1. Introduction
1. Les champs électromagnétiques, qu’ils soient émis
par les lignes à haute tension, les appareils domestiques, les antennes
relais, les téléphones mobiles ou autres dispositifs à micro-ondes,
font de plus en plus partie de notre environnement techno-industriel.
2. L’expérience consistant à vivre ou à travailler dans des champs
électromagnétiques artificiels d’extrême basse fréquence et de hautes
fréquences superposés aux champs électromagnétiques naturels de l’environnement
est évidemment, en termes d’évolution, encore relativement neuve
pour l’être humain, la faune et la flore. Elle ne remonte qu’à une
cinquantaine d’années à partir du moment où l’exposition intensive, industrielle
et domestique a commencé avec les radars, les ondes de radio et
de télévision, et les champs électromagnétiques générés par les
lignes à haute tension et les appareils électroménagers.
3. Ce n’est qu’à partir des années 1990 que les nouvelles technologies
de la téléphonie et de la communication mobile sans fil ont pris
un essor de plus en plus rapide au niveau européen et même mondial, avec
des applications de plus en plus diversifiées et sophistiquées:
téléphone mobile, téléphone sans fil, WiFi, WLAN (réseau local sans
fil), etc.
4. Le terme «champs électromagnétiques» comprend la totalité
des champs émis par des sources naturelles et anthropiques. On distingue
les champs statiques et les champs alternatifs. Pour ces derniers,
on différencie essentiellement les champs d’extrêmes basses fréquences
(ELF), l’électricité domestique par exemple, et les champs d’hyperfréquences
(HF) avec, entre autres, les téléphones portables. Les champs électriques
sont mesurés en volt/mètre (v/m), alors que les champs magnétiques
sont mesurés aux niveaux d’exposition courante en microteslas (µt).
Comme des courants électriques très faibles font partie de la physiologie
humaine, par exemple au niveau de la communication intercellulaire,
il est légitime de s’interroger sur les perturbations que peuvent
engendrer les expositions artificielles actuelles sur l’environnement
humain et sur leurs conséquences éventuelles sur la santé.
5. Il y a lieu de constater avec satisfaction que les innovations
technologiques induites par l’électrification et des nouveaux procédés
de radio-télécommunication sont apparus et ont contribué très largement
à l’essor économique et au bien-être matériel des populations des
pays industrialisés. Ainsi, par exemple, les appareils électroménagers
ont largement permis d’alléger la vie quotidienne de millions de
ménages et ont de ce fait joué un rôle non négligeable dans les
mouvements d’émancipation de la femme.
2. Historique du débat
6. Pourtant, force est de constater que dès le début
de l’introduction de certaines de ces nouvelles technologies, des
problèmes environnementaux ou sanitaires sont apparus et ont été
discutés dans certains pays aussi bien au niveau scientifique qu’au
niveau des professionnels de la santé et de la médecine du travail. Ainsi,
par exemple, dès les années 1930, les ondes des radars furent associées
à certains «syndromes de maladies de micro-ondes» auprès des opérateurs
et techniciens en contact intense et prolongé avec ces ondes. L’ancienne
URSS et les pays de l’Est avaient adopté des valeurs préventives
très basses destinées à protéger la santé des opérateurs.
7. Aux Etats-Unis et en l’Europe de l’Ouest, la discussion des
effets sanitaires nocifs potentiels de champs électromagnétiques
s’est focalisée, au cours des années 1970 et 1980, essentiellement
sur la problématique des lignes à haute ou très haute tension et
de la protection sur le lieu du travail (travail devant ordinateurs,
dans les aciéries électriques, etc.). Concernant les risques des
lignes à haute tension, une étude épidémiologique américaine (Wertheimer
et Leeper) de 1979 avait montré une relation entre la proximité
des lignes à haute tension et la leucémie de l’enfant, relation
d’ailleurs confirmée en 2001 par le Centre international de la recherche
sur le cancer (CIRC), qui classait ces champs comme «cancérigènes
possibles chez l’homme» (catégorie 2B). Et, parallèlement, dès le
début des années 1980, une autre problématique liée aux champs électromagnétiques
et à la pollution chimique fut évoquée lors de conférences internationales:
les nuisances résultant des écrans d’ordinateurs dans les bureaux,
les effets sur la santé se manifestant par des maux de tête, de
la fatigue, des problèmes oculaires et cutanés. Concernant l’aspect
électromagnétique de ces effets, des normes préventives sévères
(normes TCO) avaient été proposées dès le début des années 1990
par la Confédération suédoise des employés, et adoptées ensuite
plus largement.
8. Les années 1990 ont vu l’essor de la téléphonie mobile et
son expansion rapide dans les pays industrialisés d’abord, mais
de plus en plus aussi dans les pays en voie de développement d’Afrique,
d’Asie et d’Amérique latine.
9. La téléphonie mobile et les applications de plus en plus sophistiquées
de la télécommunication sans fil se sont intégrées non seulement
dans les milieux professionnels, mais ont envahi littéralement toute
notre sphère privée. Même les très jeunes enfants sont actuellement
concernés à la maison, à l’école, dans les moyens de transport,
etc.
