réfugiés et de la population, réunie à Bruxelles,
a décidé de demander au Bureau de proposer à l’Assemblée de tenir
un débat d’actualité ou éventuellement un débat d’urgence, lors
de la session d’avril, sur l’arrivée massive de migrants en situation
irrégulière, de demandeurs d’asile et de réfugiés sur les rivages
du sud de l’Europe. La commission des migrations, des réfugiés et
de la population a en outre accéléré ses travaux sur «le sauvetage
en mer» et «le partage des responsabilités en Europe», compte tenu
de l’urgence de trouver des solutions. Ces deux rapports devraient
être examinés lors de la prochaine session de juin
.
4. Le 15 mars 2011, sur l’initiative du Secrétaire Général du
Conseil de l’Europe, le Comité des Ministres a tenu une réunion
extraordinaire afin d’examiner l’action possible du Conseil de l’Europe
en cas d’arrivée massive de demandeurs d’asile et de migrants en
provenance du sud de la Méditerranée. Lors de cette réunion, le
Comité des Ministres a adhéré aux propositions du Secrétaire Général
concernant l’élaboration de plans d’action d’urgence ainsi que la
formation des agents chargés de l’examen des demandes d’asile.
3. Chiffres sur les arrivées
3.1. Italie/Lampedusa
5. A la suite des récents événements dans le sud de
la Méditerranée, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les
réfugiés (HCR) estime qu’entre la mi-janvier et le 6 avril 2011,
plus de 23 000 personnes (dont plus de 21 000 Tunisiens) sont arrivées
en bateau à Lampedusa, causant un surpeuplement massif du centre d’accueil
pour les migrants. Un petit pourcentage seulement de ces personnes
ont fait une demande d’asile, et la plupart ont été transférées
entre-temps vers d’autres lieux en Italie
.
6. Le centre d’accueil local, conçu pour héberger 850 personnes,
abrite actuellement 2 000 personnes environ. Cette situation évolue
chaque jour, mais le surpeuplement reste constant. Après les récentes
arrivées, plusieurs milliers de personnes ont été contraintes de
dormir en plein air, à proximité du centre d’accueil et dans les
installations portuaires. Un grand nombre de personnes ne trouvent
pas d’abri contre la pluie et les basses températures. Le HCR a
également exprimé ses vives préoccupations au sujet des conditions d’hygiène,
qui seraient déplorables, et a demandé aux autorités italiennes
de prendre des mesures d’urgence afin de résoudre le problème de
la surpopulation sur l’île, qui ne compte que 5 000 habitants environ
en dehors de la période de fréquentation touristique
.
7. Des milliers de migrants ont été transférés entre-temps de
Lampedusa vers le continent italien. Nombre d’entre eux ont été
placés dans un centre d’accueil à Manduria, dans le sud du pays,
tandis que d’autres ont été déplacés vers la région des Pouilles
ou la Sicile. Le Gouvernement italien a mis au point un plan d’urgence pour
accueillir 10 000 migrants de façon temporaire, avant leur rapatriement
en Tunisie. Le 6 avril dernier, l’Italie a passé avec la Tunisie
un accord en vertu duquel les Tunisiens se trouvant déjà en Italie
recevront un permis de séjour temporaire de six mois tandis que
la Tunisie s’engage à simplifier et accélérer les procédures de
retour pour les Tunisiens qui viennent d’arriver.
8. S’il est compréhensible que l’Italie recherche des solutions
rapides et efficaces pour mettre fin à l’immigration irrégulière,
de telles procédures accélérées ne devraient pas exclure l’accès
à une protection internationale pour les personnes qui en ont besoin.
En effet, non seulement des Tunisiens, mais aussi de plus en plus
d’Erythréens, d’Ethiopiens et de Somaliens arrivent à Lampedusa.
Autour du 28 mars, les premières embarcations en provenance de Libye
sont arrivées en Italie, avec 877 personnes à bord. Nombre de ces personnes
auront certainement des motifs bien fondés pour demander une protection
internationale et le HCR s’emploie à élaborer des plans d’intervention
avec l’Italie, étant donné que l’on peut s’attendre à d’autres arrivées.
