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Recommandation 1285 (1996)

Droits des minorités nationales

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l'Assemblée le 23 janvier 1996 (3e séance) (voir Doc. 7442, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, rapporteur: M. Bindig; et Doc. 7471, avis de la commission des migrations, des réfugiés et de la démographie, rapporteur: M. Cucó). Texte adopté par l'Assemblée le 23 janvier 1996 (3e séance).

1. Une fois encore, l'Assemblée souligne la grande importance qu'elle attache à la protection effective des droits des minorités nationales en Europe.
2. Elle a prouvé le grand intérêt qu'elle porte à cette question en tenant, depuis 1990, cinq débats et en adoptant un nombre égal de recommandations au Comité des Ministres, dont le présent texte.
3. Au cours de la même période, deux nouvelles conventions du Conseil de l'Europe relatives aux droits des minorités ont été ouvertes à la signature et à la ratification. Il s'agit de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (1992) et de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (1995). L'Assemblée adhère sans réserve à ces conventions.
4. Etant donné l'importance de la manière dont elles seront mises en œuvre, la commission des questions juridiques et des droits de l'homme de l'Assemblée étudie actuellement la possibilité de parvenir, dans la Charte des langues régionales ou minoritaires, à un noyau dur de droits qui devraient être acceptés par chaque Partie contractante pour les langues régionales ou minoritaires qu'elle désigne. Ce noyau dur ne ferait pas partie intégrante de la convention en tant que tel, mais pourrait être proposé sous forme d'une recommandation aux (futures) Parties contractantes.
5. Pour la mise en œuvre de la convention-cadre, le Comité des Ministres sera assisté d'un comité consultatif, dont il lui reste à déterminer la composition et les procédures. Il est essentiel que ce comité consultatif soit indépendant. Le succès de la convention pourrait dépendre pour beaucoup de la manière dont il s'acquittera de sa mission.
6. L'Assemblée pourrait formuler d'autres propositions à la lumière des conclusions d'une réunion spéciale que la sous-commission des droits de l'homme de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme pourrait tenir dans un proche avenir sur la composition et les procédures du comité consultatif.
7. La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires a été ratifiée par la Finlande, la Hongrie et la Norvège, et signée par l'Autriche, Chypre, le Danemark, l'Allemagne, le Liechtenstein, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Roumanie, l'Espagne et la Suisse.
8. La Convention-cadre pour la protection des minorités nationales a été ratifiée par la Hongrie, la Roumanie, la Slovaquie et l'Espagne, et signée par l'Albanie, l'Autriche, Chypre, la République tchèque, le Danemark, l'Estonie, la Finlande, l'Allemagne, l'Islande, l'Irlande, l'Italie, la Lettonie, le Liechtenstein, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, la Moldova, les Pays-Bas, la Norvège, la Pologne, le Portugal, Saint-Marin, la Slovénie, la Suède, la Suisse, l'Ukraine et le Royaume-Uni.
9. Pour l'entrée en vigueur de ces conventions, respectivement cinq et douze ratifications sont nécessaires.
10. Il est en outre essentiel de compléter ces deux conventions par un protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l'Homme énonçant des droits clairement définis pouvant être invoqués par des individus devant des organes judiciaires indépendants.
11. Le Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des Etats membres du Conseil de l'Europe (Vienne, octobre 1993) avait chargé le Comité des Ministres «d'engager les travaux de rédaction d'un protocole complétant la Convention européenne des Droits de l'Homme dans le domaine culturel par des dispositions garantissant des droits individuels, notamment pour les personnes appartenant à des minorités nationales».
12. L'Assemblée, dans sa Recommandation 1231 (1994), «regrette profondément» que le sommet n'ait pas suivi sa proposition, figurant dans la Recommandation 1201 (1993) relative à un protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l'Homme portant sur les droits des minorités nationales.
13. Cependant, si une approche «maximaliste» était adoptée pour le nouveau protocole, l'Assemblée pourrait s'estimer satisfaite, étant donné que nombre des droits des minorités sont soit déjà couverts par la Convention elle-même, soit susceptibles d'être considérés comme des droits «culturels».
14. L'Assemblée est profondément déçue par la récente décision du Comité des Ministres de suspendre ses travaux sur un projet de protocole et espère vivement que cette activité sera bientôt reprise.
15. En attendant l'issue des travaux du Comité des Ministres, l'Assemblée continuera d'utiliser comme texte de référence la proposition de protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l'Homme concernant les personnes appartenant à des minorités nationales qui figure dans sa Recommandation 1201 (1993). Elle suivra très attentivement les activités évoquées ci-dessus.
16. En conclusion, l'Assemblée recommande au Comité des Ministres:
16.1. d'inviter les vingt-quatre Etats membres qui n'ont pas encore signé la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et les trente-cinq Etats membres qui ne l'ont pas encore ratifiée à le faire dès que possible;
16.2. d'inviter ceux des Etats membres qui ne l'ont pas encore fait à signer et à ratifier la Charte européenne de l'autonomie locale dès que possible (on dénombre actuellement vingt-cinq signatures et vingt et une ratifications);
16.3. d'élaborer un protocole portant modification à la Charte européenne de l'autonomie locale autorisant le Comité des Ministres à inviter des Etats non membres à adhérer à la charte;
16.4. d'inviter les Etats membres à signer et à ratifier dès que possible la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (qui recueille actuellement trente et une signatures et quatre ratifications);
16.5. de faire en sorte que le comité consultatif à créer dès l'entrée en vigueur de la convention-cadre soit aussi indépendant, efficace et transparent que possible, par exemple:
a. en prévoyant un comité qui comprenne un membre au titre de chaque Etat contractant;
b. en garantissant que les membres du comité allieront à la sagesse politique une compétence juridique particulière dans le domaine des minorités;
c. en prévoyant des élections sur le modèle de celles organisées pour la constitution de la Commission européenne des Droits de l'Homme ou du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants;
d. en permettant au comité de tirer ses informations d'un large éventail de sources et d'agir de sa propre initiative;
e. en habilitant également le comité à instaurer un dialogue avec le gouvernement de la Partie contractante intéressée, ainsi qu'avec les groupes de minorités nationales, et à publier ses rapports et recommandations avec l'autorisation dudit gouvernement, ou dans des cas particuliers, sans celle-ci;
16.6. de consulter l'Assemblée avant qu'il ne prenne de décisions définitives sur le comité consultatif;
16.7. de reprendre sans délai ses travaux sur un projet de protocole à la Convention européenne des Droits de l'Homme «dans le domaine culturel par des dispositions garantissant des droits individuels, notamment pour les personnes appartenant à des minorités nationales», d'y apporter une conclusion rapide et satisfaisante, et de faire le nécessaire pour que ce protocole soit aussi complet que possible;
16.8. d'insister sur la nécessité de formuler les obligations qui incombent aux Etats aussi précisément que possible, afin de rendre les droits susceptibles d'être accordés aux individus par les Etats clairs et justiciables;
16.9. de soumettre ce projet de protocole, une fois achevé, à l'Assemblée pour avis;
16.10. d'examiner, en attendant la conclusion des études menées par la commission des questions juridiques et des droits de l'homme de l'Assemblée et par la Commission européenne pour la démocratie par le droit, la recommandation d'un noyau dur de droits susceptibles d'être acceptés par tous les Etats contractants à la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.