3. Inquiétudes grandissantes en Europe
10. Pourtant, depuis une bonne dizaine d’années, une
inquiétude de plus en plus forte des populations européennes a commencé
à se manifester face aux risques sanitaires potentiels de la téléphonie
mobile et face à un déficit d’information fiable sur ces questions.
Ainsi, selon une étude récente de l’Eurobaromètre (Commission européenne),
48 % des Européens se disent préoccupés ou très préoccupés par les
risques potentiels sur la santé que représente la téléphonie mobile.
L’hypothèse d’un risque est partagée respectivement par 76 % des
Européens concernant les antennes relais et 73 % pour les effets
potentiels du téléphone portable.
11. Cette inquiétude face aux champs ou ondes électromagnétiques
a conduit à la création et à l’essor d’une multitude d’initiatives
citoyennes dans de nombreux pays. Ces initiatives sont dirigées
la plupart du temps contre l’implantation de stations d’antennes
relais à proximité surtout d’écoles, de crèches, d’hôpitaux ou d’autres
institutions hébergeant des enfants ou des personnes sensibles,
s'en prenant de plus en plus aussi à d’autres aspects de la télécommunication
sans fil comme le WiFi dans les écoles par exemple.
12. Le commission de l'environnement, de l'agriculture et des
questions territoriales a organisé deux auditions avec des experts
les 17 septembre 2010 et 25 février 2011.
13. Lors de la première audition d’experts, M. Ralph Baden du
Service de la médecine du travail du ministère de la Santé du Grand-Duché
de Luxembourg a évoqué de manière générale la problématique des champs
et ondes électromagnétiques de très basse fréquence et de haute
fréquence, et les valeurs seuils respectives en vigueur. Il a relevé
les différentes sources de ces champs électromagnétiques extérieures
aux habitations: antennes relais, lignes à haute tension, stations
radio, télévision, radars, etc., mais a insisté surtout, sur la
base des résultats des mesures, sur les sources de ces champs à
l’intérieur des habitations ou des bâtiments publics en montrant
par des exemples concrets comment réduire de manière simple et pratique l’exposition
à ces champs électromagnétiques «indoor» et faire disparaître par
la même occasion certains troubles de la santé: maux de tête, insomnies,
toux, états dépressifs, etc.
4. Les effets sur l’environnement: plantes, insectes,
animaux
14. Lors de cette même audition d’experts, le Dr Ulrich
Warnke de l’Institut de la biologie technique et de la bionique
de Sarrebruck a décrit les effets biologiques de certaines fréquences
micro-ondes sur les plantes. Selon les fréquences, l’intensité,
la modulation des fréquences et la durée d’exposition, des études scientifiques
montrent des réactions de stress et des atteintes à l’expression
des gènes. Ainsi, par exemple, des études récentes du laboratoire
de biologie cellulaire de l’université de Clermont-Ferrand (2007)
montrent clairement les effets des micro-ondes de la téléphonie
mobile sur les gènes des plantes, et notamment sur les plants de
tomates.
15. D’autres études scientifiques internationales montrent des
réactions de stress comparables avec certains types de haricots,
mais aussi avec des arbres à feuilles ou des conifères exposés à
des fréquences diverses (antennes relais, fréquence TETRA).
16. Le Dr Warnke a mis en évidence le sens magnétique naturel
inné de certains animaux ou insectes leur servant d’orientation
dans le temps et l’espace, et organisant les fonctions internes
de leur organisme en montrant ensuite comment les champs ou ondes
artificiels extrêmement faibles peuvent influencer négativement
ce sens de l’orientation, de la navigation et de la communication
de certains animaux ou insectes: oiseaux migrateurs, pigeons, certaines
sortes de poissons (requins, baleines, raies) ou certains insectes
(fourmis, papillons et surtout les abeilles). Les troubles induits
par les ondes électromagnétiques artificielles seraient-ils une
des causes majeures – en dehors des problèmes d’exposition chimique
– des phénomènes répétitifs de baleines échouant sur les plages
ou de la mort ou de la disparition de colonies d’abeilles (colony collapse disorder) observée
au cours des années passées?
17. Les études scientifiques très nombreuses citées lors de cette
audition d’experts devraient sans doute inciter les responsables
politiques à réfléchir et à agir en conséquence. Un dernier aspect
évoqué lors de cette audition d’experts était consacré aux effets
potentiellement pathogènes observés auprès des animaux d’élevage
– veaux, vaches, chevaux, oies, etc. –, après l’installation à proximité
d’antennes relais de téléphonie mobile: malformations inexplicables
de veaux nouveau-nés, cataractes, problèmes de fertilité.
18. Face aux inquiétudes et aux oppositions se développant rapidement
dans beaucoup d'Etats membres du Conseil de l’Europe, les dirigeants
des sociétés de distribution d’électricité et les opérateurs de
téléphonie mobile réagissent en réfutant tout effet négatif sur
la santé humaine de leurs activités industrielles et commerciales.