3.2. Situation à la frontière franco-italienne
9. Il est peu probable que ce nouvel accord entre l’Italie
et la Tunisie, qui permettrait aux personnes ayant obtenu un permis
de séjour de six mois de circuler librement dans la zone Schengen,
fournisse une assurance à la France, qui craint qu’un grand nombre
de ces arrivants ne tentent d’entrer sur son territoire. Compte
tenu des liens historiques et culturels entre les deux pays, on
suppose que de nombreux Tunisiens arrivés en Italie ont déjà essayé
de se rendre en France pour s’y établir. Pour cette raison, les
autorités françaises ont renforcé les contrôles aux frontières entre
l’Italie et la France. Les migrants tunisiens en situation irrégulière
interceptés ont été renvoyés à Vintimille, en Italie.
10. La Commission européenne a critiqué cette décision, en rappelant
que tant la France que l’Italie sont membres de l’Espace Schengen,
territoire européen sans frontières. Les migrants tunisiens en situation irrégulière
interceptés par les forces de l’ordre françaises devraient être
placés dans des centres de rétention français et la France devrait
négocier leur retour avec le pays d’origine.
3.3. Malte
11. Malte a reçu, à ce jour, un millier de personnes,
qui ont quasiment toutes besoin de protection (819 personnes sont
arrivées dans un temps très court
); elles
sont placées en rétention en attendant que leur cas soit examiné
.
Plus de 411 d’entre elles sont somaliennes, 250 sont érythréennes
et 87 éthiopiennes. On compte 557 hommes, 180 femmes et 82 enfants
. Toutes ces personnes sont
placées dans des centres de rétention, y compris les enfants avant
qu’ils ne puissent être soumis à un examen médical et transférés
avec leurs parents dans des centres d’accueil ouverts.
12. Après la diminution radicale des arrivées par mer ces derniers
mois, les centres de rétention maltais étaient largement vides et
peuvent, pour l’instant, accueillir les personnes arrivées récemment.
Malte craint toutefois l’éventualité d’arrivées massives qui réduiraient
ses capacités d’accueil.
13. Face à ces arrivées, les autorités sont instamment invitées
à veiller attentivement à ce que des mécanismes soient mis en place
pour identifier en particulier les individus vulnérables, notamment
les femmes, les enfants, les victimes de la traite, les victimes
de la torture, etc. A la suite de sa récente visite à Malte, le Commissaire
aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a sévèrement critiqué
la politique de détention obligatoire
,
une politique d’autant plus condamnable lorsqu’elle concerne des
groupes vulnérables, notamment les enfants.
3.4. Grèce
14. Bien qu’aucune arrivée par mer de migrants en situation
irrégulière, réfugiés ou demandeurs d’asile provenant des pays touchés
par les conflits en Afrique du Nord n’aie été enregistrée en Grèce
à ce jour, il ne faut pas perdre de vue que la Grèce a reçu 10 300
demandes d’asile en 2010 et que, d’après le rapport annuel d’analyse
des risques de l’Agence européenne pour la gestion de la coopération
opérationnelle aux frontières extérieures (Frontex)
,
la Grèce est actuellement concernée par 75 % des détections totales
de franchissement illégal des frontières dans l’Union européenne.
Les flux migratoires évoluent rapidement et la Grèce pourrait bientôt
se trouver confrontée à des arrivées de flux migratoires mixtes
au lendemain de ces événements récents.
3.5. Renvois présumés
15. Si les pratiques de renvoi sont clairement condamnées,
le refus d’accès au territoire auquel se heurtent des personnes
venues de Libye doit l’être également. Le 14 mars 2011, les autorités
italiennes ont refusé l’entrée à environ 1 800 personnes qui se
trouvaient à bord du ferry
Mistral Express en
provenance de Libye. Le navire est finalement parvenu à gagner le
Maroc
.
16. Dans le passé, le HCR a déjà fait part de ses graves préoccupations
concernant les répercussions de cette politique qui, faute de garanties
adéquates, risque d’empêcher l’accès à l’asile et de remettre en
cause le principe international du non-refoulement. A cet égard,
il est également utile de souligner que la commissaire européenne
Cecilia Malmström a explicitement déclaré que l’interdiction et
le renvoi des migrants trouvés en mer ne sont pas autorisés
.
17. Il y a lieu d’exhorter les pays concernés à ne procéder à
aucun renvoi. En outre, bien qu’une intervention soit nécessaire,
aucune expulsion massive ne doit avoir lieu et l’accès à une protection
internationale doit être fourni.