Lors de l'audition tenue à Paris le 25 février 2011, les représentants
officiels d'opérateurs de téléphonie mobile français et européens
ont ardemment défendu l’argumentaire selon lequel les valeurs seuils officielles
en vigueur dans la plupart des pays du monde suffisaient pour protéger
la santé humaine des effets thermiques des portables et que d’éventuels
effets biologiques, s’ils pouvaient être démontrés, n’auraient aucun
effet négatif sur la santé de l’homme.
19. Pour souligner cet argumentaire, ces experts ont évoqué l’évaluation
scientifique effectuée par des associations telle que l’ICNIRP (International
Committee on Non-Ionisation Radiation Protection) ou par des organisations
officielles: Organisation mondiale de la santé, Commission européenne
et plusieurs agences nationales de protection. En fait, ces organisations
ou organes internationaux, européens ou nationaux semblent à l’évidence
avoir repris les valeurs seuils et recommandations préconisées par
l’ICNIRP dès la création de cette association privée située près
de Munich, au début des années 1990.
20. Pourtant, lors de cette même audition, des dirigeants d’associations
de citoyens et des représentants des ONG comme «Robin des toits»
ont insisté largement sur de nombreux risques et effets biologiques
nocifs et des problèmes de santé liés, selon eux, à des champs ou
ondes électromagnétiques de la téléphonie mobile, des antennes relais,
des lignes à haute tension et d’autres sources électromagnétiques
artificielles, et cela même à des intensités très basses largement
inférieures aux valeurs seuils officiellement en vigueur.
21. Le représentant délégué de l’Agence européenne de l’environnement
de Copenhague, instance consultative officielle de l’Union européenne,
a insisté sur l’importance du principe de précaution inscrit dans les
traités européens et en a déduit la nécessité de mesures préventives
efficientes afin de protéger la santé humaine et d’éviter ainsi
des affaires ou scandales sanitaires douloureux tels que les crises
liées à l’amiante, au tabac, au plomb, aux PCB (polychlorobiphényles)
et autres. Il a analysé de façon convaincante les méthodes scientifiques
d’évaluation en vigueur et les différents niveaux de preuve pour
conclure, sur la base du rapport scientifique «Bioinitiative» et
d’autres études plus récentes de l’Institut Ramazzini de Bologne,
que les indices ou niveaux de preuve étaient suffisantes actuellement
pour appeler les gouvernements et les instances internationales
à agir.
22. Enfin, un autre expert, spécialiste en médecine clinique et
en oncologie a confirmé, sur la base des résultats d’analyses biologiques
et cliniques de quelques centaines de patients français se disant «électrosensibles»,
qu’un syndrome d’intolérance aux champs électromagnétiques (SICEM)
existe effectivement et qu’il ne s’agit pas de simulateurs ou de
malades psychiatriques.
5. Effets biologiques des champs électromagnétiques
en médecine
23. Il est établi depuis le début du XXe siècle que les
champs électromagnétiques fonctionnant dans diverses fréquences
peuvent avoir un effet utile et bénéfique en médecine clinique,
que ce soit au niveau diagnostique ou thérapeutique.
24. En effet, les évolutions scientifiques depuis la seconde guerre
mondiale nous ont fait comprendre que l’organisme humain ne fonctionnait
pas uniquement sur la base de réactions cellulaires biologiques
ou biochimiques, mais que l’homme était aussi un être électromagnétique.
Il est en effet bien connu que les cellules nerveuses communiquent
entre elles par des impulsions électriques. Les signaux électriques
les plus puissants détectés sur l’homme sont ceux qui proviennent
des activités nerveuses et musculaires. Ainsi, par exemple, le cœur
étant le groupe musculaire le plus important de l’organisme, le
diagnostic médical du fonctionnement cardiaque se fait par enregistrement
des signaux électriques provenant du cœur (électrocardiogramme –
ECG). A un niveau diagnostique toujours, l’électro-encéphalographie
(EEG) permet une surveillance non envahissante de l’activité électrique
du cerveau. C’est dans les domaines cliniques des maladies cérébrales,
dans la surveillance du sommeil ou dans la confirmation de la mort
clinique que l’EEG a trouvé ses applications.
6. Emploi thérapeutique de courants électriques ou
d’ondes électromagnétiques
25. Sans entrer dans les détails, le rapporteur voudrait
attirer l’attention sur le fait que certains courants électriques
ou ondes électromagnétiques utilisés dans certaines fréquences peuvent
avoir un effet absolument bénéfique en matière médicale. Quelques
exemples permettent d’illustrer cet effet thérapeutique bénéfique d’électrothérapies:
effets cliniques de courants électriques continus (électrolyse),
effets cliniques d’impulsions électriques extérieures sur le muscle
cardiaque (défibrillateur, pacemaker), effets cliniques de microcourants provoqués
par des champs magnétiques pulsés pour améliorer la guérison de
réparations tissulaires et de fractures osseuses, pour ne citer
que les plus connues de ces applications en bandes de fréquence
non ionisantes.
26. Si donc, dans certaines bandes de fréquence, les champs électriques
et électromagnétiques ont des effets biologiquement absolument bénéfiques,
d’autres fréquences non ionisantes, que ce soient les extrêmes basses
fréquences, les lignes électriques ou certaines ondes à haute fréquence
utilisées dans le domaine du radar, de la télécommunication et de
la téléphonie mobile, semblent quant à elles potentiellement avoir
des effets biologiques plus ou moins nocifs sur les plantes, les
insectes et les animaux ainsi que sur l’organisme humain, même lorsqu'ils
sont exposés en-dessous des valeurs seuils officielles.
7. Progrès technologique et croissance économique
aux dépens de la protection de l’environnement et de la santé
27. On se doit de constater que la problématique des
champs ou ondes électromagnétiques et ses conséquences possibles
sur l’environnement et la santé est comparable à celle d’autres
problèmes actuels, notamment celui de l’autorisation de la mise
sur le marché des produits chimiques, des pesticides, des métaux lourds,
des OGM, pour ne citer que les plus connus. Une des causes de l’inquiétude
des populations et de leur méfiance vis-à-vis de la communication
par les agences de sécurité officielles et par les gouvernements
réside certainement dans le fait que, par le passé, un certain nombre
d’affaires ou de scandales sanitaires comme celui de l’amiante,
du sang contaminé, des PCB ou dioxines, du plomb, du tabagisme et
récemment encore celui de la grippe H1N1 ont pu avoir lieu malgré
le travail ou même avec la complicité d’agences nationales ou internationales
dites de sécurité environnementale ou sanitaire.
28. C’est d’ailleurs dans ce contexte que la commission de l'environnement,
de l'agriculture et des questions territoriales travaille actuellement
sur la question des conflits d’intérêts et de la nécessité urgente
d’une véritable indépendance des scientifiques engagés dans les
agences officielles ayant comme mission d’évaluer les risques des
produits avant leur autorisation de mise sur le marché.
29. Le rapporteur souligne dans ce contexte qu’il est pour le
moins très curieux de constater que les valeurs seuils officielles
en vigueur pour limiter l’impact sanitaire de champs électromagnétiques
de très basse fréquence et des ondes de haute fréquence avaient
été formulées et proposées aux institutions politiques internationales
(OMS, Commission européenne, gouvernements) par l’ICNIRP, ONG à
origine et à structure peu transparente, soupçonnée d’ailleurs de
liens assez proches avec les industries dont l’essor dépend des recommandations
de valeurs seuils maximales pour les différentes fréquences des
champs électromagnétiques.
30. La simple reprise et l’adoption des recommandations de sécurité
préconisées par l’ICNIRP par la plupart des gouvernements et par
les agences de sécurité semble s’être faite essentiellement pour
deux raisons:
- pour ne pas entraver
l’essor de ces nouvelles technologies promettant la croissance économique,
le progrès technologique et la création d’emplois;
- mais également parce que les décideurs politiques restent
malheureusement peu impliqués dans les questions d’évaluation des
risques technologiques sur l’environnement et la santé.
31. Concernant les résultats souvent non concluants ou même contradictoires
de recherches et d’études scientifiques sur les risques éventuels
de produits, de médicaments ou comme ici de champs électromagnétiques,
un certain nombre d’études comparatives semblent d’ailleurs indiquer
une relation assez forte entre l’origine des financements, privés
ou publics, et les résultats de l’évaluation des risques, situation évidemment
inacceptable puisque révélatrice de conflits d’intérêts mettant
en cause l’intégrité, l’indépendance et l’objectivité de la recherche
scientifique.
32. Ainsi, par exemple, dans le domaine de l’évaluation du risque
induit par les radiofréquences des téléphones portables sur la santé,
des chercheurs suisses de l’université de Berne ont présenté en
2006 les résultats d’une analyse systématique de l’ensemble des
résultats des recherches effectuées et ont conclu à une forte corrélation
entre le mode de financement des recherches et les résultats obtenus:
33 % des études financées par les industriels concluent à l’existence
d’effets sur notre organisme de l’exposition aux radiofréquences
de la téléphonie mobile. Ce chiffre s’élève à plus de 80 % lorsque
les études sont financées par des fonds publics.
33. Il faut donc, dans ce domaine comme dans d’autres, plaider
pour une véritable indépendance des agences d’expertise et en faveur
d’une expertise indépendante, pluridisciplinaire et contradictoire.
Il ne doit plus être possible que des donneurs d’alerte soient discriminés
et que des scientifiques critiques mais reconnus soient exclus dans
le choix des experts siégeant dans les comités d’expertise ou que
leurs recherches ne reçoivent plus de moyens financiers.
8. Les forces et les arguments en présence: la querelle
autour des incidences d’effets biologiques et autour des valeurs
seuils
34. Il semble évident que les sociétés d’électricité,
de téléphonie mobile ou de télécommunication considèrent en premier
lieu les paramètres économiques et financiers, et donc les bénéfices
et les parts de marché. Dans ce contexte, il est compréhensible
que des réglementations, des valeurs seuils plus sévères freinant
à première vue leurs affaires ne sont pas bien vues et sont combattues
avec force. En témoignent les propos agacés et parfois émotionnels
d’un représentant de la téléphonie mobile française lors de l’audition d’expertise
contradictoire avec notre commission.