4. Réfugiés et migrants pris au piège des conflits
18. Le 8 avril 2011, fuyant la répression violente des
protestations et le conflit armé en Libye, 460 000 personnes avaient
franchi la frontière libyenne pour se rendre dans les pays voisins,
principalement l’Egypte et la Tunisie, où elles ont échoué dans
des camps organisés à la hâte. Dès le 1er mars 2011, le HCR et l’OIM ont
lancé un appel conjoint aux gouvernements du monde entier afin qu’ils
offrent leur soutien pour l’évacuation humanitaire d’urgence de
ces personnes, des Egyptiens pour la plupart.
19. Le pont aérien immédiatement mis en place par plusieurs gouvernements
– qui a permis à des dizaines de milliers d’Egyptiens de rentrer
chez eux en quelques jours – a considérablement atténué le surpeuplement à
la frontière. Toutefois, le HCR invite instamment les Etats à poursuivre
leurs efforts tant que des milliers de personnes continueront de
fuir la Libye. Une augmentation de l’afflux de familles libyennes
vers l’Egypte a été observée en effet au début du mois d’avril,
avec jusqu’à 2 500 Libyens franchissant la frontière chaque jour
.
20. Deux autres questions suscitent en outre une préoccupation
immédiate en Libye.
21. Premièrement, un nombre de plus en plus important de personnes
provenant de pays actuellement touchés par la guerre, par exemple
la Somalie, parviennent à franchir la frontière entre la Libye et
la Tunisie. Ces personnes ne peuvent être rapatriées dans leur pays
d’origine. Les pays européens doivent par conséquent unir leurs
efforts afin de trouver des solutions appropriées pour ces personnes,
qui ont besoin d’une protection internationale.
22. Deuxièmement, un certain nombre de migrants et de réfugiés
sont encore pris au piège des conflits en Libye. Le HCR indique
que la plupart des réfugiés et demandeurs d’asile les plus vulnérables
restent à Tripoli, incapables de se réinstaller ou d’accéder aux
services de base. Il signale en outre qu’un certain nombre des personnes
qui ont tenté de fuir ont été attaquées, touchées ou même tuées
par balles. Les personnes en provenance d’Afrique subsaharienne
risquent apparemment d’être considérées par la population comme appartenant
aux forces mercenaires qui agissent aux côtés du colonel Kadhafi
.
La situation est en train de s’aggraver et ces personnes, terrorisées
pour leur vie, se terrent chez elles et ne peuvent s’échapper. En
outre, elles craignent d’être forcées à rentrer dans leur pays d’origine.
23. Les gouvernements des Etats membres devraient revoir avec
une priorité absolue les dispositions concernant la réinstallation
de ces personnes (dont certaines se sont déjà vu accorder le statut
de réfugié par le HCR et d’autres sont des demandeurs d’asile).
5. Décès lors des tentatives d’atteindre les côtes
européennes
24. A la fin du mois de mars 2011, 27 migrants clandestins
ont été retrouvés noyés dans la Méditerranée, au large des côtes
tunisiennes.
25. Le 6 avril 2011, une embarcation a chaviré au large des côtes
de Lampedusa. Les gardes-côtes italiens ont sauvé 49 personnes au
total et ont récupéré 20 corps. De nombreuses personnes manquent
encore à l’appel étant donné que l’embarcation en transportait apparemment
200 environ.
26. Certaines embarcations auraient également disparu. L’une d’entre
elles serait partie le 22 mars (avec 335 personnes à bord) et l’autre
le 25 mars (avec 68 personnes à bord)
.
Des corps auraient été retrouvés échoués sur les côtes Libyennes
.
27. De tels accidents tragiques continueront à se produire et
pourraient même se multiplier dans les prochains jours ou les prochaines
semaines. Cependant, l’Europe ne peut se limiter à fermer ses portes
et à mettre fin aux arrivées, sans se pencher sur les causes profondes.
28. Entre-temps, il y a lieu de prendre des mesures d’urgence
et de mener une action solidaire. Comme l’a souligné le Président
de l’Assemblée dans sa déclaration du 1er avril 2011: «On ne peut
pas se contenter de colmater la brèche pour enrayer ce flux, il
faut aussi s’attaquer aux causes profondes du phénomène et apporter
une aide à ceux qui sont en difficulté, qu’il s’agisse des naufragés
en mer, des personnes qui fuient la persécution ou des petites îles
qui subissent, en première ligne, les conséquences de cet afflux
de migrants.»