35. Les représentants de la téléphonie mobile maintiennent depuis
des années le même paradigme et le même argumentaire, et ils s’appuient
en cela sur les propos rassurants développés par la plupart des
agences et institutions internationales. Ainsi, par exemple, les
valeurs seuils de 100 microteslas pour les champs électromagnétiques
à basse ou très basse fréquence et les 41/42 volt/mètre pour les
très hautes fréquences de la téléphonie mobile à 900 mégahertz (MHz)
seraient adéquats pour protéger le public des effets thermiques.
A des niveaux très élevés, les champs des radiofréquences sont évidemment
susceptibles de provoquer des effets thermiques nocifs sur l’organisme
humain, estimation d’ailleurs partagée par tout le monde.
36. Reste bien sûr la question très controversée de l’existence
et des conséquences non thermiques ou athermiques et donc biologiques
sur l’environnement et l’organisme humain. Les représentants des
opérateurs nient en bloc l’existence d’effets biologiques nocifs
à long terme des champs électromagnétiques en-dessous des valeurs
seuils en vigueur. Pour illustrer le caractère et la portée de ces
valeurs seuils, citons par exemple l’article 5.1 de la Directive
2004/40/EC du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004
relatif à des normes minimales pour protéger les travailleurs: «(…)
Toutefois, la présente directive ne traite pas des effets à long
terme, y compris les effets cancérigènes qui pourraient se produire
en raison d'une exposition à des champs électriques, magnétiques
et électromagnétiques variant dans le temps, à propos desquels il
n'existe pas de données scientifiques probantes qui permettent d'établir
un lien de causalité (…)» («Introduction», paragraphe 4).
37. La protection des travailleurs n’est donc valable que pour
éviter des effets thermiques et dans le court terme!
38. Concernant des effets biologiques potentiellement nocifs,
les opérateurs, les agences et les réglementations officielles n’en
tiennent aucun compte et, pour justifier cette attitude, ils renvoient
à l’argumentaire suivant: d’abord le fait de constater un effet
biologique ne signifierait pas que celui-ci présenterait nécessairement
un caractère pathologique menaçant pour l’organisme humain. De plus,
il n’y aurait pas de preuve scientifique définitivement concluante
d’une relation de cause à effet entre champs électromagnétiques
et radiofréquences, et des incidences pathologiques à long terme
de leurs effets non ou athermiques. Et pour souligner ces propos,
ils s’appuient sur des publications scientifiques nombreuses qui
ne montreraient aucun effet biologique significatif.
39. Les arguments des opérateurs peuvent schématiquement être
résumés de la façon suivante:
- les
valeurs seuils préconisées par l’ICNIRP sont des valeurs qui assurent
la sécurité sanitaire;
- les enfants utilisant le portable ne sont pas plus sensibles
que les adultes;
- il n’existe pas d’effets biologiques significatifs en
dehors des effets thermiques;
- et s’il y avait des effets biologiques éventuellement
nocifs, il n’y aurait pas de mécanisme d’action scientifiquement
acceptable pour expliquer de tels effets.
9. Les études scientifiques et les arguments développés
par les associations et ONG, par des regroupements de scientifiques,
par l’Agence européenne de l’environnement et par le Parlement européen
40. Des études scientifiques et médicales sérieuses mettant
en évidence des effets biologiques à caractère pathologique existent
depuis les années 1930 concernant les radiofréquences et micro-ondes
des installations radar. Elle rend aussi attentif au fait que des
effets nocifs de l’exposition prolongée à des champs électromagnétiques
à basse ou très basse fréquence de lignes de transport électrique
ou d’écrans d’ordinateurs ont pu être observés dès la fin des années
1970, et le CIRC de l’OMS (Centre international de la recherche
contre le cancer) avait classé ces champs comme «cancérigènes possibles»
chez l’homme (catégorie 2B) en 2001.
41. Le rapporteur rappelle les effets biologiques positifs avérés
de certaines applications médicales (électrothérapies) de champs
électromagnétiques et de micro-ondes de très faible intensité. Si
de tels effets bénéfiques existent dans certaines bandes de fréquences,
des effets biologiques nocifs pour l’organisme humain devraient
être pour le moins tout autant du domaine du plausible ou du possible.
42. Les études scientifiques relatives aux effets négatifs de
certaines fréquences de micro-ondes sur des plantes, des insectes
et sur des animaux sauvages ou d’élevage, effets inquiétants à plus
d’un degré, et les études scientifiques révélant des effets biologiques
à caractère potentiellement pathogène pour l’organisme humain sont
elles aussi importantes et ne peuvent pas être écartées d’un simple
revers de main.
43. Ces études sont extrêmement nombreuses: le rapport «Bioinitiative»
de 2007 en a analysé plus de 2 000 et une monographie importante
de l’Institut Ramazzini, l’Institut national pour l’étude et le
contrôle du cancer et des maladies environnementales de Bologne
en Italie, publiée en 2010, en a ajouté d’autres.
44. Un nombre appréciable de scientifiques et de chercheurs de
haut niveau se sont regroupés dans un comité international spécifique
dénommé ICEMS, International Commission for Electromagnetic Safety,
afin de mener des recherches indépendantes et de préconiser l’application
du principe de précaution en la matière. Des scientifiques ont publié
des résolutions instructives en 2006 (Benevento
Resolution) et en 2008 (Venice Resolution),
appelant à l’adoption de nouveaux standards et de normes de sécurité
beaucoup plus sévères.
45. Les études scientifiques relevant des effets athermiques ou
biologiques des champs ou ondes électromagnétiques sur les cellules,
sur le système nerveux, sur la génétique, etc., figurent essentiellement dans
trois catégories: effets biologiques influençant le métabolisme,
le sommeil, le profil de l’électrocardiogramme, effets observés
dans l’expérimentation animale ou dans des cultures de cellules (in vitro) ou effets issus d’études
épidémiologiques concernant l’utilisation prolongée du téléphone
portable ou le fait d’habiter à proximité de lignes à haute tension
ou de stations de base des antennes relais.
46. Le terme «effet biologique» est employé pour désigner un changement
d’ordre physiologique, biochimique ou comportemental induit dans
un tissu ou une cellule en réponse à une stimulation extérieure. Tout
effet biologique ne représente pas nécessairement une menace grave
pour la santé; il peut simplement manifester la réponse normale
de la cellule, du tissu ou de l’organisme à cette stimulation.
47. Un effet biologique médical ou pathologique est en revanche
un effet qui peut mettre en danger le fonctionnement normal de l’organisme
en provoquant des symptômes ou pathologies plus ou moins graves. Or,
justement, un nombre grandissant d’études scientifiques menées par
des équipes de chercheurs universitaires de haut niveau démontrent
l’existence d’effets biologiques potentiellement ou certainement pathologiques.
48. Le rapporteur constate qu’il n’est pas possible dans le cadre
de ce rapport d’analyser et de résumer les résultats de toutes ces
études. Une synthèse du plus grand nombre de ces études (environ
2 000) a été formulée dans le rapport dit «Bio-initiative», rapport
rédigé par 14 scientifiques de renommée internationale qui concluait,
concernant la téléphonie mobile et d’autres radiofréquences, à des
taux anormalement élevés de tumeurs du cerveau et de neurinomes
de l’acoustique, à des effets sur le système nerveux et le fonctionnement cérébral,
à des effets sur les gènes, sur les protéines de stress cellulaire
et sur le système immunitaire. Dans ce contexte, il a été observé
par exemple que l’exposition aux radiofréquences peut induire des
réactions inflammatoires et allergiques, et modifier la fonction
immunitaire à des niveaux largement inférieurs aux normes d’exposition
du public.
49. Concernant les aspects spécifiques de ces effets, comme la
génotoxicité des ondes, un grand programme de recherche (programme
REFLEX) financé par la Commission européenne et impliquant 12 équipes
de recherche européennes, avait été lancé. Les résultats furent
rendus publics en décembre 2004. Les conclusions du rapport étaient
inquiétantes à plus d’un titre puisque les résultats démontraient
des effets génotoxiques des ondes de la téléphonie mobile et notamment
un nombre plus important de cassures de chromosomes, de ruptures
de molécules ADN dans différents types de cellules humaines et animales
en culture. Par ailleurs, la synthèse de protéines de stress était
très augmentée et l’expression des gènes était modifiée dans divers
types de cellules.
50. Concernant l’étude Interphone, enquête épidémiologique la
plus importante réalisée sur les utilisateurs du portable et leurs
risques de gliomes, de méningiomes, de neurinomes de l’acoustique
et de tumeurs de la glande parotide après l’utilisation prolongée
de leur téléphone mobile, les premiers résultats partiels publiés
le 18 mai 2010 par le CIRC (Centre international de recherche sur
le cancer) plus de dix ans après le lancement de cette étude traduisent
un désaccord profond entre les différentes équipes de chercheurs
(16 équipes de 13 pays) quant à l’interprétation de ces résultats.
La coordinatrice de cette étude, Mme Elisabeth Cardis, a résumé de
la façon suivante une sorte de compromis: «L’étude ne met pas en
évidence un risque accru, mais on ne peut pas conclure qu’il n’y
ait pas de risque car il y a suffisamment de résultats qui suggèrent
un risque possible.» Effectivement, certains résultats montrent
que l’utilisation durable et intensive du portable accroît très
significativement les risques de gliome (40 % et même 96 % lorsqu’on
regarde l’usage ipsilatéral, c’est-à-dire lorsque le gliome est
apparu du côté de la tête où était utilisé le téléphone) et le risques
de méningiome (15 %, 45 % pour un usage ipsilatéral).
51. Le rapporteur est d’avis qu’une des faiblesses principales
de cette étude épidémiologique consiste dans le fait que la période
d’utilisation du portable analysée, jusqu’au début des années 2000,
est probablement trop courte, moins de dix ans, pour arriver à des
résultats totalement concluants vu le temps de latence et de développement
de tumeurs cérébrales. En effet, les rayonnements ionisants (radioactivité)
sont reconnus comme une cause de cancer du cerveau, mais les cas
induits par la radioactivité apparaissent rarement avant dix ou
vingt ans d’exposition.