29. Comme le Président de l’Assemblée a conclu, à propos des boat people, «tout décès est un
décès de trop».
6. Solidarité
30. Dès l’amorce de la première nouvelle vague d’arrivées
à Lampedusa, l’Italie a déclaré l’état d’urgence sur l’île et a
lancé un appel à l’aide à l’Union européenne et à ses Etats membres
afin de faire face à ces arrivées et à celles à venir. En février,
plus de personnes sont arrivées par mer à Lampedusa en cinq jours qu’au
cours des douze mois précédents en Italie. Comme il a été souligné,
les capacités d’accueil de Malte sont très sollicitées et – en vue
de probables arrivées plus massives lorsque les conditions climatiques s’amélioreront
– Malte a également demandé à l’Union européenne l’introduction
immédiate d’un mécanisme de partage de la charge.
31. Le 1er mars 2011, le HCR, dans un effort pour démontrer la
solidarité internationale et le partage de la charge, a présenté
une proposition de programme de réinstallation dans le contexte
de la situation d’urgence relative à la crise en Libye. Ce faisant,
le HCR a exprimé l’espoir que les pays soient en mesure d’offrir
d’autres places de réinstallation outre celles prévues par leur
quota annuel pour 2011.
32. Le 16 mars 2011, la commission des affaires étrangères du
Parlement européen s’est prononcée en faveur de la mise en œuvre
d’un mécanisme de partage de la charge en cas d’arrivées massives
de demandeurs d’asile provenant d’Afrique du Nord.
33. Le 23 mars 2011, face à l’augmentation considérable de la
pression migratoire sur l’Italie et sur l’île de Lampedusa, notamment,
l’agence Frontex a étendu la zone d’activité de l’opération commune
Hermès
et prolongé
sa durée de cinq mois, en vue de renforcer la capacité de contrôle
des frontières de l’Europe dans le centre de la Méditerranée. La
zone d’activité a été étendue afin d’inclure la Sardaigne. Frontex
signale qu’en plus de l’aéronef et des deux navires qu’elle finance
et coordonne déjà, un avion hollandais et un autre portugais sont
arrivés respectivement à Pantelleria et en Sicile pour aider les
autorités italiennes à renforcer leurs activités de contrôle des
frontières
.
Le 26 mars 2011, la zone d’activité de l’opération commune Poséidon
, qui couvre les îles grecques et la
mer Egée, a également été élargie pour inclure la Crète.
34. Le 5 avril 2011, le Parlement européen a adopté une résolution
sur les «Flux migratoires liés à l’instabilité: champ d’application
et rôle de la politique étrangère de l’UE» (2010/2269(INI))
.
Dans cette résolution, le Parlement européen a souligné que Frontex
ne peut constituer l’unique instrument de l’Union européenne pour
aider l’Italie ou Malte à affronter la crise de l’immigration en
Méditerranée et a invité le Conseil européen à élaborer un plan
d’action pour la réinstallation des réfugiés tout en s’attaquant
aux causes profondes (notamment le chômage) dans les pays d’origine
et de transit des migrants.
35. Dans une lettre envoyée le 6 avril 2011, la commissaire européenne
en charge des affaires intérieures, Cecilia Malmström, a invité
tous les Etats membres de l’Union européenne à rechercher rapidement
un accord sur le partage de la charge de l’accueil des réfugiés
qui fuient la Libye et les côtes d’Afrique du Nord en conflit pour
rejoindre l’Europe. Elle a demandé la mise en place de mesures d’urgence
ainsi que l’activation, si nécessaire, d’un mécanisme de protection
temporaire, prévu par une directive spéciale de 2001, qui aiderait des
pays comme Malte et l’Italie à faire face à l’afflux
.
36. La commissaire européenne mentionne également dans sa lettre
des mesures à court terme qui pourraient être prises pour mettre
fin aux arrivées de migrants irréguliers provenant de Tunisie, par
exemple un renforcement des moyens d’action de Frontex et la mise
en place d’un partenariat avec la Tunisie en vue du retour des migrants
en situation irrégulière. La commissaire européenne annonce enfin
son intention de présenter, en juin, un paquet de mesures à long
terme. Malte a immédiatement accueilli avec satisfaction le contenu
de cette lettre, en soulignant qu’elle avait soutenu ces points
de vue depuis le début des soulèvements
.