52. L’étude Interphone réalisée uniquement sur des adultes soulève
pourtant des interrogations sérieuses: comme les plus gros utilisateurs
sont actuellement les jeunes, adolescents ou même les enfants chez
qui l’absorption des rayonnements est encore plus importante et
plus problématique, que se passera-t-il avec ces jeunes ou les enfants
après quinze ou vingt ans d’utilisation intensive?
53. Le rapporteur aimerait insister sur un autre aspect des risques
potentiels: si l’attention se focalise actuellement sur les rayonnements
du portable et que le rapporteur fait appel en faveur d’une utilisation
aussi prudente que possible de cet appareil, notamment par les enfants
et les adolescents, force est de constater qu’il y a depuis quelques
années bien d’autres sources de champs électromagnétiques et de
radiofréquences.
54. Nous sommes actuellement exposés à l’extérieur ou à l’intérieur
des bureaux et habitations à tout un cocktail de fréquences électromagnétiques
qui s’ajoutent aux pollutions chimiques de l’air que nous respirons ou
accumulées dans la chaîne alimentaire. A l’extérieur ou à l’intérieur
nous retrouvons les champs électromagnétiques ou les radiofréquences
des lignes de distribution électriques (à proximité) et des stations de
base des antennes relais GSM, UMTS, WiFi ou, par exemple, des stations
radio ou radar. Dans les bureaux ou les domiciles privés s’y ajoutent
très souvent les rayonnements de téléphones sans fil (DECT), de babyphones
et d’autres appareils de technologie sans fil.
55. Par ailleurs, les industriels recherchent une nouvelle expansion
des infrastructures de la téléphonie mobile destinée à accueillir
les dispositifs de la «quatrième génération» 4G qui fournira un
système mobile à large bande sécurisée et complet pour les modems
sans fil des ordinateurs portables, des téléphones mobiles dits
«intelligents» et autres appareils mobiles et de soutien à l’accès
internet haut débit mobile, aux services de jeux, etc.
56. En Israël, les ministères concernés (Environnement, Santé,
Communication) s’appuyant sur l’application du principe de précaution,
s’opposent à l’introduction de ces nouvelles infrastructures, arguant
que les effets des irradiations devraient être vérifiés avant d’autoriser
de nouveaux systèmes.
57. Une question qui émeut fortement les populations européennes
est celle de l’emplacement des stations de base et des antennes
relais. Parallèlement à certaines études locales ou régionales,
surtout suisses et allemandes, décrivant la survenue de problèmes
sanitaires auprès d’animaux d’élevage après l’installation d’antennes
relais de téléphonie mobile proche de certaines fermes: problèmes
inexplicables de fertilité, de malformations, de cataractes, etc.,
certaines études épidémiologiques locales ou régionales, effectuées
par des groupes de scientifiques et de médecins ont réussi à montrer
aussi certains symptômes de maladie chez des habitants vivant dans
des quartiers ou villages à proximité d’antennes relais installées
depuis quelques mois ou années. Ces études locales ont été effectuées
en France, en Allemagne, en Suisse, en Autriche, etc.
58. Selon ces études épidémiologiques et partiellement aussi cliniques,
les symptômes sont apparus ou ont augmenté quelque temps après la
mise en fonction d’antennes relais où le renforcement des rayonnements émis
par l’augmentation du nombre ou de l’intensité des antennes, et
ont occasionné des troubles du sommeil, des maux de tête, des problèmes
de tension artérielle, des vertiges, des problèmes cutanés et des
allergies. Comme le caractère scientifique de telles études locales
est régulièrement mis en question par les opérateurs et très souvent
aussi par les organes de sécurité et de régulation, une étude toute
récente publiée au début de l’année 2011 dans une publication médicale
allemande (Umwelt. Medizin. Gesellschaft, 1/2011)
est pourtant intéressante et révélatrice, même si le nombre de participants
à cette étude (60 personnes) reste assez petit. Les personnes concernées
de la localité de Rimbach en Bavière furent analysées avant la mise
en service d’une nouvelle station de base d’antennes relais en janvier
2004, ensuite après la mise en service en juillet 2004, en janvier
2005 et en juillet 2005. Dans cette étude comme dans des études
épidémiologiques analogues, les symptômes augmentés ou aggravés
après la mise en service étaient des troubles du sommeil, des maux
de tête, des allergies, des vertiges et des problèmes de concentration.
59. Des médecins et scientifiques ont pu mesurer et constater
des changements significatifs dans les concentrations urinaires
de certaines hormones de stress ou autres. Ont pu être constatées
une augmentation significative de l’adrénaline et de la noradrénaline
pendant plusieurs mois et une baisse significative de la dopamine
et de la phényléthylamine (PEA), changements signalant une situation
de stress chronique induisant selon les auteurs de l’étude les augmentations
de symptômes signalés plus haut. Les auteurs mettent en relation
des niveaux PEA abaissés avec des troubles de l’attention et de
l’hyperactivité des enfants, troubles ayant augmenté massivement
en Allemagne au courant des années 1990-2004.