Les ministres de l’Intérieur de l’Union européenne se sont réunis
à Luxembourg le 11 avril 2011 pour examiner ces questions.
37. Le 8 avril 2011, la Commission européenne a publié une note
décrivant en détail sa réponse aux flux migratoires en provenance
d’Afrique du Nord
.
38. Le 26 avril 2011, un sommet franco-italien se tiendra à Rome.
Le Président français, Nicolas Sarkozy, et le chef du Gouvernement
italien, Silvio Berlusconi, examineront notamment les problèmes
migratoires et la situation en Libye.
39. En ce qui concerne les financements, la commissaire européenne
en charge des affaires intérieures a souligné que 25 millions d’euros
étaient disponibles et prêts à être utilisés à titre d’aide d’urgence
pour faire face à la crise. D’autres fonds supplémentaires pourraient
être trouvés si nécessaire. Elle a mentionné en outre que, dans
tous les cas, les personnes fuyant la Libye ne seraient pas renvoyées
par l’Union européenne.
7. Conclusions
40. Dans le projet de résolution, votre rapporteur s’efforce
de traiter deux problèmes, le premier concernant les besoins humanitaires
et de protection immédiats, le deuxième concernant les mesures à
prendre pour traiter les causes premières de cet afflux de migrants,
demandeurs d’asile et réfugiés. Ce faisant, les Etats membres doivent
absolument faire preuve de solidarité et, sous une forme ou sous
une autre, prendre une part de responsabilité.
41. Nous devons être réalistes et les solutions que nous allons
trouver devront équilibrer les besoins des pays sortant d’un conflit
et les préoccupations et intérêts de nos Etats membres. Ce processus
devra aller dans les deux sens et il faudra que toutes les parties
acceptent des compromis. L’Europe devra apporter un soutien économique,
social et juridique au développement et aux réformes démocratiques
et devra aussi chercher des pistes permettant d’accueillir des migrants
de ces pays en conditions régulières. De leur côté, ces pays devront s’attaquer
à la migration irrégulière et ne pas faire obstacle au retour de
leurs propres ressortissants.
42. A court terme, nous devons être immédiatement prêts à réinstaller
les réfugiés déjà reconnus par le HCR et qui sont pris au piège
des conflits en Libye.
43. A court terme, nous devons trouver des solutions immédiates
pour ceux qui arrivent quotidiennement sur nos côtes méridionales
et dont le nombre ne cessera de croître si le conflit en Libye persiste
et s’aggrave. Quelles que soient les solutions, les Etats européens
doivent respecter leurs obligations humanitaires et leurs obligations
au titre du droit international des droits de l’homme et des réfugiés.
Ils doivent donner l’accès à des procédures d’asile équitables et
effectives, en tenant compte des besoins des groupes vulnérables.
Ils ne doivent pas violer le principe du non-refoulement et éviter
de renvoyer les embarcations en mer.
44. Les Etats membres doivent également examiner des solutions
de réinstallation pour alléger le fardeau pesant actuellement sur
les pays européens riverains du sud de la Méditerranée, soit en
réinstallant les demandeurs d’asile qui ont obtenu une protection
des Etats membres dans lesquels ils sont arrivés, soit en suspendant
temporairement l’application des Règlements de Dublin.
45. En cas d’exode massif de réfugiés libyens dû à un climat de
terreur croissante imposé par le colonel Kadhafi ou à l’émergence
d’une guerre civile, les Etats membres de l’Union européenne devraient
envisager l’application de la directive temporaire de protection.
46. Toutefois, des solutions à court terme ne suffiront pas. L’Europe
devra traiter les causes à l’origine de la situation et être prête
à investir lourdement dans les nouvelles démocraties émergentes.
Si les jeunes de ces pays n’ont toujours pas de perspectives d’avenir,
en particulier pour le travail, ils continueront de tout tenter pour
venir en Europe dans l’espoir d’une vie meilleure.
47. Que ce soit à court ou à long terme, les Etats membres du
Conseil de l’Europe et l’Union européenne ont des solutions. Nous
devons nous assurer que nous utilisons nos ressources communes de
la manière la plus efficace pour traiter les problèmes humanitaires
actuels et nous attaquer aux causes profondes à l’origine de cette
situation.