60. Le rapporteur insiste dans ce contexte aussi sur le fait que
certaines personnes peuvent être plus sensibles aux rayonnements
ou ondes électromagnétiques que d’autres. Les recherches effectuées
par exemple par le professeur Dominique Belpomme, président de ARTAC
(Association de recherche thérapeutique anticancer) sur plus de
200 personnes se disant «électrosensibles» ont pu, résultats d’analyses cliniques
et biologiques à l’appui, prouver l’existence d’un tel syndrome
d’intolérance aux champs électromagnétiques dans l’ensemble du spectre
des fréquences. Selon ces résultats, ce n’est pas seulement la proximité
par rapport aux sources d’émissions électromagnétiques qui joue
un rôle, mais aussi la durée d’exposition et souvent une exposition
coexistante à des produits chimiques ou à des métaux (lourds) présents dans
l’organisme humain. Dans le même ordre d’idées, la Suède a accordé
aux personnes qui souffrent d’hypersensibilité électromagnétique
le statut de personnes à capacité réduite de manière à ce qu’elles bénéficient
d’une protection appropriée.
61. Dans le contexte des risques avérés ou potentiels des champs
électromagnétiques, il convient de prendre note également du fait
que, d’après un rapport de la société Lloyd, les compagnies d’assurance tendaient
à exclure la couverture des risques liés aux champs électromagnétiques
des polices de responsabilité civile au même titre par exemple que
les organismes génétiquement modifiés ou l’amiante, fait peu rassurant
par rapport à des risques potentiels émanant de ces champs électromagnétiques.
62. Enfin, le rapporteur se pose la question de savoir s’il ne
serait pas opportun et innovant d’essayer de développer de nouvelles
techniques de communication sans fil tout aussi performantes, mais
plus économes en matière de consommation d’énergie et surtout moins
problématiques d’un point de vue environnemental et sanitaire que
la communication sans fil actuelle à base de micro-ondes. De tels
systèmes, des technologies de communication optiques ou optoélectroniques
utilisant la lumière visible et l’infrarouge, seraient en développement
aux Etats-Unis et au Japon et pourraient remplacer en grande partie
les technologies actuelles. Si de tels changements de systèmes de
transmission et de communication s’avéraient réalistes, il s’agirait
dans ce cas d’innovations technologiques et économiques qu’il ne
faudrait pas manquer ou bloquer.
10. Conclusions
63. Toute la lumière n’a pas encore été faite sur les
effets potentiellement nocifs des champs électromagnétiques sur
l’environnement et la santé humaine, et un certain nombre d’incertitudes
scientifiques continuent d’exister en la matière. De plus, des inquiétudes
ou peurs de grandes parties de la population persistent concernant
les risques sanitaires des ondes et aussi des revendications exprimées
par des scientifiques de haut niveau, par des regroupements de médecins
et par les associations de citoyens concernés, nombreuses dans beaucoup
d’Etats membres du Conseil de l’Europe.
64. Le principe de précaution et le droit à un environnement sain,
particulièrement en faveur des enfants et des générations futures,
doivent être des facteurs clés de tout développement économique,
technologique et social de la société. Dans ce sens, l’Assemblée
parlementaire a déjà décidé à plusieurs reprises (voir la
Recommandation 1863 (2009) «Environnement
et santé: pour une meilleure prévention des risques sanitaires liés
à l’environnement» et la
Recommandation
1959 (2011) «Les politiques de prévention en matière
de santé dans les Etats membres du Conseil de l’Europe») que des
mesures préventives cohérentes et efficaces doivent être prises
en vue de protéger l’environnement et la santé humaine.
65. Grâce à l’analyse des études scientifiques disponibles à ce
jour, grâce aussi aux auditions d’experts organisées dans le cadre
de la commission de l’environnement, de l’agriculture et des questions
territoriales, on dispose d’assez d’indices de preuves d’effets
potentiellement nocifs des champs électromagnétiques sur la faune,
la flore et la santé humaine pour réagir et pour prévenir des risques
environnementaux et sanitaires potentiellement graves.
66. Cela était d’ailleurs déjà le cas en 1999 et en 2009 quand
le Parlement européen avait voté à une majorité écrasante des résolutions
soutenant le principe de précaution et des actions préventives efficientes vis-à-vis
des effets nocifs des champs électromagnétiques, notamment par l’abaissement
conséquent des seuils d’exposition des travailleurs et du grand
public selon le principe ALARA, par le rétablissement d’une véritable
indépendance de la recherche en la matière et par une politique
d’information et de transparence améliorée envers les populations
inquiètes (voir la Résolution du Parlement européen du 2 avril 2009
sur les préoccupations quant aux effets pour la santé des champs
électromagnétiques, 2008/2211 INI).
67. Finalement, l’Assemblée pourrait s’associer aux analyses et
avertissements lancés d’abord en septembre 2007, puis en septembre
2009 par l’Agence européenne de l’environnement (AEE), relatifs
aux risques sanitaires des champs électromagnétiques, de la téléphonie
mobile et des téléphones portables en particulier. Selon l’AEE,
les indices ou niveaux de preuves scientifiques d’effets biologiques
nocifs sont suffisants pour invoquer l’application du principe de
précaution et de mesures préventives efficaces et urgentes.